• Aucun résultat trouvé

Ubi partes sunt concordes nihil abjudicem

III. Le domaine des relations entre le juge et l’arbitre

3. Ubi partes sunt concordes nihil abjudicem

12. Le postulat général selon lequel l’accord d’arbitrage est exclusif de la juridiction ordinaire49 reprend en un certain sens le principe ubi partes sunt concordes nihil abjudicem (« lorsque les par-ties s’accordent, le juge n’est pas nécessaire »). Une partie de la doc-trine défend un glissement de la juridiction en affirmant que l’arbi-trage s’assimile effectivement à une instance juridictionnelle, bien que les arbitres soient des personnes privées et non pas des fonc-tionnaires de l’Etat. C’est précisément cette dimension juridiction-nelle de l’arbitrage qui permet de le distinguer d’autres institutions voisines telles que l’expertise, la médiation, la conciliation ou le mandat. Selon cette théorie, les arbitres sont temporairement investis d’un pouvoir juridictionnel, depuis l’instant où ils acceptent leur mission jusqu’à la fin de l’arbitrage. L’arbitrage étant librement convenu par les parties, le compromis ou la clause compromissoire opère dans chaque cas concret un transfert ou un déplacement du pouvoir juridictionnel et de la compétence du juge vers l’arbitre.

L’arbitre détient un pouvoir décisionnel relativement au litige qui lui est soumis comme s’il était un juge, quoiqu’on ne puisse l’assimiler à celui-ci.

Il existe toutefois une différence de taille entre la convention d’ar-bitrage et la clause de prorogation de compétence : la dérogation ou la prorogation conventionnelle transfère une compétence d’un for à un autre, mais ne la crée pas, à la différence de ce qui se produit avec la convention d’arbitrage50. Sans vouloir créer des catégories

51. E. Artuch Iriberri, El convenio arbitral…, op. cit., p. 49.

52. Eventualité écartée, non sans réticence, dans les premières décisions CCI à ce sujet. Voir sentence no 3493/1983, du 16 février, SPP Middle East Ltd., Hong Kong Southern Pacific Properties Ltd. c. République arabe d’Egypte-EGOTH, YCA, vol. IX, 1984, pp. 111 ss.

53. Selon la sentence CCI rendue en 1988 dans l’affaire no5103,

« cette situation de compétence concurrente ne peut surgir entre une juridic-tion arbitrale et une juridicjuridic-tion étatique pour la raison que leur compétence respective ne dépend que d’un seul facteur : l’existence, la validité et l’éten-due de la convention d’arbitrage. De deux choses l’une, en effet. Ou celle-ci est valable et attribue compétence, pour connaître d’une demande détermi-née, aux arbitres : les tribunaux judiciaires doivent alors, si elle est invoquée devant eux, en le constatant, se déclarer incompétents… Ou bien, au con-traire, la convention d’arbitrage n’a pas été invoquée par le défendeur, ou est nulle, ou ne vise pas le différend porté devant le juge judiciaire et celui-ci se déclarera compétent par application des règles de son for, tandis que l’ar-bitre renoncera à connaître ce litige » (Journ. dr. int., t. 115, 1988, p. 1207).

Voir Y. Derains, « Les tendances de la jurisprudence arbitrale… », loc. cit., pp. 839-840.

totalement imperméables, force est de reconnaître qu’il existe entre les deux figures des différences substantielles.

13. On ne peut concevoir que s’élève entre juges et arbitres un conflit de juridiction ou de compétence : à la base de toute l’institu-tion arbitrale se situe la liberté de disposil’institu-tion des parties pour tous les litiges privés susceptibles de les opposer, liberté qui a pour conséquence l’activité des arbitres. Ce qui ne veut pas dire que les parties renoncent à la protection que leur offrent les tribunaux ; bien au contraire, toute la procédure arbitrale s’appuie fortement sur l’ac-tivité juridictionnelle de l’Etat, de façon occasionnelle (désignation des arbitres ou recours en annulation) ou systématique (reconnais-sance et exécution de la sentence)51.

