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Un réseau associatif entre instrumentalisation, cooptation et résistance

3. L A MONTÉE DES RÉSISTANCES

3.2 Un réseau associatif entre instrumentalisation, cooptation et résistance

Cette partie soutient que très peu d’associations ont pu prendre leur autonomie vis-à- vis de l’État, demeurer critiques à l’égard du régime et former une société civile viable. D’une part, les associations sportives, culturelles et caritatives sont apolitiques. D’autre part, certaines associations de plaidoirie, plus politisées, à l’instar des associations de défense des droits des femmes, ont été cooptées ou instrumentalisées. Comme l’évoque l’opposant politique Hocine Ait Ahmed, ces associations ne sont que des « faux-semblants et des manœuvres de diversion » du régime qui « croit pouvoir encore se donner une apparence d’ouverture et d’écoute ». À ce titre, ces associations ne peuvent être considérées comme constituant une société civile, au sens où nous l’avons défini.

Dans ce même communiqué, Hocine Ait Ahmed salue toutefois le courage : « des organisations autonomes… Des femmes et des hommes connus pour les combats qu’ils ont menés ces dernières années en faveur des droits civiques et socioéconomiques ».351 Force est

donc d’admettre qu’une société civile est parvenue à émerger à la faveur de libéralisation politique. Néanmoins, celle-ci est limitée, sévèrement réprimée par les autorités et éprouve la plus grande des difficultés à mobiliser la population. Dans l’absence d’appuis populaires suffisants, elle ne peut se prévaloir d’un discours contre hégémonique fédérateur. La société civile en vient alors à limiter ses demandes à certains enjeux particuliers : droits de l’homme, des travailleurs, vérité et justice après la guerre civile. Comme le résume Jean Noel Férrié , « La libéralisation économique, comme l’ouverture de l’espace public favorise le développement de la société civile, mais d’une manière qui ne correspond guère aux analyses qui font de celle-ci le vecteur direct de la démocratisation, car elle est en fait trop sectorisé (quant à l’implantation et quant à l’objet) pour donner naissance à un mouvement social »352. Ce faisant, ces associations ont cessé de constituer une menace pour le régime.

351

Faouzia Ababsa, « le parti d’Aït Ahmed fustige les assises organisées par le CNES » La Tribune (25 juin 2011). En ligne : http://www.latribune-online.com/evenement/53990.html (page consultée le 28 ars 2012)

352

Jean-Noël Ferrié, « Les limites d’une démocratisation par la société civile en Afrique du Nord » CEDEJ (mai 2004). En ligne : http://halshs.archivesouvertes.fr/docs/00/19/57/16/PDF/Democratisation_et_societe_civile.pdf

La fonction politique des associations.

Le nombre d’association algérienne ayant un caractère « politique » est pour le moins limité. En effet, les comités de quartier, les associations sportives, religieuses ou culturelles sont les plus nombreux, mais sont peu ou pas politisées. C’est également le cas des associations caritatives et de bienfaisance. Celles-ci sont non seulement tolérées, mais soutenues par le régime, car elles complètent l’État dans la provision des services et l’instauration d’un filet social.

Graphique 7: Répartition des associations locales en fonction de l’activité353.

Les associations caritatives. En 2009, bien que le ministre de la solidarité national indique que : « l’apparition de ce genre d’association diminuerait le rôle de l’État dans la protection des citoyens », il souligne toutefois que : « ceci ne veut pas dire l’exclusion des particuliers dans ce genre d’initiatives. Ces gens sont les bienvenus, mais doivent savoir que le premier et le dernier mot reviennent à l’État »354. Cavarota et Durac notent ainsi que: ―the

Algerian regime is more «permissive towards charities and NGOs involved in socio-economic

353

République algérienne démocratique et populaire. « Typologie des associations locales agrégées ». Ministère de l’Interieur et des

collectivités locales. En ligne : http://www.interieur.gov.dz/Dynamics/frmItem.aspx?html=2&s=29 (page consultée le 24 mars 2012). 354

Habiba Mahmoudi, « Les riches d’Algérie : nous aidons les pauvres, mais…en secret! ». Ennahah (19 séptembre 2009). En ligne : http://www.ennaharonline.com/fr/news/2765.html (page consultée le 23 mars 2012).

