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Chapitre 1 : Description des systèmes cléromantiques à l'étude

1.4 Autres systèmes cléromantiques

1.4.2 Textes d'astragalomancie

Outre le texte d'astragalomancie retrouvé dans 17 villes que nous avons présenté dans la section 1.2, six autres textes, basés sur le même fonctionnement, sont connus. Tous sont fragmentaires. Quatre d'entre eux ont été édités par Nollé.

Antioche ad Cragum

Le plus important a été trouvé à Antioche ad Cragum403 et est daté de la fin du IIe ou du début du IIIe siècle ap. J.-C., selon la forme de son écriture.404 Moins connu que le texte

403 Identifié <Ant> par NOLLÉ (2007) p. 295; voir supra note 186. 404 Voir l'édition de NOLLÉ (2007) p. 192-211.

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d'astragalomancie <K>405 étudié précédemment, celui-ci en reprend exactement les mêmes principes : il fonctionne aussi selon le lancer de cinq astragaloi et respecte essentiellement la même structure, arborant un en-tête (énoncé du lancer en chiffre et nom d'un dieu au génitif406) ainsi qu'une prédiction présentée sur trois lignes (parfois en trimètres iambiques et parfois en hexamètres, souvent en alternance). En voici un exemple:

ααααγ [Ἀ όλλωνος Π ο] ·

ζ ἅ αν ' ὁ Φοῖβός σοι σαφῆ ρομην ει· Νε κην ἀρωγὸν σὺν εοῖς ἕξεις ἅμα·

σ εῦ ε, κατα ράσσο , μη ὲ σχεσιν οιοῦ.407

Dans ce cas-ci, les trois vers de prédictions sont en trimètres iambiques. La somme totale du lancer (ζ) est en retrait pour en faciliter la recherche à vue. Si l'on compare avec la structure du Tableau 10, seule la description du lancer en vers est absente. Comme nous l'avons vu, cette description est la partie de l'oracle la moins standardisée et était parfois aussi absente dans certaines versions du texte <K>408. Nous verrons d'ailleurs que le vocabulaire et les stratégies rhétoriques sont, en tout point, conformes au texte <K>. Pourtant, il est issu d'une tradition tout autre et aucun des vers n'est commun aux deux textes. Malheureusement, notre texte (<Ant>) n'a été retrouvé nulle part ailleurs qu'à Antioche ad Cragum et donc nous ignorons à quel point cette tradition était répandue ou s’il s’agit d’un cas isolé. De ce qui en a été trouvé, les prédictions 1 à 38 sont presque entières. Si la prédiction XXXVIII est lisible en grande partie, le texte devient, par la suite, très lacunaire409. C'est donc plus de 65% de ce texte (38 énoncés / 56) qui nous est parvenu et nous y référerons pour confirmer/infirmer certaines analyses lorsque possible.

405 <K> pour koinè, voir supra note 186.

406 Les noms de certains dieux (Ant[II], Ant[VIII], Ant[X], Ant[XI], Ant[XIII] et Ant[XV]) ont été éradiqués lors

de la période chrétienne, mais il serait hasardeux d'en avancer la raison. Voir NOLLÉ (2007) p. 192.

407 "11113 [Apollon Pythio]s : / Phébus ne te révèle que des choses claires : / Tu auras du même coup Nike et les

dieux comme aide. / Dépêche-toi, mets-toi à l’œuvre, ne te retiens pas!".

408 Voir supra note 234. 409 NOLLÉ (2007) p. 192.

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Les oracles à sept astragaloi

Aussi édités par Nollé, des oracles cléromantiques faisant usage de sept astragaloi (donc 120 prédictions possibles) ont été découverts. Ils sont tous datés du IIe - IIIe siècle ap. J.-C.410 Ironiquement, seuls de très maigres fragments subsistent de ces plus longs textes. Leur principale contribution est de nous faire connaître l'existence d'une telle pratique.

