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Vers une étude expérimentale : Synthèse d’échantillons denses

II- Les Techniques utilisées

Deux techniques de frittage ont été utilisées au cours de ces trois années, selon la proportion de métal présent dans les échantillons. Les échantillons les plus riches en silicates ont été frittés par Spark Plasma Sintering (SPS). Il s’agit de chauffer un échantillon très rapidement par effet Joule grâce à l’injection d’un fort courant dans un creuset en graphite, contenant la poudre, le tout sous pression de confinement. Pour les échantillons les plus métalliques, le SPS n’est pas envisageable car le métal conduirait trop le courant à travers la poudre. Dans ce cas là, le frittage s’est donc fait dans un four à une atmosphère à chauffage classique par des résistances.

94 II-1-Les synthèses en four à 1 bar

II-1-a : le principe

Ce mode de frittage concerne uniquement les échantillons à dominante métallique, à savoir respectivement Fo+Ni (30:70) et (10:90), Fo+Fe (30:70) et (10:90). Le frittage à 1 bar consiste à densifier des poudres uniquement par l’action de la température. Le four (Fig.2.3a) est constitué de 4 éléments chauffants. Au travers de l’isolant passent deux tubes d’alumine servant de support aux échantillons. La circulation des gaz se fait de haut en bas et de façon continue. Enfin, un thermocouple de type S (Pt,Pt-Rh10%) permet un contrôle précis de la température (±1°C) au cours de l’expérience. A l’intérieur de cette enceinte, la poudre est placée dans un creuset de même nature que la phase métallique présente dans le mélange de poudre préalablement tassé. Ce creuset est ensuite placé dans un tube d’alumine et fermé par le haut par une pastille de même nature (Fig.2.3b). De telles précautions évitent une pollution en métal au niveau du thermocouple, ce qui aurait pour conséquence de changer ses propriétés et donc d’induire un biais dans la mesure de la température.

Figure 2.3 : a-Schéma du four à une atmosphère utilisé pour les synthèses d’échantillons à matrice métallique. b-Assemblage poudre + creuset à l’intérieur de l’enceinte du four.

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Dans notre cas, la fugacité en oxygène (fO2) dans le four doit être contrôlée afin de

maintenir des conditions suffisamment réductrices pour ne pas oxyder le métal. Un mélange de gaz Ar-H210% bullant dans de l’eau permet ce contrôle. Connaissant la pression du gaz

bullant dans l’eau (1.4 bar en moyenne) et la pression de vapeur d’eau saturante (28 hPa) à la température de la pièce (23°C en moyenne), il est alors facile de déterminer la fugacité en oxygène régnant dans notre four. En effet, le rapport pH2O/pH2 étant égal à 0.2 (soit

log(PH20/H2)=-0.70) et les températures des expériences étant de 1400°C et 1500°C, la

fugacité en oxygène varie respectivement entre 10-11 et 10-10 atmosphère (Fig.2.4a).

Figure 2.4 : a-Fugacité en oxygène (en atmosphère) fixée par le tampon H2/H2O lors des synthèses à 1400 et 1500°C. b-Fugacité en oxygène dans le four lors des synthèses par rapport aux divers tampons. Remarquer que pour la synthèse d’échantillons avec du fer (1500°C), on se trouve quasiment sur le tampon.

Pour ces conditions de température et de fugacité en oxygène, on se trouve dans les domaines de stabilité de Ni° et Fe° (Fig.2.4b). On constate qu’à 1400°C, température de synthèse pour les échantillons contenant du nickel, on se trouve environ 5 ordres de grandeur en dessous du tampon Ni-NiO. Pour les synthèses faites à 1500°C sur les échantillons contenant du fer, la fugacité en oxygène dans le four, égale à 10-10 atm, est très proche du tampon Fe-FeO.

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Chaque synthèse se déroule de la manière suivante : la circulation du mélange gazeux débute environ 12 heures avant le début de la montée en température qui se fait de façon régulière, à 400 °C/h pendant environ 3 heures (Fig.2.5). Pour permettre une densification rapide et efficace, la température est augmentée plus rapidement à partir 1200°C. En effet, on passe de 6-7°C/min à 18-20°C/min (Fig.2.5), et ce jusqu’à la température souhaitée qui est environ 30-40°C en dessous du point de fusion de la phase métallique présente. On laisse l’échantillon à cette température pendant 4 heures pour que la densification soit la plus aboutie possible. Enfin, le refroidissement se fait selon une exponentielle décroissante, autrement dit rapidement au début pour figer la texture de la synthèse, et lentement à la fin. Cette dernière phase prend environ 2 heures, au bout desquelles l’échantillon est sorti et prêt à être analysé.

