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Une typologie empirique

Dans le document La notion de préjudice corporel (Page 56-114)

52 - DESCARTES différencie le corps vivant du corps mort, en comparant le corps au mécanisme d’une montre : « Quelle différence il y a entre un corps vivant et un

corps mort. Afin que nous évitions cette erreur, considérons que la mort n’arrive jamais par la faute de l’âme, mais seulement parce que quelqu’une des principales parties du corps se corrompt ; et jugeons que le corps d’un homme vivant diffère autant de celui d’un homme mort que fait une montre, ou autre automate (c’est-à-dire autre machine qui se meut de soi-même), lorsqu’elle est montée et qu’elle a en soi le principe corporel des mouvements pour lesquels elle est instituée, avec tout ce qui est requis pour son action, et la même montre ou autre machine, lorsqu’elle est rompue et que le principe de son mouvement cesse d’agir. »143.

53 - Le Professeur Isabelle MOINE définit une personne juridique comme : « la

traduction dans le droit du phénomène global de la personne humaine »144. Or, la

créance due au titre de la réparation d’un dommage corporel ne peut être détenue que par une personne physique ayant la qualité de personne juridique. Cette créance a pour rôle de compenser la douleur ressentie dans le corps de la victime et semble a priori concerner un corps vivant. Pour les mêmes raisons, le corps mort ne ressent pas la douleur et ne peut, par conséquent, acquérir de droit à réparation. De plus, n’étant plus une personne physique, il n’est plus une personne juridique et ne peut donc ni être titulaire de créance, ni agir en justice. La limite entre le corps mort et le corps vivant interpelle et laisse en suspens nombre de questions comme le remarque le professeur LABRUSSE-RIOU : « depuis qu’une certaine science et une certaine philosophie

effacent ses contours, qui prononce, sans hésitation, le mot homme ? […] L’embryon congelé ou le mourant végétatif brouillent un horizon autrefois bien tracé entre la vie et la mort »145. La question des différents types de comas ne permet pas de déterminer

avec certitude l’état de conscience de l’individu et il faudra déterminer jusqu’où le

143 DESCARTES, Les passions de l’âme, chez Henry Le Gras, 1649, p. 7.

144 Isabelle MOINE, Les choses hors commerce. Une approche de la personne humaine juridique,

Tome 271, LGDJ, 1997, p. 133.

145 Jean-Louis BAUDOUIN, Catherine LABRUSSE-RIOU, Produire l’homme : de quel droit ? - Étude

droit considère la personne en état de coma comme susceptible de ressentir la douleur et d’obtenir par conséquent la réparation intégrale de ses préjudices. Le concept même de réparation intégrale pose problème dans une situation où la victime ne ressent plus ou ne peut plus communiquer sa souffrance.

Le corps réparable est donc tout d’abord un corps vivant (section 1). La définition de celui-ci permettra d’aborder les difficiles notions juridiques du début de la vie et du fœtus. Mort, le corps ne peut entrer dans la définition du corps réparable, il conviendra de le délimiter (section 2).

Section 1- Le corps vivant

54 - Hannah ARENDT explique que, pour les Romains, le mot vivre était synonyme de inter homines esse, « vivre parmi les hommes » tandis que mourir signifiait inter

homines esse desinere, « cesser d’être parmi les hommes »146. Dans son ouvrage

intitulé Condition de l’homme moderne, la philosophe allemande expose l’insolubilité de la question de la nature humaine: « le problème de la nature humaine, problème

augustinien (quaestio mihi factus sum, « je suis devenu question pour moi-même ») paraît insoluble aussi bien au sens psychologique individuel qu’au sens philosophique général. »147. S’il paraît compliqué pour l’espèce humaine de se définir elle-même et

de se comprendre au sens philosophique, qu’en est-il de la science ? La vie habite l’homme et reste malgré tout un mystère scientifique pour celui-ci. Le corps vivant comme la personne humaine sont des notions difficiles à définir comme le rappelle Madame BERTRAND-MIRKOVIC : « Mais le droit ne peut redéfinir la personne

humaine selon ses propres vues, car ce serait la traiter comme un instrument, un moyen, alors qu’elle est sa finalité. » 148 Des réponses biologiques existent, mais une

différence persiste entre la vie dont l’être vivant a conscience et celle du corps vivant. C’est ainsi que peut être identifiée la dichotomie entre le corps et l’esprit.

