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I.3 Transport dans des films de nanocristaux

II.1.1 Introduction

a Choix du système : nanoplaquettes de CdSe

Les propriétés optiques remarquables des nanoplaquettes en font des candidats de choix pour des photodétecteurs à longueur d’onde de coupure bien définie, et dispo-nibles sur substrat arbitraire. En matière de matériaux, nous avons le choix entre des nanoplaquettes de CdSe, CdTe et CdS. Notre avons choisi de construire notre travail à partir des nanoplaquettes de CdSe, du fait de leur robustesse ainsi que de la possibi-lité de fabriquer des hétérostructures de type-II et quasi type-II, en faisant croître une coque ou une couronne d’un autre matériau sur ou autour du cœur de CdSe[68][73][70]. Plus particulièrement, nous utiliserons des nanoplaquettes CdSe 510, dont la pre-mière transition excitonique est à 510 nm.

b Conception et fabrication des électrodes en salle blanche

Nous avons vu au chapitre I que le transport dans les films de nanocristaux est fortement limité par les sauts tunnel successifs que doivent effectuer les porteurs à travers les ligands pour rejoindre l’électrode opposée. Les nanoplaquettes n’échappent naturellement pas à cette contrainte. Ainsi, un film fait à partir de nanoplaquettes de CdSe possède une résistance dépassant aisément le téraohm, que l’on ne peut mesurer au moyen de notre banc de mesure. Il faut donc que la distance entre les électrodes soit la plus faible possible, et l’aire électrique (largeur × hauteur des électrodes) la plus grande possible. Cependant, pour un photodétecteur, nous avons besoin d’une surface d’absorption suffisamment grande pour absorber le plus de photons possible. Une géométrie verticale, avec un film de nanocristaux entre deux électrodes planes, peut sembler approprié. Néanmoins, le risque de court-circuit entre les deux électrodes complique l’élaboration de tels dispositifs. Par ailleurs, cela implique que le film de nanocristaux soit en contact avec de la résine photosensible et des solvants agressifs, ce qui n’est pas souhaitable.

À la place, nous avons opté pour une géométrie planaire, c’est-à-dire un canal formé d’un film de nanocristaux séparés par deux électrodes, la source et le drain. Afin de répondre aux contraintes énoncées plus haut, nous avons opté pour une géo-métrie d’électrodes interdigitées (figureII.1) séparées de 10 µm ou 20 µm. Nous avons fixé cette limite basse d’espacement conformément à la résolution de la photolithogra-phie optique, de l’ordre du micron. Nous préférons la photolithographotolithogra-phie optique à la lithographie électronique, car nous avons besoin d’électrodes en grande quantité afin de tester un vaste ensemble de paramètres sur le transport dans les films de nano-plaquettes. Par ailleurs, nous souhaitons entre autres déposer ces électrodes sur des substrats complètement isolants comme du verre ou du PET, ce qui est plus difficile à effectuer en lithographie électronique à cause des phénomènes de chargement.

Or Or Substrat 2,5 mm 1 mm NPLs CdSe Or Or Substrat

Figure II.1 – Schéma vu du dessus (gauche) d’électrodes interdigitées, et schéma en coupe (droite) d’un film de nanoplaquettes (NPLs) sur de telles électrodes.

Les électrodes ont été fabriquées en salle blanche, sur des wafers de silicium possé-dant une couche d’oxyde d’épaisseur typique de 300 nm. Après un nettoyage dans un bain d’acétone et aux ultrasons, les substrats sont nettoyés au plasma d’oxygène. Une couche de résine photosensible (AZ 5214E) est ensuite déposée sur chacun d’eux au moyen d’une tournette (ou spin-coater). Après avoir précuit la résine afin d’en évaporer le solvant, le motif est exposé au moyen d’UV au travers d’un masque. Le motif est ensuite inversé au moyen d’une cuisson à 125C et d’une exposition sans masque, puis révélé dans un bain de développement (AZ 726). Après rinçage à l’eau dé-ionisée et

nettoyage au plasma d’oxygène, une première couche d’accroche de 3 nm en chrome est déposée par évaporation thermique ou électronique, puis une seconde en or de 37 nm. Enfin, la résine est ôtée au moyen d’un lift-off, c’est-à-dire d’un bain d’acétone, en s’ai-dant éventuellement d’ultrasons. On obtient alors quelques dizaines d’électrodes telles que représentées à la figureII.1.

c Fabrication des échantillons : dépôt, échange de ligands

Nous déposons des films de quelques centaines de nanomètre d’épaisseur au plus sur les électrodes fabriquées précédemment. Une fois les connections électriques vers la source et le drain effectuées, l’illumination de l’échantillon se fait par au-dessus, au moyen d’un laser à 405 nm comme représenté sur la figure II.2.

