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Test de protection contre la Bluetongue souche Corse BTV-2

B. Application à la vaccination contre la fièvre catarrhale ovine

3. Test de protection contre la Bluetongue souche Corse BTV-2

-a- Protocole de vaccination

Afin de vérifier la capacité de nos virus myxomateux recombinés à protéger des moutons contre une souche virulente de sérotype homologue du virus de la Bluetongue, nous avons inoculé un groupe de 11 animaux avec un cocktail des cinq virus (SG33-NS1, SG33-NS2, SG33-NS3, SG33-VP7 et SG33-VP2). 2x106 à 107 pfu/virus/animal ont été inoculés par voie intradermique en deux injections à 21 jours d’intervalles (groupe « animaux vaccinés ») (Figure 14). Parallèlement nous avons inoculé dix animaux avec le virus recombiné SG33- VP60 (2x106 pfu/animal) (groupe « témoins négatifs »). Quarante-deux jours après la

première inoculation, les animaux ont été éprouvés avec la souche BTV-2 Corse fournie par Mérial (104 TCID50 par voie sous-cutanée) sous confinement A3 (unités expérimentales de

l’AFSSA à Sophia Antipolis). A l’issu de l’expérimentation, les animaux ont été euthanasiés et incinérés (J75).

-b- Suivi clinique des animaux

Une surveillance clinique a été réalisée de J0 à J7, puis de J21 à J28, soit pendant 7 jours post- inoculation des candidats vaccins, afin de surveiller l’apparition d’éventuels symptômes

Figure 14: Protocole expérimental de vaccination contre une épreuve virulente Bluetongue. Dix animaux ont été inoculés à J0 avec un cocktail vaccinal de 2x107 pfu de

chaque virus recombinant (SG33-NS1, SG33-NS2, SG33-NS3, SG33-VP7 et SG33-VP2) par voie intradermique et reboostés 21jours après avec ce même mélange et par voie intradermique à nouveau. A J42 post première injection, les animaux ont été challengés avec la souche Corse BTV-2 virulente fournie par la laobratoire Mérial. J75, constitue la fin de l’expérimentation tous les animaux encore vivants ont été authanasiés.

J0 J21 J42 J75 1ière injection rappel épreuve virulente BTV-2 euthanasie

locaux ou généraux et donc d’effets secondaires post-vaccination. Après l’épreuve virulente, un suivi clinique a été effectué tous les jours. Ce suivi clinique comprend une prise de température, une observation soigneuse des points d’injection et une notation des signes cliniques selon un système de « scoring » mis au point par Mérial en 2003 lors d’un essai de vaccination contre la Bluetongue (voir Annexes).

Suivi de la température

La température rectale physiologique d’un mouton se situe entre 38,5 et 40°C, au-delà nous considérons que l’animal est en hyperthermie. La Figure 15 présente la moyenne des températures des dix animaux pour le groupe « témoins négatifs » et des onze animaux du groupe « animaux vaccinés ». Le profil de la moyenne des températures pour les deux groupes est similaire. Avant l’épreuve virulente, les températures se situaient toutes dans un intervalle de 38,5 à 40°C, ce qui indique que les animaux ne réagissent pas à l’inoculation de notre cocktail vaccinal. En revanche, trois jours après l’inoculation de la souche virulente BTV-2, nous avons observé un pic thermique, dont le maximum est atteint huit jours post- épreuve (J50) avec des températures dépassant les 41°C et ce pour les deux groupes. Aucune différence significative n’est observée entre les deux groupes.

« Scoring » clinique

Après épreuve virulente, 3 moutons sur 10 sont morts dans le groupe « témoins négatifs » (taux de mortalité de 30 %) et 5 animaux sur 11 dans le groupe « animaux vaccinés » (taux de mortalité de 45 %).

Pour chaque animal, la moyenne des scores cliniques journaliers a été calculée à partir de J42 (jour de l’inoculation du BTV-2 souche virulente) jusqu’à J75 (fin de l’expérience et euthanasie des animaux encore vivants).

L’analyse des courbes de « scoring » clinique révèle un profil identique pour les deux groupes d’animaux caractérisé par une augmentation des scores cliniques à partir de J49, soit 7 jours après l’inoculation de la souche d’épreuve (Figure 15).

Figure 15: Suivi clinique des moutons lors de l’essai de vaccination protection contre la Bluetongue. Les courbes grises correspondent au groupe « témoin négatif ». Les

courbes noires correspondent au groupe d’animaux vaccinés avec le cocktail de MYXV recombinés. A. Courbes des moyennes journalières des températures. B. Courbes des moyennes des scores cliniques.

41,5 41 40,5 40 39,5 39 38,5 0 21 42 jours température (°C) 0 2 4 6 8 10 12

A

B

43 49 51 55 59 score clinique jours post épreuve

-c- Test sérologique: réponse contre les protéines VP7, NS1 et NS3

Des tests ELISA permettant de détecter les anticorps anti-VP7, anti-NS1 et anti-NS3 ont été développés par l’AFSSA et les analyses sérologiques ont été effectuées par l’AFSSA. Aucune réponse significative contre la VP7, NS1 ou encore NS3 n’a été détectée chez les animaux vaccinés avec le cocktail de SG33 recombinés avant l’épreuve virulente (données non montrées).

