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CHAPITRE 2 : MÉTHODES DE DÉTECTION ET D’ÉVALUATION DE

2.4 Détermination du coefficient d’orientation par méthode non destructive

2.4.3 Tomographie par rayons X

Les rayons X, découverts en 1895 par Wilhelm Röntgen, ont tout d’abord trouvé leur application dans le domaine médical. Ce n’est qu’en 1949 que Mullins et Pearson ont pour la première fois utilisé cette méthode pour ausculter des pièces en béton. L’utilisation des rayons X, bien que très développée dans l’industrie aéronautique pour le contrôle de pièces de petite taille, peine à se faire une place dans le domaine du génie civil. Son utilisation se limite aux laboratoires de recherche. La tomographie par rayons X a ainsi permis d’observer l’existence de cavité dans le béton, la présence de coulis d’injection dans les conduits de précontrainte, la position des aciers passifs et leur diamètre, les hétérogénéités et les fissures dans le béton, ou encore les défauts de soudure dans les assemblages métalliques(Mix, 2005).

Le rayonnement X, tout comme la lumière visible ou le rayonnement gamma(γ), est un rayonnement électromagnétique (Figure 2-25). Il est caractérisé par un champ électromagnétique sinusoïdal qui se propage à la vitesse de la lumière.

Figure 2-25 : Domaines du spectre électromagnétique en fonction de la longueur d'onde, de la fréquence ou de l'énergie des photons(Lours, 2009).

Les principales caractéristiques de ce rayonnement définies par l’équation (2-10) sont : - sa fréquence ν exprimée en Hertz;

- sa longueur d'onde λ exprimée en mètres ou en Amgströms (1Å = 10-10 m); - son énergie E exprimée en électron-Volts (1 eV = 1,6.10-19 J);

𝐸 =ℎ𝑐

𝜆 = ℎ𝜐 (2-10)

avec - h est la constante de Planck h = 6,626 x 10-34 J.s;

- c la célérité de la lumière dans le vide c = 3 x 108 m.s-1.

On distingue deux types de radiographie : la radiographie par rayons X et par rayons gamma. Cette dernière est la plus utilisée, car les rayons gamma sont générés par un radio-isotope spécialement conçu pour pénétrer le béton (Hassani et al. 2004). Le principe de la méthode repose sur la différence d’absorption entre les fibres métalliques et la matrice. La matrice de béton, ayant une densité environ 3,5 fois supérieure aux fibres métalliques, absorbe une plus grande partie du rayonnement. En effet, quand un faisceau de rayons X entre en collision avec de la matière, différents types d'interaction apparaissent en plus d’un dégagement de chaleur (Lours, 2009):

- les rayons sont transmis sans changer de directions; - Les rayons sont transmis en changeant de direction;

- Les rayons sont absorbés par les atomes. Sous l'action du rayonnement incident, un électron d'un atome de l'échantillon peut être éjecté de la couche électronique qu'il occupait, c'est l'effet photoélectrique. Ce photoélectron peut être remplacé par un électron d'une couche supérieure. Ce saut électronique s'accompagne d'un rayonnement X appelé rayonnement de fluorescence.

La dernière interaction est celle exploitée. La diminution de l’intensité des rayons dépend de la qualité du faisceau, de la densité du matériau et de son épaisseur. La relation entre l’intensité du photon incident et du photon transmis est la suivante :

𝐼 = 𝐼0exp (−𝜇𝑥) (2-11)

Avec I : l’intensité du photon transmis; I0 : l’intensité du photon incident;

µ: coefficient atténuation du matériau; x : l’épaisseur de l’objet ausculté.

