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2. IMPERFECTION DE L’INFORMATION - CADRES MATHEMATIQUES

2.3 Approches de modélisation d’informations imparfaites

2.3.3 Théorie des ensembles flous

La théorie des ensembles flous, proposée par Zadeh en 1965 [60], constitue un outil mathématique puissant pour la modélisation, la description et la prise de décision dans le cas d’informations ambigües, approximatives, imprécises ou vagues. Ces types d’informations imparfaites ont des limites mal définies et sont plus fréquentes dans le raisonnement humain. La théorie des ensembles flous tente donc d’imiter la façon avec laquelle l’humain manipule ces informations. Elle est basée sur l’idée d’appartenance partielle où plusieurs contenus informationnels peuvent se produire simultanément, mais aussi partiellement.

Nous allons faire un bref rappel des principaux concepts de cette théorie afin de montrer sa capacité de modélisation et de description des informations et concepts manipulés par l’humain. Rappelons que ces informations et concepts sont essentiels dans le processus d’interprétation de scène.

2.3.3.1 Définitions

Dans la théorie des ensembles classiques, l’appartenance d’un élément à un ensemble classique ou algébrique peut avoir deux états logiques : appartenir ou ne pas appartenir à cet ensemble. Zadeh a tenté de sortir de cette logique binaire en introduisant la notion d’appartenance partielle. Cette notion permet d’avoir des graduations dans l’appartenance d’un élément à un ensemble. Il s’agit d’autoriser un élément à appartenir plus moins fortement à un ensemble.

Soient Ω un univers exhaustif de contenus informationnels (i.e. de singletons) et A, une propriété caractérisant les singletons de Ω. En considérant le raisonnement humain, ces singletons peuvent vérifier cette propriété d’une façon partielle. Une telle propriété est appelée vague ou ambiguë. Cette propriété est représentée comme un ensemble flou A défini sur cet univers. Cet ensemble est caractérisé par une fonction d’appartenance µA définie par :

[ ]

n n : 0,1 ( ) A A x x µ Ω→ →µ (2.5)

où µA(xn) désigne le degré d’appartenance du singleton xn à l’ensemble flou A. Dans le cas où le nombre de singletons est raisonnable, on peut écrire cet ensemble flou comme suit :

[ ]

n n n

{( , A) / } , A( ) 0,1

A= x µ x ∈Ω µ x(2.6)

Ainsi, un ensemble flou A est complètement défini sur l’univers Ω par sa fonction d’appartenance µA

associant chaque singleton xn de Ω à une valeur µA(xn)∈[0,1] qui représente le degré d’appartenance du singleton xn à l’ensemble A, c’est-à-dire le degré de vérité que xn appartienne à A (ou vérifie cette propriété ambiguë).

Trois cas sont à distinguer :

- µA(xn)=0 : xn n’appartient pas à A ;

- 0 < µA(xn) < 1 : xn appartient partiellement à A, et - µA(xn) = 1 : xn appartient entièrement à A.

Bien que la fonction d’appartenance puisse prendre n’importe quelle forme (tant que cette fonction permet d’associer à chaque singleton de Ω une valeur de l’intervalle [0,1]), cinq types standards de fonction d’appartenance sont les plus fréquemment utilisés dans le cadre de cette théorie, il s’agit des fonctions S, fonctions L, fonctions triangulaires, fonctions trapézoïdales et fonctions gaussiennes [62]. La Figure 2.3 illustre les formes géométriques de ces cinq types de fonctions d’appartenance.

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Notons que le choix de l’une de ces formes de fonctions d’appartenance dépend essentiellement des connaissances exprimées par l’expert. Une fois la forme de la fonction d’appartenance sélectionnée par l’expert, les paramètres associés à cette fonction sont déterminés soit manuellement par l’expert d’une façon empirique et directe, soit par l’utilisation d’un processus automatique d’optimisation appliqué sur des mesures floues (considérées comme des fonctions objectives) telles que l’entropie floue ou l’indice flou [84] [85].

