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LES TEMPORALITÉS DE MARIAGE

L’accomplissement des fiançailles signifie l’officialisation de la relation d’affinité entre les deux familles. Dès lors qu’elle est mise à l’ordre du jour, la préparation du mariage débute par le choix de la date des noces. Cette première étape concerne tout d’abord le choix de la saison du mariage suivi de la fixation d’un jour précis considéré comme faste et propice.

Au village de Zhang, la saison la plus favorable au mariage se situe au moment transitoire entre l’hiver (9ème – 12ème mois lunaire) et le printemps (1er – 3ème mois lunaire),

et particulièrement aux alentours du nouvel an chinois, soit le 12ème mois et le 1er mois lunaire. Lorsque j’interrogeais les villageois concernant le choix de cette période favorable au mariage, deux raisons majeures étaient évoquées. Premièrement, la superposition de la célébration du mariage aux fêtes du nouvel an renforce la festivité et le caractère joyeux et faste de cet événement47. La deuxième raison renvoie aux

conditions de conservation des denrées alimentaires propres à la saison la plus froide de l’année. Puisqu’un mariage est un évènement important, un banquet somptueux est organisé pour accueillir un grand nombre d’invités. D’ailleurs, il n’est pas rare qu’une quantité importante de nourriture reste après le mariage, même une fois la nourriture

47 En effet, la multiplicité des célébrations lors d’un jour considéré comme faste ou d’une période

considérée comme festive est courante en Chine, dans la vie laïque comme dans la vie religieuse. À ce sujet, voir notamment l’étude de Adeline HERROU sur les moines taoïstes en Chine : « les auspices sont d’autant plus favorables que la date marque différents événements à célébrer » (2005, p. 307).

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redistribuée aux invités juste après l’évènement. Souvent, les restes de nourriture doivent être conservés pour être consommés dans les jours qui suivront.

Cependant, si autrefois la dépendance des villageois vis-à-vis des conditions climatiques pour la conservation des aliments justifiait en partie la saisonnalité des noces, cette explication pragmatique est remise en cause à l’époque contemporaine car la majorité des villageois de Zhang possède aujourd’hui des équipements électroménagers (réfrigérateur, congélateur, etc.). La saisonnalité des pratiques matrimoniales au village de Zhang résulte d’autres facteurs, qui ne sont pas forcément évoqués par les villageois dans leurs discours quotidiens. Ces facteurs structurent les pratiques des villageois et reconfigurent l’organisation de la vie sociale et rituelle.

L’action de choisir une période précise pour les activités matrimoniales relève d’une pratique traditionnelle dans la société chinoise. À partir de sources historiques et de travaux anthropologiques et sinologiques, j’exposerai dans la première partie les caractéristiques de la saisonnalité des activités matrimoniales en Chine ancienne, afin de démontrer que les Chinois anciens organisaient leurs activités productives, sociales et rituelles dans une démarche visant l’harmonie entre les temporalités et l’ordre cosmologique. Ensuite, il s’agira d’analyser comparativement et de mettre en perspective les pratiques matrimoniales au regard du choix et des représentations des saisons à l’époque de la Chine ancienne avec celles contemporaines des habitants du village de Zhang. L’objectif sera d’identifier et d’expliquer les changements et la continuité des temporalités matrimoniales qu’a connus la Chine rurale contemporaine. La dernière partie sera consacrée au choix de la date des noces. Je me focaliserai sur les pratiques et sur les attitudes des villageois chinois concernant les techniques divinatoires dans le choix de la date des noces, afin d’étudier les effets de la divination sur l’organisation de la vie sociale. Plus largement, je démontrerai son évolution dans le temps, de son origine jusqu’à présent, ainsi que les modifications et les réajustements qu’adoptent les villageois face aux changements sociaux, économiques et politiques en Chine post-maoïste.

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1.