55 - Le corps réparable est un corps vivant, il faut donc définir ce qu’est la vie. La vie de l’être humain débute-t-elle in utero ou après la naissance ? Quelles sont les frontières de la vie de l’être vivant ? La vie est tout d’abord une condition de la réparation (§1), mais il conviendra de prendre en compte le cas tout particulier du

fœtus (§2), cas pour lequel le droit redouble d’imagination.

§1- La vie comme condition à la réparation

56 - Il n’existe pas de consensus permettant de définir la vie, à l’instar de cette définition de Le Karuna PLATON : « La Vie [...] ne peut être expliquée mais

seulement vécue, et c'est dans la Vérité de ces mots très simples que vous trouverez la raison pour laquelle même les plus grands savants n'ont jamais pu la contenir ni dans

146 Hannah ARENDT, Condition de l’homme moderne, Calmann-Lévy, 1961, p. 16. 147 Hannah ARENDT, ibid, p. 19.

148 Aude BERTRAND-MIRKOVIC, La notion de personne-Étude visant à clarifier le statut juridique

leurs mains, ni dans leurs cerveaux mais elle se traduit justement pour eux dans leurs recherches pour le bienfait de l'Humanité. »149 À la lumière de cette citation, donner

une définition de la vie paraît particulièrement ambitieux. Mais le corps vivant en tant qu’objet de la réparation peut être défini en tant qu’objet du droit du dommage corporel (A). De la même manière, la victime blessée dans sa chair, personne juridique, est le sujet de la réparation (B). Ainsi, à partir de quel moment de son existence, un être humain peut-il devenir victime d’un dommage corporel et en ressentir les préjudices ?

A- Le corps vivant : objet de la réparation

57 - « Il n’y a qu’une vie, c’est donc qu’elle est parfaite »150 écrivait Paul Éluard

pour décrire la complexe mais non moins remarquable notion de vie.

La vie doit être protégée et à travers la notion de vie, c’est la personne qui doit l’être. La réparation du dommage corporel participe à la protection de la personne : « tâche

dont la responsabilité revient principalement au droit, exige comme condition sine qua non de sa réalisation effective que l’on sache de quoi on parle »151. Le corps est de

toute évidence l’un des objets de la protection de la personne et donc de la réparation. Il convient dans un premier temps de définir le corps humain à travers le spectre de la vie (1) pour ensuite entreprendre de dessiner les contours de ce corps humain vivant, objet de la réparation (2).

1 - Le corps habité par la vie :

58 - Le terme même de préjudice corporel intègre la notion de corps. Or, pour ressentir un préjudice, le corps doit être vivant donc habité par la vie. Le domaine de la réparation du préjudice corporel ne concerne a priori que le corps vivant d’autant plus que seule une personne juridique peut agir en justice pour demander réparation de ses blessures. La vie apparaît donc être une condition de la mise en œuvre de la

149 Le Karuna PLATON, Les sons de Dieu, Éditions du Point d’Eau, 1986, p. 15.

150 Paul ÉLUARD, « Les souvenirs et le présent », Une leçon de morale, Gallimard, 1949, p. 65. 151 Roberto ANDERNO, La distinction juridique entre les personnes et les choses à l’épreuve des

réparation du corps blessé (a), mais cette vie ne peut être à elle seule une source de préjudices (b).

a- La définition de la vie, condition de la réparation :

59 - Une personne physique est un être humain titulaire de la personnalité juridique au terme de laquelle celle-ci se voit reconnaître des droits subjectifs comme le droit d’ester en justice. Depuis l’abolition de l’esclavage152 tout homme a le statut de

personne physique. La personnalité juridique est définie par CORNU comme « l’aptitude à être titulaire de droits et assujetti à des obligations »153, elle permet la

reconnaissance des droits de la personne. Le droit a posé les limites de la personnalité juridique sur celles biologiquement retenues de la naissance et de la mort parfois qualifiés de seuils de personnalisation154. La difficulté réside certainement, dans la

définition de ce que le Professeur ROCHFELD décrit comme les « frontières de la

personne »155, le début et la fin de la vie. En ce qui concerne le corps mort, nous

verrons plus tard qu’il bénéficie d’un statut particulier qui n’est plus celui d’une personne, mais celui d’une chose sacrée.

