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3.4 Calculs de chimie quantique

3.4.4 Théorie de la Fonctionnelle de la Densité DFT

La théorie Hartree−Fock et les méthodes dérivées de ce formalisme sont basées sur une fonction d’onde multiélectronique. Ces calculs sont très coûteux en temps et en ressources. Or, la théorie de la fonctionnelle de la densité remplace cette fonction d’onde par la densité électronique en tant que quantité de base pour les calculs. Ceci permet de reformuler le problème quantique à N corps en un problème monocorps (ou bi−corps si l’on considère les problèmes de spin) en se basant sur le paramètre de densité électronique. Au début du XXIe siècle, la théorie de la fonctionnelle de la densité (DFT, Density Functional Theory en anglais) était l’une des méthodes les plus utilisées dans les calculs quantiques. Son avantage réside dans sa capacité à traiter des systèmes de tailles très variées, allant de quelques atomes à plusieurs centaines, dans un temps de calcul raisonnable.

Historiquement, la DFT trouve ses origines dans le modèle développé par L.H. Thomas [55] et E. Fermi [56] à la fin des années 1920. Leur modèle basé sur le principe de la densité électronique homogène a été amélioré par Dirac [57] en ajoutant un terme d’échange. Un peu plus tard, J.C. Slater [58] propose une amélioration de l’étude d’un gaz uniforme par le choix d’un potentiel local. Néanmoins, le formalisme théorique sur lequel repose la méthode actuelle n’est établi qu’au milieu des années 1960 par les contributions de P. Hohenberg et W. Kohn [59].

Pour calculer l’énergie du système formé de N particules en interaction évoluant dans un potentiel externe, Kohn et Sham proposent deux théorèmes essentiels qui furent démontrés dans leur article de 1964 [60] :

3.4. Calculs de chimie quantique 81 — Premier théorème : pour tout système de particules en interaction dans un potentiel externe Vext(~r), ce potentiel est uniquement déterminé, à une

constante additive près, par la densité ρ(~r) de la particule dans son état fondamental. Cela signifie que toutes les propriétés du système peuvent être complètement déterminées si la densité électronique de l’état fondamental est connue.

— Second théorème : Il existe une fonctionnelle universelle E[ρ] exprimant l’énergie en fonction de la densité électronique ρ(~r), valide pour tout potentiel externe Vext(~r). Pour tout potentiel extérieur, la densité qui minimise cette

fonctionnelle est la densité exacte de l’état fondamental.

Cette énergie considérée exacte s’exprime en fonction de plusieurs termes fonction- nels :

Eexacte[ρ] = T [ρ] + Vne[ρ] + Vee[ρ] (3.45)

avec T [ρ] l’énergie cinétique, Vne[ρ] l’énergie d’interaction électron−noyau et Vee[ρ]

l’énergie d’interaction électron−électron. Ce terme est subdivisé en deux parties :

Vee[ρ] = J[ρ] + K[ρ], où J[ρ] est la fonctionnelle d’interaction de Coulomb et K[ρ]

celle d’échange.

Les termes de l’équation 3.45 ne sont pas faciles à déterminer. En 1965, Kohn et Sham proposèrent un formalisme qui permet de calculer l’énergie E[ρ] en se basant sur une fonction d’onde constituée de déterminants de Slater. Au départ, on construit un Hamiltonien qui ne prend pas en compte les interactions entre les électrons. Soit Vext(~r) le potentiel extérieur moyen ressenti par les électrons. Les

orbitales moléculaires du déterminant de Slater sont obtenues après la résolution de l’équation suivante : " −~ 2 2 ∇+ Vext(~r) # φi= iφi (3.46)

L’énergie sans interaction Es[ρ] s’écrit alors :

Es[ρ] = Ts[ρ] +

Z

Sachant que la densité électronique est définie en fonction des orbitales Φi(r) par

la relation :

ρ[~r] = ΣNi | Φi(~r) |2 (3.48)