LA SAISONNALITÉ DES ACTIVITÉS MATRIMONIALES DANS LA

CHINE ANCIENNE

En analysant minutieusement les chansons d’amour dans le recueil de texte Classique des vers (Shijing 诗经)48, Marcel GRANET a constaté qu’en Chine ancienne les fiançailles avaient lieu au printemps tandis que les noces se déroulaient en automne. Ce constat est issu de « l’interprétation la plus simple [des chansons populaires] qui se trouve la plus riche et la plus suggestive » (1990 [1953], p. 70). Autrement dit, l’auteur a déterminé le sens littéral des chansons tout en se dégageant du symbole moral confucéen que leur avaient attribué les commentateurs chinois. S’appuyant sur cette méthode49, Marcel GRANET a pu retracer les caractéristiques de l’ensemble du processus des activités

matrimoniales de la Chine ancienne :

« Au deuxième mois de printemps, aussitôt que le yang [阳] de retour ramène les hirondelles et la chaleur, dès que, sur les plantes des champs, la rosée remplace la gelée blanche, lorsque la glace se met à fondre et que vient la première crue des rivières, quand les fleurs précoces poussent dans les coins humides et que les oiseaux chantent et cherchent à s’accoupler, alors, les hommes sortent de leurs maisons, les filles cessent de filer, et les garçons, de village en village, colportent la toile tissée. Émus par le printemps, garçons et filles s’en vont en bande, à l’est ou au sud des murailles, danser sur quelque tertre bien exposé, à l’ombre des arbres. Puis, le long des rivières gonflées, dans les prairies basses, ils s’en viennent cueillir la fleur odorante qui est un encens capable d’écarter les puissances malignes et que l’on porte dans un sachet pendu à la ceinture. Filles et garçons chantent et se provoquent et se choisissent. Jupes troussées, on passe la rivière ; les couples s’isolent et, les commentaires parlent ainsi, font acte de mari et de femme. Alors, les filles reçoivent des garçons la

48 Les textes rassemblés dans ce recueil peuvent remonter jusqu’au premier millénaire av. J.-C. (entre XIe

siècle et Ve siècle av.J.-C.).

49 L’auteur a expliqué par la suite sa méthode d’analyse : « dans les chansons populaires de tous les pays,

certaines associations d’idées reviennent constamment. Si l’on fait bien attention au balancement des couplets et aux correspondances des vers, il est facile de dégager ces thèmes, en confrontant entre elles les chansons, il est possible d’en apercevoir le sens. Nous dégagerons ainsi quelques données positives » (Marcel GRANET 1990 [1953], p. 70).

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fleur que l’on donne quand on se sépare, comme gage d’une réunion prochaine. Et les accordailles sont faites.

Mais je crois bien qu’il leur fallait passer l’été séparés, chacun dans son village. À l’automne, les parents avertis envoient un entremetteur ; au soleil levant, l’oie sauvage est offerte, puis la double peau de cerf ; et, au jour favorable fixé par la tortue ou les bâtonnets d’achillée, lorsque la mère a noué la ceinture de la fiancée et y a attaché la serviette rituelle, la jeune fille monte, à la nuit tombante, dans la voiture nuptiale, et va boire avec son époux aux deux moitiés de calebasse. » (Ibid., p. 89‑90)

La description détaillée ci-dessus nous permet d’identifier au moins trois caractéristiques principales des activités matrimoniales de la Chine ancienne : la saisonnalité des activités matrimoniales caractérisée par les fiançailles en printemps et les noces en automne ; la séparation temporelle et rituelle entre le moment des fiançailles et celui des noces ; la superposition des cérémonies matrimoniales sur les fêtes agraires.

1.1. Les fiançailles au printemps, les noces à l’automne

D’après la description ci-dessus proposée par Marcel GRANET, la procédure du

mariage en Chine ancienne était segmentée en deux étapes, dont la première renvoie à celle du choix du conjoint et des fiançailles qui devaient avoir lieu au printemps, la seconde correspond aux noces qui avaient lieu en automne. La saisonnalité des activités matrimoniales fait globalement consensus parmi les chercheurs qui étudient la Chine ancienne. Cependant, concernant la saison exacte du mariage, il existe une polémique : certains chercheurs comme Marcel GRANET défendent la doctrine du mariage en

automne, tandis que d’autres soutiennent la doctrine du mariage en printemps, comme c’est le cas du sinologue Léon VANDERMEERSCH (1980, p. 422‑423)50.