60 - Dès lors la personnalité juridique est une condition nécessaire au statut de victime pour obtenir réparation. Le Professeur NEYRET a écrit dans sa thèse consacrée aux atteintes au vivant, que « la qualité de victime serait un don de

naissance »156. Elle est en principe acquise au moment de la naissance de l’être

humain. Pour des impératifs d’ordre public l’article 55 du Code civil impose aux parents de porter à la connaissance de l’État la naissance d’une nouvelle personne. La naissance est donc le point de départ de la personnalité juridique, c’est ce qu’on appelle le principe de simultanéité puisque le Droit fait coïncider personne physique et

152 L'esclavage est définitivement aboli le 27 avril 1848. Le décret d'abolition du 27 avril 1848

précise : « l'esclavage est un attentat contre la dignité humaine ; [...] en détruisant le libre arbitre de

l'homme, il supprime le principe naturel du droit et du devoir ; [...] il est une violation flagrante du dogme républicain : Liberté, Égalité, Fraternité.» et interdit absolument « tout châtiment corporel, toute vente de personnes non libres » .

153 Association Henri CAPITANT, Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, op. cit., p. 760.

154 Gérard MÉMETEAU, « Vie biologique et personnalité juridique- Qui se souvient des hommes. »,

La personne humaine, sujet de droit, 4ème journée R. Savatier, Puf 1994, p. 21.

155 Judith ROCHFELD, Les grandes notions du droit privé, Thémisdroit, Puf, 2013, p.23. Le

Professeur ROCHFELD utilise cette expression des « frontières de la personne » pour qualifier les frontières temporelles de l’existence de la personnalité juridique.

156 Laurent NEYRET, Atteintes au vivant et responsabilité civile, Thèse, Tome 468, LGDJ, 2006, p.

personnalité juridique. Celui qui naît s’installe dans la vie qui confère à l’être humain le statut de personne physique. La vie devient donc une limite temporelle, elle est définie par des seuils biologiques : c’est l’« ensemble des phénomènes et des fonctions

essentielles se manifestant de la naissance à la mort et caractérisant les êtres vivants »157 et elle peut être également synonyme d’ « existence »158. La définition de

la vie est donc fonction des matières159 qui s’y réfèrent. À côté de cette vie

matérialisée par la naissance il existe une autre vie qui concerne l’être humain, il s’agit de la vie fœtale qui correspond à « la période qui s’écoule de la neuvième semaine

après la conception à la naissance »160. Il existe donc une vie fœtale distincte de la vie

qui débute dès la naissance. Nous réservons à un second chapitre le cas tout particulier de la vie avant la vie, celle du fœtus.

61 - Le théologien, Xavier THÉVENOT assimile la reconnaissance de la personnalité juridique d’une personne physique à une double naissance car : « c’est la

faire naître davantage »161. Pour le Doyen CORNU, « la personnalité est un don de

naissance, un droit inné, un bienfait originel »162. Pour la personne physique dont il est

évidemment question, le droit reconnaît la personnalité juridique dès lors que l’être humain est né, viable et vivant. Cette triple exigence découle de l’article 79-1 du Code civil163 qui établit la déclaration d’un enfant décédé avant sa déclaration à l’état civil.

C’est au sujet de ce début de la vie et de cette définition que le débat est sensible car il mêle droit et éthique164 ; une partie de la doctrine souhaite l’abandon du tryptique

naissance-viabilité-vie conditionnant la personnalité juridique165. Or, éthique et droit,

157 Définition du CNRTL, [http://www.cnrtl.fr/definition/vie], (2018-07-02). 158 Ibid.

159 Steven LAUREYS, « Death, Unconsciousness and the brain », Nature Reviews Neuroscience, vol

VI, n° 11, nov. 2005.