Termessos

Le plus grand fragment a été retrouvé à Termessos, en Pisidie. Sept prédictions en ont survécu, soit à peine 5% du texte. Leur contenu ne diffère pas substantiellement de ce que nous avons vu jusqu'à maintenant. En voici un exemple :

ια αααααγγ

χεῖοι έντε μέν εἰσιν, τρῖοι ο· κλαῖρος ἄριστος· νχε ρει· ράξεις γὰρ ἀνελ στως, ἃ ροαιρῇ· καὶ τὰ φόβον αρέχοντα χαρὰν κέρ ος τε ρο ηλῦ· Ζῆνα μέγαν βασιλῆα σέβο καὶ Φοῖβον ἄνακτα.411

Aucun nom de dieu n'est inclus dans les en-têtes des sept prédictions conservées. Par contre, un vers descriptif pour le lancer suit immédiatement et se trouve tout juste au dessus de la prédiction qui s'étale sur trois hexamètres.

Selge

Aucune prédiction complète n'a pu être extraite des tables épigraphiques de Selge. En fait, la première moitié de la plupart des hexamètres est manquante. Il est toutefois possible d'en identifier les composantes. Voici l'énoncé le plus complet que nous en possédons :

ααςγ κγ [Δ]ιο[σ]κο ρων• οὐκ έλων βόσκεις ξηράν• κι[νῇ]ς ὲ ρὸς ἄλ[λην•] [καρ ός σοι] ἔσται λήρης χλωρῆς ἀ ' ἀρο ρης [ – ᴗ ᴗ | – ].ν τ' ὶ τὴν [ ᴗ ] ην• οὐ ε ς σε κρατήσει• [ – ᴗ ]έρων ἥκεις• νχε[ ρει•] μη ὲ βρά νε412 410 NOLLÉ (2007) p. 211-221.

411 "11 1111133 / Il y a cinq chios et deux fois des "trois": le meilleur lancer / Œuvre aux choses que tu

envisages, car tu les accompliras de façon inespérée: / Définis clairement ce qui te donne la crainte et ce qui te rapporte du profit. / Honore Zeus le grand roi et le maître Phébus".

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Encore une fois, les composantes s'apparentent à celles du Tableau 10 et la description du lancer en vers est absente. Élément nouveau : la prédiction s'étend sur quatre vers hexamétriques (et non trois).

Perge

Dans le cas de Perge, les fragments sont tellement minimes (des parcelles de mots tout au plus) qu'il est impossible d'en déduire quoi que ce soit. D'ailleurs, même l'utilisation de sept astragales, et non cinq, est très loin d'être une certitude pour ce texte.413 Mentionnons simplement son existence puisqu'il ne nous sera d'aucune utilité pour cette étude.

Les attestations en Thrace

Sont également dignes de mention deux fragments de textes astragalomantiques trouvés en Thrace; ne serait-ce que pour en attester la pratique dans cette région. Le premier fragment, édité par Kalinka414 présente une infime partie (deux mots par ligne) de quatre énoncés. La description du lancer en chiffre ainsi que la somme du lancer sont présents dans l’en-tête. Ceci permet de savoir, pour sûr, que cinq astragales étaient utilisés. Les prédictions suivent immédiatement, ne laissant aucune place à un éventuel vers de description du lancer (en mots). Le trimètre iambique semble avoir été utilisé pour énoncer les prédictions.

L'autre fragment a été retrouvé dans la ville de Philippopolis415. Aucun chiffre relatif au lancer n'a été préservé et donc aucune manière de connaître le nombre exact d'astragales utilisés. La

412 "23 4441163 Les Dioscures: / Bien que tu ne le veuilles pas, tu nourris une terre desséchée: Va vers une autre

terre: / Il y aura pour toi du profit sur une terre remplie de verdure /... : personne ne te dominera /... : Mets-toi à l'oeuvre, n'attends plus".

413 En fait, Nollé évoque des raisons plutôt douteuses; par exemple, le fait que le texte ait été ciselé dans des

plaques de marbre comme à Selge, ce qui constitue un mode de publication qui n'a jamais été observé pour les oracles à cinq astragales.

414 KALINKA (1906), no 162.

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seule partie restante d'un en-tête révèle le nom d'un dieu au génitif : les Ilithyies, divinités associées à l'enfantement. L'énoncé concerné comporte d'ailleurs plusieurs mots liés à la maternité416. Les prédictions, qui semblent s'étaler sur quatre vers, sont en trimètres iambiques.

Le peu que nous avons de ces textes permet tout de même de déduire qu’ils appartiennent à d'autres traditions que ceux d'Asie mineure. Ces fragments pourront toujours servir lorsque nous étudierons les thèmes couverts ainsi que le vocabulaire utilisé.

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