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Théorème de Weierstrass. Polynômes de Bernstein

Le résultat essentiel est le suivant.

Théorème III.4.24 (Weierstrass)

Soit[a, b]un intervalle fermé borné deR. Pour toute fonction continuef : [a, b]7→ R, il existe une suite de fonctionspolynomiales(fn)nqui converge uniformément versf sur[a, b].

Remarque III.4.25

– Vous pouvez trouver de nombreuses preuves différentes de ce résultat (qui par ailleurs admet un certain nombre de généralisation (Th. de Stone-Weierstrass), en particulier aux dimensions supérieures à 1). C’est un grand classique à connaître (éventuellement en connaître plusieurs preuves et applications).

– Le sujet d’Analyse-Probabilités de l’agreg 1991 traite de questions connexes (en particulier sur la densité de l’ensemble des polynômes dans des espaces fonctionnels bien choisis).

– La preuve (constructive) proposée ici repose sur les polynômes de Bernstein (elle admet une interprétation probabiliste en terme de loi binomiale, qu’il est bon de connaître [HH06, Remarque 11.2.4, p. 204], [CLF95, Exo 21-3]).

– Ces polynômes de Bernstein ont également des applications en CAO (les fameuses courbes de Bézier par exemple) voir également [HH06].ATTENTION : les polynômes de Bernstein n’interpolent pas la fonction aux noeuds oùf est évaluée.

Ce résultat a de nombreuses applications, on peut noter la suivante par exemple : Corollaire III.4.26

Soitf : [a, b]7→Rune fonction continue. On suppose que

∀n≥0, Z b

a

f(x)xndx= 0, alorsf est la fonction nulle.

Preuve :

On considère une suite (fn)n de fonctions polynomiales qui converge uniformément vers f, d’après le théorème Weierstrass. L’hypothèse surf, implique que

∀n≥0, Z b

a

f(x)fn(x)dx= 0.

4. Approximation polynômiale 45 Mais la suite de fonctions(f fn)nconverge uniformément versf2sur[a, b]. En effet, on a

sup

[a,b]

|f2−f fn| ≤ sup

[a,b]

|f|

! sup

[a,b]

|f−fn|

! , ce dernier terme tendant vers0par hypothèse.

D’après le théorème de passage à la limite uniforme sous l’intégrale, on a Z b

a

f2(x)dx= lim

n→∞

Z b a

f(x)fn(x)dx= 0.

Ainsif2est une fonction continue, positive et dont l’intégrale est nulle, elle est donc nécessairement nulle.

On verra également plus loin (voir ThéorèmeIII.4.38) le corollaire suivant.

Corollaire III.4.27

L’ensembleR[X](des fonctions polynômes), est dense dansL2(]a, b[). Comme cet ensemble admet une base dénombrable, il exite une base hilbertienne deL2(]a, b[)formée de polynômes.

En appliquant les résultats précédents (ou la théorie de Fejer des séries de Fourier), on obtient le nouveau résultat suivant :

Théorème III.4.28 (Théorème de Weierstrass pour les polynômes trigonométriques) Les polynômes trigonométriques de la forme

x7→

n

X

k=0

akcos(kπx), sont denses dans l’ensembleC0([0,1],R).

Idem pour les polynômes trigonométriques de la forme

x7→

n

X

k=1

aksin(kπx)

dans l’ensemble des fonctionsC00([0,1]) ={f ∈ C0([0,1]), f(0) =f(1) = 0}.

Corollaire III.4.29 (ThéorieL2des séries de Fourier)

Les familles suivantes sont orthogonales et totales dansL2(]0,1[) x7→sin(nπx) n≥1, x7→cos(nπx) n≥0, x7→cos(2πnx) n≥0[

x7→sin(2πnx) n≥1. Après normalisation, on obtient donc des bases Hilbertiennes deL2(]0,1[).

On va maintenant démontrer le théorème de Weierstrass, par une preuve constructive qui donne explicitement une telle suite de fonctions polynomiales, que l’on appellepolynômes de Bernstein.

Pour cela, pour toutδ >0on pose

ω(f, δ) = sup

x,y∈[a,b]

|x−y|≤δ

|f(x)−f(y)|.

Remarquons que cette fonction est bien définie par un argument de compacité. La fonctionω(f, .)ainsi définie, s’appelle le module de continuité def. D’après le théorème de Heine, toute fonction continuefsur[a, b]est uniformément continue.

Ceci implique (est équivalent !) à la propriété

lim

δ→0ω(f, δ) = 0. (III.9)

Preuve (du ThéorèmeIII.4.24):

– On observe tout d’abord qu’on peut se ramener au cas où[a, b] = [0,1], en posant f˜(t) =f(a+t(b−a)), ∀t∈[0,1].

