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CHAPITRE 3 : ETUDE DE LA REACTION AU FEU DES VEGETAUX

3.1. A LLUMABILITE THERMIQUE

3.1.1. Temps d’ignition

Le temps d’ignition a été déterminé en fonction du diamètre des brindilles et de l’épaisseur des feuilles de ciste. Les échantillons étaient placés sous le cône chauffant et exposés à un flux de 50 kW.m-2. Après déshydratation, la dégradation du combustible produit un mélange gazeux composé d’espèces combustibles et non combustibles (Tihay, Santoni, et al. 2009). Lorsque les conditions d’inflammations sont atteintes l’ignition se produit. La Figure 31 présente le temps d’allumage obtenu pour chaque échantillon en fonction de leur épaisseur.

Figure 31 : Temps d'ignition tig en fonction de l’épaisseur caractéristique des échantillons (épaisseur de feuille et diamètre des brindilles)

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Nous observons une variabilité assez importante d’un réplica à l’autre. Ceci peut être dû à plusieurs facteurs, notamment aux conditions ambiantes (température, pression et humidité de l’air), à la disposition des branches dans le panier (permettant une aération plus ou moins bonne), mais également au type d’allumage. Deux types d’allumage ont été observés. Une auto-inflammation des gaz de dégradation, plus ou moins proche de la surface des échantillons (Figure 32a). Ce type d’allumage est le plus fréquent, observé dans 99 expériences sur 102 réalisées. Et un allumage par rougeoiement (Figure 32b) c’est-à-dire qu’une des brindilles ou un morceau d’écorce rougeoie sous l’effet de la chaleur, créant une braise incandescente qui enflamme les gaz de dégradation. En revanche, nous n’avons pas observé d’allumage piloté par le biais de l’allumeur piézo-électrique.

Figure 32 : Images enregistrées en caméra rapide représentant les différents types d’allumage

observés a) auto-inflammation des gaz et b) allumage piloté par rougeoiement

La Figure 33 présente la moyenne des temps d’allumage des échantillons de ciste et de fougère en fonction de leur épaisseur caractéristique. Pour le ciste, la courbe du temps d'allumage croît de façon quasi-linéaire pour des brindilles dont l’épaisseur est comprise entre 1 et 4 mm. Puis elle atteint un palier correspondant à une valeur maximum. Cette asymptote à la courbe se situe aux alentours de 50 secondes. Ces deux comportements sont en accord avec les théories concernant l’allumage des particules thermiquement fines d’une part et thermiquement épaisses d’autre part (Quintiere 2006). En effet, dans le cas de particules thermiquement fines le temps d’allumage est fonction du diamètre :

𝑡𝑖𝑔 = 𝜌𝑐𝑑

𝑞̇′′ (𝑇𝑖𝑔− 𝑇𝑎) (53)

Et dans le cas de particules thermiquement épaisses le temps d’allumage est indépendant du diamètre des particules :

𝑡𝑖𝑔 = 𝜋

4𝜆𝜌𝑐 (𝑇𝑖𝑔−𝑇𝑎

𝑞̇′′ )2 (54)

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avec Tig et Ta (K) la température d’allumage et la température ambiante, d (m) le diamètre des particules, ρ (kg.m-3) la masse volumique, c (J.kg-1.K-1) la capacité calorifique massique, λ (W.m-1.K-1) la conductivité thermique et 𝑞̇′′ (W.m-2) la densité de flux thermique.

Pour les brindilles dont l’épaisseur est supérieure à 13 mm, deux tendances apparaissent. Nous observons d’une part des temps d’ignition proches de la valeur de l’asymptote qui confirment la théorie sur les particules thermiquement épaisses. Toutefois, nous notons également des valeurs de temps d’ignition proches de celles observées pour les particules les plus fines (1 et 2 mm d’épaisseur). Ceci peut s’expliquer par le comportement de l’écorce des brindilles et des branches, qui se détache parfois sous l’action de la chaleur pour les échantillons de diamètre supérieur à de 13 mm. L’épaisseur de l’écorce varie entre 0,4 à 1 mm pour ces échantillons. Après s’être détachée, elle se dégrade comme les particules les plus fines et provoque alors l’allumage des gaz au raz des échantillons. Ceci explique que pour certaines expériences sur des échantillons d’épaisseurs supérieurs à 13 mm les temps d’allumage soient semblables à ceux observées lors d’expériences sur les échantillons les plus fines.

En ce qui concerne la fougère, les temps d’allumage des feuilles (vertes et au repos végétatif) sont similaires à ceux des feuilles de ciste. En effet, leurs épaisseurs sont voisines (0,75 ± 0,12 mm pour les feuilles de ciste et 0,5 ± 0,1 mm pour les feuilles de fougères) et leur comportement à l’allumage sont donc analogues. En revanche, le temps d’allumage des tiges de fougère vertes (en vert sur la figure) coïncide avec celui des branches de ciste de 1 mm d’épaisseur alors que leur diamètre est plus important (5 mm). On remarque également que le temps d’allumage des tiges de fougères au repos végétatif (en marron sur la figure) est encore plus faible et proche du temps d’allumage des feuilles. Ce comportement est certainement dû à la structure des tiges de fougère (Figure 34) qui sont plus ou moins creuses à l’intérieure selon l’état du végétal, contrairement aux branches de ciste qui sont pleines. Cette géométrie freine la conduction à l’intérieur de l’épaisseur de la tige (l’air interne joue le rôle d’un isolant), ce qui favorise la montée en température de la couche externe et accélère sa dégradation thermique. A l’inverse, la conduction à l’intérieur des branches de ciste va ralentir la montée en température de leur couche externe.

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Figure 33 : Temps d'ignition tig moyen en fonction de l’épaisseur caractéristique des échantillons (les symboles en vert et en marron représentent la fougère verte ou sèche

respectivement)

Figure 34 : Photographies des structures des combustibles : a) branche de ciste, b) tige de fougère verte et c) sèche

Au vu de ces résultats, l’hypothèse de considérer les particules d’épaisseur caractéristique inférieure à 6 mm dans les modèles de propagation d’incendies ne semble pas validée pour des densités de flux de 50 kW.m-2. En effet, la Figure 33 montre clairement que les particules de diamètre 6 mm ont un temps d’allumage équivalent à celui des particules dont le diamètre est plus important (jusqu’à 20 mm). Il n'y a donc pas de raison de prendre cette épaisseur caractéristique comme limite. Notre étude démontre que pour du combustible mort exposé à une densité de flux radiatif de 50 kW.m-2 seules les particules dont l’épaisseur caractéristique est inférieure ou égale à 3 mm ont un temps d’allumage inférieur à 50 secondes.

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On peut donc classer ces particules en deux catégories. La première catégorie comprend les feuilles et les brindilles dont le diamètre est inférieur à 4 mm. La seconde catégorie comprend les brindilles et les branches dont le diamètre est supérieur ou égal à 4 mm, pour lesquelles l’écorce n’a pas d’influence sur l’allumage. La transition entre les deux comportements se produit pour des particules d’épaisseur caractéristique égale à 4 mm. Sur 102 expériences réalisées, seules 11 cas d’allumages dus au détachement de l’écorce ont été observés, ce type d’allumage peut donc être négligé pour ce classement.