Je ne prétends pas résoudre ce clivage mais je souhaite apporter des éléments complémentaires aux réflexions relatives à la saisonnalité du mariage. Mes recherches bibliographiques concernant cette thématique m’ont amené à découvrir un texte d’un

50 Néanmoins, Léon VANDERMEERSCH n’a pas fourni d’ explications appuyées pour défendre concrètement

son idée : « il est vrai qu’à la doctrine du mariage au milieu du printemps défendu par Zheng Xuan, Wang Su a opposé une autre doctrine celle du mariage en automne ; mais c’est l’opinion de Zheng Xuan qui est la plus solide et qui fait la plus autorité » (1980, p. 422‑423).

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sinologue sino-américain CHOW Tse-tsung 周策縱 (1916-2007), intitulé La saison du mariage de la Chine ancienne et la ‘gelée blanche’ 霜, la ‘rosée’ 露 (1986). Méconnue en France, l’analyse proposée par cet auteur mérite d’être évoquée, car elle permet d’enrichir le débat et defaire avancer la compréhension de la saisonnalité du mariage.

CHOW Tse-tsung parvient à une conclusion proche de celle de Marcel GRANET

concernant les saisons du mariage, sans toutefois s’appuyer sur ses travaux. Cet auteur a remarqué la présence récurrente de la « gelée blanche » et de la « rosée » dans les chansons anciennes portant sur le thème du mariage. En Chine ancienne, « la ‘rosée’ signifie le rapport sexuel lors d’un rendez-vous galant (…) tandis que la ‘gelée blanche’ signifie l’établissement de l’union avec des rites nécessaires dans un moment approprié » (Ibid., p. 43). Plusieurs exemples sont donnés par l’auteur pour illustrer ces significations de la « rosée » et de la « gelée blanche ».

Dans les romans classiques tels que Fleur en fiole d’or (jinpingmei 金瓶梅, datant de 1610) et Le pavillon aux pivoines (mudanting 牡 丹 亭 , datant de 1598), nous retrouvons l’expression de « couple de la rosée » lushu fuqi 露水夫妻 pour décrire la relation amoureuse et sexuelle qui n’est pas socialement reconnue ou qui ne dure pas longtemps. (Ibid., p. 42‑43). En ce qui concerne la « gelée blanche », l’auteur indique que dans la Chine ancienne, la « gelée blanche » shuang 霜 renvoyait au terme shuang 孀, qui signifie la femme mariée habitant momentanément toute seule en attente du retour de son mari, ou la femme veuve dont le mari est décédé (Ibid., p. 39). En ce sens, nous pouvons peut-être supposer que la dernière période solaire de l’automne, nommée la « descente de la gelée blanche ou l’arrivée de la gelée blanche » shuangjiang 霜降 pouvait signifier « l’arrivée de la femme mariée »51 . Par ailleurs, en Chine ancienne, « la ‘rosée’ fut considérée comme le prédécesseur de la ‘gelée blanche’ »52 (Ibid., p. 43),

51 Voir également une expression ancienne dans les Propos de l’école de Confucius (kongzi jiayu 孔子家

语) : « quand se dépose la gelée blanche, les travaux des femmes sont achevés ; alors les mariages peuvent se faire. Quand les glaces fondent commencent les travaux des champs et la cueillette des feuilles de mûrier : les rites nuptiaux touchent à leur fin à cette époque », cité par Marcel GRANET (1982 [1919], p. 177). En chinois : shuangjiang er fu gong cheng. Jiaquzhe xing yan. Bingpan er nongsang qi, hunli shi sha yu ci. 霜 降而妇功成, 嫁娶者行焉. 冰泮而农桑起, 婚礼始杀于此.

52 Voir Instructions mensuelles et soixante-douze temps (yueling qishierhou jijie 月令七十二候集解), WU

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d’autant plus que la « rosée » apparaît principalement au printemps, tandis que la « gelée blanche » n’existe que vers la fin de l’automne.