0 5000 10000 15000 20000 25000

development because they help fill a vacuum that is still significant in terms of the government services ». 355

Ces associations, à l’instar de la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (FOREM), se disent clairement « apolitiques» sur leurs sites Internet. Leurs actions sont pour l’essentiel humanitaires et visent la mise en place de mécanismes de solidarité et de redistribution des richesses. À ce titre, le FOREM souligne sur son site que : « le rôle prioritaire aujourd’hui de la société civile est de militer pour une économie sociale du marché. Elle doit, dans ce cadre : lutter contre la pauvreté, lutter contre l’exclusion, induire un développement durable, encourager tous les facteurs qui convergent dans ce sens, en particulier l’information, l’éducation et la formation».356

Ce faisant, les autorités n’hésitent pas à débloquer des budgets pour soutenir ces actions, car elles participent à réduire les griefs à son égard. C’est au niveau des assemblées populaires nationales (APC)357 et des wilayas358 que ce fait le financement. Ainsi, la présidente de l’APC de Sidi M’hamed avoue qu’en 1999, « il y avait plus d’argent que d’associations et je ne savais même pas comment le dépenser».359 Toutefois, la capacité du

régime à soutenir le réseau caritatif est étroitement liée à la disponibilité de la manne pétrolière. Comme l’indique Larbaoui, journaliste au quotidian Liberté, “Associations, like the rest of Algeria, run on gas. If oil prices are high, then that year the associative movement will be rich”.360

Dans cette optique, le soutien des organisations internationales et des agences étrangères d’aide au développement, aux associations algériennes, apparait moins comme une menace qu’une opportunité pour le régime. En promouvant le réseau associatif, les autorités attirent de nouvelles sources de rente pour la population, en plus d’accréditer l’image d’un régime libéral. À titre d’exemple, en 2009, le ministère français des affaires étrangères a financé un programme visant à renforcer la coopération entre l’État, les collectivités locales et le réseau associatif algérien. L’objectif était d’accroitre la capacité d’action de certaines associations dans le domaine de l’enfance et de la jeunesse afin de favoriser, entre autres,

355

Francesco Cavarota et Vincent Durac, Civil Society and Democratization in the Arab World (London: Routledge, 2010), 53.

356 Mostéfa Khiati, «L’avenir du mouvement associatif en Algérie », FOREM. En ligne :

http://www.forem.dz/index.php/fr/activites/v/126-lavenir-du-mouvement-associatif-en-algerie (page consultée le 1er avril 2012).

357

Équivalent des mucipalités

358 Équivalent des préfectures. 359

Andrea Liverani, Civil Society in Algeria. The political functions of associational life, (London: Routledge, 2008),85

360

l’insertion professionnelle de ces derniers. Lorsque l’on sait que le chômage et la marginalisation des jeunes sont des facteurs déterminants dans la multiplication des émeutes, on peut comprendre que le régime ait encouragé et salué ce genre d’initiative.

En somme, on voit se développer des formes de coopération et de collaboration entre le régime, l’appareil étatique et le milieu associatif qui ne vont pas nécessairement dans le sens d’une remise en cause du système, ni dans celui de la constitution de contre-pouvoirs autonomes.

Les associations de plaidoyer. Les associations de plaidoyer et notamment de défense des droits des femmes ont pu également servir le régime et faire l’objet de manipulation. En effet, dans sa lutte, à l’islamisme, le régime a trouvé dans ces associations des alliés de choix. À titre d’exemple, après la victoire du front islamique du salut (FIS) aux élections législatives de 1992, la militante féministe Khalida Messaoudi s’était rangée aux côtés des généraux, pour réclamer l’annulation du processus électoral. Dans son ouvrage, une Algérienne debout, elle explique les raisons de ces choix et de son engagement auprès du clan des « éradicateurs »361. Indiquant qu’on ne saurait composer avec l’islamisme, elle s’y attarde sur la menace qu’il fait peser sur le statut de la femme algérienne. Elle conclut que la « seule réponse à opposer aux islamistes est la resistance »362.

