1.4 Acquisition automatique de relations sémantiques
1.4.4 Utilisation de la structure interne des termes
Les informations internes aux termes, reposant sur leur structure, peuvent être utilisées,
notamment pour repérer les relations d’antonymie et de spécialisation. Les informations internes
utilisables se trouvent à deux niveaux :
– Niveau du morphème : la comparaison entre termes simples, monolexicaux mais
polymor-phémiques, s’effectue sur la base de leur structure morphologique.
– Niveau du mot : la comparaison entre termes polylexicaux s’effectue sur la base des mots
qu’ils contiennent.
Nous allons d’abord présenter les méthodes basées sur la structure lexicale des termes
poly-lexicaux, qui sont celles que l’on rencontre le plus fréquemment dans la littérature. Puis, nous
présentons les utilisations possibles de la structure morphologique pour l’acquisition de relations
sémantiques.
Utilisation de la structure lexicale des termes polylexicaux
Certaines relations sémantiques, et notamment l’hyperonymie et la co-hyponymie sont
mar-quées par des relations structurelles entre les termes.
d’hypo-1.4. Acquisition automatique de relations sémantiques
se manifeste par une structure lexicale spécifique, notamment pour les noms : l’hyperonyme est
un nom, l’hyponyme est un composé, comme par exemple table gigogne ou table de cuisine
[Kleiber et Tamba, 1990]. Le nom hyperonyme est inclus dans le composé qui est son hyponyme.
La notion d’inclusion lexicale est définie de la manière suivante par [Grabar et Zweigenbaum,
2002a] : un termeT
1est lexicalement inclus dans un autre termeT
2ssi tous les mots informatifs
formant T
1se trouvent également dans T
2. Par exemple, le termeacide gras est inclus dans le
terme plus long acide gras libre : acide gras est l’hyperonyme de acide gras libre, c’est-à-dire
qu’unacide gras libre est un type d’acide gras.
On peut distinguer trois types de relations d’inclusion lexicale en anglais [Ibekwe-SanJuan,
1998] :
– Expansion gauche : T
2= M +T
1. M peut être selon le cas un adjectif [Bodenreider
et al., 2001, Ibekwe-SanJuan, 2005], comme par exempleventricular aneurysm – aneurysm
ou un nom [Ibekwe-SanJuan, 2005], comme danscompression fracture – fracture.
– Insertion : dans ce cas, un nouveau mot M est inséré au milieu de T
1pour former T
2comme dans adult brain glioblastoma – adult glioblastoma.
– Expansion droite:T
2=T
1+M, comme par exemplecholesterol – cholesterol granuloma.
Les relations hiérarchiques sont marquées de manière préférentielle par l’expansion gauche
et l’insertion, du moins en anglais [Ibekwe-SanJuan, 2005]. L’expansion droite correspond à des
relations sémantiques plus faibles, similaires aux liensVoir aussi présents dans les thésaurus.
Les résultats obtenus par les méthodes basées sur la structure lexicale montrent qu’elles
complètent utilement les méthodes contextuelles et offrent l’avantage d’identifier des liens
sé-mantiques spécifiques comme la spécialisation. Par exemple, [Bodenreideret al., 2001] montrent
que moins de la moitié des liens hiérarchiques suggérés par les relations d’expansion gauche
adjectivale sont effectivement présents dans le thésaurus qu’ils utilisent (UMLS : Unified
Medi-cal Language System). Les liens identifiés pourraient donc permettre de compléter les relations
hiérarchiques présentes dans la ressource, après validation.
Une autre relation structurelle, qui présente elle un intérêt pour l’identification de
co-hypo-nymes, est lasubstitution[Ibekwe-SanJuan, 1998]. Elle correspond au remplacement d’un mot
informatif de T
1par un autre mot dans T
2où T
1etT
2contiennent le même nombre de mots.
La substitution de modifieurs indique une relation de co-hyponymie entre termes, comme c’est
le cas par exemple pourliver granuloma – cardiac granuloma.
Les modifications morpho-syntaxiques de l’un des constituants d’un terme complexe peuvent
induire des relations sémantiques supplémentaires comme l’antonymie (organic chemical –
in-organic chemical) ou la succession dans le temps [Daille, 2003].