1.1.1. La séparation des sexes

Le constat établi des fiançailles au printemps et des noces en automne nous conduit à questionner les raisons pour lesquelles cette période matrimoniale est traversée par une séparation temporelle entre les deux cérémonies durant la Chine ancienne. Cette séparation s’étale de l’équinoxe de printemps (le moment des fiançailles) jusqu’à l’équinoxe d’automne (le moment des noces). Les fiancés s’éloignent l’un de l’autre après les fêtes printanières pour vaquer à leurs occupations et pour se consacrer aux travaux paysans. Cette scission du couple épouse la règle de la séparation des sexes engendrée par la division sexuelle du travail, mieux connue par l’expression « homme-agriculteur, femme-tisseuse » nangengnüzhi 男耕女织.

Outre la norme de séparation des sexes pendant la période des travaux agricoles, le danger de l’union sexuelleestimé par les paysans explique également la longueur des pratiques de fiançailles dans le temps53. La séparation pendant la période du travail des champs permet aux deux familles de se préparer au mieux pour la future union mais elle permet aussi de diminuer « les dangers si redoutables de l’union sexuelle. (…) L’union sexuelle en dehors des fêtes qui la consacrent, apparaît comme tellement impure qu’il

rosée devient la gelée blanche ». En Chinois : shuangjiang, jiuyue zhong. Qi su er ning, lu jie wei shuang

yi. 霜降, 九月中. 气肃而凝, 露结为霜矣. Ce livre de WU Cheng est basé sur les Instructions mensuelles (yueling 月令), retrouvé à la fois dans le chapitre IV du Livre des rites (liji 礼记, IVe-IIIe siècles av. J.-C)

et les Annales des Printemps et des Automnes de LÜ (Lüshi chunqiu 吕氏春秋, rédigées par un groupe de lettrés sous la direction de LÜ Buwei et publiées en 241 av. J.-C).

53La dangerosité de l’union sexuelle est fortement associée à l’idée de la pollution et de l’impureté des

femmes en Chine. Le fait que les femmes chinoises possèderaient un corps impur est développée par de nombreuses études, voir par exemple l’étude de Emily AHERN MARTIN (1975, p. 193‑214) et celle de Françoise LAUWAERT (1994a, p. 31‑57). Non seulement dans la société chinoise, mais la majeure partie de l’humanité, les femmes sont dangereuses, comme l’indique Françoise HÉRITIER : « ‘du danger des femmes’ signale ce point central où se mêle la double conscience ou conviction qu’un danger pour les hommes naît de leur commerce avec les femmes, mais aussi que les femmes sont en danger » (2012 [2002], p. 49). La manifestation du danger de l’union sexuelle ainsi que les pratiques rituelles dont l’objectif est de dissiper ce danger, seront étudiées plus précisément dans le chapitre 5 portant sur les rites matrimoniaux lors du jour des noces.

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n’en faut point contaminer les choses fastes comme le travail. On ne se marie point pendant la saison des travaux et, réciproquement, après le mariage on ne saurait travailler » (Ibid., p. 84-85). Dès lors, afin qu’elle ne se superpose pas avec la saison printanière des fiançailles, la cérémonie des noces devrait avoir lieu en dehors des travaux champêtres, autrement dit, dans une période entre les fêtes automnales signifiant le début du repos des laboureurs et les fêtes printanières de l’année suivante marquant le commencement des travaux agricoles.

1.1.2. La superposition entre les fêtes et les noces

Si la volonté de deux individus suffisait pour établir leurs accordailles lors des fêtes printanières, l’établissement de l’union matrimoniale officialisé par les rites des noces reposait sur l’engagement collectif et concerté des deux familles concernées. En effet, « pour qu’un homme s’approprie définitivement une femme, le rite, si sacré soit-il, des accordailles est insuffisant ; il faut encore que les familles y consentent et que des rites publics habituent la société et les fiancés eux-mêmes à un tel changement d’état civil » (Marcel GRANET 1990 [1953], p. 85). Le caractère collectif des noces est manifesté par l’importance prééminente de l’orgie de boisson et de nourriture lors des fêtes automnales, tandis que les accordailles sont établies par les « rites sexuels des fêtes printanières [qui] avaient à peine besoin de voir leurs effets complétés par la communion alimentaire. Ils suffisaient, en somme, aux fiançailles. Mais au moment de l’entrée en ménage, établir une identité substantielle, qui rendra possible la vie en commun, devient la préoccupation principale. Une grande orgie de boisson et de nourriture fut l’essentiel des Fêtes d’automne. Les pratiques sexuelles y étaient secondaires ; aussi bien ce n’était point là des fêtes d’initiation et d’inauguration : c’étaient les fêtes de la récolte et de la rentrée au hameau » (Marcel GRANET 2010 [1922], p. 35‑36).

