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Troisième phase de carrière : maitriser le jeu et devenir directeur ou secrétaire général

5 Apprendre à être un diplomate et monter dans la hiérarchie .1 Première phase de carrière : du recrutement au sous-directeur

5.8 Troisième phase de carrière : maitriser le jeu et devenir directeur ou secrétaire général

Le plus haut niveau du ministère, le grade 19 de SG ou de DG, est réservé à un nombre de personnes très limité. Même les directeurs à l’échelle 17 ne peuvent pas tous automatiquement accéder à ce niveau. Le passage du grade 17 au grade 18, celui de SG adjoint ou de DG adjoint, est réservé à ceux qui ont besoin d’apprendre le métier de DG, et qui peuvent, a priori, prétendre à accéder au niveau de DG un jour.

Il existe des critères informels pour devenir DG, qui ne sont pas toujours respectés :

« Avant de devenir DG, il faut avoir été directeur. Pour devenir directeur, il faut avoir été ambassadeur. »

5.8.1 Donner des conseils stratégiques et politiques au ministre

Pour commencer, la responsabilité d’un DG est bien plus grande que celle d’un directeur :

« Il y a une grande différence entre un directeur et un DG. Un directeur doit pouvoir gérer entre 30 et 70 personnes. Il faut qu’il sache produire et conseiller. C’est toujours assez étroit comme responsabilités et on a

toujours un DG au dessus de nous. Mais il n’y a plus personne entre le DG et le ministre, on parle directement au ministre. Le métier de directeur est plus facile dans cette optique.

Le DG doit prendre des initiatives et doit avoir une vision stratégique pour conseiller son ministre :

« Ceux qui ont un regard stratégique deviennent DG. On a fait comprendre à un ancien directeur qu’il ne deviendra pas DG. Trop passif. Il n’était pas au premier rang pour résoudre des problèmes. Un DG a une vision stratégique sur les choses. On est responsable pour un processus et il faut assumer cette responsabilité. Il faut oser d’être là. »

« Pour monter du niveau 14 au niveau de directeur il faut apprendre à prendre des initiative dans son propre domaine. Un DG est plus stratégique et plus axé sur La Haye. »

La proximité du ministre fait que la nature du travail devient plus politique. La séparation des pouvoirs est toujours importante, mais le conseil demande une certaine vision politique. Ce rôle est réservé aux DGs à La Haye, et non aux ambassadeurs :

« Dans le contact avec le ministre il faut trouver un juste équilibre entre tes conseils et la mise en œuvre de sa politique. Il faut pouvoir opérer comme vice-ministre. Nous avons un petit gouvernement, donc on a besoin de personnel pour recevoir les gens de l’étranger. Il faut pouvoir être vice-ministre dans ta présentation et il faut pouvoir penser politiquement. Ce sont d’autres compétences que celles des ambassadeurs. Un DG est plus quelqu’un qui inspire et qui a des idées. Quand un ambassadeur prend trop ce rôle il entre en conflit avec les DGs. »

En cas de désaccord ou d’une différence de points de vue entre le DG et le ministre, le chef ultime reste dans tous les cas le ministre :

« On ne s’oppose pas au ministre plus de deux ou trois fois. Après il faut partir ou se taire. Il faut garder ses principes, un minimum, mais faire des concessions est inévitable. »

5.8.2 Travailler à La Haye

La vision stratégique qui est demandée d’un DG relève du contexte politico-administratif à La Haye. Le travail à l’étranger demande une coordination avec presque tous les ministères de La Haye. Dans les négociations de compétences et de budgets, le ministère doit en permanence défendre ses intérêts à La Haye.

