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Le traitement de l’hyper-Lp(a)

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3. Interventions thérapeutiques et réduction de la Lp(a)

3.4. Le traitement de l’hyper-Lp(a)

3.4.1. L’aphérèse

L'élimination extracorporelle par aphérèse est le traitement autorisé le plus efficace pour abaisser drastiquement les niveaux de Lp(a) (Vogt, 2017). Il existe plusieurs types d’aphérèse. Le premier type consiste à capturer les lipoprotéines athérogènes grâce à des colonnes chargées en anticorps anti-apoB100 ou anti-apo(a). Le second est basé sur la filtration des lipoprotéines en fonction de leur taille, sur des membranes microporeuses. Le troisième repose sur le principe d’affinité non immunologique des lipoprotéines à apoB100, soit en les adsorbant sur un gel de sulfate de dextran-cellulose ou dans une cartouche remplie de billes poreuses de polyacrylamide, soit en les précipitant par l’héparine en milieu acide (Pokrovsky et al., 2016). Toutes ces techniques entraînent une réduction de la Lp(a) en moyenne d’au moins 50%, la plus efficace étant l’aphérèse avec des anticorps anti-apo(a), permettant une réduction de Lp(a)

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jusqu’à 88% (Pokrovsky et al., 2016). Dans une étude prospective, 120 patients atteints de coronaropathies et présentant des niveaux de Lp(a) supérieurs à 200 nmol/L (~80 mg/dL) ont été traités par aphérèse en plus d’un traitement hypolipémiant maximal pendant cinq ans. Les taux médians de Lp(a) ont diminué de manière significative de 400 nmol/L (~160 mg/dL) à 107 nmol/L (~43 mg/dL) équivalant à une réduction moyenne de 60 à 70%, après aphérèse. En plus de la réduction de la Lp(a), l’aphérèse a permis une diminution par dix du taux annuel d’événements cardiovasculaires, pendant cinq ans (Jaeger et al., 2009). Dans une autre étude observationnelle portant sur 170 patients avec des taux de Lp(a) supérieurs à 100 mg/dL (~250 nmol/L), l’aphérèse a entraîné une réduction significative de Lp(a) de 71 à 110 mg/dL, ainsi qu’une réduction du taux de nouveaux événements cardiovasculaires par trois à l’issue de la première année et par dix à l’issue de la deuxième année (Leebmann et al., 2013). Outre la diminution des lipoprotéines athérogènes, l’aphérèse entraîne aussi la réduction des marqueurs de l'inflammation et l'amélioration de la fluidité sanguine (Moriarty, 2015). En effet, l'aphérèse permet d’éliminer les phospholipides oxydés (Arai et al., 2012) et la phospholipase A2

(Moriarty and Gibson, 2005), associés à la Lp(a), ainsi qu’à d’autres lipoprotéines à apoB100.

L’un des inconvénients notables de l'aphérèse réside dans son inefficacité à réduire durablement la Lp(a). Après une séance d’aphérèse, la Lp(a) retrouve rapidement ses concentrations plasmatiques basales entre 7 et 14 jours suivant la procédure (Ma et al., 2019b; Tselmin et al., 2017), nécessitant ainsi des séances hebdomadaires répétées, invasives et coûteuses avec un accès souvent limité (Kelly and Hemphill, 2017).

3.4.2. AKCEA-APO(a)-LRx

AKCEA-APO(a)-LRx ou APO(a)-LRx est un oligonucléotide antisens chimiquement modifié de

deuxième génération, conçu pour réduire la synthèse d'apo(a) dans le foie (Tsimikas, 2017). En 2015, lors d’une étude de phase I, 47 individus sains de 18 à 65 ans avec des niveaux de Lp(a) de 25 nmol/L (10 mg/dL) ou plus, ont été randomisés pour recevoir soit le placebo, soit une dose unique, soit plusieurs doses consécutives sur 22 jours d’APO(a)Rx. Alors que des injections

uniques d'APO(a)Rx (50, 100, 200 ou 400 mg) n'ont pas significativement diminué les

concentrations de Lp(a) après 30 jours de suivi, les six doses consécutives d'APO(a)Rx (100,

