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CHAPITRE 2 : MATERIEL ET METHODES

2.2. D ISPOSITIFS EXPERIMENTAUX

2.2.1. Présentation des calorimètres et technique de calorimétrie par consommation

La réaction au feu des végétaux est étudiée depuis une dizaine d’année à l’aide de dispositifs expérimentaux initialement prévus pour les matériaux de construction. Ces outils sont principalement basés sur la technique de la calorimétrie par consommation d’oxygène afin de mesurer la puissance des feux (combustibilité). Ils permettent également d’étudier l’allumabilité et la combustibilité des matériaux. En laboratoire, le cône calorimètre (ISO 5660) est certainement l’équipement le plus utilisé.

Pour ces travaux de thèse, un cône calorimètre FTT® a donc été utilisé à l’échelle dite matériau (Figure 13). Ce dispositif répondant à la norme ISO 5660, permet d’étudier le comportement au feu d’un matériau dans des conditions d’inflammabilité contrôlées. Il fournit plusieurs grandeurs dont le délai d’inflammation, la perte de masse, la puissance dégagée, la production des fumées ainsi que la production de CO et de CO2 et la consommation de O2. Le cône se compose comme suit :

- Un élément chauffant assurant l’irradiation de l’échantillon avec une densité de flux radiatif constante pouvant atteindre 100 kW.m-2,

- Un fluxmètre indiquant la valeur du flux incident. Dans cette étude, la densité de flux a été fixée à 50 kW.m-2 en portant l’élément chauffant à 752°C,

- Une cellule de pesée,

- Un allumeur piézo-électrique servant à créer une étincelle pour effectuer un allumage piloté (non utilisé dans notre étude),

- Une hotte de 15 cm × 15 cm,

- Un conduit d’extraction des gaz de combustion (débit volumique d’extraction de 24 L.s-1), - Un laser He-Ne (0,5 mV) émettant dans l’infrarouge à une longueur d’onde de 633 nm, - Un analyseur de gaz infrarouge non dispersif (IRND) permettant d’analyser le CO et le CO2, - Un analyseur paramagnétique pour analyser le O2.

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Figure 13 : Photographie du cône calorimètre

Un grand calorimètre appelé Large Scale Heat Release rate calorimeter (LSHR) FTT® (Figure 14) a été utilisé pour les expériences de combustion à l’échelle système. Ce dispositif répond à la norme ISO 9705 et fourni les mêmes mesures que le cône calorimètre : le délai d’inflammation, la perte de masse, la puissance dégagée, la production de fumée ainsi que les espèces chimiques émises telles que le CO et le CO2 et la consommation de O2. Le LSHR se compose comme suit :

- Une hotte de 3 m × 3 m,

- Un conduit d’extraction des gaz de combustion ayant un débit volumique d’extraction de 1 m3.s-1,

- Un laser He-Ne (0,5 mV) émettant dans l’infrarouge à une longueur d’onde de 633 nm, - Un analyseur IRND et un analyseur paramagnétique communs au cône calorimètre.

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Figure 14 : Photographie de la hotte du LSHR

Le cône calorimètre et le LSHR permettent de déterminer la puissance calorifique dégagée par la combustion d’un matériau à l’aide d’informations mesurées dans les gaz d’extraction : débit massique et concentrations des produits de combustion et de l’oxygène. Le débit massique des gaz d’extraction est obtenu à partir de leur température (mesurée au moyen d’un thermocouple) et de la pression différentielle engendrée par un diaphragme dans le cas du cône calorimètre, et de leur vitesse mesurée par une sonde de McCaffrey dans le cas du LSHR. Une partie de ces gaz est prélevée au moyen d’une pompe et acheminée jusqu’aux analyseurs de gaz (O2, CO2 et CO). Ils passent préalablement par un filtre à suies, un piège à froid et un filtre dessicant en carbonate de calcium (CaCO3). Une calibration des analyseurs est effectuée avant chaque série d’expériences. Les gaz de calibration utilisés ont des concentrations de 2500 ppm pour le CO et 8 % pour le CO2.

