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Un recours fréquent aux achats d’occasion

Une forte majorité des personnes interviewées achètent ou vendent des biens d’occasion. Il peut s’agir d’objets décoratifs, de livres, très fréquemment de jeux et jouets pour les enfants, et pour certains de vêtements. Plusieurs personnes achetant des vêtements

d’occasion pour les enfants ont tenu à préciser que les chaussures étaient toujours achetées neuves. Les lieux d’achat sont des vide-greniers (particulièrement pour les livres et les jeux), des solderies, plus rarement des bourses aux vêtements ou Emmaüs (qui semblent davantage utilisé dans le cas d’achats de vêtements par des personnes à revenus plus faibles). Le Bon Coin est utilisé pour certains pour acheter des biens d’équipement, pour d’autres des vêtements. Quelques familles ayant des enfants petits ont revendu vêtements et équipements spécifiques premier âge en passant par des groupes Facebook de parents vivant à proximité.

Internet est donc un outil important pour accéder à ce marché de l’occasion, soit par le

biais de sites dédiés au rapprochement entre acheteurs d’occasion et revendeurs, soit également pour se tenir informé de manifestations locales comme les vide-greniers.

Les quelques personnes qui tiennent des stands dans des vide-greniers, souvent en compagnie d’amis, vendent essentiellement des objets – jeux, vêtements - dont leurs enfants n’ont plus l’usage. L’argent est alors soit réinjecté dans des achats de biens de loisirs pour les

enfants, soit redonné aux enfants sous forme d’argent de poche, soit encore utilisé rapidement pour une sortie ludique.

La seule personne n’ayant pas mentionné l’usage d’Internet pour améliorer le pouvoir d’achat du ménage n’est pas mentionné est cette mère de famille monoparentale au budget le plus resserré14. La famille est pourtant équipée d’Internet. Il est possible que les enfants aient le monopole de l’usage d’Internet.

14 [M6 : Parent isolé 2 enfants (11-14 ans et 15-17 ans), Revenu=BDR -45%, Locataire Social, Appartement,

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Acheter d’occasion est dans certains cas présenté comme un comportement « malin », renvoyant à des valeurs positives de l’économie collaborative et de l’évitement du gaspillage par la seconde vie des objets. Dans d’autres cas, c’est vécu comme un pis-aller, une obligation liée à la faible marge budgétaire (qui reste toutefois présenté comme l’occasion de faire de bonnes affaires). Dans cet entretien, l’achat d’occasion est clairement présenté comme un pis-aller, à défaut de pouvoir assumer le coût d’un achat neuf :

Les jouets pour Noël, on a acheté d’occasion, on a cherché sur le Bon Coin des Playmobil, on a acheté une X Box et des jeux. Neuf c’est trop cher. Malheureusement. J’aimerais bien leur acheter neuf, mais bon… » [C3 : Couple 2 enfants (3-10 ans et 11-14 ans), Revenu=BDR -22%, Locataire Privé,

Appartement, Sans voiture, Aide famille non].

Cette autre femme qui a à la fois acheté et vendu des objets d’occasion, est ambivalente par rapport à ce comportement. C’est l’occasion de faire plaisir aux enfants en constituant une petite cagnotte quand ce sont leurs affaires qui sont vendues, et de leur faire encore plus plaisir en achetant davantage de jouets. Mais en même temps elle a du mal à acheter des vêtements d’occasion, peut-être par peur d’une mauvaise hygiène :

« Je suis soigneuse, je fais bien attention aux affaires, que ce soit les vêtements ou les jeux premier âge, j’ai tout revendu ou presque. J’ai revendu pas cher, ça fait une petite enveloppe, quand ils veulent quelque chose, à condition qu’ils aient été sages, on peut réinvestir pour les enfants. On peut leur faire plaisir. (…) [Sur les achats d’occasion] Le Bon Coin, Internet, les vide-greniers… Je pense que même si j’avais plus d’argent je le ferais, c’est une question d’état d’esprit. Sauf les vêtements, j’ai du mal à acheter d’occasion, sauf si c’est à des gens que je connais. J’achète d’occasion les choses pour les loisirs des enfants, les jeux, les livres… (…) Pour Noël je cherche des jeux d’occasion pour pouvoir faire plaisir aux enfants, leur en offrir plus. Merci le Bon Coin et merci les groupes Facebook où les gens revendent des jeux qui sont neufs ou qui n’ont pas été beaucoup utilisés. J’anticipe, je commence à regarder à partir d’octobre, je fais les vide-greniers, comme çà un jeu qui coûte 20 euros en supermarché je vais l’avoir pour 3 ou 4€. Comme ça ils vont en avoir quatre. C’est des petites astuces pour pouvoir leur faire plaisir. On a fait la majorité de leurs cadeaux d’occasion. [Elle précise quels

jouets Playmobil elle a achetés, à quel prix, en comparant avec les prix en neuf en grande surface.]

