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Dans le document [Oeuvres de Mr. de Voltaire]. T. [11] (Page 60-73)

De qui les flancs à tout âge ont porté Plus de mortels que Cibèle féconde N’avait jadis donné de Dieux au monde, Qu’avec plaifir ton grand œil hébété Voit tes enfans dont ma patrie abonde ; Sots tradufteurs, & fots compilateurs, Et fots auteurs , & non moins fots lecteurs : Je t ’interroge, ô fuprêmç puiffanee ! Daigne réapprendre en cette foule immenfe De tes Enfans qui font les plus chéris ,

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C h a n t t r o i s i è m e . î ï

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Les plus féconds en lourds & plats écrits, Les plus conftans à broncher comme à braire A chaque pas dans la même carrière : Ah ! je connais que tes foins les plus doux Sont pour l’auteur du journal de Trévoux.

Tandis qu’ainfi Denis notre bon père Devers la lune en fecret préparait Contre l’Anglais cet innocent myftère , Une autre fcène en ce moment s'ouvrait, Chez les grands fous du monde fublunaire. Charle eft déjà parti pour O rléans, Ses étendarts flottent au gré des vents. A fes cêtés Jeanne le cafque en tête , Déjà de Rheims lui promet la conquête. Voyez-vous pas ces jeunes écuyers , Et cette fleur de loyaux Chevaliers ? La lance au poing cette troupe environne Avec refpeét notre fainte Amazone. Ainfi l’on voit le fexe mafeulin A Fontevraux fervir le féminin, s )

Le Sceptre eft là dans les mains d’une femme 5 Et père Anfelme eft béni par Madame.

La belle Agnès en ces cruels momens, Ne voyant plus Ton amant qu’elle adore, Cède au chagrin dont l’excès la dévore ; Un froid mortel s’empare de Tes fens. L’ami Bonneau toûjours plein d’induftrie , En cent façons la rappelle 4 la vie.

Elle ouvre encor fes yeux , ces doux vainqueurs, D ij

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L a P u c e l l e .

Mais ce n’eft plus que pour verfer des pleurs : Puis fur Bonneau fe penchant d’un air tendre , C’en eft donc fa it, dit-elle, on me trahit. Où va-t-il donc ? que veut-il entreprendre ? Etait-ce là le ferment qu’il me f i t ,

Lorfqu’à fa flamme il me fit condefcendre ? Toute la nuit il faudra donc m’étendre Sans mon am ant, feule au milieu d’un lit : Et cependant cette Jeanne hardie , Non des Anglais , mais d’Agnès ennemie, Va contre moi lui prévenir l’efprit. Ciel ! que je hais ces créatures fiéres, Soldats en jupe , hommaffes Chevalières, t) Du fexe mâle affectant la valeur,

Sans pofféder les agrémens du n ô tre , A tous les deux prétendant faire honneur, E t qui ne font ni de l’un ni de l’autre. Difant ces mots elle pleure & rougit, Frémit de rage , & de douleur gémit. La jaloufie en fes yeux étincelle , Puis tout-à-coup d’une rufe nouvelle Le tendre amour lui fournit le deflein.

Vers Orléans elle prend fon chemin , De Dame Alix & de Bonneau fuivie. Agnès arrive en une hôtellerie , Où dans l’inftant laffe de chevaucher, La fière Jeanne avait été coucher. Agnès attend qu’en ce logis tout dorme, Et cependant fubtilement s’informe

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C h a n t t r o i s i è m e .

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13 Où couche Jeanne , où l’on met fon harnois : Puis dans la nuit fe glifle en tapinois, De Jean Chandos prend la culotte , & paffe Ses cuiffes en tre, & l’aiguillette lace ; De l’amazone elle prend la cuirafle. Le dur acier forgé pour les combats, Prefle & meurtrit fes membres délicats. L’ami Bonneau la foutient fous les bras.

La belle Agnès dit alors à voix baffe , Amour , amour , maître de tous mes fens , Donne la force à cette main trem blante, Fai-moi porter cette armure pefante ,

Pour mieux toucher l’auteur de mes tourmens. Mon amant veut une fille guerrière ,

Tu fais d’Agnès un foldat pour lui plaire : Je le fuivrai ; qu’il permette aujourd’hui Que ce foit moi qui combatte avec lui ; Et fi jamais la terrible tempête

Des dards Anglais vient menacer fa tête , Qu’ils tombent tous fur ces trilles appas , Qu’il foit du moins fauvé par mon trépas, Qu’il vive heureux , que je meure pâmée Entre fes bras , & que je meure aimée. Tandis qu’ainfi cette belle parlait, Et que Bonneau fes armes lui m ettait, Le Roi Chariot à trois milles était.

