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Méthode

Pour cette étude, parmi les différents andains suivis, nous avons sélectionné quatre andains en fermentation à des mois et des saisons différentes. Le numéro attribué à chacun des andains ainsi que les données qui les caractérisent (date, agent structurant utilisé, espace de fermentation) sont indiqués dans le Tableau 20. Le numéro indiqué pour l’espace de fermentation utilisé fait référence à l’Annexe A. N° de l’andain suivi Date de début de formation des andains suivis Agent structurant utilisé Durée de fermentation (𝑫𝑭𝑪 𝒆𝒏 (𝒋)) Espace de fermentation utilisé Remarque

1 06/02/18 écorces de résineux 12 5 humidité initiale

non mesurée

2 19/02/18 écorces de résineux 23 3 -

3 16/03/18 écorces de résineux 9 2 -

4 03/07/18 palettes broyées 25 2 nettoyage de la

gaine d’aération

Tableau 20 : numéro et données caractéristiques de chaque andain suivis

Il est important de rappeler que le compostage implique de nombreux phénomènes physico-chimiques et biologiques qui peuvent, à l’échelle industrielle, entrainer des gradients de température sur des coupes transversales et longitudinales (Henon 2008). Ainsi, pour suivre l’évolution temporelle de la température au cours de la phase de fermentation des andains sélectionnés nous avons utilisé trois perches sur lesquelles ont été installées trois sondes de température (sondes Thaut, Tmilieu et Tbas, Figure 28). L’intérêt de ces perches à trois sondes est de mesurer la température de l’andain à différentes profondeurs représentées sur la Figure 29 ; l’utilisation de trois perches (A, B et C) nous a permis de mesurer les températures sur la longueur L1 de l’andain (voir Figure 29).

Les dimensions des andains (supposées constantes) sont indiquées dans le Tableau 21. 𝒉 (𝒎) 3,0± 0,1

𝒍 (𝒎) 6,2 ± 0,1 𝑳𝟏(𝒎) 12,0 ± 0,1 𝑳𝟐 (𝒎) 9,4 ± 0,1

Tableau 21 : dimensions des andains en espace de fermentation (cf. Figure 29)

Concernant la position des perches, elles ont été placées de sortes à obtenir un angle de 45° par rapport à l’horizontale et ont été plantées à mi-hauteur de l’andain. Les positions des sondes de température par rapport à la longueur de l’andain sont précisées dans le Tableau 22 et sur la Figure 29.

cotes indiquant la position des perches

(cf. Figure 29) andain 1 (𝒎) andain 2 (𝒎) andain 3 (𝒎) andain 4 (𝒎) 𝒂 (perche A) 9,91 ± 0,01 9,56 ± 0,01 9,27 ± 0,01 9,13 ± 0,01 𝒃 (perche B) 5,74 ± 0,01 6,26 ± 0,01 6,58 ± 0,01 5,83 ± 0,01 𝒄 (perche C) 2,04 ± 0,01 2,50 ± 0,01 3,33 ± 0,01 2,65 ± 0,01

Tableau 22 : valeurs des différentes cotes indiquant la position des sondes de température sur l'andain suivi (Figure 29) Figure 28 : perche sondes de

température

Remarque : il a été constaté, comme cela est reporté dans le Tableau 19, que plusieurs jours étaient nécessaires pour former un andain en espace de fermentation. Pour cette raison, les perches A, B et C permettant les mesures de température peuvent ne pas être installées en même temps sur l’andain suivi. Ainsi, comme les andains sont formés du mur vers l’extérieur, la perche C se trouve généralement installée au moins une journée avant les deux autres perches (Figure 29).

Figure 29 : descriptif de la position des sondes sur l'andain suivi

Résultats

3.2.1 Andain 1

La première perche (C – coté mur) de l’andain 1, a été installée le 07/02/18 (2ème jour après le début de la formation), les deux autres perches y ont été installées le 08/02/18 (3ème jour). En raison d’un problème de piles, l’enregistrement des températures ne s’est effectué que sur 9 jours (10 jours pour la perche C). Il en résulte une perte de données d’environ 3 jours.

Les données d’acquisition des trois perches A, B et C ont révélé une faible augmentation de la température (de 5°C à 28°C pour la plus forte évolution – perche B, sonde Tmilieu) et ce quelle que soit la position des sondes (voir Figure 30). Ainsi après 10 jours d’acquisition, les températures relevées avoisinaient 20°C pour les perches A (coté extérieur) et B (milieu andain) et ne dépassaient pas 20°C pour la perche C (coté mur). Les résultats de la perche C ne montrent quasi aucune évolution de la température. Nous pouvons alors supposer que l’hygiénisation, atteinte lorsque la température dépasse 55°C pendant au moins 3 jours consécutifs (et plus selon différents auteurs), n’a très certainement pas eu lieu. Ces résultats peuvent avoir deux origines :

- des conditions opératoires non optimales pour l’activité microbienne ; - des pertes thermiques trop importantes.

