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Quand faut-il décider, faire un choix sur la solution à préférer ? Qui a le pouvoir de le faire ? Quelles sont les personnes qui doivent être consultées, à quel moment et sous quelles conditions ? Après le premier chapitre « définir l’objet à enterrer » qui avait pour objectif de suivre les pratiques du gouvernement concernant de la catégorisation de l’objet, ce chapitre adopte une autre perspective. Il s’intéresse à l’élaboration du programme de gestion de l’objet « déchet hautement radioactif ». Plus particulièrement, il vise à identifier la variété de connaissances et d’expertises qui soutiennent la trajectoire du programme de gestion de l’objet, pour en analyser la dynamique afin de comprendre comment, malgré des moments de tensions et d’ouverture des alternatives possibles durant le tournant participatif, l’option privilégiée est restée le dépôt géologique. Autrement dit, ce chapitre s’intéresse aux différentes formes de co-production entre d’une part les savoirs publics et experts et, d’autre part, les décisions politiques qui ont abouti au maintien l’option de dépôt et à l’enterrement de ses alternatives.

Pour ce faire, nous partons deux postulats théoriques dont un sera plus particulièrement développé dans les sections qui suivent. D’abord, nous considérons le programme de gestion des déchets hautement radioactifs est « sociotechnique » (Bergmans 2014). Ce postulat permet de mettre en évidence les enjeux éthiques, juridiques mais aussi sociaux54 qui sont intimement liés aux aspects techniques du programme de gestion des déchets hautement radioactifs. Ensuite, à la suite d’Andrew Stirling (2008) et ses collaborateurs de la Science Policy Research Unit (SPRU) de l’Université de Sussex, nous considérons que les pratiques sociotechniques de gouvernement concernant les déchets radioactifs peuvent s’appréhender plus finement avec un cadre théorique et analytique au sein duquel la dichotomie entre analyse experte et participation publique est repensée à nouveaux frais. En suivant ce cadre, la dynamique majeure de l’analyse des pratiques de gouvernement consiste à comprendre comment certaines prises de positions expertes ou publiques mènent à des moments de fermeture (« closing down ») ou d’ouverture (« opening up ») des processus d’évaluation (« appraisals ») et d’engagements (« commitment »)

54 L’acronyme « ELSI », Ethical, Legal and Social Issues est fréquemment utilisé en STS (Science Technologie et Société).

politiques. Un tel cadrage permet d’envisager les changements des pratiques de gouvernement des déchets nucléaires sous un angle neuf, en dépassant une conception très influente dans les travaux de STS et, plus largement, de sciences politiques et sociales, qui a tendance à glorifier l’implication de publics-profanes auprès des experts tout en négligeant les relations de pouvoir et les normativités qui imprègnent pourtant fortement les exercices participatifs. Plutôt que de glorifier la participation comme un objectif en soi dont la désirabilité serait si évidente qu’elle s’imposerait presque naturellement à l’heure du « tournant participatif » (Bergmans et al. 2014a), ce cadre permet de questionner à la fois les formes procédurales d’un processus participatif particulier mais également d’investiguer les ambiguïtés et les zones grises des décisions institutionnelles et politiques qui découlent du processus initié. En d’autres termes, le cadre que nous utilisons réintroduit un scepticisme symétrique par rapport aux acteurs experts ou profanes qui prennent part à des exercices participatifs et aux conclusions qui en découlent. Il permet également de penser la gouvernance sociotechnique comme un processus décisionnel itératif ancré dans un contexte donné. Plusieurs auteurs ont déjà mobilisé les outils conceptuels évoqués ci-dessus pour analyser des processus d’analyses de vulnérabilité (Rossignol, Delvenne, Turcanu 2014), de Technology Assessment (Ely et al. 2014) ou des questions plus proches de notre sujet d’étude, comme celles portant sur la place des concepts de réversibilité et de récupérabilité dans la gestion des déchets nucléaires en France, en Finlande et au Royaume-Uni (Lehtonen 2010a).

