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Dans cette section, nous passerons en revue les travaux empiriques effectués pour tester l’impact de la réglementation sur la probabilité de crise bancaire dont les résultats semblent mitigés et parfois opposés.

Ayant comme objectif d’améliorer l’efficience des banques et de protéger les déposants, la surveillance et la régulation bancaires sont évoquées comme des facteurs potentiels de

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Indice de monitoring privé

1997 2007

Chapitre 4. Analyse empirique de l’effet de la régulation bancaire sur les crises bancaires dans les pays émergents

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prévention des crises bancaire. La mise en place d’un cadre de supervision et de réglementation efficace est nécessaire pour le bon fonctionnement du marché bancaire. Elle essaie d’assurer la stabilité du système, permet de détecter à temps les problèmes bancaires et d’éviter ainsi les crises. Elle représente un défi important pour les pays émergents et les pays en voie de développement.

L’importance de prémunir un système financier de l’instabilité a fait l’objet de nombreuses études empiriques. Rossi (1999), Goldstein et Turner (1996) ont évoqué l’impact négatif d’un faible dispositif de réglementation prudentielle et une supervision rigoureuse sur la stabilité des systèmes bancaires. L’étude porte sur 15 pays en développement sur la période 1990- 97 et tente d’utiliser de nouvelles mesures de contrôle du capital, de régulation prudentielle, de supervision et d’assurance-dépôts. Leurs résultats indiquent que les crises bancaires sont plus probables en période de contrôle sur les sorties de capitaux, de faibles réglementations prudentielles et de forte assurance - dépôts.

Barth et al. (1999, 2001a, 2002) ont réalisé des études sur un échantillon de 107 pays en examinant l’impact des mécanismes de règlementation et de surveillance bancaire sur les performances et la stabilité des banques. Ils ont constaté que l’imposition de restrictions sur les activités bancaires affecte négativement les banques. En effet, une surveillance prudentielle plus importante ainsi que la restriction des activités ont un impact négatif sur le développement, les performances et la stabilité des banques. Les résultats montrent aussi que la supervision du système financier par une agence publique n’a pas d’effet positif sur le développement financier. Par ailleurs, les résultats suggèrent que les politiques visant à disséminer l’information, à favoriser l’appropriation de la supervision bancaire par le secteur privé sont amenées à promouvoir le développement du système bancaire, ses performances et sa stabilité.

En d’autres termes, les pays qui adoptent des restrictions très importantes connaissent des probabilités de crises bancaires plus importantes et leurs secteurs bancaires sont plus faibles. Conformément à cet argument, la mise en place d’une faible restriction peut favoriser une plus grande diversification des activités des banques et peut réduire les risques (Classens et Klingebiel 2000). Alors que d’autres études ont mis en garde contre des situations où ce rôle stabilisateur de la diversification est remis en question. Comme le montre l’étude menée par Shleifer et Vishny (1993), les restrictions réglementaires augmentent le pouvoir des autorités de supervision, qui sera positivement relié à la corruption et négativement relié à la performance des banques, et à la stabilité des marchés financiers. Ainsi, dans leur étude Barth

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et al. (2001b), ont également trouvé qu’une instance de supervision trop puissante peut avoir une influence négative en ce sens qu’elle peut favoriser la corruption, ce qui serait néfaste pour le développement du système bancaire et sa stabilité.

Peu d’études empiriques ont essayé d’analyser l’effet de la diversification des banques sur la stabilité financière dans le cadre de la concentration. L’étude de Schaeck et al. (2006) sur des données de 38 pays sur la période 1980-2003, a montré que le pouvoir de marché des banques a un effet négatif sur la stabilité financière. Dans le même sens Beck et al. (2006) ont abouti à des résultats négatifs sur le fait qu’un système concentré soit plus aisé à superviser. De même Boyd et al. (2006), ont trouvé que la diversification des activités bancaires est difficile à contrôler. Cetorelli et al. (2007), ont montré qu’une diversification vers des actifs ou bien vers des métiers très différents peut réduire l’efficacité du contrôle interne.