Ces mesures réalisées permettent de déterminer la puissance calorifique dégagée lors de la combustion des végétaux en utilisant le principe de la mesure calorimétrique par consommation de dioxygène, proposée par Hinkley en 1968 (Hinkley P. 1968) et mise au point par le NIST (National Institute of Standards and Technology) entre 1970 et 1980. C’est actuellement la technique la plus précise et la plus pratique pour mesurer la puissance calorifique d’un feu

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expérimental. Toutefois, il est nécessaire d’appliquer quelques hypothèses avant d’utiliser cette méthode :

- Tous les gaz sont considérés comme parfaits - Ils sont mesurés pour un air sec

- Seuls l’O2, le CO2, le CO le H2O et le N2 sont pris en compte dans la composition de l’air, tous les autres gaz étant assimilés au N2

- On considère constante la quantité d’énergie dégagée par unité de masse d’O2 pour une combustion complète

La combustion complète d’un composé CxHyOz est décrite par la réaction stœchiométrique suivante : 𝐶𝑥𝐻𝑦𝑂𝑧+ (𝑥 + 𝑦 4𝑧 2) 𝑂2+ 3,76𝑁2 → 𝑥𝐶𝑂2 + 𝑦 2𝐻2𝑂 + 3,76 (𝑥 + 𝑦 4𝑧 2) 𝑁2 (16) L’énergie dégagée par la combustion est liée à la quantité de dioxygène consommée. La puissance calorifique 𝑞̇ est alors donnée par relation suivante (chapitre précédent):

𝑞̇ = 𝐸𝑂2(𝑚̇𝑂°2 − 𝑚̇𝑂2) (17)

avec 𝐸𝑂2 la constante calorifique représentant l’énergie dégagée par kg de dioxygène consommée. Cette valeur est estimée pour chaque combustible à partir d’une analyse élémentaire et du Pouvoir Calorifique Inférieur (PCI). La différence entre 𝑚̇𝑂°2 (débit massique de dioxygène mesuré sanscombustion) et 𝑚̇𝑂2 (celui mesuré lors de la combustion) représente le débit de dioxygène consommé au cours de la combustion.

Dans le cas du cône calorimètre (par exemple) le débit massique des gaz est exprimé par la relation suivante :

𝑚̇𝑒 = 𝐶√∆𝑃𝑇

𝑒 (18)

avec ΔP le saut de pression, Te la température des gaz et C une constante déterminée lors d'une procédure de calibration au méthane.

La fraction molaire de dioxygène au niveau des analyseurs 𝑋𝑂𝐴2 est liée au débit d’oxygène par :

𝑋𝑂𝐴°2

=

𝑚̇ 𝑂2 ° 𝑀𝑂2 𝑚̇ 𝑂2 ° 𝑀𝑂2+ 𝑚̇ 𝐶𝑂2 ° 𝑀𝐶𝑂2+ 𝑚̇𝐶𝑂° 𝑀𝐶𝑂+ 𝑚̇ 𝑁2 ° 𝑀𝑁2 (19) Et

Lara Leonelli 69 𝑋𝑂𝐴2 = 𝑚𝑂2 𝑀𝑂2 𝑚̇ 𝑂2 ° 𝑀𝑂2 + 𝑚̇ 𝐶𝑂2 ° 𝑀𝐶𝑂2 + 𝑚̇𝐶𝑂° 𝑀𝐶𝑂 + 𝑚̇ 𝑁2 ° 𝑀𝑁2 (20)

avec 𝑋𝑂𝐴°2 et 𝑋𝑂𝐴2 les fractions molaires de dioxygène sans combustion et au cours de la combustion respectivement.

Ces expressions permettent de déterminer les débits massiques d’oxygène correspondants : 𝑚̇𝑂°2 = 𝑋𝑂2 𝐴° (1 − 𝑋𝑂2𝐴° − 𝑋𝐶𝑂2𝐴° − 𝑋𝐶𝑂𝐴°) 𝑀𝑂2 𝑀𝑁2 𝑚̇𝑁°2 (21) Et 𝑚̇𝑂2 = 𝑋𝑂2 𝐴 (1 − 𝑋𝑂2𝐴 − 𝑋𝐶𝑂2𝐴 − 𝑋𝐶𝑂𝐴 ) 𝑀𝑂2 𝑀𝑁2 𝑚̇𝑁2 (22)

De ce fait on peut exprimer :

𝑚̇𝑂°2 − 𝑚̇𝑂2 = 𝑋𝑂2 𝐴°(1 − 𝑋𝐶𝑂2𝐴 − 𝑋𝐶𝑂𝐴 ) − 𝑋𝑂2𝐴 (1 − 𝑋𝐶𝑂2𝐴° − 𝑋𝐶𝑂𝐴°) (1 − 𝑋𝑂2𝐴° − 𝑋𝐶𝑂2𝐴° − 𝑋𝐶𝑂𝐴°)(1 − 𝑋𝑂2𝐴 − 𝑋𝐶𝑂2𝐴 − 𝑋𝐶𝑂𝐴 ) 𝑀𝑂2 𝑀𝑁2 𝑚̇𝑁2 (23) D’où 𝑞̇ = 𝐸𝑂2 𝑋𝑂2 𝐴°(1 − 𝑋𝐶𝑂2𝐴 − 𝑋𝐶𝑂𝐴 ) − 𝑋𝑂2𝐴 (1 − 𝑋𝐶𝑂2𝐴° − 𝑋𝐶𝑂𝐴°) (1 − 𝑋𝑂2𝐴° − 𝑋𝐶𝑂2𝐴° − 𝑋𝐶𝑂𝐴°)(1 − 𝑋𝑂2𝐴 − 𝑋𝐶𝑂2𝐴 − 𝑋𝐶𝑂𝐴 ) 𝑀𝑂2 𝑀𝑁2 𝑚̇𝑁2 (24)