« Le contexte politico-administratif joue un rôle très important pour un DG. Il faut avoir été un bon directeur et pouvoir gérer une équipe, mais en tant que DG on est au plein milieu d’un contexte politico-administratif à La Haye. Il faut prendre en compte ce que les autres ministères veulent au niveau de la migration, de la défense, politiquement… C’est une grande différence avec la fonction de directeur. Il faut adopter une vue plus large et prendre responsabilité pour la totalité. Un DG doit avoir un œil pour toute l’organisation. Il faut être stratège, sensible à l’organisation et à la politique. »

Le jeu de pouvoir à La Haye est complexe et demande des compétences spécifiques qui ne sont pas les mêmes que celles d’un ambassadeur :

« Ca fait des années que je plaide que le métier à La Haye est un autre métier que celui de l’étranger. Il faut reconnaître que ce sont deux missions différentes qui demandent des compétences différentes. « Certains se débrouillent très bien dans une ambassade, mais on ne les imagine pas opérer à La Haye. À La Haye il y un contexte politico-administratif, une collaboration et des conflits interministériels, il faut

prendre en compte le conseil des ministres, les médias, le ministre. Il faut une certaine expérience et des capacités pour cela.

« Un DG opère très stratégiquement, alors qu’un ambassadeur doit connecter les gens et les motiver »

« Le métier de directeur est un autre métier. Le DG conseille moins au niveau du contenu, mais plus comme « comment on va vendre notre politique au parlement », quels députés il faut inclure ex ante dans la décision, etc. Le cadre décisionnel est beaucoup plus large. Le directeur du Moyen-Orient va dire qu’il faut être dur avec les Israéliens quand ils n’ont pas respectés leurs obligations internationales, mais le DG doit conseiller le ministre sur la stratégie à adopter pour réaliser ce conseil en accord avec l’ensemble des intérêts politiques. Il faut avoir de l’expérience avec le fonctionnement de La Haye. Il faut avoir un réseau en dehors de ce ministère. Quand on a travaillé à l’étranger pendant 20 ans on a pas cette sensibilité et ce réseau. »

5.8.3 S’entendre avec le ministre

Un DG est le premier conseiller du ministre. Il est alors important que le ministre puisse s’entendre avec la personne du DG :

« On peut être aussi fort qu’on veuille, si on s’entend pas ca ne va pas marcher. »

« Pour la nomination d’un DG il y a beaucoup de facteurs en jeu qu’on ne contrôle pas en tant qu’administration. Le ministre doit être confortable avec la personne. Il y a beaucoup de facteurs autres que le contenu qui jouent un rôle. Ce ne sont pas des facteurs politiques, moi en tout cas je n’ai jamais senti ça. Je ne sui pas membre d’un parti politique et cela ne m’a jamais empêché dans ma carrière. »

« Le progrès a échelle 17 ou 18 peut être demandé par le ministre. Parfois il y une bonne chimie et ça fonctionne bien pour lui. »

« Le ministre veut s’entourer de personnes qui rentrent bien dans l’ambiance empathique ».

Il est possible de contribuer activement à une bonne relation avec le ministre : « Parfois il fallait livrer un document à la résidence du ministre pendant le weekend. Certains entraient pour un verre de vin, d’autres rentraient chez-eux. Les premiers faisaient plus facilement carrière car leur relation était mieux. »

« Dans la voiture avec le ministre il fallait parler du cyclisme, d’autre chose que le dossier. Les ministres ont besoin de se détendre aussi, de parler d’autre chose que le travail. C’est bon pour le rapport humain ».

Le ministre joue un rôle limité dans les nominations, mais il arrive qu’un diplomate fasse carrière après une nomination du ministre :

« Quand le ministre voyait un jeune employé qui lui plaisait, on voyait souvent des promotions après. »

Une fois qu’on n’est plus DG à La Haye, mais ambassadeur dans une grande ambassade, est-ce qu’on a encore du pouvoir sur les affectations ?

« Le pouvoir est avec les DG. Un ancien DG qui est devenu ambassadeur ou RP n’a plus de pouvoir sur les nominations. Tout est décidé à La Haye. »