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Théorie extrémale et dégénérescence des classes de graphes closes par

Dans cette partie, nous allons nous intéresser aux propriétés extrémales des classes de graphes excluant un certain mineur. Plus précisément, nous nous poserons la question de savoir à partir de quelle densité d’arête un graphe possède un certain mineur.

Ces bornes sur le nombre d’arêtes nous permettront par la suite de prouver l’existence de sommets de "petit" degré. On dira qu’un graphe est t-dégénéré si δ(G) ≤ k. Par exemple, on peut montrer que la classe des arbres est 1-dégénérée ou encore que la classe des graphes sans mineur K4est 2-dégénérée (en utilisant la définition récursive

des graphes série-parallèles).

Pour les graphes planaires simples, on peut montrer qu’ils sont 5-dégénérés en utilisant la formule d’Euler. Pour cela, soit G un graphe planaire simple. On note par n le nombre de sommets de G, m le nombre d’arêtes de G et f le nombre de faces d’un plongement

planaire de G. La formule d’Euler affirme que n −m + f = 2. En remarquant qu’une arête est comprise dans au plus 2 faces et qu’une face est bordée par au moins 3 arêtes, on en déduit que f ≤2m3 et donc que m ≤ 3n −6. Ainsi les graphes planaires possèdent au plus 3n − 6 arêtes. Ce résultat peut se généraliser aux graphes sans mineur K5en utilisant le

Théorème 2.14.

On peut maintenant montrer que les graphes sans mineur K5sont 5-dégénérés. Suppo-

sons par contradiction un graphe G sans mineur K5tel que ∀v ∈ V(G), d(v) ≥ 6. Comme

m = 12 P

v∈V(G)d(v) ≥

6n

2 =3n ≥ 3n − 6, on en déduit que G contient un mineur K5, ce qui

contredit les hypothèses.

Notons que les graphes planaires qui atteignent la borne des 3n − 6 arêtes sont les graphes planaires maximaux, dont l’ajout d’une arête supprime leur planarité. Ces graphes sont donc triangulés (i.e. tels que toutes leurs faces soient des triangles). Bien plus généralement, Mader a étendu ce résultat à la classe des graphes sans mineur Kr, pour 3 ≤ r ≤ 7, de la manière suivante.

Théorème 2.40 (Mader, 1968, [47])

Pour 3 ≤ r ≤ 7, tout graphe sans mineur Kr avec au moins r sommets a au plus

(r − 2)n −¡r −12 ¢arêtes.

Ce théorème permet en particulier de montrer que tout graphe sans mineur K6(resp.

K7) possède un sommet de degré au plus 7 (resp. 9).

La question naturelle qui suit ce théorème est de savoir si tout graphe sans mineur Kr

possède (r − 2)n −¡r −12 ¢ arêtes en général. Néanmoins cette propriété ne se vérifie pas pour r ≥ 8. En effet, on peut construire une famille de contre-exemples pour le cas r = 8. Pour cela nous aurons besoin de la définition suivante.

Soit G et H deux graphes. Une (G,H,k)-cockade est un graphe construit récursivement de la manière suivante :

– G et H sont des (G,H,k)-cockades.

– Soit N et M deux (G,H,k)-cockades alors le graphe obtenu à partir de N et M en iden- tifiant une clique de taille k de N avec une clique de taille k de M est une (G,H,k)- cockade.

Lorsque G = H, on dira que c’est une (G,k)-cockade.

Dans notre cas, on peut remarquer que K2,2,2,2,2 ne contient pas de mineur K8 mais

possède plus de 6 × 10 −¡72¢ arêtes. On peut alors montrer récursivement que toute (K2,2,2,2,2,5)-cockade possède cette propriété.

Jørgensen à montré que cette famille était la seule obstruction à la généralisation du Théorème 2.40 au cas r = 8. Il a en effet pû prouver le théorème suivant.

Théorème 2.41 (Jørgensen, 1994, [37])

Tout graphe avec n ≥ 8 sommets et au moins 6n − 20 arêtes a soit un mineur K8, soit est

Ce théorème implique en particulier que tout graphe sans mineur K8possède un som-

met de degré au plus 11.

De la même manière, Song et Thomas ont caractérisé les exceptions pour le cas r = 9.

Théorème 2.42 (Song & Thomas, 2006, [69])

Tout graphe avec n ≥ 9 sommets et au moins 7n −27 arêtes contient un mineur K9, est une

(K1,2,2,2,2,2,6)-cockade ou est isomorphe à K2,2,2,3,3.