Ainsi, il apparaît que la discipline de marché qui joue un rôle important dans la stabilité bancaire des pays émergents, est faible et reste sous l’influence de la réglementation bancaire. En effet, les pratiques réglementaires et de supervision et les facteurs institutionnels influencent énormément et altèrent les mécanismes de discipline. Barth et al. (2004) ont étudié l’impact des mécanismes de régulation et de surveillance bancaire sur la performance et la stabilité des banques. Ils ont trouvé que la discipline de marché est un élément crucial dans les stratégies de régulation et de surveillance efficaces.

Dans une tentative de limiter les effets négatifs du retrait des dépôts après la faillite d’une banques, plusieurs pays émergents ont appliqué un mécanisme dit d’assurance-dépôts qui permet de réduire le risque de panique bancaire, puisque l’assureur garantie les dépôts. Les travaux de Demirgüç-Kunt et Detragiache (1998b) ont mis en place une base de données sur les assurances des dépôts et ont testé la relation entre assurance-dépôts et crises bancaires, à travers un modèle logit multivarié sur 53 pays développés et émergents entre 1980-1995. Ils ont trouvé que l’adoption d’un système d’assurance des dépôts explicite dans les pays où l’Etat a une mainmise importante sur le secteur bancaire, entraine que la probabilité de crise bancaire sera plus importante. L’existence d’une garantie implicite ou explicite du gouvernement, augmente la prise de risque de la part des banques et des emprunteurs. Au contraire Eichengreen et Arteta (2000) qui ont établi un modèle probit pour analyser les causes des crises bancaires dans les pays en développement, ont trouvé que les assurances de dépôts n’expliquent pas nécessairement des risques bancaires.

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De même, des travaux de La Porta et al. (2002) ont trouvé que les pays dans lesquels il y a eu mainmise importante de l’Etat sur le secteur bancaire connaissent un faible taux de développement financier et une croissance économique faible. Ces résultats ont été confirmés par Barth et al. (2001).

Récemment, un nombre croissant d’études économétriques s’intéressent au rôle des facteurs institutionnels sur la stabilité bancaire. L’approche dite institutionnelle des crises bancaires s’intéresse au rôle exercé par la qualité des lois, des règlementations et du cadre administratif propre à chaque pays.

Plusieurs études ont tenté de déceler le lien éventuel entre les indices institutionnels et les crises bancaires. L’impact de l’environnement légal et institutionnel sur la fragilité des banques est démontré par Mitton (2002) qui a trouvé qu’un faible niveau de démocratie et une mauvaise application des lois fragilisent le système bancaire. En outre, les restrictions réglementaires des activités bancaires sont plus fortes dans les pays où l’environnement institutionnel et juridique est plus inefficace.

Klapper et Love (2002) ont étudié la relation entre l’environnement réglementaire et institutionnel et les mécanismes de gouvernance. Ils ont trouvé que cette relation affecte négativement les performances des banques. Ainsi, Kaminsky et Reinhart (1999), Drees et Pazarbasioglu (1998), Gavin et Hausmann (1998) montrent que la libéralisation du secteur financier, lorsqu’elle est associée à une réglementation prudentielle faible, expose les banques à une grande concurrence interne et externe. Une telle situation réduit leurs marges et les pousse à prendre davantage de risques.

À la lumière des travaux empiriques, nous pouvons constater que les résultats sont mitigés quant à l’impact des facteurs réglementaires et institutionnels dans le contrôle des incitations à l’excès de risque. Notre étude empirique partage beaucoup de points communs avec les travaux cités plus haut, notamment le fait d’intégrer les facteurs institutionnels et macroéconomiques de réglementation, comme des variables explicatives de la crise bancaire. Elle se distingue des autres travaux par la méthode choisie (estimation sur des données de coupe instantanée).

L’objectif de notre étude est d’analyser l’influence des facteurs du développement financiers, de supervision, de réglementation, sur les crises bancaires que certains pays émergents et en développement ont connu. Notre hypothèse centrale est que les défaillances bancaires à l’origine des crises peuvent être expliquées, en grande partie, par les insuffisances

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des dispositifs de supervision, particulièrement patentes dans les pays émergents. Nous procédons à l’estimation de l’impact des facteurs du développement financier, de supervision, de réglementation, de nature macroéconomique et institutionnelle sur les crises bancaires. Nous voulons vérifier de cette façon si une catégorie particulière de variables (réglementation, macroéconomique, institutionnelle) a une influence plus prégnante que les autres.