160 Ibid.

161 Xavier THÉVENOT, La bioéthique, Centurion, 1989, p.55.

162 Gérard CORNU, Droit civil, Introduction, Les personnes, Les biens, Montchrestien, 12ème éd., 2005,

n° 459, p. 204.

163 Alinéa 1er de l’art 79-1 du Code civil : « Lorsqu'un enfant est décédé avant que sa naissance ait été

déclarée à l'état civil, l'officier de l'état civil établit un acte de naissance et un acte de décès sur production d'un certificat médical indiquant que l'enfant est né vivant et viable et précisant les jours et heures de sa naissance et de son décès. ». Les articles 311-4, 725 et 906 du Code civil exposent à

leurs tours les conditions de viabilité et de vie.

164 Sciences de la vie. De l’éthique au droit, Conseil d’État, La documentation française, 1988.

165 Philippe SALVAGE, « La viabilité de l'enfant nouveau né », RTD civ. 1976, p. 725 ; Christian

ATIAS, « La situation juridique de l'enfant conçu », in La vie prénatale, biologie, morale et droit, Téqui 1986, p. 119 ; Gérard MÉMETEAU, « La situation juridique de l'enfant conçu. De la rigueur classique à l'exaltation baroque », RTD civ. 1990, p. 611 ; Daniel VIGNEAU, L'enfant à naître, Thèse

indispensables curseurs de la condition humaine doivent se conjuguer : pour CORNU, « au droit d’établir les barrières, à l’éthique de garder les ouvertures […] d’un côté le

bilan légal des interdits, de l’autre le suivi éthique des incertitudes »166.

62 - Le fœtus, pour devenir une personne physique et donc juridique, doit naître. Cela signifie qu’il doit venir au monde, quitter l’organisme maternel. L’enfant qui était

fœtus in vivo prend alors son autonomie biologique et assure en partie sa survie.

Lorsque l’enfant est venu au monde et qu’il remplit les autres critères, à savoir être viable et vivant, la réparation d’un préjudice ne pose pas de difficultés puisqu’il peut éprouver le dommage. Des difficultés résiduelles se posent cependant : par exemple, il est difficile d’établir un préjudice esthétique chez un nouveau-né qui n’éprouve pas encore de pudeur. En pratique, les procédures sont longues et les indemnisations n’interviennent qu’à partir de la consolidation. La victime n’étant plus un nourrisson peut dès lors exprimer ses préjudices. Il existe à ce propos un important contentieux des enfants handicapés des suites de l’accouchement167.

63 - La seconde étape de l’accès au statut de personne juridique est la viabilité du

fœtus, ce qui signifie qu’il doit avoir tous les organes indispensables à sa survie. Dès

lors, dans quelle situation se trouvent les fœtus qui ont besoin d’une intervention chirurgicale dès la naissance, opération conditionnant leur survie ? A la naissance, leur viabilité est compromise mais elle peut-être améliorée par l’intervention de l’homme ; on considère donc qu’ils sont viables. La non-viabilité est l’absence d’organes essentiels à la survie de l’enfant, vouant ce dernier à une mort certaine168. La naissance

et l’accouchement posent la question de savoir si le fœtus, blessé et décédé au moment même de l’expulsion, est une victime d’un dommage corporel éprouvant des

Toulouse, 1988, p. 74 s. ; Catherine PHILIPPE, « La viabilité de l'enfant nouveau-né. », D. 1996, p. 29.

166 Gérard CORNU à l’occasion de la synthèse des travaux du colloque sur l’embryon humain, in

L’embryon humain-Approche multidisciplinaire, sous la direction de Brigitte FEUILLET-Le

MINTIER, Economica, 1996, p. 335.

167 Christophe RADÉ, « Handicap consécutif à une mauvaise prise en charge de l’accouchement »,

RCA, 01/04/2010, n°4, p. 19 ; Sophie HOCQUET-BERG, « Lien causal entre le handicap de l’enfant et

les fautes du médecin obstétricien », RJPF, 01/12/2013, n° 12, p. 35.

préjudices ? Dans un tel cas, le fœtus n’est pas et n’a pas été une personne juridique : il n’est pas né, n’a pas vécu et n’a pas respiré. Il s’agit donc d’un enfant mort-né169.

