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L’aide de l’entourage, quand elle existe, un amortisseur notable

Une partie des familles interrogées ont un niveau de vie relativement faible, qui peut être

notamment amélioré par l’aide familiale quand celle-ci existe. La solidarité familiale semble plus fréquente auprès des familles monoparentales qu’auprès des couples.

Un seul couple bénéficie d’une aide conséquente de sa famille. Une des grands-mères achète la très grande majorité des vêtements des enfants.

« Ma belle-mère contribue à 90% à l’achat des vêtements et chaussures pour les enfants, ça lui fait plaisir, c’est très pratique. Elle dépense 4 fois plus que notre budget à mon mari et moi, je ne pourrais pas les habiller aussi joliment. »

Une partie des activités de loisirs des enfants est financée par les grands-parents. Les enfants passent toutes les vacances quand ils ne sont pas avec leurs parents en compagnie des grands- parents, la famille n’a donc aucun budget de centre aéré. La famille passe une des deux semaines de ses vacances dans un logement prêté au bord de la mer. Après avoir fait dans le passé des

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crédits à la consommation, aujourd’hui l’argent est emprunté à la génération des parents.

Solliciter leur aide met toutefois à mal l’amour-propre :

[Avez-eu recours au crédit à la consommation ? Dans quelles circonstances ?] « Oui dans le passé

[prêt pour acheter une voiture], et on le regrette, le remboursement a été difficile. On ne veut

plus y faire appel. Les taux sont tellement énormes, c’est idiot de passer par eux. C’est de l’argent facile qui est très difficile à rembourser. Maintenant on emprunte à la famille. Y a une histoire d’orgueil à mettre dans sa poche mais quand on peut, c’est mieux d’emprunter à la famille. »

[C1 : Couple 2 enfants (tous 2 de 3-10 ans), Revenu=BDR -16%, Locataire Privé, Maison, 2 voitures, Aide famille forte].

Cette crainte des crédits à la consommation, faciles à obtenir mais très coûteux et donc difficiles à rembourser, est d’ailleurs générale dans ce public. Les rares crédits en cours sont essentiellement des prêts bancaires pour l’achat de voitures, ou encore des paiements en plusieurs fois (et sans intérêts) dans des grandes surfaces spécialisées pour l’équipement ménager.

Dans une autre famille biparentale, les enfants ne vont généralement pas au centre aéré. Ils sont pris en charge pendant les vacances par les grands-parents, ou par des amies de la mère (dans ce dernier cas dans le cadre d’échanges de service).

Dans les familles monoparentales, la mobilisation de la génération des parents est presque systématique. L’ampleur de l’aide dépendant à la fois des capacités matérielles des

parents et des besoins des mères. La fratrie est parfois également impliquée, soit dans des aides matérielles (particulièrement au moment de l’installation des femmes dans un logement juste après la séparation), soit pour aider à la garde des enfants pendant les congés scolaires ou pour faire du baby-sitting occasionnel.

Une des femmes est locataire d’une maison appartenant à un membre de la famille, qui lui demande un loyer inférieur aux prix du marché et paye directement la taxe d’habitation.

Pour cette autre mère d’une famille monoparentale, sa propre mère très âgée n’a pas la santé suffisante pour s’occuper seule de son petit-enfant. Mais malgré un budget limité, elle aide sa fille en lui payant parfois un plein, en partageant le coût de la location d’un mobil-home et les frais de carburant pour les vacances passées ensemble, en finançant la machine à laver dont elles se partagent l’usage, et en participant parfois aux achats alimentaires16.

Pour cette autre mère de famille monoparentale, l’aide de ses parents est précieuse. Elle prend la forme de cadeaux qu’elle qualifie d’« utiles, pas futiles ». Les enfants passent une partie de leurs vacances d’été chez les grands-parents quand la mère est au travail, et à cette occasion les grands-parents achètent de l’habillement. Ils ont prêté de l’argent sans intérêt à leur fille quand elle a dû renouveler sa voiture :

« Je n’ai pas voulu emprunter à la banque, j’ai préféré emprunter à mes parents parce que y a pas d’intérêt et si une dépense imprévue retarde le remboursement, ça ne crée pas de frais. Emprunter à la banque, ce serait un luxe que je ne peux pas me permettre. » [M7 : Parent isolé 2

enfants (tous 2 de 11-14 ans), Revenu=BDR -30%, Locataire Social, Appartement, Voiture, Aide famille faible].

16 [M2 : Parent isolé 1 enfant (3-10 ans), Revenu=BDR -14%, Locataire Social, Appartement, Voiture, Aide

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L’aide de la famille explique totalement le niveau de vie de cette femme seule avec deux enfants, qui dépense plus qu’elle ne gagne. Les parents se sont portés caution pour qu’elle accède à une location du secteur privé, l’ont aidé à s’équiper, l’ont invité en vacances - son frère l’ayant véhiculé avec ses enfants-, et la renflouent si elle se retrouve à découvert.

« Ma mère est "addict" aux vêtements, les trois-quarts c’est elle qui nous les offre. Il suffit que je lui montre quelque chose qui me plait, je l’ai dans l’instant. J’ai des parents qui m’aident beaucoup, sur le plan financier, sur tous les niveaux, j’ai des parents qui sont très présents. C’est parfait. [Elle rit] (…) Mes parents m’aident régulièrement. Ma mère a accès à mes comptes, dès qu’elle voit que je commence à être un peu mal, elle me vire de l’argent. Elle le fait aussi parce qu’elle voit que je ne fais pas de dépenses excessives. Heureusement je suis la seule de leurs enfants dans ce cas, les autres gagnent très très bien leur vie. Ça se passe bien pour eux. »

Toutefois cette forte implication de la famille a un coût symbolique :

« Quand je vois mon compte en banque qui est dans le rouge, et que si je me retrouve devant une dépense imprévue, c’est problématique. Même si je sais qu’au final ma mère va s’en apercevoir et va me virer de l’argent, il faut que je sois dans la démarche "on va en parler", elle va me dire "tu vois, machin", et il va falloir lui dire trois-cents mercis. Je préfèrerais pouvoir faire face à mes démarches seule. » [M8 : Parent isolé 2 enfants (11-14 ans et 15-17 ans), Revenu=BDR -30%,

Locataire Privé, Maison, Sans voiture, Aide famille très forte].

Inversement, si cette autre femme seule avec un enfant ne reçoit pas d’aide matérielle de sa famille, c’est parce qu’elle revendique d’être autonome. De plus, elle s’en sort sans problème avec ses revenus :

« Je préfère être autonome, j’ai pas envie de demander. J’ai des amis, ça les dérange pas de demander de l’aide à leur famille. Je préfère me débrouiller moi-même. J’aurais besoin, je serais à la rue, on m’aiderait, mais là j’en ai pas franchement l’utilité. » [M4 : Parent isolé 1 enfant (<3 ans),

Revenu=BDR -6%, Locataire Employeur, Appartement, Voiture, Aide famille non].

Cela ne l’empêche pas d’avoir des liens forts de sociabilité avec sa famille, qui passent par exemple par des repas partagés. Sa mère lui garde parfois son enfant pour qu’elle puisse sortir avec des amis.

Notons que la femme qui élève seule ses enfants avec le plus petit budget de l’échantillon ne bénéficie d’aucune solidarité familiale (elle a répondu négativement à toutes les questions concernant les échanges éventuels avec la famille d’origine), et elle n’a pas non plus mentionné d’amis.