L’idée qu’il ne peut y avoir de conflits de compétence entre juges et arbitres est constamment exprimée dans les décisions arbitrales, en particulier dans deux hypothèses. Tout d’abord, lorsqu’un Etat ou une entité étatique intervient dans l’arbitrage, on s’attache à souli-gner que les arbitres ne sont pas des juges et qu’ils ne se situent pas, dans le cas de l’arbitrage international, dans un ordre juridique concret : à défaut, l’exception d’immunité de juridiction serait sans aucun doute soulevée52. En second lieu, quand une exception de connexité ou de litispendance est soulevée devant les arbitres, ceux-ci écartent toute possibilité de conflit car leurs propres compétences ne dépendent que d’un seul facteur : l’existence, la validité et l’éten-due de la convention d’arbitrage, laquelle a précisément pour objet d’écarter la compétence des tribunaux étatiques53. En ce sens, il

existe un obstacle fondamental à l’apparition d’un cas de litispen-dance ou de connexité : juges et arbitres ne peuvent connaître dans les mêmes conditions d’une même affaire, comme s’il s’agissait de législations nationales. La compétence de l’un exclut naturellement celle des autres.

Néanmoins, les juges doivent connaître la conception que se font les législations concernées de la nature de la convention d’arbitrage lorsqu’ils examinent sa validité comme un présupposé de leur propre compétence. Il est donc important que les droits nationaux évitent d’établir des connexions inutiles qui risqueraient de porter atteinte à l’efficacité de la convention d’arbitrage. C’est pourquoi l’aspect juri-dictionnel de l’arbitrage revêt une importance considérable dans sa conceptualisation. De fait, la possibilité pour les arbitres de trancher un litige sur lequel les parties ne parviennent pas à s’entendre par le biais d’une décision contraignante est la différence essentielle entre l’arbitrage et d’autres institutions qui, telles la médiation ou la tran-saction, pourraient lui être assimilées. En ce sens, le juge acquiert en vertu de la convention d’arbitrage les pouvoirs d’un véritable juge, dès lors qu’il tranche un litige de manière définitive ; mais ce n’est pas le seul aspect de la convention intervenue entre les parties ni, bien sûr, celui qui explique le mieux son efficacité réelle. La dispo-nibilité des matières sur lesquelles elle porte et la volonté des parties de soumettre leur litige à la décision de personnes privées sont des idées fondamentales : c’est en elles que l’arbitrage trouve son ori-gine.

14. Tandis que la compétence du juge lui vient directement de la loi, l’arbitre ne bénéficie pas d’une délégation de compétence de l’autorité publique, au-delà de la reconnaissance générale par les législations nationales de l’existence de l’institution arbitrale. Au surplus, l’arbitre voit sa compétence limitée par la volonté des par-ties à une question donnée et par la loi à un certain type de litiges, il est privé de l’imperium et son rôle est essentiellement discontinu dans le temps. Lui fait défaut la permanence qui caractérise les membres du pouvoir judiciaire : l’arbitre est désigné pour un litige déterminé.

A cet égard, les institutions arbitrales font preuve d’une prudence particulière dans la désignation des arbitres afin de ne pas dériver vers une « professionnalisation » de ces derniers.

En outre, l’arbitre ne dispose pas d’un ordre juridique étatique pour administrer la justice : il n’est pas l’organe d’application d’un

54. B. Ancel, « Tronc commun, logique et expérience dans l’arbitrage interna-tional, Il foro padano, 1990, deuxième partie, p. 20.

55. E. Artuch Iriberri, El convenio arbitral…, op. cit., p. 52.

système de droit international privé54. C’est la prédominance de cette thèse qui justifie le contrôle exercé par les tribunaux de l’Etat où a lieu l’arbitrage et l’application de la loi de cet Etat à la convention d’arbitrage international. Si la convention d’arbitrage place les arbitres dans la structure juridictionnelle d’un Etat, la loi de celui-ci régira la plus grande partie de l’arbitrage et, bien sûr, la convention d’arbitrage, de sorte que les arbitres appliqueront la lex fori comme le font les juges de cet Etat.