Comme précisé dans notre section méthodologique, le cœur de l’analyse débute à partir d’un moment important de mise en tension des programmes de gestion, dont une des réponses du gouvernement sera la mise en place d’un tournant participatif ou délibératif institutionnalisé55. L’intérêt de ce focus réside dans le fait que ce moment sera une tentative de reconfiguration des relations entre les différents acteurs impliqués dans la gestion des déchets radioactifs où le programme de gestion ne sera officiellement plus uniquement considéré comme un projet technique mais bien

reconnu par les acteurs impliqués comme un projet sociotechnique « qui a besoin

d’être accepté et légitimé » (Bergmans et al. 2014a: 5). Ce qui nous intéresse n’est pas tant de savoir si le projet était auparavant un projet sociotechnique (puisqu’en tant que

55 Bryan Wynne (2007) parle de « participatory return » pour préciser qu’un premier tournant participatif, bien que différent, s’est d’abord opéré dans les années 70. Dans les années 90, il faudrait donc parler de « return » participatif (Wynne 2007: 100).

chercheur STS, nous considérons effectivement que c’était le cas56), mais plutôt d’observer le changement de cadrage opéré par les acteurs impliqués, qui considérèrent que la robustesse technique d’un projet n’avait pas été un facteur suffisant pour justifier sa légitimité et son acceptation et qu’il était dès lors nécessaire de considérer de nouveaux aspects du projet comme les aspects sociétaux.

Ce chapitre se divise en plusieurs parties. La première, plus théorique, présente les postulats sur lesquels nous baserons notre analyse. La deuxième partie revient très brièvement sur les contestations locales considérées comme le point de départ du tournant participatif. La troisième partie présente les trois trajectoires des différents programmes de gestion en France, en Belgique et au Canada depuis leur mise en tension dans les années 90.

Le projet sociotechnique comme une succession d’appraisals et de

commitments

Pour Andy Stirling (2008: 265), la gouvernance d’un système technologique se compose de deux processus qui englobent la diversité d’acteurs, de discours, de structures et de processus à analyser : l’appraisal (évaluation) et le commitment (engagement). Ces processus se développent en parallèle, sont interreliés et mutuellement co-constitués (Smith, Stirling et Berkhout 2005; Stirling 2006a; Stirling 2006b, Smith et Stirling 2007; Ely et al. 2014). En d’autres termes, le processus d’évaluation et l(es) évaluation(s) produite(s) sont une condition nécessaire aux engagements, tout comme les engagements alimentent en retour l’évaluation et son processus. Les connaissances, les logiques d’intérêts, les pratiques, les réseaux, les institutions qui soutiennent l’évaluation façonnent également la manière dont les acteurs comprennent, représentent ou interprètent les différentes alternatives possibles dans l’engagement. Cette co-constitution pose également de nombreux défis en matière de responsabilisation et de transparence (Stirling 2008).

Les auteurs définissent un appraisal comme « un ensemble de processus sociaux au travers desquels des connaissances sont produites et collectées en vue d’éclairer la prise de décision et les engagements institutionnels y afférents [notre traduction] » (Ely et al. 2014: 507). En bref, l’appraisal fait référence aux manières de savoir

56 Comme Bergmans et al. (2014: 8) le résument: «From a STS perspective, therefore, it is of great importance to examine not only the frames that are employed but also how these are enacted, investigating how, if integration is claimed, actors are recognizing this or, if integration is not claimed, how activities are presented as being of a separated kind.»

(« ways of knowing ») et d’informer (« informing social choices ») (Stirling 2008). Elle concerne la manière dont les informations sont produites, comprises, et rendues pertinentes pour informer et permettre l’engagement décisionnel/institutionnel. Pratiquement, elles peuvent prendre diverses formes comme des rapports d’évaluations, des bilans économiques ou commerciaux, des enquêtes parlementaires, des évaluations plus ponctuelles comme une intervention médiatique ou des initiatives provenant des organisations non gouvernementales, etc.

Le « commitment » désigne la prise de décisions concrètes concernant des trajectoires technologiques et il porte sur une série de structures et de processus visant à affecter des ressources, à définir des priorités politiques ou à mettre en place des infrastructures (Stirling 2008: 265). En bref, il s’agit de former, au sens de construire et constituer (« forming ») le choix social. Comme les évaluations, ces engagements prennent différentes formes qui revêtent des matérialisations très concrètes (par exemple, les discours politiques, les allocations de fonds de recherche, une attention politique particulière, les régulations, un support fiscal, etc.). La diversité des instruments proposés pour soutenir un programme et les choix effectués contribuent ainsi à influencer les résultats des technologies soutenues.

