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Parmi les points forts de Bâle II, nous pouvons citer la capacité des banques à calculer les exigences de fonds propres en fonction de leurs possibilités et avec un large éventail d'options flexibles. Ce nouvel accord fait partie d'une génération de risque réglementaire souple, sensible et très proche des préoccupations des utilisateurs.

Le « Bâle II » soulève des lacunes des défauts internes du dispositif retenu : la complexité, la procyclicité, l’insuffisance de la discipline de marché. De tels défauts ne contestent pas directement les résultats des simulations qui ont, en effet, de bonnes probabilités de réalisation.

La crise financière actuelle qui est due aux prêts subprimes, a relevé de graves lacunes dans le contrôle et la réglementation bancaire. D’où l’interrogation de certains spécialistes : les accords de Bâle vont-ils aggraver ou atténuer la crise financière ? L’un des objectifs principal de la mise en place du nouveau dispositif est d’éviter les risques contre les faillites individuelles de banques. Cette crise a fait ressortir des problèmes que Bâle 2 ne traite pas vraiment et qui apporteront un changement majeur au niveau de la réglementation.

Dans la suite de ce travail nous allons confronter Bâle II face à ses principaux objectifs et faire un lien avec les problèmes posés dans les pays émergents.

4.1. Avancées et critiques du dispositif de Bâle II 4.1.1. La complexité :

De nombreuses banques sont incapables de mettre en œuvre des techniques avancées de mesure du risque de crédit et de risque opérationnel dans le cadre du nouvel accord de Bâle. Ceci est considéré comme extrêmement complexe et coûteuse.

Evidemment, cette meilleure prise en compte des situations particulières à un coût en termes de simplicité. Au niveau international ce dispositif prudentiel s’avère encore plus couteux avec des charges supplémentaires s’élevant à plusieurs milliards des dollars. De ce fait, l’amélioration du niveau de sécurité du système financier économiquement requis n’est pas gratuite et il est possible que certaines banques se proposent d’affecter quelques-unes de

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leurs activités à des établissements non soumis à la réglementation bancaire, ce qui compromettrait l’atteinte de l’objectif principal du Comité de Bâle, à savoir la stabilité du système financier.

Pour les banques dépourvues d’activités internationales, le Bâle II est jugé inutile et elles continuent d’appliquer les méthodes standardisées, Quant aux banques de plus grande taille, leur capitalisation est déjà surveillée et les nouveaux instruments seront redondants puisqu'ils ont déjà été utilisés par les banques pour augmenter spontanément leur capital au-delà des exigences réglementaires.

4.1.2. La procyclicité :

Bâle II risquait d’être trop procyclique, c'est-à-dire d’amplifier les cycles économiques. La raison en est que les exigences en fonds propres s’accroissent au moment même où il devient plus difficile et plus coûteux de se procurer du capital, du fait de la détérioration de la conjoncture économique. Le nouveau ratio de solvabilité est basé sur une plus grande sensibilité des exigences en fonds propres aux risques inhérents aux opérations bancaires. En fait, le nouveau ratio devrait diminuer les exigences de capital, tout en permettant une analyse plus détaillée du risque de crédit. Ce principe peut conduire à des taux de variabilité excessive et à des fluctuations cycliques de l'activité économique.

Pendant que la réforme du ratio Cook était clairement motivée par la dénonciation de son caractère « procylique », les ratios prudentiels quand à eux sont caractérisés par le caractère « pro cyclique » renforcé par la sensibilité au risque du ratio de solvabilité.

Selon Mishkin et al. (2010), la procyclicité se définit comme « une variabilité accrue du

niveau des exigences en fonds propres puisque ces dernières surréagissent à la hausse, en cas de ralentissement de la croissance ». Pierre (2004), a montré dans son article40 que la plupart

des auteurs, comme Artus ou Lévy-Lang ont dénoncé la pro cyclicité. Selon ces auteurs, si les activités économiques ont subi un ralentissement, la situation financière des entreprises va se détériorer et par conséquent le risque de défaut va augmenter. Ce qui conduit dans la logique de Bâle II à accroître le besoin en fonds propres. De ce fait, le profit escompté par la banque dans le but d’octroyer un crédit ou souscrire une obligation ou une action, s’amenuise au moment précisément où la rentabilité de l'entreprise se dégrade.

40

Pierre-Yves Ch., (2004), « Au-delà des apparences techniques, une inquiétante réforme bancaire: Les enjeux de Bâle 2 », Analyses et Documents Economiques - N° 95 - Février.

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En effet, plusieurs études ont montré qu’une volatilité élevée du capital réglementaire sensible aux risques accentue les cycles conjoncturels. Les ratings fondés principalement sur le bilan et les comptes de résultats des emprunteurs se détériorent très vite alors que les exigences en fond propres s’accroissent automatiquement dans le cas où les défaillances sont en récession ou en accroissement.

