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Utilisation de l’eau dans le secteur agricole

1 ÉTAT ACTUEL DES SOURCES D’EAU POTABLE

2.1 Réduction de l’utilisation de l’eau douce

2.1.4 Utilisation de l’eau dans le secteur agricole

En agriculture dans les îles des Caraïbes, l’eau est principalement utilisée pour l’irrigation des terres. L’amélioration des pratiques d’agriculture afin d’économiser l’eau devrait être un enjeu fondamental, car elles sont les plus grandes consommatrices d’eau douce (World water, 2012).

Pour la production agricole, un apport en eau est essentiel. De façon naturelle, les pluies se chargent de cette contrainte. Cependant, durant les périodes de sècheresse ou de pousses plus courtes, les producteurs subissent des pertes économiques dues à des rendements agricoles réduits (Birdlife International, 2010). La gravité de ces pertes économiques, ainsi que l’importance des récoltes servent de justification pour les producteurs afin de puiser de grandes quantités d’eau afin d’arroser leurs plantations et d’augmenter la production. Le recours des producteurs consiste à puiser de l’eau des sources disponibles dans les environs. Actuellement, ce sont les puits, les rivières et les étangs qui servent de sources. Plusieurs approches peuvent être utilisées afin de réduire la consommation d’eau des champs agricoles.

D’une part, les techniques d’irrigation utilisées ne sont pas toujours les plus performantes puisque les quantités d’eau utilisées surpassent les besoins réels. Une étude de Harlan et al. (2002) indique qu’en République dominicaine seulement 18 à 20 % de l’eau utilisée provoque un changement de rentabilité (Harlan et al., 2002). On peut donc en conclure qu’il y a une grande partie de l’eau qui est gaspillée. Parmi les facteurs responsables de ce gaspillage, on retrouve l’état de la canalisation, le haut taux d’évaporation et les méthodes d’arrosage (Harlan et al., 2002). De meilleures techniques d’irrigation devraient ainsi être implantées.

D’autre part, un second facteur qui provoque une demande en eau supérieure au besoin réel des cultures est que beaucoup de cultures se font sur des terrains avec une forte pente (Smukler et al., 2011). Puisque la pente réduit la rétention et l’infiltration d’eau, les terrains des cultivateurs

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s’assèchent beaucoup plus rapidement, ceux-ci doivent ainsi puiser de grandes quantités d’eau ailleurs et arroser leurs parcelles. Pour contrer cet effet, les labours de contour, les bandes tampons, les déviations et les terrasses sont des solutions permettant de retenir l’eau (PNUE, 1998). Une meilleure rétention d’eau signifie qu’une moins grande quantité d’eau extérieure est nécessaire. Puis, le fait de ralentir le flux des écoulements d’eau permet de diminuer l’érosion et la perte de terres arables (PNUE, 1998).

Puis, l’agriculture protégée est aussi proposée afin de mieux gérer l’utilisation de l’eau et ainsi éviter les gaspillages (Caribbean Agricultural Research and Development Institute, 2011). L’agriculture protégée est un type d’agriculture sous serre. L’effet semi-clos que procure une serre permet d’avoir un plus grand contrôle sur le climat adjacent à la culture. De cette façon, il est possible de diminuer l’évaporation et réduire la force des vents qui assèchent le sol. Le contrôle de ces deux facteurs permet de réduire les besoins et par le fait même l’extraction d’eau.

Une nouvelle approche vise l’efficacité de l’irrigation et a évité les gaspillages. Cette approche évalue les besoins en eau des cultures, c’est-à-dire la productivité physique de l’eau ou le ratio d’extrant provenant de l’agriculture sur la quantité d’eau consommée (World Water Forum, 2012). Ce principe encourage ainsi le développement de techniques plus efficientes d’utilisation de l’eau lors de l’irrigation de plantation, en plus d’associer à certaines cultures un point de référence d’eau nécessaire. Le point de référence représente la quantité d’eau qui devrait être disponible pour une culture afin de maximiser sa production.

Par la suite, les différents assortiments de légumes ont des besoins en eau qui varient. Il y a donc des chercheurs de Cuba qui travaillent afin de sélectionner des variétés de légumes adaptés aux conditions climatiques des Caraïbes (González, 2012). Ces variétés nécessiteraient un apport extérieur moins exigeant au niveau de l’eau, ce qui diminuerait les besoins d’irrigation.

