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L’étude de la dynamique de la fluorescence donne accès à une grandeur appelée temps de vie expérimental τexp. Le temps de vie expérimental est comparable au temps de vie radiatif à condition que la

concentration en ions luminescents soit peu élevée et que la part de désexcitation non radiative soit négligeable. La deuxième condition est remplie d’office pour l’ion ytterbium car le niveau d’énergie situé directement en dessous du niveau émetteur est suffisamment loin de celui-là pour que la désexcitation multiphonons soit minoritaire.

L’émission radiative suit une loi de décroissance exponentielle :

)

exp(

)

0

(

)

(

exp

τt

N

t

N

=

Eq. 5

où N(t) est le nombre d’ion Yb3+ se désexcitant radiativement au temps t

Le temps de vie expérimental est donc directement la pente de décroissance de l’intensité de fluorescence en fonction du temps en échelle logarithmique. Les courbes de déclins sont obtenues en

excitant l’ion Yb3+ dans le niveau 2F5/2 par pompage optique à 900 nm. La détection du signal se fait

à 1040 nm. A titre d’exemple un déclin de fluorescence est montré sur la figure III-17.

0,000 0,002 0,004 0,006 0,008 0,010 0 2 4 6 8 YCOB : Yb 0,05%

longueur d'onde d'excitation 900 nm longueur d'onde de détection 1040 nm

τexp=1,38 ms intensité de fl uoresenc e (u.a. ) temps (s)

Figure III- 17 : déclin de fluorescence du niveau 2F5/2 de l’ion Yb3+ dans le YCOB dopé à 0,05%

0 10 20 30 40 50 60 70 80 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 3,5

temps de vie radiatif théorique échantillons frittés échantillons monocristallins échantillons frittés, fondus puis trempés

te m p s de v ie radiat if e x périm ent a l (m s ) concentration en ytterbium (%)

Figure III- 18: temps de vie expérimentaux du niveau 2F5/2 de l'ytterbium dans l'YCOB en fonction de la

concentration

Sur la sont portés les temps de vie expérimentaux mesurés sur des échantillons de concentration et de nature variable. Lorsque les mesures sont effectuées sur des monocristaux, les temps de vie sont nettement plus longs que s’il s’agit de poudre polycristalline. Par ailleurs au sein de ces deux familles, les temps de vie dépendent également de la concentration en ytterbium insérés dans la matrice. Plusieurs phénomènes entrent en compétition ici et expliquent ces variations :

- Le transfert d’énergie non radiatif entre les ions ytterbium. Un ion ytterbium porté dans son état excité, peut transférer directement son énergie à un ion ytterbium voisin qui passe à l’état excité. Ceci a pour effet d’allonger artificiellement le temps de vie puisque, tant que l’énergie est transférée entre les ions, elle n’est pas ré-émise sous forme de lumière. Ce

phénomène est d’autant plus marqué que la concentration en ytterbium est importante dans la matrice.

Yb

3+

Yb

3+

- Il y a transfert d’énergie radiatif sous forme d’émission - réabsorption. Un ion ytterbium se désexcite radiativement, mais sur le trajet la lumière émise est réabsorbée par un autre ion ytterbium, si bien que le temps de vie est, comme précédemment, surestimé. Ce phénomène augmente lorsque la concentration en ytterbium augmente et lorsque l’épaisseur d’échantillon traversée par le signal augmente.

Yb

3+

Yb

3+

- les défauts cristallins induisent une extinction de la fluorescence. Ces défauts forment des pièges qui absorbent l’énergie des ions ytterbium et la transforment en énergie thermique. Ce phénomène est plus rapide que la désexcitation radiative, donc il abaisse le temps de vie mesuré. L’extinction est d’autant plus forte que la concentration de défauts est grande.

- Il y a agrégation des ions ytterbium. Les niveaux d’énergie des ions agrégés sont différents des niveaux d’énergie des ions isolés. Les possibilités de désexcitation non radiatives sont donc augmentées et le temps de vie expérimental diminue. Le phénomène d’agrégation augmente avec la concentration en ions ytterbium.

L’extinction de la fluorescence induite par les défauts est la cause de la baisse du temps de vie expérimental quand on passe d’un échantillon monocristallin à un échantillon fritté. De même, le temps de

vie baisse quand on passe d’un échantillon seulement fritté à un échantillon fritté puis fondu et trempé, car ce traitement thermique supplémentaire augmente la quantité de défauts dans la matrice.

De façon générale pour les trois types d’échantillons, les courbes de temps de vie expérimental en fonction de la concentration en ions Yb3+ sont croissantes puis décroissantes quand la concentration en ytterbium augmente.

Aux fortes concentrations le phénomène majoritaire est l’agrégation des ions ytterbium. Il provoque la baisse du temps de vie expérimental. Ceci explique la partie décroissante de la courbe.

Aux faibles concentrations, l’agrégation est minoritaire. Ce sont les transferts entre ions ytterbium (radiatifs et non radiatifs) qui prédominent et expliquent l’allure croissante des courbes.

Le changement d’allure des courbes a lieu à des concentrations différentes suivant que les échantillons sont monocristallins ou pulvérulents. Dans le cas des monocristaux l’effet du transfert radiatif entre ytterbium est important puisque l’épaisseur d’échantillon traversée par le signal est élevée. Ceci a pour effet d’élever le temps de vie expérimental. Au contraire dans le cas des poudres, le nombre d’agrégats est sans doute plus élevé que dans les monocristaux à concentration en ytterbium égale. Ces deux phénomènes expliquent pourquoi les courbes de temps de vie expérimental atteignent leur maximum pour des concentrations en ytterbium plus faibles dans le cas de poudres par rapport aux monocristaux.

Il faut noter que les deux premiers phénomènes (transfert d’énergie non radiatif et émission-réabsorption) ne changent en rien le fonctionnement laser du matériau. Il en résulte que les temps de vie mesurés expérimentalement par dynamique de fluorescence ne sont pas fiables pour évaluer les potentialités laser de nos cristaux, ils sont artificiellement surestimés. Nous choisissons en conséquence d’utiliser la valeur du temps de vie radiatif théorique, et non pas expérimental, dans toute la suite de ce travail.