Le dispositif de mesure classique par radiographie (Figure 2-26b) est composé d’un tube à rayon X, d’un diaphragme qui permet de limiter l’exposition du milieu environnant aux radiations, d’un filtre qui conserve uniquement les longueurs d’onde pour interagir avec le spécimen, d’un écran d’intensification, d’un film correspondant à l’image radio, et d’un écran de plomb pour absorber les radiations résiduelles. Pour le système de radiométrie, le film est remplacé par un détecteur. Le film ou le détecteur est conçu avec un matériau sensible à l’intensité des photons incidents.

a) b)

Figure 2-26 : Système a) radiographique à rayons X(Mix, 2005)et b) radiométrique par rayons gamma(Mitchell, 2004)

Pour réaliser une radiographie ou une radiométrie dans les conditions optimales et ainsi accroitre de façon significative la qualité des images en sortie, Mix (2005) répertorie cinq grandes règles :

- Le faisceau source doit être aussi petit que possible, idéalement il avoir l’apparence d’un point;

- La source des rayons X doit être éloignée de l’échantillon tout faisant en sorte que la capacité de pénétration des rayons soit suffisante;

- La distance film – spécimen doit être la plus faible possible;

- Le film doit être parallèle au spécimen.

Lataste (2009) et Provost (1991) ont utilisé la radiographie pour étudier l’orientation et la ségrégation des fibres dans des échantillons de faibles épaisseurs (15 et 50 mm). La recherche allemande est de son côté allée plus loin en reconstituant des éléments complets en BRF tel qu’illustré à la Figure 2-27 (Weidemann et al., 2008; Krause et al., 2010).

Figure 2-27 : Tomographie à rayons X a) Éprouvette en BRF, b) reconstitution 3D à partir de radiographies, c) image filtrée (Krause et al. , 2010)

Pour arriver à reconstituer de telles éprouvettes en trois dimensions, de nombreuses mesures de radiométrie sont nécessaires. Par exemple, pour reconstituer en 3D un cube de 0,087m3,Weidemann et al.(2008) ont dû réaliser 900 radios avec chacune un angle d’attaque des rayons différents, ce qui lui a pris une trentaine de minutes. À l’heure actuelle, la majeure partie des publications sur cette technique traite des algorithmes de détections et de caractérisation des fibres (Redon et al., 1998 et 1999; Robb et al., 2007;Axelsson et al.,2008). Cette méthode permettrait de déterminer l’orientation et la distribution des fibres, la présence de ségrégation ou de défaut dans la matrice, et ce dans l’ensemble d’une structure en béton fibré. De plus, contrairement à la méthode de résistivité, les barres d’armatures ne posent aucun problème et l’inspection de section de 500 mm de profondeur est parfaitement réalisable.

L’utilisation de cette technique à grande échelle dans des usines de préfabrication reste mitigée. D’une part, Hassani et al. (2004) assurent que cette possibilité est parfaitement envisageable. D’autre part Reinhardt et al.(2001) rappellent que pour simplement radiographier (sans

reconstruction 3D) une poutre à échelle réelle, plus de 2 heures sont parfois nécessaires et des distances de sécurité pouvant avoisiner les 50 mètres sont à prévoir.

Comme le rappelle Mitchell, pour tout appareil contenant une source de matière radioactive, une licence de détention et d’utilisation délivrée par les autorités gouvernementales est obligatoire. Cette licence permet de garantir qu’aucun membre du personnel ne sera exposé de façon inappropriée à des radiations, et qu’un programme de prévention a été mis en place. Ce programme de prévention doit inclure une liste des responsables et des utilisateurs du système ainsi que les formations qu’ils ont suivies, la description des sources radioactives utilisées et des locaux accueillants ces dernières. En effet, il est très important de contrôler l’exposition du personnel aux radiations, car elles sont très nocives pour la santé. À titre indicatif, au Canada la réglementation fixe la dose maximale admissible par personne de radiation ionisante à 50 mSv par an jusqu’à occurrence de 100 mSv tous les 5 ans.

La tomographie par rayons X apparait comme une méthode possédant un fort potentiel. Une fois les algorithmes de détection des fibres opérationnels et optimisés, cette méthode sera complète, car elle permettra aussi bien de repérer des zones de ségrégation, de déterminer la distribution des fibres, de repérer les défauts dans la matrice, et de calculer l’orientation de chacune de fibres. Cependant, elle se heurte à son caractère dangereux qui peut effrayer bon nombre d’industriel et de membre du personnel. L’acquisition du matériel, la création de lieu dédié, la formation du personnel sont des investissements financiers conséquents et nécessaires, mais qui peuvent à long terme apporter un véritable avantage pour le contrôle qualité et le développement de méthode de coulée.