Figure 2.5 : parcours Température(T)-temps(t) typique lors du frittage à une atmosphère. Le maximum de température est fixée à 1400°C ou 1500°C selon la nature du métal présent dans l’échantillon, respectivement Ni ou Fe.

II-1-b : observations des frittés

Plusieurs séries de tests ont été effectuées afin d’obtenir des échantillons denses et non pollués. Voici deux exemples de ce qu’il faut vérifier avant de pouvoir passer à des expériences de croissance cristalline comme nous l’avons envisagé.

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Dans un premier temps, des synthèses ont été réalisées avec les poudres commerciales brutes. Ces poudres ont des granulométries très variables (<1 µm à quelques dizaines de microns, cf. I-1) avec des tailles de grains moyennes ≥10 µm. il s’avère que lorsque ces poudres sont frittées à 1400°C pendant 4h, il y a forte porosité résiduelle (Fig.2.6a). Pour palier à ce problème, un temps de frittage plus long ou à plus haute température pourrait être envisagé mais cela provoquerait la croissance des grains, ce que nous voulons éviter en vu des expériences futures. En revanche, le frittage de ces poudres après broyage (60 minutes dans de l’alcool dans un broyeur à bille), permet d’obtenir des agrégats avec une distribution de taille de grains plus homogène et de taille moyenne plus petite (Fig.2.2 vs 2.8,~3 µm pour Fo et 1-2 µm pour Ni) et une porosité résiduelle très faible (Fig.2.6b) : l’échantillon est dense

(Table 2.1). Ce protocole sera utilisé pour toute la suite de l’étude.

Figure 2.6 : Effet de la taille des grains de départ sur la porosité d’échantillons forsterite + nickel frittés avec un cycle identique. Images MEB-BSE, 20 kV, spotsize 50, x300 a- Echantillon fritté avec les poudres commerciales ayant des distributions de taille de grains polymodales et grossières. La porosité apparait en noir sur l’image et se traduit par un pic dans les faibles niveaux de gris dans l’histogramme. b-Le même mélange synthétisé avec des poudres finement broyées (3-4 µµµµm).

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Comme mentionné précédemment, il est plus difficile de maintenir des conditions réductrices (fO2<<tampon) pour fritter des poudres contenant du fer. En effet, dans ces

échantillons, une troisième phase se développe en proportion non négligeable : l’oxyde de Fer

(Fig.2.7a-d). De plus, du fer est incorporé dans la structure de l’olivine (Mg,Fe)2SiO4 (Fig.2.7b), ce qui n’est pas le cas avec le Nickel pour les échantillons forsterite + nickel.

Ainsi, c’est une des raisons principales pour lesquelles nous nous sommes concentrés sur l’étude des échantillons avec le Nickel comme phase métallique.

Figure 2.7 : Formation de FeO lors d’une synthèse Fo30+Fe70 pendant laquelle la fugacité en oxygène n’a pas été assez bien contrainte. a-image MEB-BSE où les trois phases apparaissent (A=Fo, B=Fe et C=FeO). L’oxyde de fer se développe au contact Fo-Fe. b- d-spectre EDS de chacune des phases. Noter la diffusion de fer dans la forsterite, ce qui apparait moins avec le Ni.

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Finalement, bien qu’assez simple à mettre en œuvre, le frittage à une atmosphère nécessite de prendre les précautions d’usage afin d’obtenir des échantillons suffisamment denses. En plus de ce qui a été évoqué précédemment, la nature du creuset peut jouer un rôle sur la densification (Table 2.1). En effet, un creuset en graphite peut réagir avec le métal et changer la nature même de l’échantillon, et donc ses propriétés physiques telles qu’un abaissement de la température de fusion. Malgré tout, lorsque tout est bien contrôlé, on peut atteindre des porosités <1% (Table 2.1), ce qui est tout à fait adapté pour les futures expériences de croissance cristalline

Nom de

l'échantillon Proportions Broyage

Nature du creuset Température max (°C) Temps de chauffe (min) Temps à Tmax (min) Densité mesuré (g/cm3) Densité théorique (g/cm3) Porosité (%) Observations

GMF9 Fo30+Ni70 non broyée Graphite 1400 210 320 6.35 7.20 11.74

Réaction C-Ni

GMF12 Fo30+Ni70 non broyée Nickel 1400 210 320 6.95 7.20 3.42 gros pores

GMF17 Fo30+Fe70 60 min + alcool Fer 1500 210 320 6.42 6.43 0.17 présence de FeO GMF23 Fo10+Ni90 60 min + alcool Nickel 1400 210 320 8.32 8.33 0.18 GMF24 Fo30+Ni70 60 min + alcool Nickel 1400 210 320 7.17 7.20 0.42

Table 2.1 : Tableau des différents tests effectués sur les échantillons à matrice métallique.

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