Ainsi, les banques sont amenées à diminuer l’offre de crédit ce qui renforce l’effet de la récession économique. la dégradation de la conjoncture économique rend donc la procuration du capital de plus en plus difficile et coûteuse, alors que les exigences en fonds propres augmentent. Donc le caractère procyclique de Bâle II dépend de la qualité des émetteurs de créances. Dans le cas où, avec une conjoncture économique morose, la notation des emprunteurs se détériore, le montant des actifs pondérés par le risque augmente.

Ultérieurement, l’introduction des risques opérationnels dans le calcul des fonds propres forme l’élément le plus débattu des nouvelles dispositions. En effet, il n’est pas certain de parvenir à réduire ces risques en augmentant la charge de capital propres. D'une part, les risques opérationnels tels que les pannes informatiques et les systèmes de contrôle interne sont pratiquement impossibles à évaluer en termes de fréquence et de volume. Contrairement aux risques de crédit et de marché, c’est la probabilité et la perte potentielle qui sont calculées sur la base des chiffres tirés de l'expérience.

D’un autre côté, les différentes approches compte sur un rapport linéaire entre le revenu brut et la charge réglementaire de capital propre. De ce fait, l’accroissement des revenus de la banque emmène l’augmentation du risque de faillite induit par les risques opérationnels. Par conséquent, pour améliorer ses fonds propres, la banque devrait diminuer ses bénéfices.

En conséquence, on trouve que dans le phénomène de la procyclicité, ce n’est pas tant l’augmentation des exigences en capitaux propres en elle-même (effet quantitatif) qui semble inquiéter les pays émergents mais plutôt le fait que les banques (locales mais surtout internationales) vont recomposer leurs portefeuilles en fonction de la notation et du coût en capital des créances (effet qualitatif).

4.1.3. Discipline de marché : une efficacité étroite

Le troisième pilier du nouvel accord vise à renforcer la discipline de marché par une plus grande transparence en obligeant les banques à fournir un certain nombre d'informations afin que les intervenants du marché puissent exercer leur discipline.

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La discipline de marché a pour fonction de fournir une nouvelle information objective qui sert à être adopté par les autorités de contrôle dans le but d’améliorer leur supervision. D’ailleurs, cette discipline de marché peut conduire les investisseurs privés à influencer les comportements des banques. Cette influence se traduit exceptionnellement par un complément du contrôle prudentiel ou par une substitution des instances à des instances de régulation.

Les facteurs concernant la qualité et la transparence des marchés financiers communiqués influencent l’efficacité du troisième pilier. Donc obliger les banques à transmettre publiquement des informations qui seront utilisées par des investisseurs privés permet de mieux évaluer la performance des banques.

Le Comité de Bâle attache trop d'importance à la quantité des informations détaillées à fournir au lieu de se concentrer sur leur qualité. Nous pouvons craindre que la publication de données extrêmement techniques non seulement ne fournisse guère d'informations complémentaires aux tiers intéressés, mais ne génère que des frais supplémentaires pour les banques. Dans ce cadre, la crise des subprimes, qui montre une grave défaillance du système de régulation, pousse à réfléchir sur l’éventualité de la simplification des règles.

Aussi, on peut se demander dans quelle mesure les informations supplémentaires ne sont pas susceptibles d'augmenter le temps de réaction et donc la volatilité du marché ; ceci, compte tenu de l'interdépendance croissante entre les différents acteurs du système financier et le temps de réaction plus court (obtenu grâce aux nouvelles technologies).

Cette approche plus globale de la discipline de marché remet quelque peu en question l’efficacité supposée du troisième pilier.

Bien que l'égalité des chances entre les intermédiaires financiers soit un objectif déclaré du Comité de Bâle, les nouvelles directives soulèvent des questions à ce sujet. Il est notamment problématique que les autorités prudentielles des divers pays interprètent chacune différemment les dispositions de Bâle II avant de les intégrer dans leur réglementation bancaire.

Malgré les déficiences du nouvel accord de Bâle, la réglementation prudentielle est incontestable. Cependant, à l’échelle mondiale les nouveaux dispositifs assurant la stabilité financière sont généralement discutés entre les pays développés. Les pays émergents ont généralement une structure financière plus fragile et ne peuvent pas s’adapter facilement aux règles prudentielles applicables aux pays développés. Pour les pays émergents, où la notation

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n’est pas très développée, l’accord de Bâle II prévoit les mêmes pondérations du risque crédit que le ratio Cooke. Pour les autres pays qui ont des notations externes, mais ne pouvant pas développée des notations internes, l’approche standard leur est réservée. Dans ces conditions les banques de ces pays se trouvent désavantagées en contractant des fonds propres plus élevées. Des modifications dans le nouvel accord de Bâle ne sont pas prévues avant sa mise en application. Cependant, les accords de Bâle ont l’avantage d’être évolutif selon les besoins financiers, d’ailleurs on parle d’un futur accord de Bâle III.

Chapitre 4. Analyse empirique de l’effet de la régulation bancaire sur les crises bancaires dans les pays