Cavarota et Durac, remarquent que « Islamists enjoy much greater popular support in society. Thus, from the regime’s point of view, the impact of secular organizations is beneficial because they compete with Islamists and because ultimatly secular organizations can largely be counted on to support the regime if the Islamists begin to gain the political upper hand »363. Khalida Messaoudi a donc fini par être coopté par le régime, se voyant

même accorder un portefeuille ministériel. Jusqu'à recemment, elle continue de s’opposer à toute réhabilitation du FIS.364

Cette section s’est donc penchée sur la nature des associations et des liens qu’elles entretiennent avec le régime. Noua avons montré que les associations à caractère purement caritatif sont profitables au régime puisqu’elles l’appuient dans sa tâche sociale et œuvrent

361

Nom donné à un groupe de généraux et de civiles qui ont refusé tout compromis avec les hommes politiques islamistes et ont préféré défaire le FIS militairement. Voir: Djallil Lounnas, «La guerre civile algérienne et la communauté internationale, 1989-1999 »,

Journal d’étude de relations internationales au Moyen-Orient 3 n°1 (mars 2008). 362

Khalida Messaoudi, Une Algérienne debut (Paris : Éditions Flammarion, 1999).

363 Francesco Cavarota et Vincent Durac, Civil Society and Democratization in the Arab World (London: Routledge, 2010), 53. 364

Cherif Ouazani, « Algérie pourquoi le FIS n’a pas été réhabilité » Jeune Afrique (22 septembre 2011). En ligne : http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAJA2645p016.xml0/ (page consultée le 14 février 2011).

malgré elles à la stabilisation du système politique. D’autres associations, davantage politisées, ont quant à elles été instrumentalisées pour faire contre poids à l’islamisme.

De ce fait, la société civile algérienne est bien moins étendue que ne le laisseraient penser l’enthousiasme des chercheurs qui s’y sont attardés au début des années 1990. Comme le souligne Sarah Kettab, « les très rares associations véritablement indépendantes tolérées par le pouvoir, comme la LADDH, fonctionnent dans une extrême précarité, soumises aux pressions permanentes et aux tentatives d’infiltration et de division du DRS, au point que, en 2004, on ne les compte plus que sur les doigts d’une main ».365.Il n’en demeure pas moins que

ces associations existent, elles constituent la société civile algérienne et ont donné naissance à la CNCD.

La société civile entre résistance et répression.

Cette section se penche donc sur les associations qui sont parvenues à rester autonomes vis-à-vis de l’État tout en demeurant critiques à l’égard du régime. On évoque les difficultés qu’elles rencontrent au quotidien : la répression des autorités qui contraint l’action de ses membres et son incapacité à mobiliser une large base sociale. On montre que leurs revendications sont sectorielles et que la difficulté de mobiliser la population, l’empêche de se constituer en mouvement contre-hégémonique. Ne parvenant à se poser comme une alternative crédible, la société civile cesse de représenter une menace pour le régime.

La Ligue algérienne de défense des droits de l’homme. La LADDH est certainement la critique la plus connue du régime algérien. L’un de ses fondateurs, Ali Yahia Abdennour, rappelle que : « le projet d’une Ligue algérienne des droits de l’homme (LADH) s’est concrétisé par une réunion qui s’est tenue le 14 avril 1985 au restaurant El-Bassour, à Alger. Sachant que toute voix discordante est réduite au silence, des militants issus de sensibilités politiques et sociales différentes ont choisi avec courage (…) de militer pour les droits de l’homme en Algérie et tenter de les promouvoir par un travail pédagogique auprès de l’opinion publique (…) ».366 Ces militants vont toutefois faire les frais de leur choix politique puisque : « le Pouvoir a considéré qu’un défi lui avait été lancé par les fondateurs de la ligue ». La répression s’abat sur les militants de la ligue qui se voient « exposer au contrôle de

365 Sahra Kettab, « Les violations des libertés associatives »Comité justice pour l’Algérie Dossier n°9. En ligne : http://www.algerie-

tpp.org/tpp/pdf/dossier_9_associations.pdf (page consultée le 3 mars 2012)

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sa vie privée, du courrier, du téléphone, aux poursuites judiciaires, à la prison »367. Les membres fondateurs de la LADH sont arrêtés le 15 juin 1985 et condamnés à des peines allant de 9 mois à 3 ans de prison. La ligue est quant à elle interdite.

