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Traits de prononciation potentiels d’une norme parisienne

Dans le document 2 État de l art. 2.1 Norme(s) (Page 61-67)

2.3  Caractérisation phonético-phonologique des normes étudiées

2.3.2  Traits de prononciation potentiels d’une norme parisienne

Avant d’aborder les traits de prononciation du « français parisien » dont traitera le présent ouvrage, une clarification doit être faite par rapport à l’ambiguïté du statut de Paris au niveau de la prononciation. Métropole européenne en forte croissance depuis le 13ème siècle déjà, Paris a en effet une longue tradition d’immi-gration de locuteurs venant d’autres régions et d’autres pays (cf. Hansen 2017, 123) et présente par conséquent un «  véritable melting pot linguistique  » (Lyche/

Østby 2009, 205 ; mise en italique dans l’original), comme le soulignaient déjà Martinet/Walter (1973) : « C’est donc là que viennent se fondre et s’amalgamer les prononciations de toutes les régions pour former une sorte de dénominateur commun entre Paris et la province » (Martinet/Walter 1973, 17). Notons que Walter (1988 ; 1998) nomme ce melting pot le Paris-creuset, formé par les « Parisiens d’adoption », en opposition au Paris-terroir, formé pour sa part par les « Parisiens de souche » (cf. Walter 1988, 170–171 ; Walter 1998, 363 ; cf. également 2.2.1.2).

La ville de Paris est donc caractérisée par une grande diversité ethnique, cultu-relle et sociale qui se reflète dans des usages linguistiques multiples (cf. Lyche/

Østby 2009, 205). Ainsi, selon Pustka (2008), les Parisiens plus âgés différencient traditionnellement deux accents parisiens intra-muros dans leurs représentations (cf. Pustka 2008, 219) : l’accent de la « classe supérieure » du 16ème arrondissement et l’accent « parigot » des classes ouvrières des quartiers du Nord-Est, chacun de ces accents étant associé à une série de traits de prononciation prototypiques

les différenciant considérablement l’un de l’autre (une description de ces traits pourra être trouvée dans Pustka 2008, 219–236). Ces accents sont par ailleurs associés parallèlement à des représentations géographique, sociale et situation-nelle (cf. Pustka 2008, 244–245) : l’accent du 16ème arrondissement est associé au Sud-Ouest de Paris et de ses environs (Neuilly, Auteuil, Passy) (facteur géogra-phique), à la « classe supérieure » de la ville (facteur social) et à un « style snob » (facteurs situationnel), l’accent parigot aux quartiers de Belleville et Ménilmon-tant (facteur géographique), à la « classe ouvrière » (facteur social) et au registre

« vulgaire » (facteur situationnel).

Depuis plusieurs décennies cependant, la ville de Paris intra-muros est sujette à une large gentrification, c’est-à-dire à une expansion de la bourgeoisie (cf. Pinçon/

Pinçon-Charlot 2004, 55–57), de sorte que l’accent anciennement bourgeois devient actuellement l’accent parisien par excellence (cf. Lenning 1978, 7 ; Pustka 2008, 220).

Or, c’est précisément cet accent parisien qui se trouve dans les hétéro-représentations de locuteurs « provinciaux », qui l’associent à la capitale française (facteur géogra-phique) et – de manière similaire aux auto-représentations des Parisiens – à la bour-geoisie (facteur social) et à un style « snob » (facteur situationnel) (cf. Pustka 2008, 244–245). Les accents de couches sociales défavorisées sont, pour leur part, de plus en plus situés dans les banlieues parisiennes, comme le font remarquer Armstrong/

Jamin (2002) : « [. . .] the banlieue vernacular phonological system seems to have absorbed features of titi parisien » (Armstrong/Jamin 2002, 131). Selon Pustka (2008, 244), cet « accent des banlieues » est particulièrement associé au département de la Seine-Saint-Denis (93) (facteur géographique), aux jeunes issus de l’immigration (facteur social) et au registre « racaille » (facteur situationnel).

Les représentations géographiques, sociales et situationnelles des différents accents parisiens présentés ci-dessus sont résumées dans le tableau 5 aussi bien dans la perspective externe des « provinciaux » (hétéro-représentations) que dans la perspective interne des Parisiens (auto-représentations) :

Tableau 5 : Auto-représentations et hétéro-représentations de l’accent/des accents parisien(s) (en référence à Pustka 2008, 244–245).