4. Discussion

Développer un vaccin alliant à la fois innocuité et efficacité vis-à-vis de la FCO reste à l’heure actuelle un objectif majeur en santé animale. Cette nécessité s’est accrue d’une part avec l’émergence de la maladie en Europe du Nord mais aussi par le fait que les bovins jusqu’alors considérés comme réservoirs asymptomatiques, manifestent désormais des signes cliniques non négligeables lors d’infection par le BTV-8. L’impact économique de la maladie sur les cheptels ovins et bovins est donc très important. Il existe à l’heure actuelle des vaccins à virus atténués « sérotype-spécifiques », mais se pose toujours la question de la bonne atténuation et de la pathogénicité résiduelle de tels vaccins. De plus, les 24 sérotypes du BTV n’induisant pas de protection croisée, la problématique d’un vaccin à large spectre de protection reste un enjeu de taille.

C’est donc dans cette optique-là que nous avons travaillé à l’élaboration d’une nouvelle stratégie vaccinale fondée sur l’utilisation de virus myxomateux recombinés.

En se basant sur les données encourageantes obtenues in vitro et in vivo avec un transgène témoin (VP60) (chapitre I des résultats), nous avons construit une batterie de virus SG33 (souche vaccinale du MYVX) recombinés: le SG33-VP7 exprimant la protéine VP7, antigène spécifique du groupe, les SG33-NS1, SG33-NS2 et SG33-NS3 produisant les protéines non structurales du BTV-2, protéines les plus conservées entre tous les sérotypes du BTV, et enfin le SG33-VP2 qui produit la protéine immunodominante déterminant le sérotype du BTV et inductrice d’anticorps séroneutralisant le virus BTV. Voulant obtenir à terme un large spectre de protection contre la Bluetongue, nous avons vacciné des moutons avec un cocktail contenant nos cinq virus recombinés. La protéine VP2 devrait générer des anticorps anti-VP2 neutralisants mais spécifiques du sérotype (Huismans & Erasmus, 1981; Jeggo et al., 1984;

Huismans et al., 1987; Mertens et al., 1987; Pierce et al., 1995). Les protéines NS1, NS2 et NS3, les plus conservées parmi tous les sérotypes du BTV, pourraient aider à une certaine protection croisée. Il a été montré que NS1 serait impliquée dans la génération d’une réponse immunitaire à médiation cellulaire. De même pour NS2, la vaccination de souris avec la protéine seule permet le développement d’une réponse cellulaire contre la NS2 et une protection partielle contre un virus de la vaccine recombiné exprimant la NS2 (Jones et al., 1997). La protéine VP7 de la capside interne serait elle aussi impliquée dans la génération d’une réponse cellulaire contre le virus (Wade-Evans et al., 1996). Ces protéines NS1, NS2 et VP7 s’accumulent en grande quantité pendant la réplication du virus et génèrent des LT cytotoxiques à la fois chez le mouton et la souris ( Jeggo & Wardley, 1982a; Jeggo & Wardley, 1982b; Jeggo & Wardley, 1982c; Jeggo et al., 1983; Jeggo et al., 1984; Jeggo et al., 1985; Jeggo & Wardley, 1985; Andrew et al., 1995; Jones et al., 1997). La protéine NS3 s’accumule elle aussi en grande quantité dans les cellules infectées, mais aucune information n’est connue quant à son implication dans l’induction de la réponse immunitaire.

Grâce à la génération au laboratoire d’anticorps de lapins spécifiques de la protéine VP7, nous avons montré que le virus recombiné SG33-VP7 produit la protéine VP7. Avec les protéines NS1 et NS3 fournies par l’AFSSA de Maisons-Alfort, nous avons tenté d’immuniser des lapins pour obtenir le même type d’outils. Cependant, aucune production d’anticorps spécifiques de ces deux protéines n’a été obtenue, sans doute parce que ces protéines non-structurales sont faiblement immunogènes et peut être particulièrement dans une espèce non-hôte du BTV comme le lapin. En ce qui concerne les protéines NS2 et VP2, elles ne sont pas encore disponibles car le clonage de leur ADNc reste encore difficile. C’est plus particulièrement le cas pour le gène de la VP2 qui est un long fragment d’environ 3000 pb très riche en A-T, posant des problèmes lors des étapes d’amplification par PCR. Pour compenser dans une certaine mesure ce manque d’outils nous avons réalisé des RT-PCR après infection de cellules par nos différents virus recombinés ce qui nous a permis de visualiser la production d’ARNm spécifiques des gènes NS1 et NS3. Les résultats des RT-PCR spécifiques des ARNm pour NS2 et VP2 sont douteux.

L’inoculation des virus myxomateux recombinés a été réalisée par voie intradermique, une des voies préférentiellement utilisées lors de la vaccination fondée sur l’emploi des vecteurs poxviraux. De plus, nous avons montré précédemment que les fibroblastes du derme de mouton, ainsi que des cellules présentatrices d’antigènes sont infectables et capables de

produire des antigènes viraux in situ (Chapitre I de la partie résultat, article #2). Ces données cumulées sont donc en faveur de cette voie d’inoculation. L’inoculation de notre cocktail de virus SG33 recombinés s’avère incapable de protéger les moutons contre une épreuve virulente du virus de la Bluetongue et ceci malgré le fait que le système d’expression adopté ait montré son efficacité avec un antigène témoin (VP60). Certains points sont donc encore à étudier et à améliorer dont la qualité de l’expression, la présentation des antigènes et leur prise en charge par les cellules présentatrices d’antigènes.