En juillet 1989, Ali Yahia Abedennour lance avec un groupe de militants une nouvelle organisation, la Ligue Algerienne de Defense des Droits de l’Homme (LADDH), soumise aux dispositions de la loi 90-31 sur les associations. Depuis, elle milite pour défendre les libertés individuelles et collectives, conformément à la Charte des droits de l’Homme de l’ONU. Elle assure en outre une assistance juridique à toute personne qui la requiert. Elle entend enfin mobiliser les Algériens pour la « défense de leurs droits » et alerter l’opinion publique internationale sur la situation des droits de l’Homme en Algérie.368 Pour mener à bien sa

mission, elle est soutenue et financée sur projet par la Federation Internationale des Droits de l’Homme (FIDH). Elle en outre s’inscrit dans plusieurs réseaux internationaux dont le Réseau Euromed des Droits de l’Homme (REMDH), la Coordination Maghrébine des Organisations de Droits de l’Homme (COMDH) et le groupe arabe pour le monitoring des médias (AWG- MM)369. La ligue intervient néanmoins dans des conditions difficiles et ses militants

continuent de faire l’objet d’intimidations.

SOS disparus. Cette association est l’une des plus en vues à Alger, tant il est vrai que tous les mercredis ses militants organisent des marchent et des rassemblements devant la Commission nationale pour la promotion et la protection des droits de l’Homme (CNCPPDH), pour réclamer la justice et la vérité sur le sort des disparus de la guerre civile370. Cette

association est née dans le contexte de la guerre civile. Nasera Dutour, sa fondatrice est alors établie en France, mais décide de passer les vacances estivales en Algérie. Durant l’été, son fils disparait. Elle sillonne le pays à sa recherche frappe à toutes les portes, mais sans succès. Les autorités lui indiquent que plusieurs jeunes sont kidnappés par les islamistes et forcés à rejoindre les maquis. Les rumeurs qu’elle entend sont tout à fait différentes. Des parents et amis de disparus soutiennent que les services de sécurités sont directement impliqués et certains individus disparaissent après avoir été vus pour la dernière fois au poste de police.

367

Ibid., 40.

368 Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme, « Action ». En ligne : http://www.la-laddh.org/ (page consultée le 12 mai

2011).

369

Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme, « Présentation ». En ligne : http://www.algerie- laddh.org/?action=presentation (page consultée le 12 mai 2011).

370

Plusieurs personnes ont été portés disparus pendant la guerre civile, certaine à la suite d’entretient avec les services de sécurité. Les familles de ces disparus continuent de réclamer la vérité sur le sort de leurs proches.

Nassera Dutour décide alors de lancer un collectif pour réclamer des comptes aux autorités. « Quand je l’ai perdu, je me suis dit que les choses ne pouvaient rester comme ça, que je devais faire quelque chose», nous avoue-t-elle.

Nacera retourne alors en France. Elle rencontre des mères de disparus et lance en mai 1998, à Paris, le Collectif des Familles de Disparus en Algérie (CFDA). Elle commence par alerter les médias, accordant plusieurs entrevues pour relater son histoire et évoquer le drame des disparus algériens. Elle nous raconte «qu’une émission était passée sur M6.371 C’est

comme ça que des Algeriens ont pris connaissance de ce qu’on faisait. Certains ont par la suite tenté d’entrer en contact avec nous et on a commencé à prendre de l’ampleur». Une tournée est alors entamée pour sensibiliser l’opinion européenne. En juin 1999, le CFDA est officiellement reconnu comme association en France. C’est là que le travail le plus délicat et sensible est réalisé. Le fait d’avoir une base arrière à Paris donne une marge de liberté confortable à l’association, en plus d’assurer sa crédibilité internationale.372 En 2001, un

bureau est ouvert à Alger sous le nom de SOS disparus, afin de : « structurer le mouvement des mères de disparu (e)s sur le territoire national et offrir à toutes les victimes une assistance dans leurs démarches administratives et judiciaires ainsi qu’une assistance psychologique »373.