Hétéro-représentations

Auto-représentations

Accent du 16ème Accent parigot Accent de banlieue Facteur

géographique Capitale

française Sud-Ouest de

Paris Belleville et

Ménilmontant Seine-Saint-Denis (93) Facteur

social Bourgeoisie Classe

« supérieure » Classe

« ouvrière » Enfants d’immigrés Facteur

situationnel Style « snob » Style « snob » Registre

« vulgaire » Registre « racaille »

Parallèlement à ces différents accents parisiens et aux représentations qui y sont associées, comme mentionné aux chapitres 2.2.1.1 et 2.2.1.2, la prononcia-tion des « classes supérieures » parisiennes a joué un rôle prépondérant dans la définition du bon usage qui est devenu la référence linguistique pour toute la France et la francophonie, ces représentations de la norme en tant que français parlé à Paris étant toujours d’actualité (cf. également Hansen 2017, 123). Ainsi les locuteurs parisiens intra-muros revêtent-ils un double rôle au niveau linguis-tique : selon leur « degree of social accent » (Hansen 2017, 123), ils représentent, d’une part, la norme du français et parlent, d’autre part, une variété parisienne de français.

Dans le domaine de la production, ces précisions rendent impérative une dis-tinction entre prononciation de référence et prononciation parisienne, plusieurs traits parisiens n’appartenant pas à la prononciation décrite dans les diction-naires de prononciation traditionnels (cf. Lyche 2010 ; Detey/Lyche 2016 ; Detey et al. 2017) et pouvant être perçus – dans le sens d’une définition pluricentrique de la norme (cf. 2.1.2.4) – à l’intérieur même de Paris comme plus « corrects » ou plus « neutres ». C’est de cette prononciation parisienne qu’il s’agira ci-dessous.

Le tableau 6 présente donc les voyelles dont l’appartenance à une norme de pro-nonciation parisienne devra être testée dans le présent ouvrage :

Tableau 6 : Traits de prononciation appartenant potentiellement à la norme de prononciation parisienne (en référence à Martinet 1945 ; Peretz 1977 ; Mettas 1979 ; Lerond 1980 ; Hansen 1998 ; Walter 1998 ; Pustka 2008 ; Lyche/Østby 2009 ; Hansen/Juillard 2011 ; Hansen 2017).

Traits parisiens potentiellement standards Exemples

1. Maintien de l’opposition /a/ : /ɑ/ patte /pat/ ~ pâte /pɑt/

2. Maintien de l’opposition /e/ : /ɛ/

Tendance croissante à la loi de position : [e] en syllabe finale ouverte, [ɛ] en syllabe finale fermée

épais /epɛ/ ~ épée /epe/

faites [fɛt] ~ est [e]

3. Neutralisation de l’opposition /ø/ : /œ/

Tendance croissante à la loi de position : [ø] en syllabe finale ouverte, [œ] en syllabe finale fermée (mais [ø]

devant /z/ et /v/)

jeune /ʒœn/ ~ jeûne /ʒøn/

aveux [avø] ~ peuple [pœpl]

4. Maintien de l’opposition /o/ : /ɔ/

Tendance croissante à la loi de position dans les cas hors paires minimales : [o] en syllabe finale ouverte, [ɔ] en syllabe finale fermée (mais [o] systématique avec graphies <au> et <eau>)

paume /pom/ ~ pomme /pɔm/

socialisme [sosjalism] ~ rhinocéros [ʁinoseʁɔs]

5. Neutralisation de l’opposition /ɛ̃/ : /œ̃/ brun /bʁœ̃/ ~ brin /bʁɛ̃/

6. Postériorisation en chaîne des voyelles nasales : /ɛ̃/

réalisé en [ɑ̃], /ɑ̃/ en [ɔ̃], /ɔ̃/ en [õ] bien [bjɑ̃], blanc [blɔ̃], blond [blõ]

