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Toxicité à court-terme des émissions des moteurs diesel

II. Toxicité globale des émissions diesel, revue épidémiologique

2. Toxicité à court-terme des émissions des moteurs diesel

La technologie diesel a commencé à se répandre à la fin des années 1950, ce qui a entraîné de nombreux auteurs à se pencher sur la toxicité des émissions de ces moteurs. Les particules ont principalement été étudiées au regard de leur capacité à pénétrer profondément les poumons.

2.1 Gêne liée aux odeurs

Des nausées et une gêne liées aux émissions diesel ont été décrites (254–256).

2.2 Irritation

L’exposition contrôlée de volontaires à un aérosol dilué d’émissions diesel sur une dizaine de minutes conduit à une sévère irritation oculaire (concentrations moyennes de 4,2 ppm de NO2

et 1 ppm de SO2) (257). Il faut noter qu’aujourd’hui cet effet serait principalement lié dioxyde

d’azote. En effet, les oxydes de soufre sont de moins en moins présents dans les échappements diesel de par ladésulfuration imposée des carburants, du moins en ce qui concerne les véhicules terrestres : maximum 10 ppm de soufre pour les gazoles routiers et non routiers (Directive 2009/30/CE) (258). En revanche le fioul maritime reste problématique (3,5% m/m actuellement, puis 0,5% en 2020) (259).

D’autres travaux ont pu montrer qu’au cours du poste de travail, les sujets pouvaient présenter des symptômes d’irritation oculaire (larmoiement, picotement, œil rouge), alors que les concentrations en NOX étaient inférieures aux Valeurs Limites d’Exposition Professionnelles

(VLEP) de 0,3 ppm de NO2 (254,260). Plus sporadiquement, des troubles respiratoires

(irritation nasopharyngée, dyspnée, toux, expectorations) ont également été relevés (254,261). Globalement, ces symptômes rentrent dans l’ordre dans les jours qui suivent l’arrêt de l’exposition. Ils sont attribuables aux divers composés irritants en phase gazeuse de

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l’échappement diesel (oxydes de soufre et d’azote, aldéhydes, etc.) mais les particules y contribuent aussi (42).

2.3 Troubles fonctionnels respiratoires

Dans la majorité des études épidémiologiques sur les expositions professionnelles, il n’y a pas de description de modifications fonctionnelles respiratoires significatives pendant le poste de travail, pour les mineurs (262), les garagistes d’atelier de maintenance des bus (254) et les dockers (263).

Cependant, une autre étude concernant des dockers (264) montre une diminution faible mais statistiquement significative du volume expiratoire maximal une seconde (VEMS) et de la capacité vitale forcée (CVF) au cours d’une journée de travail. L’exposition moyenne était de 0,5 ppm de NO (soit 0,6 mg/m3) et de 0,27 ppm de NO2 (soit 0,54 mg/m3) c’est-à-dire

relativement similaire voire inférieure à celles relevées dans les études ci-dessus qui ne montraient pas de lien significatif. Cette atteinte était réversible dans les 3 jours après l’arrêt de l’exposition.

On peut ajouter qu’une atteinte fonctionnelle respiratoire (aigüe ou subaigüe) a rarement été décrite pour une exposition aux émissions diesel avec des concentrations en NO2 inférieures à

5 ppm, même en présence des signes d’irritation oculaire (265).

D’autres études, cette fois chez des volontaires sains, n’ont pas non plus permis d’établir un lien entre l’exposition à différentes concentrations d’aérosols diesel et une diminution du VEMS ou de la CVF, elles sont représentées dans Tableau 2-3.

Tableau 2-3 : études d’exposition respiratoire à des aérosols dilués d’émissions diesel chez le volontaire sain

Publication Concentrations dans l’aérosol diesel Durée

PM10 NO NO2

(208) 300 µg/m3 4,5 ppm 1,6 ppm 1h

(266) 200 µg/m3 - - 2h

(267)* 108 µg/m3 0,6 ppm 0,2 ppm 2h

* Une augmentation significative (+ 4,1%) de la résistance des voies aériennes a néanmoins été relevée.

Si les paramètres fonctionnels respiratoires sont peu impactés lors d’une exposition aigüe aux émissions diesel, on remarque tout de même que les nombreux irritants présents dans l’aérosol diesel (oxydes d’azote et de soufre, aldéhydes, etc.) peuvent engendrer un syndrome d’irritation aigue bronchique plusieurs semaines après l’exposition. Cet effet a été rapporté par Newman (268), relatant des émissions accidentelles massives auxquelles ont été exposés de façon aigüe ou subaigüe des conducteurs de train.

Chez l’asthmatique, des inhalations d’aérosols à des concentrations similaires en PM10, NO et

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modifiés, cependant il a été noté une augmentation statistiquement significative des résistances des voies aériennes pour les deux études et une hyperréactivité bronchique (269).

Une autre étude a été réalisée à Londres avec 60 adultes asthmatiques qui ont marché pendant 2h dans Oxford Street où seuls les bus et les taxis peuvent circuler (dieselisation quasi-totale). Trois semaines plus tard, ces mêmes sujets ont été invités à se promener dans Hyde Park (situé à distance du trafic). Les PM2,5, les particules ultrafines (PUF), le carbone élémentaire et le NO2

étaient significativement plus élevés dans Oxford Street que dans Hyde Park (5 fois plus de carbone élémentaire et 3 fois plus de PUF). Dans les deux cas, une diminution du VEMS et de la CVF persistait plusieurs heures après l’exposition. Cette diminution des paramètres fonctionnels respiratoires était significativement plus forte dans Oxford Street (jusqu’à -6,1% de VEMS et -5,4% de CVF) que de dans Hyde Park (respectivement -1,9% et -1,6%). Les modifications du VEMS étaient, de plus, reliées à l’exposition aux PUF et au carbone élémentaire (270).

Un grand nombre d’études en population générale a établi un lien entre l’exposition à la pollution atmosphérique à court-terme et l’aggravation de l’asthme, naturellement la part imputable aux émissions diesel est difficile à définir. De la même façon, lors des pics de pollution, on note une augmentation des hospitalisations/consultations aux urgences/visites à domicile pour asthme, une consommation plus importante des traitements antiasthmatiques ainsi qu’une altération de la fonction ventilatoire (271).

2.4 Intoxication par le monoxyde de carbone

En espace confiné, par exemple lors de travaux en tunnel, le principal risque est celui d’une intoxication par le monoxyde de carbone (CO) qui se manifeste par des céphalées, des nausées, des vertiges, des troubles de la conscience et une élévation de la carboxyhémoglobinémie. Le CO peut également être responsable d’accidents anoxiques cérébraux ou myocardiques par hypoxémie (42).

2.5 Effets cardiovasculaires

Dans la population générale, plusieurs études épidémiologiques font ressortir un lien entre l’exposition à la pollution atmosphérique (notamment les particules fines) et la morbi-mortalité cardiovasculaire à court terme. Ces dix dernières années, des études expérimentales ont également tenté d’établir le rôle spécifique des émissions diesel pour ces effets.

Pour explorer les hypothèses mécanistiques, plusieurs études expérimentales ont été réalisées chez l’animal avec des inhalations de concentrations très élevées d’aérosol diesel (jusqu’à 5 mg/m3). La limite de ces travaux reste l’impossibilité de transposer les résultats au système cardiovasculaire humain, et ce pour les concentrations moyennes de l’aérosol diesel rencontrées dans les situations de pollution environnementale ou d’exposition professionnelle (42).

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3. Toxicité liée aux expositions répétées aux émissions des