J’aurais jamais pu l’acheter autrement. » [C5 : Couple 2 enfants (tous 2 de 3-10 ans), Revenu=BDR -

17%, Locataire Privé, Maison, 2 voitures, Aide famille faible].

L’achat d’occasion se distingue des achats, également via Internet, d’objets neufs mais à prix sacrifiés dans le cadre de soldes ou de ventes privés. C’est cet usage d’Internet qui est

mentionné par cette famille monoparentale qui bénéficie largement de l’aide matérielle de sa famille15, qui va trouver un sac de marque neuf mais à prix réduit sur Internet pour un de ses enfants ou encore par la famille dont le niveau de vie se rapproche du BDR :

« On regarde beaucoup sur Internet s’il y a des offres. On va essayer dans les magasins la paire de baskets, et si c’est 100 € en magasin et qu’on le trouve à 60 € sur Internet, on n’hésite pas. On va pas acheter pour acheter, on achète si on a besoin. Et on regarde les prix. On regarde beaucoup les ventes privées, si on sent la bonne affaire, on va le prendre. » [C6 : Couple 2 enfants (11-14 ans et 15-17

ans), Revenu=BDR -3%, Locataire Employeur, Appartement, 2 voitures, Aide famille non].

A l’opposé de ces stratégies de bonnes affaires, on peut mentionner le cas de cette famille qui,

quand elle a besoin de liquidités, cherche des objets qu’elle pourrait revendre sur Internet ou dans des boutiques spécialisées dans des reventes d’objets d’occasion :

15 [M8 : Parent isolé 2 enfants (11-14 ans et 15-17 ans), Revenu=BDR -30%, Locataire Privé, Maison, Sans

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« Quand on a besoin d’argent, on fait le tour de la maison pour voir s’il y a des choses qui ne nous servent pas. On les met sur le Bon Coin ou encore dans des boutiques [type cash converter], des jeux vidéo, des jouets dont les enfants ne se servent plus, de l’électroménager dont on ne se sert pas. Ces boutiques rachètent à des taux très bas, on essaye plutôt de vendre sur le Bon Coin. On vend aussi des livres sur Price Minister, on se sert de l’argent pour en racheter d’autres. » [C2 : Couple 2 enfants

(11-14 ans et 15-17 ans), Revenu=BDR -20%, Locataire Social, Appartement, 1 voiture+1 scooter, Aide famille non].

Cette mère de famille monoparentale juge quasiment indispensables ces sites qui permettent d’acheter d’occasion des biens d’équipement. En cas de panne d’un appareil ménager, dans l’attente de trouver la bonne affaire, elle se passe de l’équipement :

« Quand il m’arrive quelque chose [panne d’un appareil ménager] je vais sur le Bon Coin, je vais regarder le prix… je sais que quand ma gazinière est tombée en panne, je suis allée faire des devis

[pour un appareil neuf] ça coûtait une fortune. Finalement j’ai trouvé une étudiante qui m’a vendu sa

gazinière 45€. C’est une vielle gazinière, elle a au moins 25 ans, mais ça marche. Le neuf c’est trop cher. Quand mon lave-linge m’a lâché, je pouvais pas me permettre d’en racheter un neuf, en attendant j’ai lavé le linge à la main. Je pouvais pas me permettre d’aller au Lavomatic, ça coûte trop cher. C’est pas génial de laver le linge à la main, en attendant que je trouve une opportunité à 100€. » Elle considère toutefois qu’acheter du neuf est une solution plus durable, mais elle ne pense pas pouvoir s’offrir du neuf avec son niveau de vie :

« Les appareils sur le Bon Coin, c’est pas du neuf, c’est du provisoire. Et il ne faut pas être délicat. Il faut être prêt à bien laver, à décaper un peu. (…) Je suis tributaire des bons plans. En attendant, si quelque chose tombe en panne, j’apprendrais plutôt à m’en passer. » [M7 : Parent isolé 2 enfants

(tous 2 de 11-14 ans), Revenu=BDR -30%, Locataire Social, Appartement, Voiture, Aide famille faible].

Pour cette autre famille, également monoparentale, Internet est l’opportunité d’accéder à des offres de dernière minute qui permettent les rares départs en vacances :

« On ne part pas beaucoup en vacances, une fois tous les deux ans en moyenne. La dernière fois on a pu partir aux Sables d’Olonne pour quatre jours et trois nuits à l’hôtel. C’était une offre sur Internet, à la dernière minute, il fallait partir le lendemain. » [M10 : Famille monoparentale 1 enfant (15-17 ans),

Revenu=BDR - 10%, Locataire Privé, Maison, Voiture, Aide famille possible mais non mobilisée].