Pour réaliser l’appraisal ou le commitment, plusieurs méthodes, souvent présentées comme opposées l’une à l’autre, sont possibles : l’analyse experte (expert analysis), généralement associée à la « sound science » d’une part, et l’approche participative, généralement associée à davantage d’ouverture vers la société civile d’autre part. Selon Stirling (2008), le clivage entre la démarche participative et la contribution des experts crée une dichotomie inutile et improductive57. La démarche participative et la contribution des experts ont, en effet, beaucoup de points communs : elles sont soumises à des effets de cadrage (Blok 2007; Jensen 2005), sont marquées par des relations de pouvoir (Mouffe 1993, 2000), sont sensibles aux manœuvres stratégiques, visent à réduire la diversité, sont généralement orientées vers le consensus et sont susceptibles d’avoir une finalité justificative similaire (Rossignol et al. 2014; Stirling 2004).

57 L’auteur suggère de s’intéresser en premier lieu aux justifications, aux motivations des acteurs pour recourir à l’un plutôt qu’à l’autre. Dans sa démonstration, il identifie plusieurs types de justification : (1) normatives, (2) substantives, (3) instrumentales. Selon le type de rationalité envisagée, les influences et la distribution de pouvoir diffèrent. Ces trois types ne sont pas cloisonnés mais peuvent s’entremêler dans une politique donnée.

Pour dépasser cette dichotomie, Stirling (2008) et Smith et Stirling (2007) proposent une grille de lecture différente pour analyser les dynamiques existantes dans la construction et l’élaboration d’appraisal et de commitment : l’opening up et le

closing down. Cette grille d’analyse peut s’appliquer à la diversité des acteurs, des

discours, des structures ou des processus qui construisent ou élaborent des configurations technologiques. Nous la détaillons dans la section suivante.

Les dynamiques à l’œuvre des appraisals et commitments

L’opening up et le closing down

Deux dynamiques sont à l’œuvre dans la construction et l’élaboration de l’appraisal et du commitment : le closing down et l’opening up. Le closing down, fait référence au fait de définir les « bonnes » questions, les problèmes et les enjeux prioritaires, les connaissances pertinentes, et de recruter les protagonistes appropriés pour déterminer les meilleures options. Le closing down est généralement ce que les décideurs politiques attendent de la science, à savoir qu’elle soit comme un tout uniforme, capable de donner une direction (Stirling 2010). Stirling identifie plusieurs difficultés associées à la question de la légitimité des moments de closing down. D’abord, la première difficulté réside dans le fait que les négociations, les tensions et jeux de pouvoir pour aboutir à des recommandations communes sont cachés dans ce type de processus. À tout le moins, ils n’apparaissent pas dans l’évaluation finale qui est présentée comme un tout unifié. Ensuite, une autre difficulté concerne le fait que ce document doit pouvoir se justifier (par exemple : qui l’a écrit ? Comment ? Selon quels objectifs ?) et qu’il subit par conséquent une multitude de pressions susceptibles de remettre en cause sa légitimité. Il faut donc se méfier de l’impression erronée selon laquelle la prise de décision serait plus facile en mode closing down :

We might expect it to be easier to effect closing down where an appraisal process is relatively narrow. However, this conjunction of narrowness and closure may exacerbate tensions with wider policy discourses

(Stirling 2008: 283).

L’opening up, par contre, implique un degré plus élevé de réflexivité. Il consiste à présenter les alternatives, invite à se focaliser également sur les options négligées ou abandonnées, à inclure des perspectives marginales, à trianguler les savoirs contestés,

à tester les différentes sensibilités à différentes méthodes, ou encore à examiner différentes possibilités pour dégager de nouvelles options (Stirling 2008: 278-280). Dans une dynamique conduisant à davantage d’opening up, comme l’expliquent Voß and Kemp (2006), les frontières du système peuvent être questionnées et une diversité d’acteurs, de valeurs, d’enjeux et de possibilités peuvent être inclus dans le processus. Stirling (2008) identifie toute une série d’avantages liés aux moments d’opening up : ils permettent d’augmenter la robustesse, de révéler des ambiguïtés ou encore de travailler sur la légitimité d’une décision ou d’un processus58. Loin de rendre les décisions impraticables, ce mode peut être vu comme plus cohérent et normativement plus conséquent avec des institutions et des procédures démocratiques établies (Stirling 2008: 28).