Le facteur de consommation d’oxygène ϕ, permet de simplifier l’écriture de 𝑞̇ :

𝜙 =

𝑚̇𝑂2

° − 𝑚̇𝑂2

𝑚̇𝑂2° (25)

On peut alors écrire :

𝜙

= 𝑋𝑂2 𝐴°(1 − 𝑋𝐶𝑂2𝐴 − 𝑋𝐶𝑂𝐴 ) − 𝑋𝑂2𝐴 (1 − 𝑋𝐶𝑂2𝐴° − 𝑋𝐶𝑂𝐴°) 𝑋𝑂2𝐴° (1 − 𝑋𝑂2𝐴 − 𝑋𝐶𝑂2𝐴 − 𝑋𝐶𝑂𝐴 ) (26) Et on obtient donc : 𝑞̇ = 𝐸𝑂2𝜙 𝑋𝑂2 𝐴° (1 − 𝑋𝑂2𝐴° − 𝑋𝐶𝑂2𝐴° − 𝑋𝐶𝑂𝐴°) 𝑀𝑂2 𝑀𝑁2 𝑚̇𝑁2 (27) L’expression de 𝑚̇𝑁2 est : 𝑚̇𝑁2 = 𝑚̇𝑎

𝑋

𝑁°2𝑀𝑀𝑁2 𝑎 (28)

où 𝑚̇𝑎 représente le débit massique d’air entrant et 𝑀𝑎sa masse molaire. Les gaz mesurés étant asséchés, 𝑋𝑁°2 ne peut être mesuré directement. Toutefois, 𝑋𝑁°2 peut être exprimée par :

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L’expression de la puissance peut alors s’écrire : 𝑞̇ = 𝐸𝑂2

𝜙𝑋

𝑂𝐴°2𝑚̇𝑎(1 − 𝑋𝐻°2𝑂)𝑀𝑂2

𝑀𝑎 (30)

Au cours de la combustion, une fraction d’air entrant est appauvrie en oxygène, qui est remplacé par un nombre de moles de produits de combustion supérieur ou égal au nombre de moles d’oxygène consommées. Le rapport entre ces deux quantités est appelé facteur d’expansion α et sa valeur est de 1,105 avec une erreur relative associée de 10 % maximum (Janssens 1992). Le débit massique d’air entrant (𝑚̇𝑎) peut alors être relié au débit massique de gaz sortant (𝑚̇𝑒) :

𝑚̇𝑒

𝑀𝑒

=

𝑚̇𝑎

𝑀𝑎

(

1 − 𝜙

)

+ 𝑚̇𝑎

𝑀𝑎𝛼

𝜙

(31)

Cette expression peut être simplifiée en posant l’hypothèse que 𝑀𝑒 ≈ 𝑀𝑎 :

𝑚̇

𝑎

=

𝑚̇𝑒

1+ 𝜙 (𝛼−1) (32)

L’expression de la puissance calorifique peut alors s’écrire : 𝑞̇ = 𝐸𝑂2𝜙𝑋𝑂2 𝐴° 𝑚̇ ̇ 𝑒 1+ 𝜙 (𝛼−1) (1 − 𝑋°𝐻2𝑂)𝑀𝑀𝑂2 𝑎 (33)

Cependant, la valeur de 𝐸𝑂2 ayant été déterminée pour une combustion complète, il est nécessaire d’effectuer une correction de cette valeur dans le cas d’une combustion incomplète, la production de CO ne pouvant plus être négligée. L’expression de la puissance calorifique s’écrit alors en tenant compte de la quantité de CO non catalysée en CO2 (Janssens 1991) :

𝑞̇ = 𝐸𝑂2(𝑚̇𝑂°2 − 𝑚̇𝑂2) − (𝐸𝐶𝑂− 𝐸𝑂2)(∆𝑚̇𝑂2)

𝑐𝑎𝑡 (34)

où ECO est l’énergie dégagée par unité de masse de O2 consommée pour l’oxydation du CO en