Pour ces raisons, cette assimilation est excessivement dogmatique et partielle. Mais si, de plus, la convention d’arbitrage donne lieu à un arbitrage privé international, elle devient irréaliste : la conven-tion implique, comme il a été dit, l’incompétence des juges et tribu-naux non seulement de l’Etat considéré mais de tous les autres Etats, si bien qu’il n’y a pas lieu d’évaluer la fonction de l’arbitre selon la loi de cet Etat mais plutôt selon celle de tout autre Etat qui présenterait avec le litige des liens plus étroits. En définitive, la sentence intervenue entrera en contact, le cas échéant, avec l’ordre juridique et les juridictions de cet Etat à l’occasion d’un éventuel recours en annulation. Il se peut que l’intervention du juge ne soit sollicitée ni avant, ni pendant, ni après l’arbitrage, de manière que l’on peut difficilement admettre l’idée selon laquelle cette institution s’intègre nécessairement dans tel ou tel ordre juridique, et encore moins dans tel ou tel ordre juridictionnel55. Sur le plan international, de nombreux exemples montrent que les tribunaux arbitraux privés ne se considèrent pas comme des juridictions étatiques. Et cela implique, pratiquement, que l’appréciation de la validité et de l’effi-cacité des conventions d’arbitrage obéisse à des règles de droit inter-national privé — règles matérielles ou règles de conflit — issues du droit des obligations. Si l’on analyse la convention d’arbitrage comme une clause de derogatio fori, on applique les règles relatives à la dérogation ou à la prorogation de compétence, en omettant son évident aspect conflictuel, lequel a pour origine la nature obligation-nelle et non processuelle de la convention. On peut enfin faire valoir une différence fondamentale entre les différents types de clauses relatives à la compétence : tandis que les clauses de dérogation ou de prorogation de compétence transfèrent la compétence d’un tribunal à

56. Voir Metalclad Corp. c. Estados Unidos Mexicanos, cas no ARB (AF)/97/1, sentence du 30 août 2000, ILM, vol. 40, 2001, pp. 36 ss., et Supreme Court of British Columbia du 2 mai 2001, WTAM, vol. 13, 2001, pp. 47 ss.

un autre, la clause d’arbitrage « crée » cette compétence au profit d’un tribunal qui, à défaut, n’existerait pas.

15. Une autre question particulièrement importante en pratique concerne la compétence judiciaire associée au choix d’un arbitrage.

S’il est certain, comme l’affirme l’intitulé du présent paragraphe, que le juge n’est pas nécessaire là où les parties s’entendent, l’im-portance de sa compétence résiduelle est énorme. Le meilleur exemple en est sans doute fourni par les structures de règlement des différends mises en place par les traités bilatéraux de promotion et de protection réciproque des investissements, conclus par deux Etats en vue de créer un cadre juridique sûr pour les investissements privés réalisés à l’étranger. Dans ces traités, la création d’un envi-ronnement propice à l’investissement débouche inéluctablement sur l’élaboration d’une méthode de règlement des différends. Si nous verrons plus loin les questions que soulève cette technique comme point de départ d’un arbitrage, notons dès à présent que la solution qui a la faveur des traités est l’arbitrage CIRDI, en application de la Convention de Washington de 1965. Mais ce n’est pas la seule solu-tion, notamment lorsque l’Etat dans lequel est réalisé l’investisse-ment n’est pas partie à cette convention. Il existe alors d’autres pos-sibilités, comme le recours aux mécanismes supplémentaires de la Convention (Additional Facilities) qui en autorisent une application partielle et assortie de correctifs. Cette option, ouverte parmi d’autres, permet une intervention judiciaire du juge du lieu de l’arbi-trage qui ne serait pas possible dans le cadre de la procédure CIRDI habituelle. C’est exactement ce qui s’est produit dans l’affaire Metalclad, dans laquelle, à la requête de la défenderesse à une procé-dure d’arbitrage, le juge américain ordonna le remplacement de l’un des arbitres, décision récemment confirmée par la Cour suprême56. Cette affaire illustre bien la réalité suivante : l’enchevêtrement des règles, conventionnelles et légales, nationales et internationales, sur lesquelles se fonde un arbitrage, peut influer directement sur son déroulement et sur son efficacité ultime. Comme dans les autres modes de règlement des litiges internationaux, la prudence s’im-pose : on ne peut affirmer catégoriquement que le choix de l’arbi-trage comme mode de règlement des litiges nés des relations

com-57. B. Goldman, « Les conflits de lois en matière d’arbitrage international », Recueil des cours, tome 109 (1963), p. 367 ; E. Loquin, « Les pouvoirs des arbitres... », loc. cit., p. 298 ; J. A. Pérez Beviá, « Algunas consideraciones sobre el árbitro y el orden público en el arbitraje comercial internacional », RCEA, vol. VI, 1990, p. 83.