Drain Source Substrat (SiO2) VDS Film NPLs IDS

Figure II.2 – Schéma d’un photodétecteur à base de nanoplaquettes (NPLs). La méthode de dépôt des films de nanoplaquettes est intimement liée à la méthode d’échange de ligands. Comme expliqué au chapitre I, cette étape est absolument né-cessaire, sans quoi le transport des charges est limité par les sauts tunnel au travers des ligands acide oléique, longs de 18 carbones (soit environ 2 nm).

Il existe deux grands types d’échange de ligands :

— Sur film : cette méthode consiste à déposer un mince film de quelques dizaines de nanomètres au plus sur le substrat, puis à le plonger dans une solution d’éthanol contenant les ligands courts, typiquement à une concentration de 1% en masse ou en volume (voir figure II.3a). Le film obtenu est ensuite rincé dans de l’éthanol pur afin d’ôter le surplus de ligands. L’utilisation de l’éthanol est importante, car étant un non-solvant pour les nanocristaux, cela évite de les re-disperser. Il suffit ensuite de répéter ce cycle de dépôt-échange-rinçage plusieurs fois afin d’obtenir l’épaisseur de film souhaitée, et combler les fissures apparues lors de l’échange de ligands du fait de la contraction en volume du film. Cette méthode permet d’obtenir des films d’épaisseur bien définie et sans agrégat. Néanmoins, il est difficile de s’assurer que l’échange de ligands est complet. Un moyen pour le vérifier consiste à acquérir un spectre infrarouge

par FTIR avant et après l’échange de ligands, en mesurant la diminution de l’aire des pics associés aux liaisons alcanes C-H (à environ 3000 cm−1). Par ailleurs, l’échange de ligands sur film génère des fissures au sein du film, ce qui peut être rédhibitoire en matière de transport.

— En suspension : cette méthode permet un échange de ligands plus complet que l’approche sur film. Elle repose sur un transfert de phase entre la suspen-sion initiale contenant les nanocristaux dans un solvant apolaire, et la phase finale contenant les ligands désirés dans un solvant polaire tel que le N-méthyl-formamide (NMFA), comme représenté à la figureII.3b. L’inconvénient majeur de ce procédé réside dans l’utilisation de solvants polaires, donc à haut point d’ébullition. Il est ainsi nécessaire de chauffer le substrat à au moins 100C afin d’évaporer le solvant et former un film. Enfin, le solvant polaire utilisé tel que le N-méthylformamide (NMFA) a un contact non-mouillant avec les substrat de silice. Les films obtenus n’ont donc pas une épaisseur homogène après séchage.

Substrat NPLs CdSe Substrat NPLs CdSe Ligands courts (a) Agitation NPLs CdSe (ligands longs) Hexane Ligands courts NMFA Hexane, ligands longs NPLs CdSe (Ligands courts) NMFA (b)

Figure II.3 – Schéma du principe de l’échange de ligands (a)sur film et (b) en sus-pension par transfert de phase.

Le tableauII.1résume les avantages et défauts de chacune des deux méthodes. Dans la suite de nos travaux, nous explorerons l’une et l’autre méthode d’échange de ligands. Dans les deux cas, l’échange de ligands s’accompagne d’un changement de couleur du film ou de la suspension du film de nanocristaux. Dans le cas des nanoplaquettes CdSe 510 nm, la couleur passe du jaune au rouge.

Échange de ligands : sur film en suspension

Efficacité - +

Contrôle de l’épaisseur +

-Absence de fissures - +

Dépôt sans chauffage +

-Table II.1 – Avantages et défauts comparés des méthodes d’échange de ligands sur film et en suspension.

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