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2. Le système immunitaire en conditions pathologiques

2.2 Les syndromes auto-inflammatoires, aussi appelés cytokinopathies

2.2.3 Les traitements anti-inflammatoires

Il existe quatre classes de traitements anti-inflammatoires : les anti-inflammatoires non stéroïdiens (Non-Steroidal Anti-Inflammatory Drugs – NSAID), les anti- inflammatoires stéroïdiens (Steroidal Anti-Inflammatory Drugs – SAID), les DMARD (Disease-Modifying Antirheumatic Drugs) synthétiques et les DMARD biologiques, également appelés biothérapies ou agents biologiques. Bien que tous ces traitements partagent des caractéristiques communes, incluant leurs propriétés antalgiques, antipyrétiques et anti-inflammatoires, leurs modes d’action diffèrent.112

2.2.3.1 Les anti-inflammatoires non stéroïdiens

Les NSAID comme l’aspirine et le naprosyn agissent en bloquant l’action des cyclo-oxygénases, des enzymes qui transforment l’acide arachidonique, un constituant des phospholipides qui forment les membranes cellulaires, en prostaglandines et en thromboxanes, des médiateurs lipidiques aux fonctions pro- inflammatoires qui sont entre autres responsables des symptômes cliniques de l’inflammation, i.e. la rougeur, l’oedème, la sensation de chaleur et la douleur.113

2.2.3.2 Les anti-inflammatoires stéroïdiens

Les SAID comme la cortisone et la prednisone sont des médicaments dérivés du cortisol, une hormone stéroïdienne produite par les glandes surrénales. La plupart de leurs effets anti-inflammatoires découlent de l’inhibition de la phospholipase A2, l’enzyme qui catalyse la libération de l’acide arachidonique, ce qui mène aussi à l’inhibition de la synthèse des prostaglandines et des thromboxanes, mais aussi des leucotriènes, d’autres médiateurs lipidiques pro-inflammatoires importants.114

2.2.3.3 Les DMARD synthétiques et les biothérapies

À la différence des NSAID et des SAID qui sont symptomatiques et non curatifs, i.e. qui agissent sur les symptômes, les DMARD permettent de ralentir la progression de la maladie en s’attaquant à des composantes spécifiques des mécanismes physiopathologiques à l’origine des affections inflammatoires, sans toutefois en traiter la cause.115 Parmi les nombreux DMARD synthétiques existants

on retrouve le méthotrexate, la colchicine et l’hydroxychloroquine. Le méthotrexate est un médicament cytotoxique anti-mitotique qui inhibe, entre autres, la dihydrofolate réductase, une enzyme clé dans le métabolisme de l'acide folique et la synthèse des purines, des métabolites essentiels à la prolifération cellulaire.116 L’hydroxychloroquine est un anti-paludique qui inhibe l’activation et la différenciation des lymphocytes T en interférant avec la présentation d’antigènes par les CPA.117 Finalement, la colchicine est un alcaloïde tricyclique extrait de plantes qui a la capacité de lier la β-tubuline des microtubules et d’inhiber la

polymérisation de ces derniers, perturbant ainsi plusieurs fonctions cellulaires, incluant la phagocytose, la chimiotaxie et la dégranulation.118