Dans les dictionnaires de prononciation, l’opposition /a/ : /ɑ/ (p. ex. pâte /pɑt/ ~ patte /pat/, cf. tableau 6) est considérée traditionnellement comme faisant partie des parisianismes (cf. Pustka 2008, 239 ; cf. également Michaelis/Passy 1914 ; Lerond 1980). Peretz (1977) et Mettas (1979) donnent des précisions sup-plémentaires sur la valeur sociale de l’opposition. Ils notent en effet une impor-tante variation dans la distribution et la forme phonétique de ces deux voyelles à travers les couches sociales parisiennes : alors que l’opposition serait neutrali-sée chez tous les locuteurs des classes « moyennes » et « populaires » (à l’exception de certains locuteurs âgés), elle serait conservée par les locuteurs des classes

«  supérieures  ». Depuis Martinet (1945) cependant, une série d’études men-tionnent la disparition graduelle de cette opposition (cf. Walter 1998  ; Pustka 2008 ; Lyche/Østby 2009 ; Hansen/Juillard 2011 ; Hansen 2017). Soulignons ici en particulier les résultats de Lyche/Østby (2009, 214), qui ne notent, sur leurs 12 locuteurs provenant de la haute bourgeoisie parisienne, que 3 locuteurs font l’opposition, ces locuteurs étant les plus âgés du corpus et l’opposition n’étant faite qu’en lecture (liste de mots et texte) (cf. également Østby 2016). Notons que cette dernière constatation pourrait être due à l’audio-monitoring labovien (cf.

Labov 1972, 208), c’est-à-dire à la plus grande auto-surveillance présentée par ces locuteurs dans les situations plus formelles comme la lecture de mots ou d’un texte. Martinet (21974, 207), Walter (1998, 17) et Pustka (2008, 240) émettent l’hypothèse que la disparition graduelle de l’opposition pourrait être due à des effets de la migration, étant donné que les « Parisiens de province » réagiraient négativement à l’utilisation que feraient les Parisiens des /ɑ/ postérieurs et asso-cieraient ce trait au registre « vulgaire ». Ainsi, même si l’on peut observer une forte tendance à considérer l’opposition comme étant en voie de neutralisation, son statut reste à clarifier (cf. 5.1.1.1, 6.1.1), étant données les différentes études considérant le maintien de cette opposition comme un parisianisme.

Une tendance à la réduction phonémique peut également être observée dans le domaine des voyelles moyennes, c’est-à-dire dans les oppositions /e/ : /ɛ/ (p. ex.

parlé ~ parlait), /ø/ : /œ/ (p. ex. jeûne ~ jeune) et /o/ : /ɔ/ (p. ex. saute ~ sotte) (cf.

Hansen 2017, 128 ; cf. également Hansen/Juillard 2011). Selon Lyche/Østby (2009, 211–212) et Hansen (2017, 128–129), l’opposition /e/ : /ɛ/ (cf. tableau 6) est neutra-lisée quasiment systématiquement en syllabe fermée, dans laquelle la voyelle se prononce [ɛ], même si le timbre de cette voyelle peut être variable chez certains locuteurs et se rapprocher considérablement du champ phonétique de [e]. L’oppo-sition en syllabe ouverte, quant à elle, semble actuellement être une zone grise : les deux variantes et certaines paires minimales sont, certes, encore attestées par Lyche/Østby (2009, 212) et Hansen (2017, 128–129), comme, par exemple, dans été /ete/ ~ était /etɛ/ ou épée /epe/ ~ épais /epɛ/. La prononciation de la voyelle varie cependant fortement d’un locuteur à l’autre (surtout dans les lexèmes comme

piquet, aspect, cabinet), même si quelques tendances systématiques sont relevées par Lyche/Østby (2009, 212) :

– Les articles définis (p. ex. les, des, ces, mes) sont réalisés en [e].

– Les terminaisons de l’infinitif (p. ex. piquer) et du participe passé (p. ex.

piqué) sont réalisées en [e].

– Les terminaisons de l’imparfait (p. ex. piquait) et du conditionnel (p. ex.

piquerait) sont réalisées en [ɛ], bien que cette prononciation perde actuel-lement fortement de sa systématicité depuis plusieurs décennies déjà (cf.

Hansen/Juillard 2011, 327).

– La terminaison du futur est réalisée avec la voyelle [ɛ] (p. ex. piquerai) (contrairement au cas des locuteurs de Suisse romande, qui maintiennent la distinction entre le conditionnel /ɛ/ et le futur /e/, cf. 1.3.3).

