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3 d’après Avena et al (1999a).

2.2.4.6. Tension superficielle

La variation de la taille peut être reliée à la formation d’agrégats en solution. La mesure de tension superficielle γ est reliée à “l’expulsion hydrophobe” de la solution des composés amphiphiles qui se répartissent à l’interface eau-air (Tanford, 1980; Lyklema, 1995). Cette propriété est souvent utilisée pour déterminer les concentrations micellaires critiques (CMC) des tensio-actifs. Au-delà de la CMC, les « monomères » de tensio-actifs ne se repartissent plus à la l’interface, mais s’agrégent en solution ; la

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pente de γ en fonction de la concentration n’est pas rigoureusement nulle ; quelques éléments de base des agrégats peuvent donc encore se répartir à l’interface eau-air.

Wershaw et al. (1969) rapportaient déjà la décroissance de γ en fonction de la concentration en solution (Figure 2-12) entre 0 et 1% massique d’acide humique en solution. Plus tard, Tschapek & Wasowski (1976) ne montraient pas de variation de γ en fonction de la concentration en acides humiques. Il faut noter que les auteurs ne précisent pas le temps de mise à l’équilibre contrairement à d’autres auteurs (Hayase & Tsubota, 1983). En revanche, ils constatent une plus grande variabilité des valeurs de γ pour les humiques que pour l’heptanol, ceci peut être relié au temps nécessaire pour le changement de conformation en solution. Chen & Schnitzer (1978), dans le cas de substances humiques issues d’un sol, montrent un changement de pente de γ en fonction de log CSH, donc un changement de répartition à l’interface eau-air, pour des concentrations supérieures à 10 g.L-1 pour un pH de 12,7.

Hayase & Tsubota (1983) ont aussi mis en évidence une variation de la tension superficielle de solutions d’acides humiques et fulviques issus d’un sédiment marin. La mesure de γ prend en compte le temps de mise à l’équilibre (15-60 heures). Après filtration de la solution mère d’acide humique en fractions de taille inférieure à 10 kDa, 10-50 kDa, 50-100 kDa, 100-300 kDa et supérieure à 300 kDa, les auteurs rapportent que les fractions fulviques et humiques inférieures à 10 kDa sont les plus actives : γ(25°C) = 36,8 et 32 mN/m respectivement (dyne/cm) (Figure 2-12). Les valeurs de γ se stabilisent entre 7 et 20 g.L-1. L’extrait fulvique semble avoir une influence plus grande sur γ que l’extrait humique.

Guetzloff & Rice (1994), quant à eux, ont aussi étudié les variations de γ pour l’acide humique Aldrich à

pH 12,3 (I ≈ 0,02 mol.L-1), sans noter de temps d’équilibre. Ces auteurs montrent une stabilisation de la

valeur de γ vers CAH ≈ 8-10 g.L-1. Guetzloff & Rice (1994) proposent une valeur de « concentration

micellaire critique » pour les acides humiques de 7,4 gAH.L-1. D’après les résultats de Hayase & Tsubota

(1983), cette valeur semble dépendre de l’extrait utilisé. Anderson et al. (1995) utilisent des concentrations de moins de 160 mgC.L-1, trop faibles comparées à celles de Hayase & Tsubota (1983)

ou Guetzloff & Rice (1994), ainsi que les valeurs de γ pour l’acide fulvique et humique de Suwannee River (SRFA et SRHA) comparées à toutes les valeurs des autres auteurs.

Yates & von Wandruszka (1999) ont mesuré les variations de γ en fonction du pH pour différents extraits. Les différents échantillons de substances humiques analysés ont un comportement comparable (Figure 2-11). La valeur de γ subit une décroissance initiale due à l’ionisation des fonctions carboxyliques induisant un caractère amphiphile, ou due au phénomène d’agrégation-désagrégation des acides humiques à faible pH (voir Figure 2-5, 2-6 et 2-9) qui diminue le nombre de molécules susceptibles de se répartir à l’interface. Après un passage par une valeur minimale, cette diminution est suivie d’une remontée traduisant l’ionisation progressive des autres fonctions de pK plus élevé diminuant ainsi le caractère amphiphile et atteignant une valeur proche de celle de l’eau pure (72 mN.m-1).

Substances humiques : définitions et propriétés Propriétés physico-chimiques 5.5 6.0 6.5 7.0 7.5 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 pH γ (N /m x 10 2) SRFA LHA LHACB LSLHA SRHA

Figure 2-11 : Variation de la tension superficielle en fonction du pH pour des solutions d’acide humique et acide fulvique à 500 mg.L-1 d’après Yates & von Wandruszka (1999) : SRFA, acide

fulvique de Suwannee River ; LHA, acide humique de Leonardite ; LHACB, mélange non traité d’acide humique de Leonardite ; SRHA, acide humique de Suwannee River.

