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VII.1. Le modèle américain

Le concept d’unité douleur thoracique ou « chest pain unit (CPU) » des anglo-saxons, a vu le jour il y a une trentaine d’années, au début des années 1980 à Baltimore aux Etats-Unis. Le rôle de ces unités était de recevoir des patients ayant présenté une douleur thoracique non traumatique sans diagnostic, quelque soit leur degré de risque ischémique. Les patients victimes de SCA ST+ n’étaient pas éligibles à l’admission en CPU puisqu’ils devaient bénéficier d’une revascularisation urgente. L’objectif de ces unités était de trier les patients à haut risque de ceux à faible risque. Les premiers étaient orientés vers une filière de prise en charge en urgence en vue d’une reperfusion. Les seconds étaient évalués en vue d’éliminer un SCA au moyen d’une prise en charge systématisée au cours d’une hospitalisation courte. Ces hospitalisations devaient idéalement être de 6 à 12 heures sans dépasser si possible 24 heures. Après une période d’observation et l’obtention des résultats des investigations initiales, le but était de définir la prochaine étape de prise en charge du patient en fonction de la présence ou non de coronaropathie (173).

L’intérêt de la mise en place de ces unités était de s’assurer de l’absence de SCA, dans une structure dédiée, dans un lapse de temps court, selon un protocole standardisé de prise en charge pour éviter des hospitalisations inutiles en cardiologie.

Ce concept a été peu étudié en France et à ce jour une seule étude a été publiée sur l’expérience UDT (6). Lors d’une douleur thoracique, la démarche diagnostique est complexe et l’une des étiologies qui en fait une urgence est l’origine coronarienne. Ce concept de lieu unique d’évaluation de la douleur thoracique chez les patients à bas risque, lorsqu’il est suspecté une origine coronarienne, paraît constituer un véritable atout dans le domaine de l’urgence cardiologique.

VII.2. L’UDT au CHU de Nancy

VII.2.1. Objectifs

L’objectif de l’UDT est de proposer une prise en charge globale de la douleur thoracique chez des patients à faible risque ischémique sur un site unique. Pour répondre à cet objectif, l’unité accueille et prend en charge le patient jusqu’à son orientation finale. L’orientation

diagnostique est recherchée au moyen d’examens cliniques, biologiques et paracliniques et permet une stratification du risque ischémique et évolutif du patient. En fonction des résultats et des conclusions des différents examens aboutissants au diagnostic, un traitement médical initial peut être mis en œuvre. Enfin le patient est orienté vers le secteur d’hospitalisation adapté ou est autorisé à regagner son domicile. Afin d’organiser de façon efficace l’admission et la prise en charge des patients et d’assurer le bon fonctionnement de l’unité, une convention a été passée entre l’UDT et les services d’urgences du CHU (Annexes 3 et 4).

VII.2.2. Situation et équipement

L’UDT du département de cardiologie du CHU de Nancy située au sein de l’Institut Lorrain du Cœur et des Vaisseaux-Louis Matthieu a ouvert ses portes le 21 mars 2013. Une première expérience avait été tentée en 2009 sur 2 lits d’USIC mais n’avait pu être poursuivie faute de moyens humains suffisants.

L’UDT est situé à proximité de l’USIC et se compose de 4 lits d’hospitalisation chacun muni d’un moniteur indépendant relié à une unité centrale de surveillance scopique. L’unité dispose également d’un électrocardiographe et d’un chariot d’urgence équipé d’un défibrillateur automatique (DA). Les patients sont sous la surveillance constante d’une infirmière et d’une aide-soignante. Cette unité est sous la responsabilité du ou des médecin(s) d’USIC aidé(s) par les internes en poste en USIC.

VII.2.3. Modalités et critères d’admission

L’UDT prend en charge les patients présentant une douleur thoracique sans signe clinique et/ou ECG de gravité, adressés par le SAU et le SAMU chez qui aucun diagnostic n’a été posé et qui ne nécessitent pas de soins urgents. Dans le cas contraire, ils sont adressés vers le secteur de cardiologie adapté à leur situation clinique. Le transfert des patients adressés par le SAU ou SOS médecins est obligatoirement organisé par le SAMU-Centre 15. Les patients pris en charge par le SMUR ou SOS médecins et candidats à l’UDT y sont adressés après accord du médecin responsable de l’unité. Les patients pris en charge initialement par le SAU et admis en UDT ont préalablement bénéficiés d’une évaluation clinique et ECG permettant une première stratification du risque ainsi qu’un bilan biologique comprenant les marqueurs de nécrose myocardique dont les résultats peuvent ne pas être attendus avant le transfert en UDT. En cas de marqueurs de nécrose myocardique positifs avant le transfert, le patient est réorienté vers l’USIC. Il est préférable d’éviter d’admettre en UDT des patients dépendants ou

polypathologiques en mauvais état général en raison de la difficulté de prise en charge adaptée dans l’unité et du risque d’impossibilité de retour à domicile du fait de leur état général.

VII.2.4. Fonctionnement de l’unité

A l’admission, chaque patient bénéficie :

 d’un examen clinique ;

 d’un ECG 18 dérivations ;

 d’une échocardiographie trans-thoracique (ETT) ;

 d’un bilan biologique comprenant : numération formule sanguine (NFS), sodium, potassium, chlore, urée, créatinine, troponines HS, CPK, CRP, D-dimères, bilan hépatique dont lipase et amylase ;

 examens d’imagerie (radiographie thoracique, scanner…) en fonction des données cliniques ;

 d’une voie veineuse périphérique en fonction de la nécessité de celle-ci.

En cas de troponines positives lors du premier bilan biologique ou d’augmentation franche lors du second dosage (> 50%), le patient est transféré en USIC ou en secteur de cardiologie pour poursuivre la prise en charge.

Chez les patients suspects de SCA, si le premier dosage de troponines est non pathologique, un second dosage est réalisé 3 heures après le premier. En l’absence d’augmentation franche des marqueurs de nécrose myocardique (< 50%), le diagnostic de SCA est peu probable et il n’est pas nécessaire de poursuivre une surveillance en cardiologie. Afin d’éliminer définitivement une pathologie coronaire, une épreuve d’effort est programmée avant la sortie du patient si celle-ci s’effectue pendant les heures de fonctionnement du laboratoire d’épreuve d’effort. Dans le cas contraire, l’épreuve d’effort est programmée dans les jours suivant sa sortie d’UDT.

Chez les patients admis en UDT ayant bénéficié d’une stratification du risque durant la phase pré-UDT et jugés à faible risque, la prise en charge thérapeutique médicamenteuse immédiate

n’est pas systématique. Celle-ci est adaptée au contexte clinique et à la probabilité diagnostique de SCA.

Des accords ont été conclus avec le laboratoire d’épreuve d’effort afin de réserver des plages horaires (1 le matin et 1 l’après-midi) pour les patients sortis d’UDT. De même, des accords ont été conclus avec le département de radiologie pour réserver un accès prioritaire aux patients de l’UDT en radiologie conventionnelle, en TDM et en IRM, en échographie.

Les diagnostics différentiels dans le cadre de la douleur thoracique faisant appel à différentes spécialités médicales et chirurgicales, un contact rapide et privilégié est organisé avec les médecins responsables du département correspondant (pneumologie, hépato-gastro-entérologie, chirurgie digestive, anesthésie-réanimation).