Depuis quelques années, l’association entend également réclamer la Justice et la Vérité. En effet, la Charte pour la Paix et la Réconciliation nationale, pour laquelle le président Abdelaziz Bouteflika a fait compagne, dans le but de tourner la page de la guerre civile, souligne que le drame des personnes disparues est la conséquence du fléau du terrorisme. Ce faisant, en aucun cas les actes isolés de certains agents de l’État ne sauraient servir à discréditer l’ensemble des forces de l’ordre qui ont « défendu loyalement la Patrie.374 Cette charte prévoit toutefois des dédommagements financiers aux familles des victimes. Comme le souligne Goldstein : « The message to human right groups, families of the disappeared and victims of both state-sanctioned violence and islamist terror was quite clear:

371 Chaine française qui émet en Algérie. Voir: CFDA, « Qui sommes-nous ? » En ligne : http://www.algerie-

disparus.org/cfda1/index.php?option=com_content&view=category&layout=blog&id=20&Itemid=131(page consultée le 22 juin 2011).

372 Francesco Cavarota et Vincent Durac, Civil Society and Democratization in the Arab World (London: Routledge, 2010),46. 373

CFDA, « Qui sommes-nous ? » En ligne : http://www.algerie-

disparus.org/cfda1/index.php?option=com_content&view=category&layout=blog&id=20&Itemid=131(page consultée le 22 juin 2011).

374

Algeria Watch. « Projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale ». En ligne : http://www.algeria- watch.org/fr/article/pol/amnistie/projet_charte.htm(page consultée le 26 février 2012).

take the compensation and do not pose critical questions about the past‖ Nassera Dutour ne l’entend néanmoins pas ainsi. Elle indique que:

Le président Abdelaziz Bouteflika avait prononcé un discours pas longtemps après avoir été élu. Des mères de disparus étaient allées à sa rencontre pour lui réclamer des comptes. Il leur avait répondu : « vos enfants ne sont pas dans ma poche. Je ne peux pas vous les rendre». On avait été déçu par cette réponse et on a tout de suite compris que ce n’est pas lui qui ferait quelque chose pour nous. Mais on ne va pas baisser les bras. Qui y a-t-il de plus précieux pour une mère que son fils? S’il est vivant qu’on me le rende, il n’a rien fait. S’il est mort qu’on me donne ses os que je puisse enterrer dignement. S’ils ne les ont pas qu’on me dise la vérité que je puisse faire mon deuil. C’est tout ce qu’on demande la vérité375.

La sensibilité du sujet expose toutefois les militants à des intimidations et menaces diverses. SOS disparus n’a pas obtenu d’agrément de la part des autorités. Elle ne peut dès lors militer légalement et louer les locaux nécessaires à la poursuite de ses activités. Chaque année, SOS disparu doit se reloger du fait des pressions exercées par les autorités sur les propriétaires, pour ne pas renouveler le bail de location. Nassera nous avoue: « j’ai été menacée plusieurs fois, on a voulu nous faire plier. Mais moi je vais te dire, je n’ai pas peur. J’ai perdu ce que j’avais de plus cher, je n’ai plus rien à perdre »376. Une vieille dame,

présente lors de notre entretien ajoute : « la dernière fois je suis allé marcher avec des amies, d’autres mères de disparus. La police est arrivée, le policier nous a dit : « vous n’avez pas honte de faire du grabuge à votre âge». Je lui ai répondu : « Et vous, vous n’avez pas honte d’amener un camion de police entier pour deux vieilles grands-mères». Avant j’étais timide, mais maintenant je ne me laisse plus faire »377. Ainsi, tout comme la LADDH, SOS disparus

fait l’objet de répression rendant son activité plus ardue. C’est également le cas d’Algérie

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