L’augmentation de la tension superficielle pour des pH supérieurs à 4 est confirmée par Terashima et

al. (2004), pour un acide humique issu d’une tourbe. Le nombre de molécules à l’interface augmente

avec le pH, pouvant traduire un changement d’organisation à l’interface. La variation en fonction de la concentration en acide humique montre aussi une décroissance quasi linéaire jusqu’à 1 g.L-1 ; ce qui est

nettement inférieur aux valeurs de Hayase & Tsubota (1983) ou Guetzloff & Rice (1994). Les inflexions sont aussi moins marquées.

Svenningsson et al. (2006) ont comparé les évolutions de γ pour différentes molécules et extraits organiques dont l’acide fulvique IHSS, qui doit être SRFA. Les concentrations sont données en molC.L-1, ce qui peut être corrigé en g.L-1 par la proportion de carbone (52,34%). Les valeurs de γ sont

relativement importantes, ce qui nous laisse penser que la décroissance observée par les autres auteurs n’est pas encore atteinte (Figure 2-12).

A partir de ces données, il est possible de recalculer l’occupation par ‘molécule’ à partir de la pente maximale de l’équation d’adsorption de Gibbs :

Γmax = n RT 1 dln C

où R est la constante des gaz (8,314 J.mol-1.K-1), T la température absolue (K), Γ l’excès de molécule

par unité de surface (mol.m-2), C la concentration molaire et n le préfacteur de Gibbs. Le fait que C soit

en mol.L-1 pourrait être perturbant mais en fait la valeur de la pente RTΓ ne dépend pas de la valeur de

masse molaire moléculaire choisie pour les substances humiques. La valeur de l’aire minimale occupée par une molécule du mélange est obtenue par :

Amin = Γ 1

max × Na⇒

1

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Les valeurs de Amin obtenues pour les différents auteurs, recalculées à partir de numérisation des

figures originelles, sont du même ordre de grandeur sauf pour Anderson et al. (1995) dont nous avons noté les faibles valeurs de γ, ce qui est confirmé par la comparaison des différentes valeurs sur la Figure 2-12. Le Tableau 2-4 présente la compilation des valeurs de Amin obtenues d’après les données de la

Figure 2-12. Les valeurs de CSH en mol.L-1 sont obtenues d’après une masse molaire moléculaire de 550 g.mol-1. En fait, pour des faibles valeurs de γ, les valeurs de dγ/dlnC sont trop faibles et sont

rejetées lors des régressions linéaires : acides humiques pour Chen & Schnitzer (1978), Terashima et al. (2004).

Pour ces différents extraits, les molécules responsables de l’effet de surface semblent donc avoir une occupation de l’interface eau-air comparable.

Tableau 2-4 : Comparaison des valeurs d’aires occupées par une unité de substances humiques d’après les pentes de γ = f(Ln cAH g.L-1/550 g.mol-1).

Auteurs pH A ± σ (Ų/molécule)

Wershaw et al. (1969) AH ? ? 62,9 ± 9,6

Tschapek & Wasowski (1976) AH brown coal 5 70,4 ± 3,2

7 74,5 ± 2,0

9 92,3 ± 4,4

Chen & Schnitzer (1978) AF sol 12,7 96,5 (121 ± 5)

AH sol 12,7 40,4 (41,6 ±2,9)

Hayase & Tsubota (1983) AH sédiment 8 47,8 ± 1,7

AF sédiment 8 52,6 ± 0,6

Guetzloff & Rice (1994) AH Aldrich 12,3 127 ± 11

Tuckermann & Cammenga (2004) AH ? 74,1 ± 3,1

Anderson et al. (1995) AH 1196 ± 226

AF 454 ± 23

Terashima et al. (2004) AH 6 63,1 ± 2,0

Svenningsson et al. (2006) SRFA ( ?) ? 140 ± 45

0.025 0.035 0.045 0.055 0.065 0.075 -14 -12 -10 -8 -6 -4 -2 0 Ln(C g/L / 872.9 g/mol) γ (N /m )

SRHA Anderson et al. (1995) SRFA Anderson et al. (1995) Terashima et al. (2004) FA Hayase & Tsubota (1983) HA Hayase & Tsubota (1983) Guetzloff & Rice (1994) FA Chen & Schnitzer (1978) HA Chen & Schnitzer (1978) Wershaw et al. (1969)

pH 5 Tschapek & Wasow ski (1976) pH 7 Tschapek & Wasow ski (1976) pH 9 Tschapek & Wasow ski (1976) Svenningsson et al. (2006)

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