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III.5 Performances & bruit

IV.1.2 Technologies actuelles

Les détecteurs infrarouges peuvent se ranger en deux grandes classes : d’une part, les détecteurs thermiques qui détectent un flux d’énergie, et d’autre part les photodé-tecteurs quantiques qui détectent des photons.

a Détecteurs thermiques

Ces détecteurs sont des thermomètres qui reposent sur la mesure d’une température ou variation de température induite par l’absorption de rayonnement thermique. Il s’agit donc d’une méthode indirecte de mesure d’un flux infrarouge. La technologie la plus employée est de type bolométrique, et mesure la variation de conductance électrique en fonction de la température. On peut également utiliser un thermocouple pour sonder un gradient de température, suivre la tension de seuil d’une diode ou encore utiliser l’effet pyroélectrique[173]. Afin de gagner en sensibilité, on utilise fréquemment des matériaux possédant une transition de phase pour le paramètre à mesurer, comme par exemple l’oxyde de vanadium VOx, opéré proche de la température de transition métal-isolant.

Intégrés dans une matrice de pixels, on parle alors de détecteurs microbolomé-triques. Ces dispositifs ont pour avantages majeurs d’être relativement économiques (moins de $10 000), simples à mettre en œuvre, de fonctionner à température ambiante et d’avoir une sensibilité spectrale large sur la bande III, de 7 à 14 µm. Sur cette plage de longueur d’onde, ces détecteurs possèdent une NETD comprise entre 50 et 200 mK. En revanche, ils sont moins adaptés sur la bande II. Ils possèdent aussi un temps de réponse lent dû à des effets de rémanence thermique. Enfin, la détectivité spécifique d’un bolomètre ne peut pas dépasser la limite fondamentale de quelques 1010 Jones à température ambiante.

b Matériaux à faible énergie de bande interdite

Si l’on souhaite obtenir une détectivité spécifique supérieure à 1010 Jones, on peut utiliser des photodétecteurs faisant directement la conversion de photons en porteurs électriques. Le choix du semi-conducteur utilisé est d’abord dicté par la longueur d’onde de coupure à atteindre. Le tableau IV.1 présente les matériaux semi-conducteurs à faible énergie de bande interdite les plus utilisés pour la photodétection dans différents domaines infrarouges.

Nous remarquons que plus la longueur d’onde ciblée est grande, moins il y a de choix en matériaux (tableauIV.1). Jusqu’à 3 µm, des semi-conducteurs purs tel que le silicium, le germanium ou le sulfure de plomb peuvent être utilisés. Afin d’atteindre des énergies de bande interdite de l’ordre de 100 mV, une stratégie couramment utilisée est de fabriquer des alliages binaires, tel HgxCd1−xTe qui permettent de régler continûment l’énergie de bande interdite entre 0 eV (HgTe étant un semi-métal) et 1,5 eV (CdTe).

De tous les matériaux, le mercatel HgCdTe est le plus utilisé dans les applications commerciales. Polyvalent, il hérite en effet de soixante ans de recherche associée à de bonnes propriétés de transport. Par exemple, pour une longueur d’onde de coupure λc = 10 µm, un tel photodétecteur possède une détectivité spécifique dépassant les 1012 Jones[173].

Matériau 1–3 µm (infrarouge télécom) 3–5 µm (infrarouge thermique) 8–12 µm (imagerie thermique) 14–30 µm (infrarouge lointain) Si Ge GaSb InGaAs PbS InAsSb PbX (X=Se,Te) PbSnX (X=Se,Te) HgCdTe

Table IV.1 – Domaine infrarouge d’utilisation de matériaux semi-conducteurs à faible énergie de bande interdite.

c Transitions inter-sous-bandes : QWIP, super-réseaux de type-II et semi-conducteurs extrinsèques

Nous avons vu que peu de semi-conducteurs possèdent une bande d’énergie interdite suffisamment faible pour absorber des rayonnements de longueur d’onde supérieure à 10 µm. Plutôt que de se reposer sur la création d’une paire électron-trou de part et d’autre de la bande d’énergie interdite, on peut également envisager des transitions entre deux niveaux électroniques. Actuellement, il existe trois manières de procéder. c.1 QWIP Les Quantum Well Infrared Photodetector sont des hétérostructures formé d’un semi-conducteur confiné selon une dimension, afin de lever la dégénérescence de la bande de conduction et obtenir des niveaux électroniques discrets (voir figure

