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IV- Les antibiotiques

2- Usage des antibiotiques en production porcine

Depuis 1999, l’Agence Nationale du Médicament Vétérinaire (ANMV), au sein de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire Alimentation Environnement Travail (Anses), collecte les données des ventes de l’industrie pharmaceutique via une procédure qui lui permet de recueillir le nombre d’unité vendues annuellement. Ces données sont croisées avec les données de l’AMM (quantité de principes actifs par unité, voie d’administration, espèces cibles, posologie autorisée) pour estimer les quantités de principes actifs utilisées chaque année, les attribuer aux différentes espèces animales et estimer l’exposition exercée (Sanders et al. 2011). Par ailleurs, la France participe au projet « European Surveillance of Veterinary Antimicrobial Consumption » (ESVAC) qui a été lancé par l’ Agence européenne du Médicament (EMA ) à la demande de la commission Européenne, l’objectif étant de collecter des données de ventes d’antibiotiques harmonisées pour tous les pays de l’Union Européenne (Anses-ANMV 2014).

Pour déterminer le niveau d’exposition des animaux aux antibiotiques, l’Animal Level of Exposure to Antimicrobials (ALEA) est calculé en tenant compte des différences d’activité et de posologie entre les antibiotiques et en prenant en compte l’évolution de la population animale. Il part de l’hypothèse de base que la totalité des antibiotiques vendus sur l’année ont été administrés aux animaux élevés sur le territoire national durant cette année (Anses 2015). Toutes espèces animales confondues, l’exposition globale en 2013 a diminué de 7,3% par rapport à l’année 2012. Entre 2012 et 2013, l’exposition aux antibiotiques a diminué de 4% chez les porcs (Anses-ANMV 2014).

En 2014, l’exposition globale a augmenté de 13,1% par rapport à l’année 2013. Une augmentation des ventes a été observées (11,8% par rapport à 2013), elle semble liée à la parution de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (LAA) n°2014-1170 du 13 octobre 2014, qui instaure plusieurs mesures telles que la fin des remises, rabais et ristournes sur les antibiotiques à compter du 1er janvier 2015.

Cette perspective a, semble-t-il, conduit de façon paradoxale les acteurs de la distribution et/ou de la délivrance du médicament vétérinaire à faire des stocks de médicaments contenant des antibiotiques en fin d’année 2014. On considère habituellement que les ventes de médicaments de l’année sont représentatives de l’exposition des animaux pour la même année en partant du principe que l’ensemble des médicaments vendus ont été administrés aux animaux. Cette hypothèse ne semble pas valide pour 2014, du fait de ce stockage, qui serait estimé à environ 3 à 4 mois. L’évolution des chiffres d’affaires liés à la vente des médicaments vétérinaires conforte cette analyse puisqu’il est observé, au 1er semestre 2015 par rapport au 1er semestre 2014, une baisse de l’ordre de 40 % des ventes d’antibiotiques, baisse due en partie à la résorption du stockage effectué sur la fin d’année 2014. Il n’a donc pas été pertinent de réaliser une étude approfondie par espèce et par famille d’antibiotique (Anses-ANMV 2015). Compte-tenue de ces informations, ce mémoire va traiter des données obtenus jusqu’en 2013. Malgré la diminution en 2013, les porcs restent parmi les plus gros consommateurs d’antibiotiques (tableau 2). Toutefois, il faut signaler que le poids vif traité de porcs en 2013 a diminué de 32,7% par rapport à 1999, de 31,9% par rapport à 2009 et 5,7% par rapport à 2012. Les porcs sont principalement traités par voie orale (Figure IV). Cette diminution devrait se confirmer avec le plan EcoAntibio2017, qui a fixé un objectif de réduction de 25% en 5 ans de l’utilisation de l’ensemble des antibiotiques (Anses-ANMV 2014).

