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CHAPITRE 4 : INFLUENCE DE L’ORIENTATION DES FIBRES SUR

4.2 Fabrication des spécimens

4.2.2 Choix de la méthode de coulée

La mise en œuvre des bétons fibrés joue un rôle important sur l’orientation définitive des fibres dans des éléments structuraux. Certaines techniques de mise en œuvre sont facilement applicables pour obtenir un angle de 0 degré des fibres par rapport à l’axe longitudinale du spécimen. Les techniques suivantes ont déjà été utilisées pour favoriser l’orientation des fibres :

- Utilisation de séparateurs espacés d’une demi-longueur de fibres pour guider l’écoulement du béton (Hannant et al., 1974);

- Découpe dans une dalle de 40 mm d’épaisseur favorisant une orientation 2D (Oesterlee, 2010);

- Utilisation d’un champ magnétique de forte intensité pour orienter les fibres (Schaal & Durieux, 2009);

- Techniques couplées utilisant les 2 premières techniques (Behloul, 1996).

De par la nature des coffrages en acier des spécimens de traction disponibles au laboratoire, la solution d’une orientation par champ magnétique a été écartée. Divers essais ont alors été réalisés pour orienter les fibres. Pour obtenir une orientation préférentielle et fortement défavorable des fibres, une coulée en couches successives donne des résultats satisfaisants et permet ainsi de s’affranchir de la présence de séparateurs. Pour des angles intermédiaires, la présence de guides de coulée ou de séparateurs devient nécessaire. L’utilisation de séparateurs espacés à lf/2

(Hannant et al., 1974), est difficilement applicable pour le BFUP compte tenu de la petite longueur des fibres. Dans une telle configuration, l’épaisseur totale des séparateurs représenteraient plus de 20% de la section totale du spécimen. Un espace inter-séparateurs de deux centimètres a donc été testé (Figure 4-6a). Afin d’éviter tout phénomène de goulot d’étranglement pouvant entrainer une accumulation de fibres, la distance entre plaquettes a été conservées constantes sur « tout le parcours » d’écoulement. De plus, pour augmenter la vitesse du fluide, un système de bascule utilisant une tige de ¾ po de diamètre placée sous le moule a été utilisé (Figure 4-6b). L’angle ainsi formé entre le moule et l’horizontale avoisinait 3,5 degrés. Le béton a été inséré dans la partie surélevée du coffrage. Une fois la première moitié remplie, le moule a été basculé pour remplir la seconde. Une fois l’arase effectuée, le spécimen a été remis à niveau.

a) b)

Figure 4-6: Coffrage des os pour favoriser l’orientation a) séparateurs, b) système de bascule

Il est à noter que la distance entre les séparateurs ne permettait pas d’obtenir une orientation favorablement par leur seule présence. En effet, une telle configuration a permis d’obtenir des fibres à 55 degrés au lieu de 0 degré dans le cas d’une orientation préférentielle. Néanmoins, une forte accumulation de fibres a été constatée au niveau du bord d’attaque de la plaquette lors de la coulée. Cela a entrainé une forte diminution voir parfois un arrêt total de l’écoulement sur le reste de la section. De plus, la pression latérale du béton sur les parois a provoqué le déversement des séparateurs.

Afin d’éliminer les bords d’attaque et ainsi l’arrêt de l’écoulement, les séparateurs ont été prolongés sur toute la longueur des spécimens (Figure 4-7).

Figure 4-7 : Modification de la disposition des plaquettes

Lors de l’écoulement du béton, une réduction progressive de la vitesse d’écoulement a été constatée, et ce jusqu’à l’arrêt complet de ce dernier. Même si le béton à l’état frais est un fluide non newtonien, les principes de base de la mécanique des fluides permettent d’obtenir une explication. Au droit de l’obstacle (x=0 sur la Figure 4-8a), la vitesse du fluide devient nulle, et le long des parois (dans la couche limite) la vitesse de déplacement du fluide est fortement réduite. Dans le cas du béton à l’état frais, le déplacement ne peut s’amorcer que si la valeur du cisaillement entre la paroi et le matériau atteint une valeur seuil. La forte diminution de la vitesse du mélange au droit de l’obstacle entraine l’apparition d’une zone de blocage qui ne cesse d’augmenter du fait de la viscosité du mélange. De plus, la faible pente servant à augmenter la vitesse de déplacement du béton dans le moule ne permettait pas d’atteindre une valeur de cisaillement suffisamment importante pour permettre au fluide de s’écouler dans de bonnes conditions (vitesse + homogénéité).Enfin, le faible espacement entre les plaquettes engendrait une diminution importante de la zone où la vitesse du fluide est relativement proche de sa vitesse d’entrée dans le réseau de séparateurs (zone hachurée sur la Figure 4-8b).