Utilisation de la structure morphologique des termes simples
Dans la mesure où de nombreux termes techniques ont une structure morphologique
com-plexe, il est envisageable d’appliquer des méthodes similaires aux termes simples. L’utilisation
de la structure morphologique des termes simples pour l’acquisition de relations sémantiques
est bien sûr dépendante des ressources morphologiques disponibles. La majorité des systèmes
combinent donc acquisition de données morphologiques, de manière supervisée ou non
super-visée, et utilisation des données ainsi extraites. Nous décrirons plus précisément les méthodes
d’acquisition de connaissances morphologiques dans le chapitre suivant.
Les relations sémantiques sont marquées dans la structure morphologique de diverses
ma-nières.
L’hyponymie se manifeste sous forme d’inclusion dans les mots à composition savante, comme
l’atteste l’exemple suivant : «Angiosarcome: type desarcome qui apparaît sur un vaisseau
san-Chapitre 1. Acquisition automatique de ressources lexicales
guin ». Ainsi, [Buitelaar et Sacaleanu, 2002] présentent une méthode d’extension des synsets de
GermaNet (version germanique de WordNet) reposant sur la décomposition des mots complexes
comme Sauerstofftherapie (oxygénothérapie) en tête (Therapie) et modifieur (Sauerstoff). Le
terme composé, formé par inclusion d’un terme plus court, est considéré comme un hyponyme
de la tête : Sauerstofftherapie est donc un hyponyme de Therapie.
La relation d’antonymie est marquée morphologiquement par des préfixes ou des suffixes
dérivationnels qui s’opposent sémantiquement. Ainsi, [Schwab et al., 2005] décrivent une
mé-thode d’extraction semi-supervisée de couples d’antonymes à partir de leurs préfixes. Les
suf-fixes pourraient également être utilisés mais sont beaucoup plus rares (on peut citer l’opposition
+phile/+phobe). Le tableau 1.5 décrit différents types d’oppositions et des exemples de leur
réalisation sous forme de préfixes découverts au cours de l’extraction. [Grabar et Hamon, 2006]
proposent également une méthode d’identification de l’antonymie à partir des préfixes de
néga-tion commedé+,ir+,anti+,non+ ou in+ et des préfixes privatifs commea+ oudys+.
Les liens sémantiques qui s’expriment par des liens morphologiques ne se limitent pas aux
seules relations d’inclusion et d’opposition. On trouve d’autres liens sémantiques [Light, 1996,
Namer, 2002, Daille, 2003, Claveau et L’Homme, 2005, Grabar et Hamon, 2006] comme par
exemple :
– la répétition : préfixesre+ ou ré+;
– le changement d’état : suffixes+iser ou +ifier;
– la localisation spatiale : préfixessur+,sous+,contre+,péri+;
– la localisation temporelle : préfixespré+,post+;
– les rôles sémantiques : agent (suffixe+eur), résultat (suffixe +ure) ;
– la méronymie : suffixes +age,+ade.
Ces régularités de correspondance entre structure morphologique et liens sémantiques
auto-risent une approche de l’analyse morphologique de type morphosémantique [Namer, 2003], qui
sera décrite plus en détail dans la Section 2.3.1, p. 43.
Type d’opposition Préfixes Exemples
Opposition de degré hypo+/hyper hypocalorique/hypercalorique
micro+/macro+ microcristaux/macrocristaux
sous+/sur+ sous-alimentation/suralimentation
infra+/supra+ infra-centimétrique/supra-centimétrique
Opposition de nombre mono+/poly+ monogénique/polygénique
uni+/omni+ unidirectionnel/omnidirectionnel
uni+/bi+ unilingue/bilingue
uni+/tri+ unicolore/tricolore
Opposition dans l’espace ex+/in+ exhalation/inhalation
exo+/endo+ exogène/endogène
extra+/intra+ extra-cellulaire/intra-cellulaire
Opposition dans le temps pré+/post+ pré-caldeira/post-caldeira
Tab. 1.5: Récapitulatif des relations d’opposition morphologiquement marquées (d’après
[Schwabet al., 2005]).
1.5. Conclusion
Dans le document
Apprentissage de connaissances morphologiques pour l'acquisition automatique de ressources lexicales
(Page 47-50)