La Figure 30 montre que les températures initiales mesurées par les perches A, B et C étaient toutes inférieures ou égales à 10°C. La température extérieure avoisinait 0°C au début de l’étape de

fermentation. Or comme nous l’avons vu dans le chapitre 1 (cf §2.3 les organismes), les micro-organismes mésophiles se développent lorsque la température est comprise entre 10°C et 45°C avec une croissance optimale entre 20°C et 40°C. Ainsi, il semble évident que les conditions de températures extérieures étaient défavorables au développement microbien. Ce problème a été mis en exergue dans les travaux de K. Wang et al. (2013) où l’impact des températures extérieures froides sur la mise en place de la phase thermophile a été étudiée. Leurs travaux ont notamment montré l’importance de la température initiale du substrat sur l’élévation des températures. En effet, selon leur étude, une température initiale du substrat à 35°C permet d’obtenir une phase thermophile suffisante même si la température extérieure est de l’ordre de -20°C.

Figure 30 : profils des températures mesurées lors de la phase de fermentation de l'andain 1

Concernant l’évolution des températures en fonction de leur position dans l’andain (profondeur des sondes de température), nous pouvons globalement observer que plus la sonde est profonde plus la température est élevée (Figure 30). Ainsi les températures relevées par les sondes Tbas sont généralement plus élevées que celles des sondes 2, qui sont elles-mêmes plus élevées que celles des sondes Thaut. Une différence de température allant jusqu’à 11°C entre la sonde Tbas et la sonde Thaut a ainsi été observée pour la perche A. Cette différence peut s’expliquer par des plus faibles pertes thermiques au cœur de l’andain, en particulier, comme c’est le cas ici, en période hivernale (février 2018). En effet, l’aération des andains est effectuée par aspiration, ainsi l’air froid extérieur refroidi en premier les zones de l’andain qui sont proches du milieu extérieur, cet air est ensuite graduellement

réchauffé lors de la traversée de l’andain par la chaleur libérée par la biodégradation de la MO (même si celle-ci est faible dans le cas de cet andain).

D’autre part, la Figure 30 montre que les variations journalières de la température extérieure n’a pas de conséquences sur le profil des températures au sein de l’andain.

3.2.2 Andain 2

La perche C a été installée le 20/02/18 (2ème jour après le début de la formation), les deux autres perches ont quant-à-elles été installées le 21/02/18 (3ème jour).

Contrairement à l’andain 1 (andain du 06/02/18), les températures au sein de cet andain ont atteint plus rapidement des températures élevées (supérieures à 55°C). Nous pouvons en effet remarquer sur la Figure 31 que les sondes Tbas et Tmilieu de la perche B ont dépassé la température d’hygiénisation (55°C) en seulement 3 jours. Les sondes Tbas et Tmilieu de la perche A, ont quant-à-elles dépassé cette température après 6 jours de fermentation. De plus, les températures mesurées sont restées supérieures à 55°C pendant à peu près 9 jours pour les sondes Tbas et Tmilieu de la perche A et pendant plus de 16 jours pour les sondes Tbas et Tmilieu de la perche B. Par conséquent, ces éléments sont indicateurs de bonnes conditions de fermentation ; ils permettent par ailleurs de supposer que le compost a en partie été hygiénisé. Les zones qui peuvent ne pas être hygiénisées concernent les zones de l’andain proches du milieu extérieur et celles proches du mur. En effet, comme pour l’andain 1, les températures mesurées par les sondes Thaut (proches du milieu extérieur) sont toujours plus faibles que celles mesurées par les sondes Tbas et Tmilieu (plus profondes dans l’andain). De même, les températures relevées par les sondes de la perche C (positionnée coté mur) sont bien plus faibles que celles des perches A et B. Ces températures augmentent peu en début de compostage (jusqu’à 34°C pour la sonde Tbas) et n’atteignent à aucun moment la température minimale d’hygiénisation (55°C). Cette faible évolution de la température lors des trois premiers jours de fermentation est suivie d’une diminution de la température de l’andain (où la température est plus faible qu’initialement). Ces résultats nous amènent à envisager deux possibilités :

- une forte aération : qui entraine des pertes thermiques trop importantes en comparaison de la chaleur libérée par la biodégradation de la MO ;

- une aération trop faible : initialement l’oxygène présent dans les espaces lacunaires du compost est suffisant pour que la fermentation commence. Ensuite, après trois jours de fermentation la quantité d’oxygène vient à manquer et ne permet plus de maintenir l’activité microbienne. Enfin, comme pour l’andain 1 (du 06/02/18), les profils de température ne présentent pas de variations qui suivraient l’évolution de la température extérieure.