Mis à part le choix de légumes particuliers, certaines îles pratiquent l’agroforesterie. Ce type d’agriculture joint la culture d’arbres à celle de plantes. Il y a deux approches possibles, soit faire pousser des arbres à l’intérieur des terres agricoles ou à l’inverse, pratiquer l’agriculture sous un couvert forestier (FAO, 2011). Cette pratique peut se faire de manière symbolique, comme en

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Haïti (Deetjens, 2011), mais malgré l’origine symbolique de cette culture, puisque les rendements dépendent des pluies, la diversité végétale retrouvée au sein d’une plantation agroforestière assure un apport alimentaire plus certain (McClintock, 2004). Les producteurs subissent moins de pertes lors de périodes sèches et ressentent moins le besoin de compenser le niveau de rendement en irriguant leur plantation. De plus, la polyculture est généralement moins exigeante pour l’environnement qu’une monoculture. Le couvert forestier représente aussi un avantage au niveau hydrique, puisqu’il agit comme barrière physique au ruissellement et retient l’eau (FAO, 2011). Donc une autre économie d’eau est réalisée.

Toutefois, il est parfois difficile de réduire les quantités d’eau puisées afin d’irriguer les plantations. Dans une telle circonstance, il est préférable d’opter pour des réserves d’eau autres que celles d’eau douce potable. Par exemple, à Antigua et Barbuda, il est connu que certains étangs étaient utilisés comme réserve d’eau pour arroser les plantations (Carter, 2010a). L’utilisation de ce type de réservoir permet de préserver les sources d’eau de surface, telles les rivières, ou celle des aquifères souterrains qui sont aussi prisées par d’autres utilisateurs. Ces étangs représentaient une bonne solution. Cependant suite à une contamination de ceux-ci, ils ne peuvent plus servir pour les producteurs (Carter, 2010a). À Antigua et Barbuda, ce phénomène oblige les producteurs à puiser dans les ressources partagées et la demande devient alors trop grande pour représenter une extraction durable (Carter, 2010a). Outre les étangs, on retrouve aussi l’eau de pluie et les eaux usées comme option de source d’eau pour l’irrigation. Ces choix sont préférables aux eaux de surface puisqu’ils sont généralement inutilisés, tant par l’humain que pour les écosystèmes. C’est entre autres ces choix qui ont été mis de l’avant lors du World Water Forum (2012), où deux objectifs ont été formulés. Le premier étant d’augmenter la productivité de l’agriculture s’approvisionnant d’eau de pluie et d’augmenter l’irrigation de 15 % comparativement à 2005-2007 dans les Amériques (World Water Forum, 2012). Le deuxième est d’augmenter l’utilisation d’eaux usées ou de mauvaise qualité en agriculture en comparaison à de l’eau potable de 25 % comparativement à 2005-2007 (World Water Forum, 2012). Ce deuxième objectif permettrait de réduire l’approvisionnement d’eau potable pour l’irrigation et du même coup, diminuer les rejets d’eau usée directement dans les cours d’eau, soit un effet secondaire très bénéfique.

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Finalement, comme la justification de l’utilisation d’autant d’eau est réalisée en partie pour contrer les pertes économiques, la variation des revenus et une meilleure rentabilité diminueraient la nécessité d’avoir une culture durant les périodes sèches. Moins de cultures durant cette période représentent un moyen de diminuer l’extraction d’eau. Les types de cultures, comme l’ethnobotanique, les herbes et les cosmétiques offrent des revenus alternatifs aux producteurs. Également, des activités qui relient le tourisme aux aliments permettraient d’établir une demande plus certaine pour les producteurs, par exemple la promotion d’activité centrée sur l’agrotourisme écologique (Birdlife International, 2010). Le système de commerce équitable représente aussi un avantage pour les producteurs. Ce marché prône le développement, un revenu digne pour les producteurs et un marché plus stable (Fairtrade Canada, s. d.). Les meilleurs revenus offrent aux producteurs la possibilité d’opter pour des cultures à plus petites échelles qui ont des besoins en eaux moins exigeantes.