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A l’œil nu, si l’on écarte les parties contenant les nappes de bulle, les cristaux de YCOB : Yb élaborés par la technique Czochralski semblent optiquement sans défaut. Cependant les applications optiques de ces cristaux sont sensibles à des inclusions de petites taille ou bien à des variations locales d’indices qui demeurent invisibles à l’œil nu. Nous utilisons ici deux méthodes pour traquer ces imperfections, au cas où elles seraient présentes dans notre matériau.

a -Image en lumière polarisée

Nous avons vu au chapitre I que pour toute direction de propagation k il existe deux lignes neutres dans le plan perpendiculaire à k, suivant lesquelles une onde plane monochromatique polarisée linéairement peut se propager. Si l’on place un cristal entre polariseur et analyseur croisés, la direction de propagation est alors la normale à ces deux lames optiques, et il y a extinction chaque fois que analyseur et polariseur sont respectivement parallèle et perpendiculaire à une des deux lignes neutres. Ceci est toujours vrai, sauf dans le cas particulier où la direction de propagation est confondue avec un axe optique. Alors le cristal se comporte de façon isotrope et aucune extinction ne peut avoir lieu. En position d’extinction, un cristal sans défaut devient noir uniformément, il disparaît. Par contre si le cristal contient des inclusions ou des bulles, celles-ci font contraste avec le cristal éteint et apparaissent de façon brillante. Ce dispositif simple permet de visualiser des défauts invisibles à l’œil nu.

En remplaçant dans le système précédent la source d’éclairage blanche par une lampe à vapeur de mercure, source multiraies, on obtient des phénomènes d’interférence extrêmement sensibles aux variations locales d’indice. Les irisations visualisées rendent comptent des inhomogénéités d’indice dans le cristal.

Figure II-6 sont reproduites trois photos de cristaux issus du même tirage Czochralski. Il s’agit d’un cristal de YCOB : Yb dopé à hauteur de 15%. Des cristaux ont été taillés et polis perpendiculairement aux trois axes cristallophysiques X, Y et Z, la direction de croissance étant confondue avec l’axe Y (soit l’axe b cristallographique). Des inhomogénéités d’indice sont visibles sur les cristaux normaux à Y et Z. Elles sont clairement liées aux conditions de croissance du cristal. Sur les photos a) et b) une zone elliptique au cœur du cristal se détache fortement du pourtour, qui est lui-même scindé en deux parties égales par une ligne droite. Sur la photo c) on retrouve la trace de la différence d’indice entre le cœur et le pourtour. Par ailleurs, des lignes rectilignes partant du cœur et montant vers la périphérie du cristal délimitent l’interface triple convexe sur laquelle la croissance a eu lieu pendant le tirage. En dehors de cette zone de cœur, l’indice semble constant. Toujours dans le plan de la direction de croissance mais perpendiculairement à l’axe X, le cristal de la photo d) est cette fois-ci homogène. Il est à noter que, dans ce cas, la coupe a été réalisée en dehors de la zone de cœur. Il est donc possible, en choisissant judicieusement la zone du cristal à exploiter, d’extraire une lame homogène en indice. Ces photos indiquent également dans quelle zone du cristal il est préférable de focaliser le faisceau de pompe pour éviter des variations d’indices au cours des tests laser.

a)

b)

c) d)

Figure II- 6 : photo des cristaux de YCOB : Yb 15% obtenues en lumière polarisée a) cristal poli perpendiculairement à Y éclairé en lumière blanche b) cristal taillé perpendiculairement à Y éclairé par une lampe à vapeur de mercure c) cristal taillé perpendiculairement à Z éclairé par une lampe à vapeur

de mercure d) cristal taillé perpendiculairement à X éclairé par une lampe à vapeur de mercure

b -Distorsion du front d’onde

Les fronts d’onde sont les surfaces d’égale phase. En lumière monochromatique parallèle, ils sont mis en évidence grâce aux phénomènes d’interférence produits par une différence de chemin optique.

Dans un premier temps, la planéité des faces est observée en faisant interférer les rayons réfléchis par la face supérieure du cristal et les rayons réfléchis par la face inférieure. La différence de marche est alors reliée à l’épaisseur de cristal traversée deux fois par le deuxième rayon. Les images produites en Figure II- 7 montrent des franges parallèles fortement déformées au voisinage de la périphérie. La planéité est donc mauvaise dans toute la région située à moins de 0,5-1 mm du bord de l’échantillon. En revanche dans toute la partie centrale, la planéité est bonne puisqu’elle est évaluée à environ λ/4.

1 cm

Figure II- 7 : visualisation de la planéité d'un échantillon de YCOB : Yb (35%) taillé perpendiculairement à Y

Dans un deuxième temps, les fronts d’onde à proprement parler sont visualisés.

La méthode consiste à utiliser un Zygo, c’est à dire un interféromètre à deux ondes, dont le plan de référence peut être translaté de quelques fractions de λ de manière contrôlée. La source est un laser de grande longueur de cohérence. Les franges d’interférence sont visualisées par une caméra vidéo et numérisées. Un logiciel permet alors de calculer la phase en chaque point. Puis, un deuxième programme effectue la soustraction des aberrations, comme le tilt, c’est à dire le basculement global de la surface étudiée ou bien le focus, c’est à dire le défaut de mise au point.

La forme des fronts d’onde rend compte des inhomogénéités de chemin optique à travers un échantillon taillé sous forme de lame à faces parallèles, mais également du défaut de parallélisme de cette lame. La différence maximale de chemin optique entre le point le plus en avance et le point le plus en retard de la surface d’onde est mesurée : c’est la distorsion du front d’onde (voir Figure II- 8). Pour les deux échantillons testés les résultats sont λ/2,6 et λ/2. Cette déformation du front d’onde a deux origines, le défaut de planéité et les inhomogénéités d’indice. Or les franges sont peu déformées et régulières, sauf près des bords. Cela indique que les cristaux sont optiquement assez homogènes.

Figure II- 8 : visualisation de la déformation du front d'onde sur un échantillon de YCOB : Yb (35%)