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3. TRANSFERTS DE METHODES HPLC VERS UPLC

3.2. Transfert en mode isocratique

3.2.1. Effets extra-colonnes

Lorsque des colonnes de faibles dimensions sont utilisées (longueur et/ou diamètre réduits), il est important de minimiser les sources de dispersion. En effet, la dispersion globale d’un pic (Fig. 5) [31]

est estimée par sa variance totale (σ²tot) et correspond à la somme des variances générées par la colonne chromatographique (σ²col) et de toutes les variances extra-colonnes (σ²ext) (Eq. (12)).

2 ext 2 col 2

tot σ σ

σ = + (12)

Figure 5 : Dispersion globale d’un pic chromatographique.

Où N est le nombre de plateaux théoriques généré par la colonne chromatographique, VR le volume de rétention d’un soluté, V0 le volume de rétention nul, et k le facteur de rétention du composé considéré.

Les sources de dispersion extra-colonne peuvent provenir de l’injection (σ2inj), de la détection (σ2det) et des tubes de connexion (σ2tub) situés entre la vanne d’injection et l’entrée de la colonne, ainsi qu’entre la sortie de la colonne et le détecteur. Ces sources de variance sont additionnelles (Eq.(14)) [31]:

2 volume de la cellule de détection (Vcell), de la constante de temps du détecteur (τ), du débit de phase mobile (F) et du coefficient de diffusion du soluté dans la phase mobile (Dm) (Eq.(15)) [31].

m

Le rapport entre la variance extra-colonne (σ²ext) et la variance totale (σ²tot) doit être inférieure à 10%, pour considérer que la résolution n’est pas significativement altérée.

Lorsque le transfert de méthode s’effectue vers une colonne ayant un volume-mort plus faible (réduction de la longueur et/ou du diamètre de la colonne) que la méthode originale, il est important que la contribution des volumes extra-colonne soit maintenue afin de garder le même rapport des variances (σ²ext/σ²tot) et donc une perte acceptable en efficacité. Pour cela, il est nécessaire d’optimiser le système LC utilisé ou alors de travailler avec un système dédié. Si cette solution n’est

pas envisageable (i.e. pas de cellule de détection de faible volume disponible, ni de constante de temps acceptable, etc.), il est nécessaire de travailler avec des facteurs de rétention élevés afin de compenser les effets extra-colonnes, en augmentant la variance liée à la colonne (Eq.(13)).

Cependant, un changement des facteurs de rétention implique une modification de la composition de la phase mobile et donc à la fois un potentiel changement de sélectivité par rapport à la méthode originale et des temps d’analyse plus longs.

3.2.2. Règles du transfert

Deux paramètres doivent être adaptés pour le transfert de méthodes en mode isocratique (phases stationnaires identiques, mais de géométries différentes) : le volume d’injection et le débit de phase mobile. En effet, pour éviter des élargissements de pic dus aux effets extra-colonne (Eqs.(12, 14)) et maintenir un niveau équivalent de sensibilité, il est nécessaire d’adapter le volume d’injection proportionnellement aux dimensions de la colonne vers laquelle la méthode est transférée (Eq.(16)) :

1

Où Vinj est le volume d’injection, dc le diamètre de la colonne, L la longueur de la colonne, les indices 1 et 2 correspondant à la méthode originale et transférée, respectivement.

Pour un transfert purement géométrique, il est important de maintenir la vitesse réduite (v) constante entre la méthode originale et la méthode finale, car cette valeur est indépendante de la géométrie de la colonne et du débit de phase mobile (Eq (17)) [31] : diffusion du soluté dans la phase mobile. Puisque les Dm sont identiques pour les deux méthodes, il est important de maintenir le produit u·dp constant. Par conséquent, le nouveau débit (F2) est

Le temps d’analyse (tr) de la méthode transférée peut également être estimé facilement à l’aide de la relation Eq.(19) dans laquelle le rappport tr/t0 doit être maintenu constant pour les deux méthodes :

1

Où V0 est le volume mort de la colonne.

Un calculateur mis à disposition sur le site WEB du Laboratoire (« HPLC calculator ») [39] permet de déterminer rapidement, les conditions à utiliser pour un transfert de méthode à l’aide des équations précitées.

3.2.3. Transfert sur colonnes courtes

La méthode originale a été développée sur un système HPLC conventionnel utilisant une colonne analytique XTerra RP18 150 mm x 4.6 mm, 5 µm. La formulation pharmaceutique employée est la Rapidocaïne® 0.5% contenant de la lidocaïne, anesthésique local utilisé comme agent anti-arythmique cardiaque. La formulation contient également deux agents conservateurs (méthyl- et propyl-parabène) dissous dans une solution isotonique de chlorure de sodium (NaCl 0.9%) (injectable par voie parentérale). La 2,6-diméthylaniline, produit de dégradation de la lidocaïne, est ajoutée au mélange.

Le temps d’analyse est de 6 min environ (Fig. 6).

Figure 6 : Analyse de la Rapidocaïne® sur un système LC conventionnel : 1) méthylparabène, 2) 2,6-diméthylaniline, 3) propylparabène, 4) lidocaïne. Colonne : XTerra RP18 (150 x 4.6 mm, 5 µm) ; Phase mobile : tampon phosphate pH 7.2 – acétonitrile (50 :50, v/v) ; Débit : 1 mL/min ; Volume d’injection : 20 µL ; Détection : UV@ 230 nm, 100 ms, 20 Hz, volume cellule UV 14 µL ; Température : 30°C.