Prenant appui sur les travaux de Stirling (2006b) et de Smith et Stirling (2007: 356), Ely et al. (2014) précisent davantage ces dynamiques en caractérisant plus spécifiquement les processus d’appraisal. Ils s’intéressent à ce qui nourrit une évaluation (ses inputs) et ce qu’elle produit (ses outputs, en termes d’ouverture et de fermeture telles qu’évoquées ci-dessus). Selon eux, les inputs de l’évaluation peuvent être larges (broad) ou restreints (narrow). Broadening out inputs signifie la prise en compte dans l’évaluation d’une plus grande variété de données, telles que des définitions du problème à traiter, des options technologiques, des alternatives politiques, des valeurs, des incertitudes et des ambiguïtés. Ils affirment que, plus on s’intéresse aux alternatives possibles, plus l’évaluation en question « s’élargit ». Les

outputs de l’évaluation peuvent quant à eux être « ouverts » ou « fermés ». Opening up outputs fait référence à la manière dont les conclusions finales sont communiquées

à l’extérieur, en rendant compte de différentes sensibilités exprimées dans l’appraisal de façon plus ou moins homogène et conditionnelle et, à l’inverse, closing down

outputs a pour objectif de favoriser un seul résultat définitif en vue de la phase

d’engagement décisionnel.

58 Selon l’auteur, l’opening up a premièrement pour avantage d’être plus robuste collectivement. Par exemple, la robustesse des informations dans le processus de gouvernance peut être mieux assurée. On considère ici non plus une seule justification mais plusieurs, ce qui apporte davantage de transparence et d’« accountability » dans les choix technologiques. Deuxièmement, les ambiguïtés existantes sont révélées entre les différentes disciplines, les différentes perspectives et il devient alors plus facile d’identifier le manque de connaissances. Troisièmement, considérer la pluralité des possibles diminue également considérablement les pressions associées au processus de fermeture qui doit justifier sa représentativité, sa légitimité et son objectivité. L’opening up permet aussi de mettre en évidence les synergies et les complémentarités entre les options politiques et technologiques. Elle peut enfin servir de base pour une étape de « closing down ».

L’intérêt de combiner les stratégies d’opening up et de closing down

Comme l’ont fait remarquer plusieurs auteurs (voir Voß et al. 2006: 431), les stratégies des acteurs ne doivent pas reposer uniquement et de manière univoque sur de l’opening up ou du closing down. Trop d’opening up rendrait impossible la gouvernance puisque la prise de décision serait rendue trop complexe et, à l’inverse, trop de closing down empêcherait toute réflexivité sur les pratiques dont il faut débattre et à propos desquelles il convient de décider. Les auteurs, tout comme Stirling lui-même (2014), prônent donc différents types de combinaisons et plaident pour un équilibre entre les deux (Voß et al. 2006: 431). Parmi les combinaisons possibles, Voß et al. (2006) proposent le « sequential closing » où un seul cadrage finit par être proposé après un moment d’ouverture ou encore le « subsidiary/experimental closing » lorsque plusieurs cadres différents sont explorés, qu’il n’est pas possible de définir a priori lequel est le plus adapté et qu’il est nécessaire de les tester. Dès lors, étant donné la multiplicité des combinaisons possibles, une question stratégique centrale consiste à se demander quels sont les moments et les situations où l’« opening up » est souhaitable et quels sont ceux où, par contre, le « closing down » est à privilégier.

Deux postulats théoriques ont été présentés dans la première partie de ce chapitre. En effet, nous avons fait le choix de considérer le programme de gestion des déchets hautement radioactifs comme une expérience sociotechnique qui peut s’envisager comme une succession et une combinaison d’appraisals et de commitments mutuellement co-produits. Les principales dynamiques à l’œuvre dans leur élaboration et leur action sont l’opening up et le closing down. Ces dynamiques se combinent et se justifient différemment selon les acteurs impliqués ou concernés par le programme de gestion concernant les différents pays étudiés.