La tendre Agnès prétend à l’heure même Pendant la nuit aller voir ce qu’elle aime.

Ainfi vêtue & pliant fous le poids,

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L a P ü c e l l e ,

N’en pouvant plus, maudiffant fon hatnois, Sur un cheval elle s’en va juchée,

Jambe m eurtrie, & la fefie écorchée. Le gros Bonneau fur un normand m onté, Va lourdement & ronfle à fon côté.

Le tendre am our, qui craint tout pour la b elle, La voit partir & foupire pour elle.

Agnès à peine avait gagné chem in, Qu’elle entendit devers un bois voifin Bruit de chevaux, & grand cliquetis d’armes» Le bruit redouble ; & voici des gendarmes , Vêtus de rouge , & pour comble de m aux, C’était les gens de Monfieur Jean Chandos, L’un d’eux s’avance , & demande qui vive ? A ce grand cri notre amante naïve

Songeant au R o i, répondit fans détour, Je fuis Agnès i vive France , ^ l’amour. A ces deux noms que le Ciel équitable Voulut unir du nœud le plus durable, On prend Agnès, & fon gros confident ; Ils font tous deux menés incontinent A ce Chandos, qui terrible en fa rage Avait juré de venger fon outrage , Et de punir les brigands ennemis Qui fa culotte & fon fer avaient pris.

Dans ces momens où la main bienfaifante Pu doux fommeil laifle nos yeux ouverts, Quand les oifeaux reprennent leurs concerts, Qu’on fent en foi fa vigueur renaiffante ,

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Ch a n t

Que les défirs pères des voluptés Sont par les fens dans notre ame excités, Dans ces momens, Chandos, on te préfente La belle Agnès, plus belle & plus brillante Que le foleil au bord de l’Orient.

Que fentis-tu, Chandos, en t’éveillant, Lors que tu vis cette nymphe fi belle A tes côtés , & tes grégues fur elle ?

Chandos prelfé d’un aiguillon bien v if, La dévorait de fon regard lafcif.

Agnès en trem ble, & l’entend qu’il marmotte Entre fes dents : je r’aurai ma culotte. A fon chevet d’abord il la fait feoir : Q uittez, dit-il, ma belle prifonnière , Quittez ce poids d’une armure étrangère. Ainfi parlant plein d’ardeur & d’efpoir, Il la décafque, il vous la décuiraffe : La belle Agnès s’en défend avec grâce ; Elle rougit d’une aimable pudeur , Penfant à Charle , & foumife au vainqueur. Le gros Bonneau que le Chandos deftine Au digne emploi de chef de fa cuifine , Va dans l’inftant mériter cet honneur ; Des boudins blancs il était l’inventeur , Et tu lui dois, ô Nation Françaife , Pâtés d’anguille , & gigots à la braife.

Monfieur Chandos, hélas que faites-vous ? Difait Agnès d’un ton timide & doux. Pardieu, dit-il ( tout Héros Anglais jure ) , u )

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Quelqu’un m’a fait une fanglante injure. Cette culotte eft mienne ; & je prendrai Ce qui fut mien où je le trouverai. Parler ain li, mettre Agnès toute nue ,

C’eft même chofe ; & la belle éperdue Tout en pleurant était entre fes bras, Et lui difait, Non je n’y confens pas.

Dans l’inftant même un horrible fracas Se fait entendre ; on crie , alerte, aux armes, Et la trompette , organe du trépas,

Sonne la charge , & porte les alîarmes. A fon réveil Jeanne cherchant en vain L’affublement du harnois mafculin , Son bel armet ombragé de l’aigrette, Et fon haubert, x ) & fa large braguette , y ) Sans raifonner faifit foudainement,

D’un Ecuyer le dur accoutrement, Monte à cheval fur fon âne , & s’écrie , Venez venger l'honneur de la patrie. Cent Chevaliers s’empreffent fur fes p as, Ils font fuivis de fix cent vingt foldats.

Frère Lourdis , en ce moment de crife s Du beau palais où règne la fottife Eli defcendu chez les Anglais guerriers , Environné d’atomes tout greffiers, Sur fon gros dos portant balourderies, Oeuvres de Moine , & belles âneries. Ainli bâté , fi-tôt qu’il arriva, Sur les Anglais fa robe il fecoua,

C h a n t t r o i s i è m e . f 7

Son ample ro b e, & dans leur camp verfa Tous les tréfors de fa craffe ignorance , Tréfors communs au bon pays de France. Ainfi des nuits la noire D éïté,

Du haùf d’un char d'ébène marqueté , Répand fur nous les pavots & les fonges , Et nous endort dans le fein des menfonges.