58. G. R. Delaume, « L’arbitrage transnational et les tribunaux nationaux », Journ. dr. int., t. 111, 1984, pp. 535-538. La sentence CCI de 1971 dans l’affaire no 1512 a affirmé que « l’arbitre international ne dispose pas de lex fori à laquelle il pourrait emprunter des règles de conflit de lois » (Journ. dr. int., t. 100, 1974, p. 907).

59. Voir l’étude classique de C. Fragistas, « Arbitrage étranger et arbitrage international », Rev. crit. dr. int. pr., 1960, pp. 1-20.

60. « Le siège de l’arbitrage tend de plus en plus à devenir une fiction, sans lien matériel nécessaire avec le territoire où s’accomplissent les opérations arbi-trales ». Cf. G. Kaufmann-Kohler, « Le lieu de l’arbitrage à l’aune de la mondia-lisation. Réflexions à propos de deux formes récentes d’arbitrage », Rev. arb., 1998, p. 534.

merciales internationales mette un terme à toutes les questions liées à la compétence judiciaire résiduelle des juridictions nationales. En ce sens, il est indispensable d’envisager leurs possibles interventions et leur caractère effectif dans chaque cas concret.

II. Le siège du tribunal arbitral 1. Inexistence d’un for arbitral

16. Il n’y a pas dans l’arbitrage international d’ordre juridique qui s’impose prima facie à l’arbitre ; celui-ci n’a pas de for, en ce sens qu’il n’est pas directement lié à un ordre juridique dont il doive scrupuleusement respecter les règles57. Privés d’une lex fori, les ar-bitres ont coutume d’agir avec une extraordinaire prudence en la ma-tière, bien qu’ils ne soient pas tenus d’agir de la même façon qu’un juge étatique58. Mais une chose est l’absence de for, autre chose fort différente est l’absence totale de référence étatique : l’inexis-tence d’un siège de l’arbitrage. Le présent cours n’abordera pas la polémique, à la fois doctrinale et professionnelle, qui existe au sujet des bienfaits de l’arbitrage supranational, c’est-à-dire sans réfé-rence étatique59. Il s’agit d’un débat inachevé, qui se développe en parallèle au « contrat sans loi » et qui dernièrement évolue dans un sens favorable au caractère anational. Mais, dans le cadre d’un exa-men comparatif étendu, on ne peut ignorer que le siège de l’arbitrage joue aujourd’hui encore un rôle important60. Il ne faut pas oublier que le juge du siège de l’arbitrage appliquera ses propres règles de procédure pour déterminer la portée envisageable d’une intervention

61. A. Panchaud, « Le siège de l’arbitrage international… », loc. cit., p. 7.

62. W. W. Park, « Judicial Controls in the Arbitral Process », Arb. Int., vol. 5, no3, 1989, pp. 255-259 ; P. Nygh, « Choice of Forum and Law in International Commercial Arbitration », Forum international, no24, 1997, pp. 12-13.

63. Cour d’appel de Paris (1rech. suppl.), 26 mars 1991 et 19 mai 1993, loc.

cit.

64. Que les règles, usages et principes du commerce international pénètrent dans les ordres nationaux, voilà qui n’est pas nouveau ; toutefois, cela exige cer-taines méthodes qui garantissent le respect du principe fondamental de légalité du droit national. Voir B. M. Cremades et S. L. Plehn, « The New Lex Mercato-ria and the Harmonization of the Laws of International Commercial Transac-tions », Boston Univ. Int. L. Jour., vol. 2, 1984, pp. 317 ss., spéc. pp. 321-323.

65. Voir le commentaire de P. Mayer de l’arrêt Dalico, loc. cit., p. 667 ; dans le même sens, E. Gaillard, loc. cit., p. 439, niant la création d’une règle maté-rielle internationale ou son application par les juridictions françaises.

dans l’arbitrage. De ce point de vue, il est certain que l’existence d’un siège arbitral constitue une garantie effective des droits et inté-rêts des parties, dans la mesure où elle autorise l’existence d’un juge d’appui et des moyens de parer au déni de justice61.