a) b)

Figure 4-8: Écoulement d’un fluide visqueux a) le long d’une paroi b) entre deux parois

Les bords d’attaque ne sont donc pas les seuls obstacles qui réduisent la vitesse de l’écoulement, l’espacement inter-séparateur influence grandement ce paramètre. L’espacement était donc trop réduit pour permettre au mélange de circuler de la façon souhaitée. La faible influence de séparateurs sur l’orientation des fibres a conduit à une augmentation de l’espacement entre les séparateurs. Le choix s’est donc porté sur un espacement de 50 mm et des séparateurs courts pour

réduire la quantité de tôle nécessaire (Figure 4-9) . De plus, des raidisseurs en bois ont été rajoutés pour éviter tout déversement.

Figure 4-9 : Montage final du système de coulée

Des variantes aux méthodes proposées ont été testées, mais n’ont pas eu les résultats escomptés. Seul le dernier montage illustré à la Figure 4-9a permis de garantir un écoulement convenable du béton.

4.2.2.2 Validation du choix

Il est légitime de penser que la présence des séparateurs, qui s’enfoncent jusqu’au fond du coffrage, créent un plan de faiblesse dans l’échantillon. Mais qu’en est-il réellement? Des essais de traction ont été réalisés sur des spécimens coulés selon les systèmes de séparateurs présentés à la Figure 4-7 et à la Figure 4-9. La réduction de l’espacement inter-séparateurs et la diminution de la taille de ces derniers ne semblent pas perturber le comportement en traction. En effet, que ce soit en termes de déformation à pic, de résistance à pic ou de comportement post-pic, les résultats d’essais obtenus sont similaires (Figure 4-10).

0 1 2 3 4 5 6 0 100 200 300 400 500 Séparateurs longs Séparateurs courts C o n tr ain te ( M P a) Déformations 0 1 2 3 4 5 6 0 0,5 1 1,5 2 2,5 Séparateurs longs Séparateurs courts C o n tr ain te ( M P a) Ouverture de fissure (mm)

Figure 4-10 : Comparaison du comportement en traction pure entre l’utilisation de séparateurs longs et de séparateurs courts

Néanmoins, la découpe des spécimens a mis en évidence la présence d’un plan de faiblesse potentiel marqué par l’absence de fibres sur une bande de largeur proche de l’épaisseur d’un séparateur (Figure 4-11). En effet, l’absence de fibres peut nuire au contrôle de la fissuration dans cette zone et entrainer une rupture du spécimen le long du séparateur.

Zone avec une concentration moindre

de fibres

Figure 4-11 : Plan de faiblesse potentiel

Cependant, lorsque l’on observe les patrons de fissuration de ces spécimens, l’influence de ce plan de faiblesse n’est pas flagrante car les fissures ne suivent pas la direction des séparateurs (Figure 4-12). La Figure 4-12a et la Figure 4-12b indiquent que les séparateurs ne semblent pas avoir modifié le développement de la fissuration dans les spécimens. Pour la Figure 4-12c, une

zone faible suivant légèrement le tracé du séparateur est visible, mais le lien de cause à effet ne peut être établi.

a) b) c)

Figure 4-12: Patrons de fissuration sur trois spécimens coulés à l’aide de séparateurs.

En outre, un nombre plus important de séparateurs aurait dû, si chaque séparateur représente un plan de faiblesse, diminuer de façon significative la résistance en traction obtenue. Cet effet n'a pas été observé. En conséquence, la technique d’orientation des fibres avec séparateurs est validée.