" f c ( 5 8 ) ^ N O T E S . a ) A La fameufe bataille ■“ • des Dunes près de Dunkerke. b ) A Malplaquet près de M ons en 1709. e ) Auffi en 1709. d ) On appellait autrefois Paradis des fous , Paradis des fo ts , les Limbes ; & on plaça

dans ces Limbes les âmes des

imbécilles& des'petits enfans

morts fans batéme. Limbe

lignifie bord , bordure , & c’é­ tait vers les bords de la Lune qu’on avait établi ce Paradis. M ilton en parle ; il fait paf- fer le Diable par le Paradis des fots : the Paradife offools.

e ) Ceci paraît une allufion aux fameux couplets de Rouf- feau.

J e te vois , innocent D an ch et, Grands yeux ouverts, bouche béante.

Une bouche à la D anchet, était

devenu une efpéce de pro­ verbe. Ce Danchet était un poète médiocre , qui a fait quelques pièces de Théâtre , &c.

f ) Ce font les Limbes in­

ventés , dit-on , par un nom­ mé Pierre Chrifologue. C’eft là qu’on envoyé tous les pe­ tits enfans qui meurent fans avoir été batifés. Car, s’ils meurent a iy ans , ils font damnés fans difficulté.

g ) Le fyftême fameux du Sieur Lofs ou Laro Kcoffais , qui bouleverfa tant de fortu­ nes en France depuis 1718 jnfqu’à 1720, avait encor

laif-fé des traces fu n eftes, & l’on s’en reffentait en 1 7 3 0 , qui fut le tems où nous jugeons que l’auteur commença ce Poème.

h ) On connaît atfez par

les excellentes Lettres P ro­

vinciales , les Cafniftes Efco- bar & M olina. Ce M olina eft

appelle ici fu ffifa n t, par allu­ fion à la gracefuffifante & ver-

f a ti l e , fur laquelle il avait

fait un fy Itême abfurde , com­ me celui de fes adverfaires.

i ) Le T ellier jéfuite , fils d’un Procureur de Vire en Baffe-Normandie, Confeffeur de L o u is X I V , auteur de

trou-A

N O T E S . : ^

blés qui la fnivirent; exilé pendant la Régence , & dont la mémoire eft abhorrée de nos jours. Le Père Donein était fon premier Miniftre.

k~) Les Janféniftes difent

que le Meifie n’eft venu que pour plufieurs.

/ ) Ceci défîgne les Con­ vulsionnaires , & les miracles attelles par des milliers de Janféniftes , miracles dont Carré Mangeron fit impri­ mer un gros recueil qu’il pré- fenta au Roi Louis XV.

m ) Le bon P Arts était un

Diacre im béeille, mais qui étant un des Janféniftes les plus zélés , & les plus accré­ dités parmi la populace, fu t regardé comme un Saint par oette populace. Ce fu t vers l’an 1724 qu’on imagina d’al­ ler prier fur la tombe de ce bon homme au cimetière d’u­ ne E glife de Paris , érigée à ntl Saint Médard , qui d’ail­ leurs eft peu connu. Ce St. Médard n’avait jamais fait de miracles, mais l'abbé Paris en fit une multitude. Le plus marqué eft celui que Madame la Daehefie du Maine célébra dans cette chanfon.

Un décroteur à la Royale D u talon gauche eftropié , Obtint pour grâce fpéciale D ’être boiteux de l’autre pié.

Ce St. Paris fit trois ou quatre J fi on l'avait JaifTé faire , mais cent miracles de cette efpèce : ! la police y mit ordre: de là il aurait reïïufcité des morts • ce diftiquc connu.

D e par le R o i, défenfe à Dieu , D ’opérer miracle en ce lieu. n ) Galilée , le fondateur

de la philofophie en Ita lie , fut condamné par la congré­ gation du Saint Office , mis

en prifon , 8c traité très du­

rem ent, non-feulement com­ me hérétique, mais comme ignorant, pour avoir démon­ tré le mouvement de la terre.

0 ) Urbain Grandier curé

de London, condamné au fen en 1629 par une commiffion du C on feil, pour avoir mis te Diable dans le corps de quelques religieufes.Un nom­ mé la Menardaye a été allez imbéeille pour faire imprimer en 1749. un iivre dans lequel il croit prouver la vérité de ces poiïeffions.

N o t e s . u * .