200, 300 mg) ont entraîné des diminutions moyennes de Lp(a) de 40%, 59% et 78% pour les patients ayant reçu 100, 200 et 300 mg d’ASO par rapport au groupe placebo. Les niveaux de phospholipides oxydés liés à l’apo(a) et à l’apoB100 étaient également significativement plus

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bas à l’issue de la cinquième semaine, avec une diminution maximale de 60% pour les patients ayant reçu six doses consécutives d'APO(a)Rx à 300 mg (Tsimikas et al., 2015).

En 2016, lors d’un essai clinique de phase II, 64 patients avec des niveaux élevés de Lp(a) ont reçu une injection hebdomadaire de 100, 200, ou 300 mg d'APO(a)Rx pendant quatre semaines

ou des injections hebdomadaires de placebo pendant douze semaines (Viney et al., 2016). Les patients ayant reçu des injections d'APO(a)Rx ont présenté une réduction de Lp(a) comprise

entre 67% et 72% par rapport aux patients ayant reçu le placebo. Une diminution significative des phospholipides oxydés et du taux de migration des monocytes a aussi été observée après traitement par APO(a)Rx, confirmant l’influence de la Lp(a) dans les processus inflammatoires

favorisant l’athérosclérose (Viney et al., 2016). En 2020, une nouvelle étude clinique de phase II a exploré l’effet d’un traitement par l’IONIS-APO(a)-LRx sur les niveaux de Lp(a) (Tsimikas

et al., 2020). À la différence d'APO(a)Rx, AKCEA-APO(a)-LRx contient en plus un groupement

GalNAc qui lui permet d’être absorbé sélectivement par les hépatocytes. Cet essai clinique réalisé sur 286 patients atteints de maladies cardiovasculaires et présentant des taux de Lp(a) supérieurs à 60 mg/dL (150 nmol/L), a démontré qu’une injection hebdomadaire de seulement 20 mg d’AKCEA-APO(a)-LRx induisait une réduction des niveaux de Lp(a) de 80%, de ses

phospholipides oxydés de 70% et de LDL cholestérol de 20% [corrigés avec la valeur de cholestérol de Lp(a)] (Figure 37) (Tsimikas et al., 2020).

Figure 37 – Réduction relative de Lp(a) par différentes doses d’AKCEA-APO(a)-LRx au cours

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De plus, la réduction de la Lp(a) induite par AKCEA-APO(a)-LRx réduit également l'état pro-

inflammatoire des monocytes circulants chez les patients présentant des concentrations élevées de Lp(a), suggérant un effet probablement bénéfique sur le risque athéromateux chez ces patients (Stiekema et al., 2020). Toutefois, l’impact d’une telle réduction de Lp(a) sur le risque cardiovasculaire n’a pas encore été mesuré au niveau clinique, mais ce traitement par ASO semble très prometteur pour traiter de manière efficace les patients à haut risque cardiovasculaire et atteints d’hyper-Lp(a). La Figure 38 résume l’impact des différents traitements actuellement disponibles, sur la réduction de Lp(a).

Figure 38 – Réduction relative de Lp(a) par différentes thérapies (traduit de Gencer and Mach, 2020).

En attendant les résultats des futurs essais cliniques sur AKCEA-APO(a)-LRx, les cliniciens

n’ont pas d’autres alternatives que de traiter les patients atteints d’hyper-Lp(a) par aphérèse de manière hebdomadaire, ce qui est très contraignant pour les sujets concernés.

De plus, la Lp(a) et le risque cardiovasculaire associé restent très méconnus des professionnels de santé, en particulier en France où très peu de laboratoires sont en mesure de correctement la doser. Les particularités de la Lp(a) compliquent davantage la recherche puisque ses mesures sont souvent biaisées par la taille de l’apo(a) qui ne peut être déterminée que par certaines techniques biochimiques ou génétiques relativement complexes à mettre en œuvre.

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