Cette méthode a été transférée sur des colonnes plus courtes (50, 30, et 20 mm). Les volumes d’injection et les débits de phase mobile ont été adaptés selon les règles de transfert énoncées plus haut (Eqs. (16, 18)). Pour cette nouvelle série d’expériences, un système LC optimisé a été utilisé (système UPLC), comprenant une cellule de détection de 500 nL (vs 14 µL sur un système conventionnel), une constante de temps de 25 ms et une fréquence d’acquisition élevée (40 Hz).

Comme attendu par la théorie (Eq.(19)), une réduction du temps d’analyse jusqu’à un facteur 10 a été observée entre la colonne conventionnelle et les colonnes courtes (Fig. 7). Bien que la taille des particules soit réduite à 3.5 µm, la perte en efficacité est significative lorsque la longueur des colonnes diminue. Une perte en résolution et sensibilité a été observée avec les colonnes de 30 et 20 mm et la hauteur des pics est réduite d’un facteur 3 à 4 entre les colonnes de 150 et 20 mm.

Figure 7 : Analyse de la Rapidocaïne® sur un système LC optimisé (UPLC) : 1) méthylparabène , 2) 2,6-diméthylaniline, 3) propylparabène, 4) lidocaïne. Phase mobile : tampon phosphate pH 7.2 – acétonitrile (50 :50, v/v) ; Débit : 1.4 mL/min ; Détection : UV@ 230 nm, 25 ms, 40 Hz, volume cellule 500 nL ; Température : 30°C. (a) Colonne : XTerra RP18 (50 x 4.6 mm, 3.5 µm) ; Volume d’injection : 7 µL. (b) Colonne : XTerra RP18 (30 x 4.6 mm, 3.5 µm) ; Volume d’injection : 4 µL. (c) Colonne : XTerra RP18 (20 x 4.6 mm, 3.5 µm) ; Volume d’injection : 3 µL.

Les colonnes courtes remplies de particules de 3.5 µm sont intéressantes pour effectuer des séparations simples (e.g. contrôle de qualité d’une formulation pharmaceutique). Cependant, il est nécessaire de générer des séparations présentant des facteurs de rétention plus élevés (k > 3) afin de réduire la contribution des effets extra-colonne. Pour la séparation de mélanges plus complexes, le couplage avec un détecteur plus sélectif (e.g. spectromètre de masse) représente une approche intéressante, pour autant que les temps de scan soient suffisamment courts.

3.2.4. Transfert sur UPLC

L’utilisation de colonnes chromatographiques présentant un faible volume (longueur et/ou diamètre de colonne réduits) permet de réduire la consommation de solvant et d’obtenir des temps d’analyse très courts. Ainsi, des colonnes de 50 x 2.1 mm ont été utilisées pour le transfert. Afin de compenser la perte d’efficacité due à la réduction de la longueur de colonne, des particules de très faible diamètre (sub-2 µm) ont été employées pour le transfert de méthode. Le volume d’injection et le débit de phase mobile ont également été adaptés (Eqs. (16, 18)) en tenant compte de la nouvelle géométrie (2.1 x 50

mm, 1.7 µm). La colonne utilisée est une colonne Acquity Shield BEH RP18 (Waters, Milford, Etats-Unis) présentant une sélectivité similaire à la XTerra RP18 utilisée dans la méthode originale (Fig. 6).

Dans ces nouvelles conditions, le temps d’analyse est réduit d’un facteur 9 (Fig. 8a) et, comme attendu, la sélectivité et la résolution sont similaires à la méthode originale et l’efficacité identique à la séparation originale. Les colonnes Acquity font partie d’une nouvelle génération de phases stationnaires composées de matériaux hybrides, compatibles avec des pressions pouvant atteindre 1000 bars. Par conséquent, la même analyse a également été réalisée à 1000 µL/min, correspondant à la pression maximale compatible avec le système et la colonne UPLC (Fig. 8b). Dans ces conditions, une séparation ultra-rapide est obtenue en moins de 30 s avec des performances chromatographiques équivalentes (facteurs de rétention et sélectivité) à la méthode originale, malgré une perte acceptable en efficacité (< 10%). En terme de sensibilité, aucune modification significative de la hauteur des pics n’est observée, mais le rapport signal sur bruit (S/N) est réduit d’un facteur 3 dans les méthodes transférées. Ce phénomène est attribué à la faible constante de temps et à la haute fréquence d’acquisition du détecteur UV (25 ms et 40 Hz, respectivement).

Figure 8 : Analyse de la Rapidocaïne® sur un système LC optimisé (UPLC) : 1) méthylparabène , 2) 2,6-diméthylaniline, 3) propylparabène, 4) lidocaïne. Colonne : Acquity Shield BEH RP18 (50 x 2.1mm, 1.7 µm); Phase mobile : tampon phosphate pH 7.2 – acétonitrile (50 :50, v/v) ; Volume d’injection : 1.4 µL ; Détection : UV@ 230 nm, 25 ms, 40 Hz, volume cellule 500 nL ; Température : 30°C. (a) 610 µL/min. (b) 1000 µL/min .

Les colonnes courtes remplies de particules sub-2 µm sont donc parfaitement compatibles avec les analyses rapides et ultra-rapides et permettent de conserver de bonnes performances chromatographiques, en mode isocratique.

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