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p ) Galignï. Eléonore Ga- lig a ï, fille de grande qualité attachée à la Reine Marie de Médicis , & fa Dame d'hon­ neur , épaule de Concino Con­

tin t Florentin,Marquis d’An-

e r e , Maréchal de France, fut non-feulement décapitée à la Grève en 1617 , comme il eft dit dans l'abrégé chron. de l’Hift. de France, mais Fut brûlée comme forciére, & fes biens furent donnés à fes en­ nemis. Il n’y eut que cinq Confeillers qui indignés d’une horreur fi abfurde, ne voula­ ien t pas aififter au jugement.

cf) Le Parlement fous Louis X L I I défendit fous peine des

galères qu’on enfeignât une autre do&rine que celle d’A- rifiote , & défendit enfuite l’ém étique, mais fans con­ damner aux galères les Mé­ decins ni les malades. Louis X I V fut guéri à Calais par l ’ém étique, & l’arrêt du Par­ lement perdit de fon crédit.

}■ ) L’hiftoire du Jéfnite Gi­ rard & de la Cadière eft affez publique ; le Jéfnite fut con­ damné ail feu comme forsier par la moitié du Parlement d’Aix , & abfous par l’autre moitié.

s ) Fontevraud , Fonte- wraux ; Fous - Ebraidi eft un

bourg en Anjou à trois lieues de Saumur , connu par une célèbre Abbaye de filles, chef- d’ordre , érigée par Robert d’Arbriflel né en 1 0 4 7 , &

mort en 1117. Après avoir fixé fes tabernacles à la forêt de F o n te v m id , il parcourut nuds pieds les Provinces du R oyaum e, afin d’exhorter à la pénitenee les filles de joie , & les attirer dans fon cloître ; il lit de grandes converfions en ce gen re, entr’autres dans la ville de Rouen. Il perfua- da à la célèbre Reine Bertrn- de de prendre l’habit de Fon- tevraux , & il établit fon or­ dre par tonte la France. Le

Pape Pafchal 11 le mit fous

la proteéHon du St. Siège en 1106. Robert quelque tems avant fa m ort, en conféra le Généralat à une Dame , nom­ mée Pétronille du C hem illé, & voulut que toujours une femme fuccédât à une autre femme dans la dignité de Chef de l’ordre, commandant éga­ lement aux Religieux com­ me aux Religieufes. Trente- quatre ou trente-cinq abbeffes ont fuccédé jufqu’à ce jour à Pétronille , parmi lefquelles on compte quatorze Princef- fes , & dans ce nombre , cinq de la maifon de Bourbon, Voyez fur cela Ste. Marthe

dans le 4e. vol. du Gullia

Chriftiana & le C'fypens oriinis Fontcbralàmijls du Père de la

M aintenue.

t ) Il y a grande apparence

que l’auteur a ici en vue les héroïnes de l’Ariofte & du Tatfe. E lles devaient être un peu mal - propres ; mais les Chevaliers n’y regardaient pas de fi près.

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N

O T s.

61 m

u ) Les Anglais jurenttygod, imnn m e , blood Sic. les Alle­

mands facrement ; les Français par un mot qui eft au jurement des Italiens ce que l ’aétion eft à l’inltrument ; les Efpagnols

■voto à Dios. Un révérend Père

Récollet a fait un livre fur les juremens de toutes les na­ tions , qui fera probablement très exact & très inftruétif. On l’imprime aétuellement.

x ) Haubert , Aubergeon ,

cotte d’armes ; elle était d’or­ dinaire compofée de mailles de fer , quelquefois couverte de foie ou de laine blanche ; elle avait des manches larges

& un gorgerin. Les fiefs de

H aubert, font ceux dont le Seigneur avait droit de por­ ter cette cotte.

y ) Braguette , de Braye , Bracca. On portait de longues

braguettes détachées du haut- de-chaulTes , & fouvent au fond de ces braguettes on por­ tait une orange qu’on préfen- tait aux Dames. Rabelais par­ le d’un beau livre , in titu lé,

De la dignité des braguettes :

c’était la prérogative diftinc- tive du fexe le plus noble ; c’eft pourquoi la Sorbonne préfenta requête pour faire brûler la Pucelle , attendu qu’elle avait porté culotte avec braguette. Six Evêques de France affiliés de l’Evêque de Vinchefter la condamnèrent au feu ; ce qui était bien jufte; c’eft dommage que cela n’arri­ ve pas plus fo u v en t, mais il ne faut défefpérer de rien.

C H A N T Q U A T R I È M E ,

Jeanne Danois combattent les Anglais. Ce qui

Dans le document [Oeuvres de Mr. de Voltaire]. T. [11] (Page 60-73)

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