CO2 (~17,6 mJ.kg-1), et ∆𝑚̇𝑂2 s’exprime par : (∆𝑚̇𝑂2) 𝑐𝑎𝑡 =(1− 𝜙)𝑋𝐶𝑂 𝐴 𝑀𝑂2 2 𝑋𝑂2𝐴 𝑀𝑎 𝑚̇𝑎𝑋𝑂𝐴°2 (35)

En prenant en compte cette correction, l’expression de la puissance calorifique s’écrit donc :

𝑞̇ = (

𝐸𝑂2

𝜙 − (

𝐸𝐶𝑂 − 𝐸𝑂2

)

(1− 𝜙) 2 𝑋𝐶𝑂𝐴 𝑋𝑂2𝐴

) (

1 − 𝑋𝐻°2𝑂

)

𝑚̇̇𝑒 1+ 𝜙 (𝛼−1) 𝑀𝑂2 𝑀𝑎

𝑋

𝑂𝐴°2 (36) Les données brutes, obtenues avec les calorimètres sous forme de fichiers CSV, sont exportées sous Excel® puis traitées en utilisant les équations de la calorimétrie par consommation d’oxygène présentés ci-dessus, afin de déterminer la puissance calorifique.

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2.2.2. Vue d’ensemble des dispositifs expérimentaux complémentaires des calorimètres

Les dispositifs de mesures et d’analyses complémentaires aux mesures de puissance sont présentés ci-dessous (Figure 15). Il s’agit tout d’abord des lasers He-Ne (partie intégrante des calorimètres) qui permettent de mesurer l’opacité des fumées à partir du coefficient d’extinction et d’en déduire la vitesse de production de fumées et la teneur en aérosols.

Figure 15 : Schéma des cônes calorimétriques et dispositifs de mesure des fumées

Concernant l’analyse des fumées, un spectromètre infrarouge à transformée de Fourier (IRTF) (Antaris IGS, Thermofisher®) permet d’identifier et de quantifier les gaz de faibles masse moléculaire en sortie des deux calorimètres. Des lignes de transfert chauffées à 165°C sont utilisées pour acheminer vers l’IRTF les gaz de combustion prélevés dans les conduits d’évacuation. De plus, une pompe de prélèvement permet de récolter les fumées sur des filtres et des tubes Tenax® en vue d’analyser les aérosols et les composés de plus grande masse moléculaire. Enfin, un dispositif optique de comptage de particules, a été placé à l’extérieur du laboratoire, face à la sortie d’évacuation des fumées afin de caractériser la granulométrie des aérosols. Le fonctionnement de ces appareils sera détaillé dans les sections suivantes. Concernant plus particulièrement les expériences réalisées à l’échelle du cône calorimètre (Figure 13), une caméra rapide haute résolution (Mikrotron Eo Sens CL MC1363), équipée d’une lentille focale de 50 mm, a été utilisée pour mesurer le temps et le lieu d’inflammation des échantillons. Cette caméra enregistre les images à une cadence de 500 images/s de 1,3 Mega pixels chacune. Une caméra infrarouge (CEDIP®, Jade3MW) disposant d’un plan focal de 256

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× 256 pixels a également été utilisée afin d’obtenir la température de la surface des échantillons. Les images IR sont enregistrées sur un PC avec une résolution de 14-bit, un temps d’intégration de 125 ms et une fréquence d’échantillonnage de 20 Hz.

Figure 16 : Vue d’ensemble du dispositif expérimentale à l'échelle du cône calorimètre

A l’échelle du terrain, les prélèvements des fumées ont été effectués en des positions permettant de satisfaire deux objectifs (Figure 17). Le premier objectif consistait à comparer les valeurs des facteurs d’émission mesurées sur le terrain avec celles obtenues en laboratoire. Nous avons donc réalisé des prélèvements à une position fixe, à hauteur d’homme et au-devant du front de feu, en nous situant le plus possible dans les fumées, cette position sera appelée panache. Le second objectif était de déterminer l’atmosphère de travail des opérationnels. Nous avons donc positionné nos pompes de prélèvement sur les opérationnels. Les fumées ont été prélevées dans des sacs Tedlar et sur des tubes adsorbants (Tenax) pour être analysées ensuite en laboratoire. Des détecteurs de gaz ainsi qu’un compteur optique de particules ont également été utilisés. Tous ces dispositifs seront présentés en détails dans la suite de ce chapitre.

Caméra IR IRTF Caméra rapide et spots Cône Pompe

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Figure 17 : Schéma du positionnement des prélèvements de fumées sur le terrain