Figure 2.3 : Formes classiques de fonctions d’appartenance

Dans le cas où Ω = {x1, x2,…, xN} désigne l’ensemble des niveaux de gris que l’on observe dans une image numérique, les formes classiques de fonctions d’appartenance sont utilisées pour la représentation des connaissances ambigües liées à ces niveaux de gris, et exprimées souvent par un expert. La fonction S (resp. la fonction L) est couramment utilisée pour représenter le fort degré de « luminosité » ou de brillance (resp. un degré d’« obscurité ») des pixels. Les fonctions triangulaires, trapézoïdales et gaussiennes sont également utilisées pour décrire des plages de niveaux de gris dites « moyennes ». Considérons, à titre d’exemple, un système de classification d’images reposant sur un ensemble de règles floues [63]. Une règle potentielle de ce système peut être la suivante : « si le niveau de gris du pixel observé est moyen ALORS ce pixel doit être attribué la classe "végétaux" ». Si une fonction d’appartenance trapézoïdale de la Figure 2.4 est utilisée pour modéliser l’information ambigüe "niveau de gris moyen", les niveaux de gris entre 115 et 135 vérifient totalement cette règle en ayant des valeurs d’appartenance totale. Les niveaux de gris dans les intervalles [100, 115] et [135, 150] vérifient partiellement cette règle, et les niveaux de gris à l’extérieur de l’intervalle [100,150] ont une valeur d’appartenance nulle.

Figure 2.4 : Exemple de fonction d’appartenance trapézoïdale pour modéliser le concept "moyen"

2.3.3.2 Opérations sur les ensembles flous

Les opérations permettant de « combiner » les ensembles algébriques peuvent être généralisées aux ensembles flous. Considérons deux ensembles flous A et B de Ω caractérisés par deux fonctions d’appartenance µA et µB. Parmi les opérations définies sur les ensembles flous, on peut citer :

Complément : le complément de l’ensemble A, noté AC, est un ensemble flou défini par le biais de la fonction d’appartenance donnée pour tout xn de Ω par:

Ω µ 1 -- 100 115 135 150 Ω µ 1 -- Ω µ 1 -- Ω µ 1 -- Ω µ 1 -- µ Ω 1 -- Fonction trapézoïdale Fonction gaussienne Fonction S Fonction L Fonction Triangulaire

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c( n) 1 A( n)

A x x

µ = −µ (2.7)

Egalité : les deux ensembles A et B sont dits égaux si et seulement si :

n , A( n) B( n)

x x x

∀ ∈Ω µ = µ (2.8)

Inclusion : l’ensemble A est dit inclus dans B si et seulement si :

n , A( n) B( n)

x x x

∀ ∈Ω µ ≤ µ (2.9)

Intersection : l’intersection de deux ensembles flous A et B de Ω est un ensemble flou constitué des éléments de Ω affectés du plus petit des degrés d’appartenance à A et B. La fonction d’appartenance de AB est donc donnée pour tout xn de Ω par :

n , A B( n) min( A( n), B( n))

x x x x

∀ ∈Ω µ = µ µ (2.10)

L’ensemble flou obtenu par l’opérateur Intersection, représente les éléments de Ω vérifiant les deux propriétés A et B simultanément, comme c’est illustré dans la Figure 2.5.

Figure 2.5 : Fonction d’appartenance de l’intersection de deux ensembles flous A et B

Union : l’union de deux ensembles flous A et B de Ω est un ensemble flou constitué des éléments de Ω affectés du plus grand des degrés d’appartenance aux deux ensembles flous A et B (Figure 2.6). La fonction d’appartenance de AB est donnée pour tout xn de Ω par

n , A B( n) max( A( n), B( n))

x x x x

∀ ∈Ω µ = µ µ (2.11)

Figure 2.6 : Fonction d’appartenance de l’union de deux ensembles flous A et B

L’ensemble flou obtenu par l’opérateur Union représente les éléments de Ω vérifiant les propriétés A ou B ou les deux à la fois.

Après avoir donné un aperçu rapide sur quelques aspects essentiels de la théorie des ensembles flous et permettant de traiter les informations ambiguës, nous allons accorder une attention particulière à la théorie des possibilités. En effet, cette théorie permet de traiter et de fusionner les informations dans un contexte d’incertitude où les connaissances disponibles pour décrire cette incertitude sont de nature ambiguë et non probabiliste. Notons que ce type d’imperfection est très fréquemment présent dans les concepts et les informations manipulés par l’homme comme dans le cas sur lequel nous nous focalisons : l’interprétation de scène. µ Ω 1 -- µA µB µAB Ω µ 1 -- µA µB µAB

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