2.2.3.3.1 Les biothérapies

Les biothérapies sont essentiellement composées de traitements anti-cytokines. Ils incluent les anticorps et les protéines recombinantes qui neutralisent les cytokines pro-inflammatoires circulantes ou qui bloquent leurs récepteurs membranaires, et les récepteurs leurres solubles qui séquestrent les cytokines pro-inflammatoires. Des taux élevés de TNF ont été associés à plusieurs maladies rhumatismales, incluant les syndromes auto-inflammatoires TRAPS, Blau et PAPA, ainsi que la RA, la maladie de Crohn et l’arthrite psoriasique.22,119 Plusieurs biothérapies anti- TNF ont donc été développées dans les dernières années; l’étanercept, l’infliximab et l’adalimumab en sont des bons exemples. Le mode d’action de ces trois médicaments repose sur la neutralisation du TNF. L’étanercept est une protéine recombinante, alors que l’infliximab et l’adalimumab sont des anticorps monoclonaux chimériques et humanisés, respectivement. Un anticorps monoclonal est issu d’une seule et même souche de lymphocyte et est spécifique à un seul antigène donné. Un anticorps monoclonal chimérique est un anticorps génétiquement modifié qui est constitué de régions dérivées de la souris et de régions dérivées de l’humain, alors qu’un anticorps monoclonal humanisé n’est constitué que des régions dérivées de l’humain.120,121

Dans d’autres maladies, incluant les syndromes TRAPS, NOMID, HIDS et DIRA, ainsi que la goutte et le diabète de type II, ce sont des taux élevés d’IL-1 qui sont observés. Les patients souffrant de ces pathologies pourront donc bénéficier des biothérapies anti-IL-1. Parmi celles-ci on retrouve l’anakinra, un antagoniste de l’IL-1R qui inhibe à la fois l’activité biologique de l’IL-1α et de l’IL-1β, le rilonacept, une protéine de fusion dirigée contre l’IL-1α et l’IL-1β, ainsi que le canakinumab, un anticorps monoclonal humanisé qui neutralise spécifiquement l’IL-1β.122-127

Comme l’IL-6 est une autre cytokine pro-inflammatoire importante à cause de ses effets pléiotropiques sur le système immunitaire, des traitements anti-IL-6 ont également été développés. Le tocilizumab, un anticorps monoclonal humanisé dirigé contre l’IL-6R, et le siltuximab, un anticorps monoclonal chimérique neutralisant l’IL-6, en sont des exemples. Le tocilizumab s’est d’ailleurs révélé efficace pour traiter les patients souffrant de la RA chez qui les anti-TNF ne fonctionnaient pas.128 Il a aussi été approuvé pour l’arthrite juvénile idiopathique systémique (Systemic Juvenile Idiopathic Arthritis – SJIA), une forme d'arthrite inflammatoire chronique touchant les enfants.129 Le siltuximab, quant à lui, aurait des effets bénéfiques chez les patients souffrant du cancer de la prostate, des ovaires et des poumons.130-132

Il existe aussi des biothérapies capables d’inhiber l’activité biologique de deux cytokines à la fois. C’est entre autres le cas du ruxolitinib, un anti-IFN/IL-6, et de l’ustekinumab, un anti-IL-12/IL-23. Le tofacitinib, un inhibiteur enzymatique sélectif des JAK kinases, permet également de cibler les voies de signalisation de l’IFN et de l’IL-6.133 Comme les concentrations d’IFN et d’IL-6 sont très élevées chez les patients atteints du syndrome CANDLE, des essais cliniques avec ces traitements sont actuellement en cours.105,134 Le ruxolitinib, quant à lui, est un inhibiteur sélectif

des JAK kinases utilisé pour traiter les patients souffrant de myélofibrose, un rare type de cancer du sang.135 Finalement, l’ustekinumab est un anticorps monoclonal humanisé qui neutralise l’IL-12 et l’IL-23 en se liant à leur sous-unité commune, l’IL12p40. Il est bénéfique pour traiter le psoriasis et l’arthrite psoriasique.136

En somme, ces nouvelles thérapies, utilisées seules ou en combinaison avec d’autres traitements anti-inflammatoires, permettent de prévenir la dégradation anatomique et fonctionnelle de plusieurs tissus, organes et systèmes tels que les articulations, la peau et le système digestif. Grâce à leur succès et à la meilleure compréhension des mécanismes physiopathologiques à l’origine de ces maladies, plusieurs biothérapies, incluant des anti-IL-18, IL-12, IL-15 et IL-27 sont en cours de développement, fournissant de plus en plus d’alternatives aux patients.137

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