Les champignons filamenteux seraient apparus il y a environ 2,3 milliards d’années (Bengtson
et al., 2017) mais le règne des Fungi n’a été reconnu pour la première fois qu’en 1969 par
Whittaker. À cette époque, trois classes étaient reconnues : les phycomycètes, les ascomycètes
et les basidiomycètes. Les espèces où n’ont été observées que des spores asexuées ont été
regroupées dans la « classe », artificielle, des deutéromycètes ou Fungi Imperfecti (Ainsworth,
1973). Comme les connaissances, grâce notamment à l’avènement de la biologie moléculaire,
sur les champignons s’améliorent, la classification des champignons a subi d’importants
changements. La classe des phycomycètes a été supprimée (Whittaker, 1969) et les membres
appartenant à cette classe ont été regroupés dans 5 classes : les zygomycètes, les
chytridiomycètes, les hypochytridiomycètes, les trichomycètes et les oomycètes (Ainsworth,
1973). Dans les classifications ultérieures, seuls les Chytridiomycota, les Zygomycota, les
Ascomycota et les Basidiomycota étaient inclus dans le règne des Fungi (Figure 8A). Cette
classification a été universellement acceptée jusqu’aux années 2000 et n’a cessé d’évoluer
depuis grâce aux apports de la biologie moléculaire pour la classification.
Certains phyla comme les Myxomycota ou les Oomycota ont été exclus du règne des Fungi.
En effet, Baldauf and Doolittle (1997) et Baldauf et al., (2008) ont démontré l’appartenance
des Myxomycètes au phylum des Amoebozoa du règne des Protista (Cavalier-Smith, 1998).
En ce qui concerne les Oomycota, ils ont également été transférés dans le règne des Protista
(Margulis and Schwartz, 1998). De plus, les Ascomycota et les Basidiomycota ont été
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regroupés dans le sous-règne des Dikarya (Figure 8B). Concernant les Blastocladiomycota et
les Neocallistigomycota, ils ont été séparés des Chytridiomycota et élevés chacun au niveau de
phylum à part entière (James et al., 2006 ; Hibbett et al., 2007). Récemment, la nouvelle
classification de Spatafora et al. (2016) propose 2 nouveaux phylums : les Mucoromycota et
les Zoopagomycota qui remplacent le phylum des Glomeromycota, maintenant considéré
comme un sous-phylum : les Glomeromycotina. Quant au phylum des Zoopagomycota, il
comprend les Zoopagomycotina, les Kickxellomycotina et les Entomophtomycotina (Figure
8C).
Le règne des Fungi est aujourd’hui mieux délimité et la communauté scientifique,
particulièrement les mycologues, s’accorde à dire que le règne des Fungi est composé de 1,62
millions d’espèces (Hawksworth, 1991). Néanmoins, comme Hawksworth le reconnait
lui-même, ainsi que Bass and Richards (2011) et Richards et al. (2012), le nombre réel d’espèce
est certainement sous estimé. En effet, une raison pour laquelle le manque de connaissance est
important est que la plupart des champignons passe la majorité de leur cycle de vie (phase
micrbienne et donc invisible à l’œil nu) sous terre ou avec d’autres substrats (Grube et al.,
2017). De plus, une proportion importante de champignons ne produit pas de forme
macroscopique (Grube et al., 2017). Le nombre réel d’espèce serait donc très probablement un
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Figure 8. Classification du règne des champignons. (A) Classification jusqu’aux années 2000,
(B) classification actuelle,(C) classification proposée par Spatafora et al. en 2016(adaptée de
la thèse de A. Hermet, 2014 et de Spatafora et al., 2016). * phyla et sous-phylum retrouvés
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1.1. Champignons supérieurs : Ascomycota et Basidiomycota
Les champignons ascomycètes et basidiomycètes, qui auraient divergé il y a environ 642
millions d’années (Beimforde et al., 2014), appartiennent au sous-règne des Dikarya et
représentent la quasi-totalité des espèces décrites à ce jour et ayant une importance
économique indéniable. Avec plus de 64 000 espèces décrites, appartenant à 6400 genres
approximativement, les Ascomycota forment le plus grand phylum des Fungi (Kirk et al.,
2008, Blackwell, 2011). Les espèces de ce phylum sont présentes dans de très nombreuses
niches écologiques et dans tous les écosystèmes terrestres et aquatiques (Schoch et al., 2009)
mais les principaux champignons ascomycètes retrouvés dans les produits laitiers, notamment
fromagers, se retrouvent dans 2 classes : les Eurotiomycètes et les Sordariomycètes (Ropars et
al., 2012). Les champignons ascomycètes ont généralement une structure spécialisée, appelée
asque, au sein de laquelle les spores méiotiques (ascospores) sont produites. Les Ascomycota
sont majoritairement microscopiques mais comprennent également quelques champignons
mycorhiziens macroscopiques tel que Morchella angusticeps, plus connu sous le nom de
Morille. C’est également au sein de ce groupe que sont retrouvés les champignons
filamenteux, aussi appelés moisissures, et les levures d’intérêts technologiques, mais aussi des
champignons dits d’altération.
Avec presque 32 000 espèces décrites, les Basidiomycota constituent le deuxième plus grand
phylum fongique (Kirk et al., 2008). Considérés comme ubiquitaires, un certain nombre de
basidiomycètes sont immédiatement reconnaissables par les fructifications élaborées qu’ils
produisent. C’est en effet au sein de ce phylum que sont retrouvés la majorité des champignons
macroscopiques comestibles tels que Boletus edulis (Cèpe de Bordeaux) ou Craterellus
cornucopioides (Trompette de la mort), des champignons dits « vénéneux » tel que Amanita
verna (Amanite printanière) ou Boletus luridus (Bolet blafard) mais également les rouilles et
charbons, les levures, ainsi que certains pathogènes humains et des endophytes (Yang, 2011).
Les champignons basidiomycètes sont généralement capables de produire des basides portant
les spores sexuées appelées basidiospores.
1.2. Le phylum des Mucoromycota
Anciennement, les Mucoromycotina étaient placés dans le phylum des Zygomycota, groupe
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sous-phyla dont le placement est incertain : Mucoromycotina, Entomophthoromycotina,
Kickxellomycotina et Zoopagomycotina. Récemment, les Mortierellales ont été séparés des
Mucoromycotina et placés dans un sous-phylum distinct, les Mortierellomycotina (Hoffmann
et al., 2011) pour obtenir la classification actuelle (Figure 8B). Une étude très récente, de
Spatafora et al. (2016), propose une nouvelle classification dans laquelle les Mucoromycotina
font maintenant partie, avec les Mortierellomycotina et les Glomeromycotina (anciennement
Glomeromycota), du phylum des Mucoromycota (Figure 8C). Dans la production de produits
laitiers, les Mucoromycotina ont, eux aussi, une grande importance économique. En effet,
certaines espèces telles que Mucor lanceolatus ou Mucor racemosus, appartenant à l’ordre des
Mucorales interviennent respectivement dans la production ou dans l’altération des produits
laitiers.
Dans le document
Production d'ingrédients laitiers fonctionnalisés par des microorganismes producteurs de composés antifongiques
(Page 56-60)