En définitive, le siège du tribunal arbitral continue de jouer un rôle important, au point que sa détermination dépend généralement de la conception que le droit et la jurisprudence nationale se font de l’arbitrage62. La jurisprudence française, avec les décisions rendues dans les affaires Dalico et Labinal63, en fournit une bonne illustra-tion. Ces arrêts sont même allés plus loin que les décisions arbitrales elles-mêmes dans la définition des paramètres de l’internationalité et l’affranchissement à l’égard de tout ordre national de référence. Bien que l’on ait souvent suggéré que les juridictions françaises appli-quaient dans ces arrêts des règles matérielles de droit supranatio-nal64, il ne fait pas de doute qu’elles se bornent à appliquer une règle matérielle interne, quoique d’origine prétorienne, qui définit la conception française des relations entre la juridiction et l’arbitrage commercial international65.

Mais le lieu où se déroule l’arbitrage ne se confond en aucun cas avec le for de l’arbitre. Les circonstances qui motivent ce choix et les conséquences de celui-ci sont essentiellement au nombre de deux : d’une part, le choix de la loi appelée à régir subsidiairement la procédure d’arbitrage dans le silence des parties ; d’autre part, la détermination de la nationalité de l’arbitrage. En conséquence, le choix d’un siège arbitral ne confère pas à l’arbitre une fonction juri-dictionnelle dans le pays choisi ; il détermine en revanche l’autorité judiciaire d’appui, celle à qui il sera nécessaire de faire appel si le bon déroulement de l’arbitrage l’exige.

66. Voir M. Storme et F. De Ly (dir. publ.), The Place of Arbitration. Third International Symposium on the Law of International Commercial Arbitration, Ghent, 30-31 May 1991, Gand, 1992, p. 5.

67. Y. Derains, « France As a Place for International Arbitration », The Art of Arbitration. Liber Amicorum Pierter Sanders, Deventer, 1982, pp. 112-114.

17. L’existence d’un régime de contrôle spécifique aux sentences rendues en matière d’arbitrage commercial international et l’éven-tuelle atténuation du contrôle judiciaire constituent sans aucun doute des éléments déterminants du développement de l’arbitrage dans un pays donné. A cet égard, les intéressés ont clairement tendance, lors-qu’ils élisent le siège de l’arbitrage, à rechercher un Etat dont le droit positif leur apporte sécurité et prévisibilité. Les motivations d’une telle attitude localisatrice peuvent avoir un caractère stricte-ment légal66. De fait, les réformes législatives en matière arbitrale tentent ainsi d’attirer les sièges arbitraux, dans le même temps que les Etats sur le territoire desquels se déroulent normalement des arbi-trages internationaux veillent à ce que leurs législations demeurent aussi attractives. C’est pourquoi, avec une longue tradition en ce sens, les réformes entreprises en France à partir de 1981 ont fait de ce pays un haut lieu de l’arbitrage international, les bonnes rela-tions qu’y entretiennent juges et arbitres constituant un facteur décisif67.

De nombreux pays ne sont pas habituellement le siège d’arbi-trages internationaux parce qu’une collaboration entre tribunaux et arbitres y fait défaut. Cette possibilité, licite en soi quel que soit l’ordre juridique considéré, ne doit pas cependant méconnaître la réalité. Les Etats ne sont pas tenus de s’aligner sur une tendance législative constatée en droit comparé, ni établir des canons d’inter-nationalité ou d’ad’inter-nationalité maximalistes. Néanmoins, cette option ouverte aux législateurs nationaux ne doit pas être confondue avec une attitude de défiance excessive à l’égard de l’arbitrage qui conduit à méconnaître certaines règles. Si les bases de l’institution sont jetées par la ratification d’instruments internationaux, il n’y a évidemment aucune raison pour que ceux-ci ne soient pas correcte-ment appliqués. Le cas de l’Espagne illustre bien cette réalité. En bonne logique, en vertu des sources qui régissent l’arbitrage com-mercial international, les relations entre celui-ci et la juridiction nationale ne devraient pas être conflictuelles ; toutefois, en jurispru-dence, on enregistre plus de reculs que de progrès, et l’on rencontre trop de solutions de type juridictionnel et d’applications extensives

Documents relatifs