Ainsi les graphes sans mineur K9possèdent un sommet de degré au plus 13. La conjec-

ture suivante affirme que les théorèmes précédents restent valables dans le cas général.

Conjecture 2.43 (Seymour & Thomas)

Pour tout r ≥ 1, il existe une constante C = C(r ) telle que pour tout graphe (r −2)-connexe avec au moins C sommets et au moins (r − 2)n −¡r −12 ¢+1 arêtes contient un mineur Kr. Les théorèmes précédents impliquent que cette conjecture est vraie pour r ≤ 9. Dans la suite, nous noterons par K−

r le graphe obtenu à partir de Kr en enlevant une

arête. Les théorèmes suivants prouvent des bornes optimales sur le nombre d’arêtes sans mineur K−

r pour k ≤ 9.

Théorème 2.44 (Jakobsen, 1983, [34])

Tout graphe avec au moins 7 sommets et92n − 12 arêtes a un mineur K

7 ou est isomorphe

à une (K2,2,2,2,K6,4)-cockade.

Théorème 2.45 (Song, 2005, [68])

Tout graphe avec au moins 8 sommets et112n −352 arêtes a un mineur K

8 ou est isomorphe

à une (K1,2,2,2,2,K7,5)-cockade.

Pour le cas suivant, la borne exacte n’est pas connue mais Chen et al. [17] proposent la conjecture suivante.

Conjecture 2.46 (Chen et al., 2005, [17])

Tout graphe avec au moins 8 sommets et132n −472 arêtes a un mineur K− 9.

Enfin Song et Thomas ont posé la conjecture suivante dans le cas des mineurs K10.

Conjecture 2.47 (Song & Thomas)

Tout graphe avec au moins n ≥ 10 sommets et 8n − 35 arêtes contient un mineur K10ou

est une (K1,1,2,2,2,2,2,7)-cockade ou est isomorphe à l’un des graphes suivants : K1,2,2,2,3,3,

K2,2,3,3,4, K2,3,3,3,3, K2,3,3,3,3, K2,2,2,2,2,3 ou au graphe obtenu à partir de deux copies de

K2,2,2,2,2,3en identifiant deux cliques de taille 6.

Cette conjecture impliquerait en particulier le cas r = 10 de la Conjecture 2.43.

L’exclusion d’un mineur de graphe biparti complet permet aussi de borner le nombre d’arêtes du graphe.

Théorème 2.48 (Chudnovsky et al., 2011, [19])

Tout graphe sans mineur K2,t avec t ≥ 2 a au plus12(t + 1)(n − 1) arêtes.

Théorème 2.49 (Jørgensen, 2001, [38])

Tout graphe 4-connexe sans mineur K4,4avec au moins n sommets a au plus 4n −8 arêtes.

Ce dernier théorème a en particulier été utilisé par Kawarabayashi et Toft pour prouver certains résultats sur la coloration des graphes que nous verrons dans le Chapitre 4. Dans le cadre des mineurs enracinés que nous avons étudiés dans la partie précédente, il n’existe que peu de résultats extrémaux les concernant. Néanmoins Jørgensen [38] a prouvé le théorème suivant dans le cas des mineurs K2,4enracinés sur les sommets du

stable de taille 4.

Théorème 2.50 (Jørgensen, 2001, [38])

Soit G un graphe 4-connexe avec au moins 4n − 8 arêtes et soit X un ensemble de quatre sommets de G quatre sommets de G. Alors G contient un mineur enraciné K2,4enraciné en

X.

Ce dernier théorème a servi, en particulier, à prouver le Théorème 2.49. Si on essaye d’enraciner un mineur K2,t sur l’ensemble stable de taille 2 alors Chudnovsky et al. [19]

ont prouvé le théorème suivant.

Théorème 2.51 (Chudnovsky et al., 2011, [19])

Soit G un graphe 2-connexe avec au moins 12(t +3−t+24 )(n −1)−1 arêtes avec t ≥ 2 et soit X un ensemble de deux sommets de G. Alors G contient un mineur K2,t enraciné en X.

Enfin, Kawarabayashi et Jørgensen ont aussi prouvé le théorème suivant généralisant le théorème de Jørgensen donné précédemment.

Théorème 2.52 (Kawarabayashi & Jørgensen, 2005, [39])

Soit G un graphe 4-connexe avec au moins 4n − 8 arêtes et soit X un ensemble de quatre sommets de G. Alors G contient un mineur enraciné K2,4enraciné en X.