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Chapitre 2 Etat de l’art

2.4 Vers le pilotage d’une performance multicritère

2.4.1 Tableaux de bord équilibrés

2.4.1.1 Présentation

Les tableaux de bord équilibrés ou Balanced ScoreCards (BSC) ont été introduits par R. S. Kaplan et D. P. Norton dans les années 1990 [Kaplan et Norton 1992]. Deux courants principaux distincts s’opposent à cette époque : l’un consiste à considérer uniquement des mesures économiques de la performance financière actuelle comme mesure de la performance de l’entreprise, mesures qui représentent plutôt un résultat et ne permettent pas d’anticiper l’avenir financier de l’entreprise, et l’autre à considérer uniquement des mesures opérationnelles comme mesure de la performance de l’entreprise. Leur volonté était de concilier dans un outil de pilotage stratégique ces deux courants et de rassembler dans un tableau de bord unique des mesures de la performance financière actuelle de l’entreprise à des mesures de la performance opérationnelle de l’entreprise qui vont permettre d’anticiper sa performance financière à plus long terme [Kaplan et Norton 1992].

Les tableaux de bord équilibrés regroupent des mesures de la performance selon quatre perspectives différentes entre lesquelles il faut trouver un équilibre :

- la perspective financière : comment les investisseurs perçoivent l’entreprise (ou quelles sont les attentes des investisseurs en termes de performance financière) ;

- la perspective client : comment les clients voient l’entreprise (ou quelles valeurs l’entreprise doit-elle créer pour le client pour atteindre la performance financière) ; - la perspective interne : dans quoi l’entreprise doit-elle exceller (ou quels sont les

Les mesures de ces quatre perspectives sont liées entre elles par des liens de cause à effet de façon linéaire : perspective innovation et apprentissage, perspective interne, perspective client puis perspective financière. On parle de carte stratégique : cette carte est le cœur de la mise en place des tableaux de bord équilibrés ; elle établit le passage entre expression stratégique et performance opérationnelle [Kaplan et Norton 1996] [Kaplan et Norton 2004]. L’objectif final est la perspective financière : les trois autres perspectives permettent d’anticiper l’évaluation de la performance financière à moyen et long termes.

Les tableaux de bord dynamiques ont ensuite enrichi le concept initial en introduisant entre les perspectives des boucles de retour ou feedbacks issus de la dynamique des systèmes dont l’intérêt a été montré [Stevenson et Wolstenholme 1999]. [Olve et al. 1999] propose ainsi de construire des modèles simulables utilisables pour identifier et comprendre les relations causales entre les objectifs stratégiques du tableau de bord équilibré et les actions et à tester les résultats d’actions possibles. [Cobbold et Lawrie 2002] distingue en tout trois générations de tableaux de bord équilibrés. H. Rampersad propose d’associer aux tableaux de bord équilibrés les théories de l’apprentissage (cycle de D. Kolb expérience – réflexion – conceptualisation – expérimentation) à travers la démarche Total Performance Scorecard.

Les tableaux de bord équilibrés sont utilisés en phase de pilotage d’une organisation pour clarifier la stratégie et faciliter sa communication, identifier les processus clés de la mise en œuvre de la stratégie, concevoir des indicateurs de performance, faire agir les ressources internes au service de la stratégie, mesurer l’écart entre chaque objectif et son atteinte effective, faciliter le reporting et adapter la stratégie en fonction de ces données. Ils suivent une approche de la hiérarchie vers les opérationnels ou top-down et sont à l’origine destinés aux directions générales1.

Les tableaux de bord équilibrés proposent ainsi de passer par la mesure de critères de performance non financiers pour évaluer la performance financière à plus long terme et font le lien direct entre mesure de l’activité et stratégie. Ils consistent en un nouveau mode de pilotage des organisations s’appuyant sur quatre axes d’élaboration et de déploiement de la stratégie.

2.4.1.2 Critères de performance et parties prenantes considérés

Les principaux types de performance considérés dans les tableaux de bord équilibrés sont donc la performance pour l’entreprise en termes d’innovation et d’apprentissage et d’avantage concurrentiel, la performance pour le client final en termes de satisfaction d’un besoin et la performance pour l’investisseur en termes économiques. La Figure 39 présente les principaux types de performance considérés dans les tableaux de bord équilibrés.

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D’autres méthodes proposent aujourd’hui d’impliquer les acteurs terrain en mode projet dans une logique de progrès continu pour élaborer et faire vivre les tableaux de bord, comme la méthode GIMSI. Elles favorisent ainsi les démarches coopératives et proactives de type bottom-up. Certaines d’entre elles invitent aussi à ajouter des axes non différenciés dans la méthode, intervenant dans la chaîne de création de valeurs, comme le réseau fournisseurs, le système d'information ou encore l'importance de l'avis du public (poids de l'éthique).

2.4 - Vers le pilotage d’une performance multicritère

Organisation

Clients finaux

Actionnaires Performance pour le client final en termes de satisfaction d’un besoin

Performance pour l’organisation en termes d’innovation et d’apprentissage

Performance pour l’actionnaire en termes économiques Concurrents

Performance pour l’organisation en termes d’avantage concurrentiel

Figure 39 : Principaux types de performance considérés dans les tableaux de bord équilibrés

2.4.1.3 Niveau d’analyse et adaptation au changement

Les tableaux de bord équilibrés se situent au niveau global de la performance de l’organisation, tout en s’appuyant sur le niveau local de la performance des activités. Les critères de pilotage sur lesquels ils s’appuient n’évoluent pas de façon dynamique avec les changements de l’environnement ; ils nécessitent une remise en question manuelle régulière des indicateurs et donc des tableaux de bord dans leur ensemble.

2.4.1.4 Intérêts et limites pour notre problématique industrielle

Les principaux intérêts des tableaux de bord équilibrés résident dans la facilité d’utilisation et l’ergonomie, dans la variété des types de performance considérés, ce qui permet de répondre au moins en partie au besoin de diversité des critères de performance, dans le nombre de parties prenantes différentes prises en compte, ce qui permet de faire face au moins partiellement au besoin de multiplicité des interfaces à l’environnement, et dans le double niveau d’analyse à la fois global et local. Mais l’utilisation d’eux seuls n’est pas adaptée à notre problématique industrielle. En effet, encore trop peu de critères de performance et d’interfaces à l’environnement sont pris en considération. De plus, le comportement des tableaux de bord équilibrés face à l’incertitude et la mouvance n’est pas

La facilité d’utilisation des tableaux de bord équilibrés et la variété apparente des critères de performance et parties prenantes considérés ont participé à faire leur réussite. Ils nous semblent intéressants pour notre étude, en particulier par rapport à l’entrée dans l’économie de l’innovation et de la connaissance, car ils considèrent que la performance de l’organisation ne réside pas seulement dans la performance de ses produits et de ses activités, mais également dans son capital (en particulier innovant et humain). Mais ils ne prennent pas en compte encore suffisamment de parties prenantes par rapport à notre besoin et le critère de performance ultime visé est toujours en réalité la seule performance économique et concurrentielle. Ils ne permettent donc pas de répondre de façon satisfaisante à l’ensemble des besoins de pilotage des organisations de demain, et en particulier à ceux de MIRCen.

Encore trop peu de critères de performance sont pris en compte dans les tableaux de bord équilibrés. Nous nous sommes donc intéressés à un autre mode de pilotage qui semble intégrer plus de critères : il s’agit du management par la valeur, que nous présentons dans le paragraphe suivant.