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CHAPITRE I. ETAT DE L’ART

I. 3.2.1.1. Structure du film passivant

I.3.3. Tribocorrosion

Dans la littérature, la tribocorrosion est définie comme le processus irréversible de l’endommagement (fissuration, écrouissage) et de l’usure de la surface d’un matériau métallique par les actions combinées du frottement et de la corrosion [34], [36] [52], [53], [54], [55] et [56]. Son étude permet une meilleure compréhension de l'influence des facteurs environnementaux (chimiques et/ou électrochimiques), sur le comportement tribologique des surfaces. La Figure 9 présente, de manière schématique, l’ensemble des éléments devant être pris en compte dans un processus de tribocorrosion.

Figure 9: Schéma représentant l'ensemble des éléments - paramètres de fonctionnement mécaniques et électrochimiques et caractéristiques du système (matériaux, environnement, contact) - dont les influences

simultanées doivent être prises en compte dans l'étude d'un processus de tribocorrosion [52].

En pratique, la tribocorrosion peut affecter un grand nombre des systèmes tribologiques très divers constitués des dispositifs mécaniques comportant des pièces généralement métalliques en contact et en mouvement relatif placées dans un environnement se révélant corrosif pour les matériaux métalliques constituant les surfaces tribologiques [52].

Dans le sous - chapitre I.2. a été identifiée la tribocorrosion comme l’un des mécanismes

de vieillissements des composants d’une centrale nucléaire. La Figure 10 présente d’autres secteurs industriels qui peuvent être touchés par la tribocorrosion.

Figure 10: Importance pratique de la tribocorrosion [57].

Figure 11: Schéma des différents types de contacts tribologiques impliquant des effets mécaniques et chimiques simultanés [58].

La dégradation des matériaux à cause des interactions simultanées mécaniques et chimiques peut se produire sous une variété des conditions (voir Figure 11). Deux corps ou trois corps en contact en présence du frottement à l’interface, en milieu agressif sont souvent soumis à la tribocorrosion. Le mouvement relatif des surfaces en contact peut être unidirectionnel ou alternatif. Le « fretting » est un type spécial de contact tribologique dans lequel les surfaces en contact sont soumises à des mouvements oscillatoires d'amplitude suffisamment faible pour ne générer qu'un frottement du contact partiel. La tribocorosion est également observée dans les contacts de roulement spécifiques aux roulements à billes. L’impact des particules peut se traduire par l’attaque combinée, mécanique et chimique, du matériau. Dans la littérature le terme de tribocorrosion est utilisé dans un sens plus restreint, essentiellement aux « sliding contacts ».

La Figure 12 présente les différents dispositifs pour l’étude expérimentale de la tribocorrosion.

Figure 12: Principes des dispositifs de laboratoire pour l’étude expérimentale de la tribocorrosion : a) mouvement circulaire du pion sur l’échantillon, b) mouvement alternatif du pion sur l’échantillon, c) sphère fixe sur un disque tournant avec injection d'électrolyte d'en bas, d) micro tube céramique tournant

servant comme tube pour l’électrolyte [58].

Les quatre types d'équipements présentés ci – dessus impliquent un antagoniste frottant sur un échantillon plan. L'antagoniste peut être un pion cylindrique (I), un cône tronqué (II), ou une sphère (III). La section droite d’un cylindre a l’avantage que la surface de contact

entre l’antagoniste et l’échantillon est bien définie. Cependant, en pratique, il est extrêmement difficile de mettre en contact la surface plane, la base du cylindre, avec la surface plane de l’échantillon, en obtenant des conditions de contact satisfaisantes pour l’expérimente. Le parallélisme des plans devrait être réalisé avec une précision qui est techniquement hors de portée. Dans le cas des contacts sphère – plan il n’y a pas des problèmes du parallélisme, mais la surface de contact est calculée à partir de la théorie

d’Hertz (voir le sous – chapitre I.3.1.1)et cette surface de contact peut évoluer à cause de la

formation d’une trace de frottement.

En 2001, le comité de tribologie du CEFRACOR (Centre Français de l’Anticorrosion) [56] a organisé une étude inter – laboratoires à laquelle sept laboratoires européens ont participés pour comparer les performances des différents dispositifs expérimentaux présentés dans la Figure 12. Les sept laboratoires ont utilisés les mêmes matériaux et le même électrolyte. Les résultats obtenus par cette étude indiquent que les différents dispositifs expérimentaux utilisés ont donnés des valeurs similaires pour le coefficient du frottement, mais les résultats concernant la perte totale du matériau et les densités du courant ont été très différents.

Actuellement, les premiers deux dispositifs présentes dans la Figure 12 a et b sont les plus utilisés pour évaluer la résistance à la tribocorrosion des matériaux métalliques passivables et pour mettre en évidence le rôle du film passif. Des mesures électrochimiques peuvent être effectuées avec les deux types de dispositifs. Cependant, pour mettre en œuvre certaines méthodes et avoir une interprétation correcte des résultats, des conditions électrochimiques stationnaires sont imposées.

Le mouvement alternatif du dispositif (Figure 12 b) introduit une perturbation périodique des conditions électrochimiques, ce que fait que l’utilisation d’un dispositif avec un mouvement unidirectionnel (Figure 12 a) est préférable pour les essais de tribocorrosion.

Les conséquences du couplage entre le frottement et la corrosion sont complexes à appréhender et à maîtriser. La connaissance du comportement du système tribologique en l’absence de milieu corrosif, et le comportement électrochimique, en l’absence de frottement des matériaux qui le constituent ne suffisent pas pour déduire le comportement en tribocorrosion d’un système. Le frottement modifie en effet la sensibilité du matériau à la corrosion et, inversement, la corrosion modifie les conditions de frottement. Il existe donc, en tribocorrosion une synergie entre le frottement et la corrosion susceptible de modifier non seulement le mécanisme tribologique initial mais également l’usure qui en résulte.

L’effet de synergie a pour origine les interactions fortes intervenant entre les actions respectives de la sollicitation mécanique superficielle et de la corrosion (voir Figure 13). Le

frottement modifie la résistance des matériaux à la corrosion en provoquant un écrouissage, parfois une fissuration superficielle, ainsi que la destruction des couches superficielles (couches adsorbées, films ou couches d’oxydes...). Inversement, la corrosion modifie les conditions de frottement et d’usure en affectant les caractéristiques morphologiques (par dissolution) ainsi que la composition chimique et les propriétés mécaniques des surfaces (formation d’oxydes...).

Les contraintes fortes liées à l’environnement, associées aux progrès récents dans l’ingénierie des surfaces ont favorisé, dans la dernière décennie, le développement des recherches à caractère fondamental sur l’origine de cet effet de synergie et, plus généralement, sur les mécanismes de tribocorrosion et d’usure, à travers d’une approche pluridisciplinaire associant la tribologie, l’électrochimie et la science des matériaux et des surfaces.

Figure 13: Schéma de : a) corrosion accélérée par frottement, b) abrasion accélérée par produits de corrosion [59].

Une des premières tentatives de description quantitative de l’effet de synergie entre la corrosion et la sollicitation mécanique a été présentée par Watson [60]. Ces auteurs ont décrit l’usure totale (T) comme la somme des trois composantes selon l'équation :

S C W

T= + + (11)

· W est la perte de matière par usure mécanique, en l'absence de corrosion.

· S est l'augmentation de l’usure totale due à l'effet combiné de la corrosion et l'usure mécanique (terme de synergie).

I.3.3.1. Influence de frottement sur la résistance à la corrosion d’un

matériau métallique passivable

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