IV.3). Ainsi, la différence d’énergie entre les deux premiers niveaux électroniques est directement fixée par la taille du puits. Si le premier niveau électronique est rempli par dopage, une transition vers le second niveau par absorption de photon est possible. Afin de bloquer le courant d’obscurité, mais pas le photocourant, la hauteur de la barrière est choisie de manière à ce que le premier état électronique soit piégé dans le puits, mais que le second soit résonnant avec la bande de conduction de la barrière (figure

IV.3). En pratique, le puits est réalisé en arséniure de gallium GaAs, tandis que la barrière en alliage AlxGa1−xAs ou InxGa1−xAs. Par construction, les photodétecteurs QWIP ont une absorption résonnante à une longueur d’onde λ réglable sur tout le spectre moyen infrarouge, et une largeur à mi-hauteur de l’ordre de λ

10. Enfin, puisque la différence d’énergie est réalisée par confinement et non plus seulement au moyen du matériau, une vaste gamme de matériaux différents est accessible.

Émetteur Collecteur E x GaAs AlGaAs AlGaAs AlGaAs AlGaAs GaAs GaAs

Figure IV.3 – Principe d’un photodétecteur QWIP avec un état électronique confiné (bleu) et un état électronique libre (rouge).

c.2 Super-réseaux Cette stratégie consiste à utiliser un réseau d’hétérostructures de type-II entre deux matériaux, typiquement l’antimoniure de gallium GaSb et l’ar-séniure d’indium InAs (figure IV.4). De cette manière, deux bandes d’énergies sont formées, dont la différence en énergie est fixée par les paramètres du super-réseau, c’est-à-dire son pas et la taille du puits.

GaSb

InAs

GaSb GaSb GaSb

InAs InAs

h

ν

E

x

Figure IV.4 – Principe d’un photodétecteur à super-réseau de type-II avec une tran-sition électronique entre deux mini-bandes (bleu et rouge).

c.3 Semi-conducteurs extrinsèques Cela consiste à doper n (ou p) un semi-conducteur tel que du silicium ou du germanium au moyen d’impuretés, afin d’induire un fort dopage dégénéré. De cette manière, le niveau de Fermi est fixé au niveau d’impureté, quelques meV sous la bande de conduction (ou au-dessus de la bande de valence). Sous éclairement, les impuretés sont ionisées, et des électrons (ou des trous) sont injectés dans la bande de conduction (ou de valence). Ce type de photodétec-teur est largement employé en astronomie, puisque qu’ils sont les principaux à opérer pour des longueurs d’ondes au-delà de 20 µm, jusqu’à 300 µm[173]. Pour le silicium, les dopants majoritairement utilisés sont le gallium Ga, l’indium In et l’arsenic As.

Pour le germanium, le dopage au gallium est majoritairement utilisé. En pratique, un détecteur à semi-conducteur extrinsèque est généralement associé à une barrière de semi-conducteur intrinsèque afin de filtrer le courant d’obscurité.

BV BC EF E

Figure IV.5 – Principe d’un photodétecteur à semi-conducteur extrinsèque avec tran-sition entre le niveau d’impureté au niveau de Fermi EF et la bande de conduction.

c.4 Bilan De toutes les technologies présentées, les plus adaptées à l’infrarouge et l’imagerie thermiques rapides (soit les fenêtres 3–5 µm et 8–12 µm) sont les photocon-ducteurs à base de mercatel, les QWIP et les super-réseaux de type-II. Les premiers possèdent les meilleures performances, mais ont un prix élevé en dépit de plusieurs dé-cennies de recherche. En effet, la croissance de HgCdte se faisant de manière épitaxiée, il est nécessaire d’utiliser un substrat de CdZnTe, dont le prix est de l’ordre de $10 000 pour un wafer de 7 cm × 7 cm.

Les photodétecteurs de type QWIP ou super-réseaux peuvent être épitaxiés sur des substrats peu coûteux comme le GaAs. Néanmoins, pour des températures supérieures à 40 K, ils sont limités par un courant d’obscurité plus élevé que les photoconducteurs mercatel.

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