Supposons donc maintenant que[a, b] = [0,1].

– On introduit la suite(fn)ndéfinie de la façon suivante fn(x) = La fonctionfnest bien un polynôme de degré au plusn.

Lemme III.4.30

On a les formules suivantes

n en utilisant (III.11) au rangn−1.

– Cette fois-ci, on écrit (pourn≥2sinon le calcul est immédiat) n

En multipliant la formule ainsi démontrée par n−1n , on trouve bien le résultat annoncé.

Si on multiplie (III.11) parf(x), on trouve f(x) =

n

X

k=0

f(x)Cnkxk(1−x)n−k, ∀x∈[0,1]. (III.14)

4. Approximation polynômiale 47 Reprenons maintenant la démonstration de la convergence uniforme de(fn)nversfsur[0,1]. Prenonsδ >0. Cette valeur deδétant fixée, on choisit unx∈[0,1], on utilise (III.10) et (III.14), puis on effectue la majoration suivante, en séparant dans la somme, l’ensemble des indicesktels que|x−k/n| ≤δet ceux tels que|x−k/n|> δ:

Dans le second terme, nous constatons que pour toutxtel que|x−k/n| > δs’il est possible de construire une chaine deN+ 1pointsy0=x, ..., yN =k/ntels que|yi−yi+1| ≤δpour tout0≤i≤N−1, alors nous pouvons

Il reste à déterminer un majorant du nombreN nécessaire pour faire cela. Une condition nécessaire pour que cela fonctionne est que

et donc on peut le plus petitN qui convient va vérifier

N ≤1 + |x−k/n|

puis en rassemblant les termes identiques et en notant que si|x−k/n|> δalors on a|x−k/n|/δ≤(x−k/n)22, on trouve

Il reste à utiliser les formules prélimaires (III.11)-(III.13) pour évaluer le dernier terme et ainsi obtenir

|fn(x)−f(x)| ≤2ω(f, δ) +ω(f, δ) Ainsi, si on choisit maintenantδ=1n, on trouve l’estimation

kfn−fk≤9

Cette dernière quantité tend bien vers0quandn→+∞d’après (III.9).

La démonstration précédente donne un résultat relativement précis sur la convergence des polynômes de Bernstein en fonction du module de continuité def. Il est possible d’estimer ce module de continuité en fonction de la régularité de la fonction. Ainsi, on peut montrer

– Sifest Lipschitzienne (en particulier si elle estC1), on a ω(f, δ)≤Kδ, oùKest la constante de Lipschitz def.

– Sifestα-Hölderienne avecα∈]0,1[, on trouve

ω(f, δ)≤Kδα.

Attention :On ne peut pas espérer beaucoup mieux que les estimations ci-dessus même pour des fonctions très régulières.

En effet, on peut montrer que

δ→0lim ω(f, δ)

δ = 0 =⇒ f ≡0.

Compléments :

– Dans [Rom96, Pb 35, p. 160], vous trouverez des propriétés supplémentaires de ces polynômes de Bernstein : – Sifest de classeCp,p≥1, alors la suite des dérivées(fn(p))nconverge uniformément sur[a, b]versf(p). – Si f est de classeC2 et[a, b] = [0,1], la suite(n(fn −f))n converge uniformément vers x(1−x)2 f00(x). En

particulier, dans ce cas précis, on déduit que, sauf sif est affine, kfn−fk

C n,

ce qui améliore sensiblement l’estimation par le module de continuité donné dans le théorème et fournit par ailleurs un équivalent et non juste une borne supérieure.

– Polynômes de Jackson. Théorème de Jackson.Les polynômes de Bernstein ne sont pas lesmeilleurspolynômes approximants pour des fonctions continues, ils sont cependant faciles à construire et à calculer dans beaucoup de cas pratiques. On peut néanmoins construire explicitement des polynômes (dits de Jackson), pour lesquels l’ap-proximation est de meilleure qualité.

Plus précisément, pour toute fonction continue, on peut trouver des polynômes(gn)de degréntels que kf−gnk≤M ω

f,b−a

n

. Voir par exemple [CM84, Th. 1.7],[Dem91, p. 43], [CLF95, Exo 21-5].

– Densité de certains sous-ensembles de polynômes.En utilisant le théorème de Weierstrass on peut montrer par exemple que l’ensemble des polynômes pairs (i.e. ne contenant que des termes de degré pair) est également dense dansC0([a, b])). Idem avec les polynômes impairs. C’est un bon exercice ...

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