64 - Le fœtus qui est naît, viable et en vie est une personne physique donc juridique. Dès lors la vie de l’enfant opère comme présomption de sa viabilité. Le doyen CORNU définit cette présomption : « La viabilité est la capacité naturelle de vivre, l’aptitude à

la vie. Tout enfant né vivant est présumé viable. »170. Le signe de la vie est la

respiration de l’enfant.

65 - Ainsi, il faut retenir qu’un préjudice corporel concerne un corps réparable caractérisé a minima par la vie. Une victime de dommage corporel doit donc être née, viable et vivante. Pourtant, un arrêt du Tribunal de grande instance de Niort du 17 septembre 2012 reconnaît deux jumeaux conçus mais non encore viables comme victimes d’un préjudice subi au titre de l’accident de moto de leur père. Le tribunal avait, en l’espèce, appliqué l’adage « Infans conceptus pro nato habetur quoties de

commodis ejus agitur »171, souvent utilisé pour les successions, qui recommande au

juge de considérer l’enfant simplement conçu comme né chaque fois qu’il y va de son intérêt. Le juge avait retenu dans cet arrêt que : « si les enfants n’étaient pas encore

nés au moment de l’accident de moto, ils étaient cependant déjà conçus, à cet effet, le lien de causalité entre l’accident et le préjudice résultant des troubles dans les conditions d’existence des enfants est établi »172. Le tribunal a ainsi reconnu

l’existence juridique de deux enfants seulement conçus car ils avaient intérêt à cette reconnaissance.

169 Grégoire LOISEAU, « L’établissement d’un enfant sans vie n’est plus conditionné par son niveau

de développement », JCP G 2008, n° 11, p. 35-38. Dans la course à l’obtention d’un statut pour les enfants morts nés, il existe désormais la possibilité de les voir reconnaître comme ayant au moins été un projet parental puisqu’ils peuvent être mentionnés sur le livret de famille des parents et ceci peu importe le développement du fœtus depuis trois arrêts de la première chambre civile de la Cour de cassation du 6 février 2008.

170 Gérard CORNU, Droit civil, Introduction, Les personnes, Les biens ,op. cit., n° 464, p. 208. 171 L’enfant est réputé né chaque fois qu’il y va de son intérêt.

172 TGI Niort, 17 septembre 2012, n°11/01855, Alice PHILIPPOT, « Pas encore né mais déjà

indemnisé : la réparation du préjudice d’affection de l’enfant », Lamy 2012, n°99, pp. 33-36 ; Julie GALLOIS, « L’enfant simplement conçu peut-il réellement se prévaloir d’un préjudice d’affection »,

RJPF 2013, n°1, pp. 13-15 ; Jean HAUSER, « Le droit dans les limbes », RTD Civ 2013, n°2, pp. 345-

66 - L’application de l’adage précité peut être vu comme la thèse de l’anticipation173

c’est à dire que, par extension, la personnalité juridique a été accordée aux jumeaux bien avant la naissance et la vie. Cette thèse a comme principal défaut de créer une nouvelle catégorie de sujets qui pourtant n’existent pas dans le droit positif. Dès lors nous préférerons la thèse de la rétroactivité174 défendue par SAVIGNY pour lequel « la

maxime infans conceptus n'est qu'une simple fiction qui ne trouve à s'appliquer que dans des étroites limites et à un certain ordre de faits spécialement déterminés »175. La

personnalité juridique ne serait accordée qu'à la naissance à l'enfant qui pourra, rétroactivement, la faire remonter au jour présumé de sa conception s'il y va de son intérêt : c’est une fiction juridique. Cela emporte pour conséquence qu'aussi longtemps qu'il n'est pas né, l'enfant conçu n'est pas une personne.

67 - Plus récemment, dans un arrêt de la deuxième chambre civile du 14 décembre 2017176, la Cour de cassation maintient sa jurisprudence et conclut que, « dès sa

naissance, l'enfant peut demander réparation du préjudice résultant du décès accidentel de son père survenu alors qu'il était conçu » au motif qu’il existait bien un

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