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2.3.1 / Terminologies autour des matériaux et des procédés : délimitation de notre champ d’action

/ Terminologies autour des matériaux

Au commencement, il y a la matière.

La conception classique de la matière repose sur la théorie des quatre éléments que sont l’eau, l’air, la terre et le feu de MEREDIEU 99. Les trois états de la matière sont l’état solide, l’état liquide et l’état gazeux. En physique, tout ce qui a une masse est considéré comme de la matière. « Matière » est donc un terme très générique pour désigner une réalité tangible.

La matière première est une ressource naturelle extraite de la nature et utilisée dans la production de produits finis, comme source d’énergie ou comme denrée alimentaire. Exemples : le pétrole, le gaz naturel, le caoutchouc, le blé, les minerais, le riz, le maïs, le sable (pour la fabrication du verre ou du silicium), etc.

En d’autres termes, une matière première est une matière destinée à la transformation pour produire des matériaux ou des demi-produits.

Les matières naturelles sont issues de la nature et possèdent trois origines : - Minérale (les métaux, les oxydes métalliques, les terres, les sables) - Végétale (les bois, les fibres naturelles, etc.)

- Animale (les cuirs, les cornes, l’ivoire, etc.)

Elles s’opposent aux matières artificielles (elles aussi obtenues à partir des matières premières naturelles) et

de synthèse (obtenues par la synthèse de composés chimiques) GUIDOT 06.

Un matériau est de la matière (naturelle, artificielle ou synthétique) utilisée pour la fabrication de demi- produits ou de produits finis et qui comporte des caractéristiques mécaniques, physiques et chimiques définies. Les matériaux peuvent être classés différemment selon leur nature (bois, verre, métaux, céramiques, polymères, composites, etc.), selon leur composition chimique, selon leurs propriétés, etc. ASHBY 04.

Le demi-produit (ou produit semi-fini) est un fragment de produit, élaboré à partir de la matière première ou d’un matériau et qui sera reconditionné ultérieurement. On peut ainsi considérer le demi-produit comme la frontière entre la matière première et le matériau ou bien comme la frontière entre le matériau et le produit fini.

Le composite est une association de plusieurs matières pour former un tout dont les propriétés seront supérieures à celles de ces composants pris séparément [MANZINI 93]. La plus part du temps, un composite est formé d’une structure (par exemple des fibres ou une trame) et d’une matrice (par exemple un thermoplastique) qui orientent les moyens de mise en œuvre du composite obtenu. Un composite est donc un matériau mais peut également être un demi-produit.

/ Terminologies autour des procédés

Les procédés de mise en œuvre sont l’ensemble des opérations qui transforment et qui confèrent des propriétés aux matériaux. Tout comme les matériaux, il existe différentes typologies de procédés comme la mise en forme, la découpe, l’assemblage et la finition.

Dans la littérature, on ne dissocie pas le matériau de son procédé de mise en œuvre. C’est le « système matériau-procédé » : « Un matériau final gardera, comme par héritage génétique, les signes de toutes les

étapes du procédé qui en détermine la structure microscopique, la macrostructure (s’il s’agit d’un composite), et la forme finale. » MANZINI 93

[SAGOT 05]. En 1980, la Mission du Patrimoine Ethnologique incite à protéger et à mettre en valeur les savoir-

faire comme ceux, divers et variés, relatifs aux techniques de construction, à la coutellerie, au tissage de la soie, à la fabrication de couverts en argent, etc. en réaction aux mutations technologiques, économiques et sociales qui conduisent à leur raréfaction www.gouv.culture.fr.

Deforge (1993) propose une définition du savoir-faire «comme une capacité de réussir une activité particulière

par un engagement personnel. Les savoir-faire comportent (peut-être) une part d’instinct (instinct du chasseur) et une part d’inné (le goût, le talent, la volonté) sous-tendant et facilitant leur acquisition ; une part d’acquis (par l’apprentissage) et une part de conquis (par l’apprentissage personnel).» La part d’intériorisation ainsi que

la part d’affectif liées au savoir-faire le rend particulièrement difficile à expliciter [CHEVALLIER et CHIVA 91]. A ce sujet, Deforge évoque également ce fait intéressant « quand au XVIII° siècle Diderot veut rassembler dans

son Encyclopédie ou dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers des éléments d’information sur les métiers, il se heurte à des artisans qui ne peuvent ou ne veulent exprimer ce qui était l’essence de leur métier. »

Les « savoir-faire » ne concernent pas seulement les pratiques anciennes liées aux matières traditionnelles. Un savoir-faire peut également être une expertise relative à des matériaux nouveaux, voire technologiques. Dans ce cas les problématiques seront les mêmes qu’avec des savoir-faire traditionnels (apprentissage, talent, etc.) ci ce n’est que les savoir-faire nouveaux ou actuels sont moins confrontés à la raréfaction des pratiques.

Les procédés sont indissociables des matériaux, ils les accompagnent dans leurs évolutions formelles nécessaires à la création de l’objet final. Pour illustrer ce phénomène, partons du sable, matière première naturelle d’origine minérale, qui lorsqu’il est mélangé avec de l’eau (élément naturel) devient un matériau. Ce matériau acquière alors certaines propriétés qui lui permettent d’être mis en forme. Le sable moulé, puis démoulé, devient un objet (voir figure ci-dessous).

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Pour conclure cette partie, nous proposons les trois figures suivantes qui synthétisent et qui illustrent la progression de la matière vers l’objet. Ainsi, dans cette recherche, lorsque nous évoquons « les matériaux et les procédés » c’est de la façon la plus large, en incluant à la fois la matière première, le demi-produit et parfois même le produit fini.

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Figure 40 : Illustration du cycle de la matière naturelle vers l’objet : cas du Crinolin. Le crinolin est un textile employé (et créé) par Hermès pour la confection de sacs notamment. Ce tissage est composé d’une chaîne en fil de lin et d’une trame en crin de cheval.

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Figure 41 : Illustration du cycle de l’objet vers un nouvel objet : cas du sac conçu pour l’exposition « Le cas du sac ». Réalisation Luisa Cevese. Le carré de soie Hermès est un produit fini. Découpé en bandelettes, il devient un demi-produit utile à la confection du sac de Luisa Cevese. Les bandelettes seront incluses dans du polyuréthane souple et translucide, une matière composite qui sera ensuite découpée et cousue pour former le sac.