C’est l’analyse des différentes dynamiques à l’œuvre dans la formation et la combinaison des moments d’appraisals et de commitments, leur interaction et leur intégration qui constituera la deuxième partie de ce chapitre. Elle permettra de présenter une image globale et originale des trajectoires des programmes de gestion canadien, belge et français. Si nous verrons que les programmes de gestion des déchets hautement radioactifs ont fait l’objet de dynamiques distinctes dans les trois pays, la trajectoire de chacun d’eux peut se structurer de manière identique en trois grandes périodes. Une première période, celle des années 50 aux années 80, qui

aboutit au choix d’enterrer l’objet. Une seconde période, celle des années 80, qui mit en tension les pratiques adoptées par les différents gouvernements et poussa au changement du régime de pratiques. Les deux premières périodes, abondamment analysées par les chercheurs en sciences humaines et sociales (Barthe 2006; Durant and Johnson 2009; Lits 2015), seront brièvement présentées afin d’introduire la période qui constitue le cœur de notre analyse. Cette troisième période, début des années 90 se caractérise par la mise en débat du choix du dépôt géologique à travers la mise en place de nouvelles pratiques et, comme nous le verrons, elle s’est traduite différemment dans les trois pays étudiés. Dans les sections qui suivent, nous insisterons donc plus longuement sur la troisième période, là où de nombreuses données de terrain ont pu être récoltées permettant de mettre en évidence de nouveaux éléments. Compte tenu de leurs spécificités, chaque programme de gestion sera présenté de manière distincte. Des conclusions spécifiques à chaque cas seront présentées et elles seront rapportées à notre cadre analytique (appraisal/commitment,

broadening out/narrowing in, opening up/closing down).

Avant de présenter les dynamiques de gestion des trois pays, revenons d’abord très brièvement sur le contexte qui a poussé les gouvernements à un changement des pratiques adoptées jusqu’alors.

Contestations locales comme point de départ au changement de régime Les programmes de gestion à long terme des déchets hautement radioactifs en Belgique, en France et au Canada, connurent plusieurs soubresauts des années 50 aux années 80, qui menèrent progressivement les Centres de recherche d’énergie nucléaire (le SCK-CEN belge, l’EACL canadien et le CEA français), les producteurs de déchets radioactifs, et les différents gouvernements fédéraux, nationaux et provinciaux et les administrations associées à considérer le dépôt géologique comme la seule et unique solution de référence pour les déchets hautement radioactifs.

Considéré comme une voie de recherche au départ, le choix d’enterrer l’objet se renforça progressivement au fur et à mesure qu’il se concrétisa. En Belgique, le SCK-CEN procéda dès 1973 à une évaluation du sous-sol belge et, dès 1974, il effectua des forages de reconnaissance et une étude plus rigoureuse et systématique du sous-sol qui aboutirent en 1985 à la construction d’un laboratoire de recherche souterrain chargé d’étudier la faisabilité d’un dépôt en profondeur dans l’argile (ONDRAF 2002: 65). En France, le choix du stockage géologique se consolida dans

les années 80 avec le soutien et l’apparition de nouveaux acteurs comme la naissance de l’ANDRA en 1979 (Barthe 2006) dont la mission principale était d’assurer les études de faisabilité de l’enfouissement59. En mars 1987, l’ANDRA, qui travaillait donc à la mise en œuvre de la solution de référence, publia un rapport dans lequel elle avait identifié quatre sites français aux caractéristiques géologiques distinctes60 pouvant accueillir le dépôt. Les critères mobilisés par l’ANDRA furent validés à l’époque par le Ministre de l’Industrie (Barthe 2006). Au Canada, le choix du dépôt géologique fut également consolidé par plusieurs évaluations d’experts associés à l’industrie nucléaire, dont le rapport « Hare » de 1977 et le rapport de l’EACL61 qui soulignèrent, entre autres, la possibilité de sélectionner deux sites en 1983 et d’opérationnaliser le premier en 2000. Les sites visés étaient principalement situés en

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