– La graphie semble présenter une forte influence sur la prononciation de ces voyelles : les graphies -é, -er, -ez correspondent généralement à un [e], les gra-phies -è, -ê et -et, -ais/-ait à un [ɛ] (exception faite de la conjonction et, qui se prononce [e]).

S’ajoute à cela un changement en cours observable dans la distribution contex-tuelle de l’opposition : dans les mots présentant une prononciation très variable de la voyelle, Lyche/Østby (2009, 212) constatent « une préférence pour les réali-sations mi-fermées chez les jeunes et plus particulièrement chez les sujets fémi-nins ». Ainsi, il semble que ces locuteurs suivent de plus en plus la loi de position, la voyelle [ɛ] étant quasiment systématique dans les syllabes fermées (p. ex. infect, fête, liège, lierre, miette, muette, faites, bêtement) (cf. Hansen 2017, 129) et la voyelle [e] de plus en plus courante également dans de nombreuses syllabes ouvertes dans lesquelles la norme morphologique et graphique (cf. supra) exigeait traditionnel-lement le [ɛ] (p. ex. piquet, filet, il sait, je connais) (cf. Peretz 1977, 68). La tendance à la fermeture en [e] touche également la forme est du verbe être (cf. Hansen 2011, 315). Par ailleurs, plusieurs études évoquent également l’existence de timbres intermédiaires variables du /ɛ/ en syllabe inaccentuée fermée (p. ex. question) et ouverte (p. ex. il est là) (cf. Léon 1973, 63) ainsi qu’en syllabe finale ouverte (p. ex.

piquet) (cf. Lefebvre (1988, 79). Ainsi, alors que la neutralisation de l’opposition /e/ : /ɛ/ en syllabe fermée semble systématique, le statut de l’opposition en syllabe ouverte – particulièrement en syllabe finale ouverte – doit encore être clarifié (cf. 5.1.1.2, 6.1.2), bien que la plupart des études montrent une évolution vers l’uti-lisation de plus en plus fréquente du [e] fermé dans cette position.

En ce qui concerne l’opposition /ø/ : /œ/ (cf. tableau 6), selon Hansen (2017, 129), la loi de position semble se renforcer en particulier chez les jeunes locuteurs, la voyelle [ø] se retrouvant souvent en syllabe ouverte (p. ex. creux) et la voyelle [œ] en syllabe fermée (p. ex. meurtre, peuple). Cette tendance avait déjà été observée par Peretz

(1977), qui faisait part d’une tendance à la neutralisation des paires jeune ~ jeûne et veulent ~ veule plus forte dans les classes moyennes que dans les classes supé-rieures de Paris. Lyche/Østby (2009, 212–213) confirment, certes, que seul le [ø] est observable en syllabe ouverte et qu’en syllabe fermée, le [œ] est plus courant. Elles attestent cependant également des voyelles [ø] dans certains contextes en syllabe fermée (devant /z/, p. ex. coiffeuse, nombreuse, rigoureuse, creuse, et devant /v/, p. ex.

épreuve) ainsi que la paire minimale jeune ~ jeûne réalisée chez 11 de leurs 12 locu-teurs dans la lecture de la liste de mots du programme de recherche Phonologie du français contemporain (cf. Durand et al. 2002 ; 2009 ; Detey et al. 2016 ; 2017). Notons qu’ici aussi, cette constatation pourrait être attribuée à l’audio- monitoring (cf. Labov 1972, 208), avec plus d’auto-surveillance des informateurs dans une situation plus formelle de lecture. Finalement, au vu de ces résultats divergeant considérablement les uns des autres, la tendance au renforcement de la loi de position dans le cas de /ø/ : /œ/ et la neutralisation de cette opposition doivent encore être testés (cf. 5.1.1.3, 6.1.3).