Autrement dit, les rencontres entre deux fiancés lors des fêtes printanières étaient primordiales pour établir les accordailles, tandis que pour officialiser publiquement l’union sexuelle par le biais des rites des noces, c’était le partage collectif de nourriture entre l’ensemble des membres de la communauté qui primait. La superposition des noces

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avec les fêtes d’automne permettait de diminuer l’effet perçu comme dangereux de l’union sexuelle, tandis que la participation des autres au banquet renvoie à la reconnaissance sociale de la relation d’affinité d’un côté, et à renouer des liens sociaux de l’autre côté54.

1.2. Le rythme de la vie sociale, le rythme de la vie

productive

L’existence de saisons spécifiques à l’organisation des activités matrimoniales se couple parfaitement avec le rythme agricole. Le choix du conjoint et les fiançailles étaient réalisés vers le début du printemps lors des fêtes printanières, marquant le début des travaux des champs, tandis que les noces étaient célébrées lors des fêtes, signifiant la fin des travaux des champs55. En effet, « la vie rythmée qu’ils menaient les fournissait aux paysans chinois à deux moments de l’année : c’était aux temps où finissaient et où commençaient les travaux d’intérieur ou les travaux des champs, aux temps où hommes et femmes, dont l’activité se relayait, changeaient de genre de vie, au début du printemps et à la fin de l’automne » (Ibid., p. 26‑27).

Néanmoins, notons que dans la pratique de la Chine ancienne, les saisons matrimoniales qui suivaient le calendrier agricole ne se distinguent pas précisément, car « le temps des travaux peut se prolonger plus loin que le neuvième mois et les fêtes des accordailles se poursuivre un peu tard dans le printemps » (Marcel GRANET 1990 [1953],

p. 88). Ce qui est important ici pour notre compréhension des pratiques matrimoniales en Chine ancienne, c’est la logique de planification des activités sociales à partir du rythme agricole. Le fait que les activités liées à l’alimentation contribuent fortement à rythmer la

54 Concernant l’organisation du banquet et la manifestation des enjeux sociaux lors de cet évènement, voir

chapitre 6.

55C

HOW Tse-Tsung a démontré l’harmonie et la correspondance rituelle entre la saisonnalité des activités matrimoniales et le rythme agricole dans la Chine ancienne : « quand l’agriculture s’est développé en Chine, afin de ne pas heurter la période des travaux des champs, les paysans plaçaient leur mariage souvent après la fin de l’automne, avant le début du printemps » (1986, p. 38).

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vie sociale n’est pas une caractéristique propre à la Chine ni une caractéristique spécifique de l’époque dite traditionnelle (Maurice AYMARD et al. 1993 1993a, p. 6)56.

Quant à la Chine ancienne, dans ses études portant sur le célèbre traité d’agriculture intitulé Techniques essentielles pour le peuple (qimin yashu 齐民要术, compilé au milieu du VIe siècle), Françoise SABBAN a indiqué la place fondamentale de

l’agriculture dans la société chinoise ancienne : « dans la pensée sociale et économique des philosophes chinois de l’Antiquité, (…) l’agriculture [était] le fondement de la société, activité de ‘base’ ben 本 qu’il faut toujours chercher à renforcer par rapport au commerce ou à l’artisanat, considéré comme ‘secondaire’ mo 末 » (1993, p. 88), ce qui explique ainsi le rôle régulateur du rythme agricole dans l’organisation de la vie sociale.

1.3. Pour une harmonie parfaite : temporalités et ordre

cosmologique

Dans toutes les sociétés agraires, le rythme agricole devait s’adapter aux contraintes de la météo et aux conditions naturelles, et ce, tout le long de l’année (Ibid., p. 87). Les rythmes de vie et les actions agricoles qui sont soumises aux contraintes climatiques et à la nature sont plus largement « soutenues par une représentation du temps

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