L’expression de l’énergie d’un système contenant N électrons interagissant entre eux est donnée par :

EKS[ρ] = TKS[ρ] +

Z

Vext(~r)d~r + VeeKS[ρ] + EXCKS[ρ] (3.49)

avec TKS[ρ] le terme de l’énergie cinétique avec interaction (mouvement des

électrons), Ts[ρ] est l’énergie cinétique classique et ∆T [ρ] = Ts[ρ] − TKS[ρ]. Vext

le potentiel extérieur, VKS

ee [ρ] le potentiel de Coulomb et EXCKS[ρ] la fonctionnelle

d’échange−corrélation.

L’objectif est maintenant d’exprimer l’énergie totale en fonction de Ts[ρ], qui à

ce point du développement est calculée à l’aide des orbitales moléculaires. Donc, l’expression de l’énergie devient :

E[ρ] = Ts[ρ] + ∆T [ρ] + Z Vext(~r)d~r + (Eee[ρ] − J[ρ]) + J[ρ] (3.50) avec J[ρ] =1 2 Z ρ r1ρr2 r12 d ~r1d ~r2 (3.51)

La fonctionnelle d’échange-corrélation EXC[ρ] contient tous les termes qui ne sont

pas connus avec exactitude. Donc elle s’écrit :

EXC[ρ] = ∆T [ρ] + (Eee[ρ] − J[ρ]) (3.52)

On peut simplifier l’expression de l’énergie totale en introduisant le terme de la fonctionnelle échange−corrélation :

E[ρ] = Ts[ρ] +

Z

ρ(~r)Vextdr+ J[ρ] + EXC[ρ] (3.53)

L’idée sous−jacente de Kohn−Sham était de séparer l’énergie cinétique en deux parties, l’une pouvant être calculée exactement, Ts[ρ], et l’autre apparaissant comme

3.4. Calculs de chimie quantique 83 la corrélation électronique.

La méthode de Kohn−Sham permet d’accéder à la valeur exacte de l’énergie du sys- tème, si on peut trouver une expression exacte du potentiel d’échange−corrélation

VXC qui est défini comme la dérivée fonctionnelle de EXC par rapport à la distri-

bution de densité ρ(~r). Pour cette raison, on doit recourir à des approximations afin

d’obtenir une expression analytique approchée de VXC.

Approximation locale de la densité (LDA Local Density Approximation) : ici, il est admis que la densité électronique peut être traitée localement comme un gaz d’électron uniforme, donc la densité varie très lentement. Dans ce cas, l’énergie sera donnée par l’expression de Dirac [57].

Les méthodes à Gradient Corrigé (GGA Generalized Gradient Approximation) : une amélioration de la précision de la méthode LDA est possible en gardant l’idée de gaz d’électron mais, dans ce cas, non uniforme. Dans ce cadre, la fonctionnelle décrivant l’échange−corrélation ne dépend plus seulement de la densité électronique mais aussi des dérivées de la densité.

Méthodes Hybrides : Ces méthodes combinent l’échange et la corrélation obtenues dans l’approximation GGA avec une partie d’échange Hartree−Fock. Il existe une grande variété de fonctionnelles d’échange, corrélation ou hybride (échange+ corrélation). Dans nos études nous avons utilisé la fonctionnelle B98 (Becke 98)[61]. De nombreuses autres approximations et corrections peuvent être introduites dans le développement des méthodes de la Fonctionnelle de la Densité et de nombreuses fonctionnelles ont été créées pour répondre à ce problème du calcul du terme d’échange−corrélation. Les méthodes DFT possèdent donc une grande force, qui est l’introduction de la corrélation dans le développement de la théorie même. D’une façon générale, les méthodes DFT montrent une rapidité de calcul très intéressante mais une faiblesse non négligeable lorsqu’il s’agit de traiter des systèmes moléculaires dans lesquels la dispersion joue un rôle important (système avec une liaison à hydrogène par exemple).