Figure 31 : profils des températures mesurées lors de la phase fermentation de l’andain 2

3.2.3 Andain 3

L’andain 3 est resté 9 jours en fermentation (andain complet). La première perche (C) a été installée le 16/03/18 (au 1er jour lors de la formation) tandis que les deux autres perches ont été installées trois jours plus tard (le 19/03/18) en raison de la fermeture de la STEU pendant le weekend. Par ailleurs, la STEU ayant reçu de nouvelles écorces (d’un autre fournisseur) lors de la formation de l’andain, environ la moitié de l’andain (proche du mur) a été préparée avec les anciennes écorces (représentées sur la Figure 32), tandis que l’autre moitié (proche du milieu extérieur) a été préparée avec les écorces du nouveau fournisseur (représentées sur la Figure 33). Ainsi, un changement de qualité d’écorce a eu lieu lors de la préparation de l’andain.

Comme pour l’andain 1, les résultats montrent peu d’évolution de la température et pas d’influence directe de la température extérieure (Figure 34) sur la phase de fermenation. Les sondes les plus profondes (sonde Tbas) ont globalement relevé des températures plus élevées que les autres sondes (Tmilieu et Thaut). Comme pour les autres andains, ce phénomène s’explique par les pertes thermiques engendrées par le système d’aération. En effet, l’air qui traverse refroidit en premier lieu les zones les plus proches de l’extérieur, puis se réchauffe au fur et à mesure de sa circulation à travers l’andain. Nous pouvons également observer que la perche C de l’andain 3 présente des évolutions de température similaires à ce qui a été observé pour la perche C de l’andain 2 (Figure 34). Nous pouvons alors penser que les conditions de compostage (aération, humidité, …) étaient correctes en début de fermentation mais se sont dégradées après trois jours de fermentation. Ainsi, la diminution de la température après 3 jours de fermentation a pu être provoquée par un trop faible apport en oxygène aux micro-organismes ou de trop fortes pertes thermiques. Une diminution de l’apport en oxygène peut résulter d’une mauvaise circulation de l’air à travers cette partie de l’andain (débit d’aération faible). A contrario, des pertes thermiques trop élevées peuvent être provoquées par une aération trop importante.

3.2.4 Andain 4

Les perches C, B et A de l’andain 4 ont été respectivement installée le 2ème jour (04/07/18), le 3ème (05/07/18) jour et le 4ème jour (06/07/18) après le début de sa formation sur l’espace de fermentation. Cet andain a été soumis à des conditions météorologiques estivales. L’andain complet est resté 25 jours en espace de fermentation.

Les températures mesurées par les sondes de l’andain 4 sont présentées sur la Figure 35.

Pour les trois perches nous pouvons observer que les températures ont globalement augmenté les premiers jours de la phase de fermentation. La perche B a indiqué ensuite une diminution progressive de la température jusqu’à la fin de la phase de fermentation. Pour les perches A et C, une diminution de la température a ensuite également été observée avec néanmoins une faible augmentation de la température au cours de la phase de fermentation. En effet, la perche A indique une courte élévation de la température du 12ème au 14ème jour de la phase de fermentation tandis que la perche C indique une élévation de température autour du 11ème jour de la phase de fermentation. Ces résultats nous laissent penser que la diminution de la température observée rapidement après le début de la fermentation est probablement provoquée par des conditions de fermentation non optimales. En effet, si cette diminution avait été provoquée par un manque de composés facilement biodégradables, elle n’aurait pas été suivie par une autre augmentation de la température.

D’autre part, nous pouvons voir sur la Figure 35 que les températures n’ont pas dépassé 55°C (température d’hygiénisation) pendant la phase de fermentation. Seule la sonde Tbas de la perche A a atteint et dépassé 55°C pendant plus de 2 jours. L’hygiénisation n’a par conséquent pas été obtenue. A partir de ces résultats, nous pouvons nous demander si les conditions de fermentation n’ont pas gêné l’évolution de la température en agissant sur les populations microbiennes. Néanmoins, ces résultats peuvent également s’expliquer par une biodégradabilité trop faible du mélange due à la grande quantité d’agent structurant (peu biodégradable) qui le compose. En effet, selon Mustin (Mustin 1987), plus le mélange est biodégradable, plus l’élévation de la température est rapide et importante. En outre, il est important de rappeler que l’ajout d’agent structurant en trop grande quantité entraine des coûts supplémentaires pour l’industriel et limite la durée de fermentation des andains en augmentant la quantité de matière à composter (capacité limitée de l’espace de fermentation). Kulikowska et Klimiuk (Kulikowska et Klimiuk 2011) ont également observé une faible évolution de la température en fonction des co-produits ajoutés aux boues d’épuration. Pour expliquer ces résultats, Kulikowska et Klimiuk évoquent une inhibition possible des fortes concentrations en ammoniac sur la dégradation de la cellulose et de l’hémicellulose.

Concernant les relevés de température en fonction de la profondeur des sondes, nous pouvons constater que les températures sont plus élevées vers le bas de l’andain. Ce comportement a également été observé lors des précédents andains suivis. Ces résultats peuvent probablement être expliqués par des pertes thermiques plus faibles dans la partie basse de l’andain compte tenu du système d’aération par aspiration.

Figure 35 : profils des températures mesurées lors de la phase de fermentation de l’andain 4