Tableau 2: Répartition des ventes 2013 entres les différentes espèces en tonnage de matière active et en quantité de matière active par

kilogramme animal (Anses-ANMV 2014)

Bovins Chats et

chiens Chevaux Poissons Lapins

Ovins et

caprins Porcs Volailles autres Total

Tonnage vendu 147,17 15,17 15,31 2,86 52,46 45,16 262,12 156,57 2,27 699,09

pourcentage (%) 21,10 2,20 2,20 0,40 7,50 6,50 37,50 22,40 0,30 100

ventes en mg/kg 15,81 96,68 51,44 63,57 517,57 78,93 91,30 85,60 65,25 45,95

Figure V: Évolution du poids vif traité de porcs selon la voie d’administration (en tonnes) (Anses-ANMV 2014)

Les données collectées par l’ANMV permettent également d’observer l’évolution des familles d’antibiotiques vendues. Ainsi, il est montré que l’exposition des porcs aux antibiotiques a diminué de 27,7 % entre 2009 et 2013. Les antibiotiques les plus utilisés sont les tétracyclines et les polypeptides (essentiellement constitués de la colistine) comme le montre la figure VI.

Figure VI: Évolution de la part des familles d’antibiotiques dans le poids vif traité des porcs

(Anses-ANMV 2014)

Au niveau Européen, le rapport ESVAC souligne que, exprimés en mg/PCU (une approximation de la taille de la population animale), les ventes d’antimicrobiens, ont diminué de 22% en France, en comparaison à 2010. Le rang de la France se situe maintenant au 18ème rang par rapport aux 26 autres pays (Figure VII) (EMA 2014).

Figure VII: Ventes totales d’agents antimicrobiens vétérinaires pour les espèces productrices de

denrées alimentaires (y compris les chevaux) en mg/PCU, au cours des années 2010 à 2012, pour les 26 pays de l‘UE (EMA 2014)

En France, selon le rapport de l’ANMV, après une une forte augmentation entre 1999 et 2007, l’exposition des porcs aux céphalosporines de troisième et quatrièmes générations (C3G et C4G) a stagné entre 2007 et 2010, puis a diminué de 65,5% entre 2010 et 2013. Fin 2010, à la suite des alertes exposant l’augmentation rapide de la résistance aux C3G et C4G, les professionnels de la filière porcine ont volontairement décidé de limiter l’usage de ces antibiotiques et comme le montre la figure 9, cette décision a été largement suivie.

Selon les enquêtes réalisées par l’Anses, l’usage des C3G et C4G ne semble pas avoir évolué chez les truies mais la diminution chez les porcs charcutiers est considérable. Ainsi 36,5% des porcs charcutiers étaient traités aux céphalosporines de dernières générations en 2010, contre seulement 6,4% d’entre eux en 2013 (figure VIII). Cette diminution de la consommation de ces molécules d’importance critique pourrait encore s’accentuer avec le plan EcoAntibio 2017. En effet, ce plan sugère « l’arrêt de l’utilisation des céphalosporines de troisième et quatrième génération de manière préventive à l’occasion des soins des porcelets et utilisation uniquement en seconde intention à titre curatif après identification et démonstration de la sensibilité de la souche au moyen d’un antibiogramme » (Anses-ANMV 2014), comme cela a été repris par la nouvelle règlementation (arrêté du 18 mars 2016).

Figure VIII: Évolution de l’exposition des porcs aux céphalosporines (Anses-ANMV 2014)

Actuellement, les céphalosporines autorisées en France chez le porc sont le ceftiofur (Naxcel, Excenel) et et le cefquinome (Cobactan). Tout deux sont utilisés pour le traitement d’infections respiratoires associées à Actinobacillus pleuropneumoniae, Pasteurella multocida, Haemophilus

parasuis et Streptococcus suis. Le cefquinome (Cobactan) est également utilisé dans le traitement du

syndrôme mammite-métrite-agalactie, des méningites à Streptococcuss suis, de l’épidermite à

Staphylococcus hyicus et des arthrites à Staphylococcus spp, Streptococcus spp, E. coli et autres

germes sensibles au cefquinome (Petit 2014). Toutefois comme indiqué plus haut, la nouvelle règlementation (arrêté du 18 mars 2016) devrait réduire leur utilisation.