La dernière opposition de voyelles moyennes est celle des voyelles postérieures /o/ : /ɔ/ (cf. tableau 6). Comme en français de référence, l’opposition est neutralisée systématiquement en [o] en syllabe ouverte (cf. Lyche/Østby 2009, 213). En syllabe fermée, la variante mi-ouverte [ɔ] est de loin la plus fréquente, mais le [o] est cepen-dant systématique devant /z/ (p. ex. chose, cause) et avec les graphies <ô> (p. ex.

côte, drôle) et <au> (p. ex. gauche, pauvre), ce qui correspond également à la pronon -ciation de référence (cf. Lyche/Østby 2009, 213). Par ailleurs, les principales paires minimales (p. ex. pomme ~ paume, roc ~ rauque) se maintiennent (cf. Hansen 2017, 129). Hansen (2017, 129) observe cependant que le locuteur parisien qu’elle analyse dans son article tend, non plus seulement en syllabe accentuée mais également en syllabe inaccentuée, à respecter la loi de position dans tous les cas dans lesquels le /O/ utilisé correspond également à un <o> graphique (jaune, avec graphie <au> sera prononcé systématiquement [ʒon] et non [ʒɔn], cf. supra) et ne se trouve pas dans la syllabe finale d’un mot appartenant à une paire minimale (p. ex. [o] dans socialisme et explosion, [ɔ] dans rhinocéros, mais maintien de paume [pom] ~ pomme [pɔm]).

Ceci confirme une étude longitudinale de plus grande envergure de Hansen/Juil-lard, dans laquelle ces dernières ont pu montrer qu’aujourd’hui, en français pari-sien, le « /O/ se réalise beaucoup plus souvent de façon fermée ou intermédiaire [. . .], soit dans 97,8% des cas au total » (2011, 328), y compris en syllabe ouverte inaccentuée. Ces observations vont donc également en direction de la réduction phonémique observée dans le cas des autres voyelles moyennes, mais cette réduc-tion resterait tout de même, ici aussi, à clarifier.

Quant à l’opposition des voyelles nasales /ɛ̃/ : /œ̃/ (p. ex. brin /ɛ̃/ ~ brun /œ̃/, cf. tableau 6), Hansen (1998) notait encore une distinction de timbre des deux voyelles, même si elle observait déjà une tendance à l’antériorisation du timbre du phonème /œ̃/ s’approchant graduellement de /ɛ̃/. Une étude plus récente de

Lyche/Østby (2009, 214–215) actualise en partie ces observations, les locuteurs de la haute bourgeoisie parisienne tendant à fusionner le contraste en faveur du /ɛ̃/, même si les auteures mentionnent quelques rares exemples de réalisations [œ̃] dans un, brun et commun. Pustka (2008, 240) confirme la disparition de l’opposition et explique que le cas de /ɛ̃/ : /œ̃/ présente une expansion contraire à celui de /a/ : /ɑ/

(dans lequel la prononciation du Paris-creuset a supplanté celle du Paris- terroir), la prononciation parisienne fusionnant l’opposition /ɛ̃/ : /œ̃/ en faveur de /ɛ̃/ sem-blant se répandre dans l’ensemble de la France septentrionale à partir de  Paris (cf. également Lerond 1980 ; Walter 1998). Hansen (2017, 127), dans une étude plus récente que celle présentée plus haut (cf. Hansen 1998), observe également que /ɛ̃/ et /œ̃/ ne sont plus distingués au niveau du timbre, certains /œ̃/ étant écartés ([ɛ̃]), d’autres présentant un timbre se situant entre le [ɛ̃] et le [œ̃], et ce, aussi bien en conversation qu’en lecture (texte et liste de mots) (cf. également Hansen 2001 ; 2012).

Mentionnons ce faisant une autre évolution actuelle des voyelles nasales du français parisien observée par Hansen (2017, 127) : les voyelles nasales auraient actuellement tendance à la postériorisation dans le cadre d’un changement en chaîne (cf. tableau 6) : les /ɛ̃/ tendraient à être prononcés en [ɑ̃], les /ɑ̃/ en [ɔ̃] et les /ɔ̃/ en [õ] (cf. également Hansen 1998 ; Delvaux 2003). Pustka (2008, 240) men-tionne par ailleurs qu’au niveau des représentations, les prononciations comme [bjɑ̃] pour bien seraient perçues à Paris même comme provenant du 16ème arron-dissement, alors qu’en province, elles seraient perçues comme étant parisiennes et dans les départements d’outre-mer comme étant simplement hexagonales.

Dans le document 2 État de l art. 2.1 Norme(s) (Page 61-67)

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