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Partie I. Paramètres biomécaniques de la marche pour l’évaluation des fonctions

2.4. Système de genou-cheville

2.4. Système de genou-cheville

L’ensemble des composants prothétiques présentés dans les paragraphes précédents cherchent à reproduire le comportement d’une articulation unique : genou ou cheville. Aucun de ces composants n’intègre les deux articulations et ne permet d’utiliser des informations du genou pour modifier le comportement de la cheville ou inversement. Or, la cheville et le genou non amputé fonctionnent ensemble pour assurer le déplacement du centre de gravité. De plus, dans la pratique courante, les sujets amputés au-dessus du genou ne sont pas équipés de pieds prothétiques à microprocesseur pour des contraintes de poids, d’encombrement et parce que le bénéfice apporté par ce type d’appareillage n’a pas encore été prouvé. Les adaptations possibles de l’appareillage aux situations de la vie courante sont donc limitées aux seules fonctions du genou. Certains composants prothétiques associent deux composants prothétiques isolés tout en partageant les capteurs et l’électronique. Cependant, peu de composants assurent un lien entre le comportement de la cheville et du genou. Quelques systèmes prothétiques cherchent à contrôler les deux articulations par microprocesseur. Parmi celles-ci, deux prototypes de prothèses contrôlées par microprocesseurs seront décrits ci-dessous, la première est une prothèse active développée par la Vanderbilt University (Figure I-22) et la deuxième est la prothèse passive SPCM développée par la société PROTEOR et sur laquelle porte cette thèse.

a. Prothèse de genou-cheville de la Vanderbilt University

Figure I-22 — Prototype de prothèse de genou-cheville de la Vanderbilt University issus de Lawson et al. 2013)

La prothèse genou-cheville de la Vanderbilt University est la première prothèse active de ce type. Au cours des dernières années, plusieurs générations de ce système ont été décrites dans la littérature. Aujourd’hui, les capteurs d’effort sous les pieds et de moments ont été remplacés dans la dernière version par un seul capteur d’effort axial au-dessus de la cheville. Les angles des deux articulations sont mesurés par des encodeurs magnétiques. Le genou et la cheville sont actionnés par deux moteurs électriques indépendants capables de fournir un couple maximal de 85 Nm au niveau du genou et 110 Nm au niveau de la cheville. Enfin, une centrale inertielle 3D est intégrée dans le tibia prothétique (Lawson 2014, Lawson et al. 2013, Shultz 2017, Sup et al. 2009). Le poids global de la prothèse est de 5 kg pour 1,5 h d’autonomie (Lawson et al. 2014). Différentes propositions de contrôle à plat, en pente et en escalier ont

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été publiées. Celles-ci visent à améliorer la marche par rapport aux appareillages disponibles actuellement, grâce à une gestion de la puissance et de la mobilité des articulations (Lawson

et al. 2013, Simon et al. 2014, Sup et al. 2009, 2011). Lors de la marche, la prothèse estime

l’inclinaison de la pente et la vitesse de marche. Ces informations sont ensuite utilisées pour modifier l’impédance de la cheville et du genou en fonction de la phase du cycle de marche. L’adaptation de la prothèse à la pente et à la vitesse de marche est alors possible (Lenzi et al. 2014). De plus cette prothèse permet de restaurer la flexion de genou en début de phase d’appui en montée de pente et montée d’escalier que l’on peut observer chez le sujet non amputé (Lawson et al. 2013, Sup et al. 2011). Un algorithme de reconnaissance de situations doit ensuite permettre de changer de mode en fonction de l’activité : assis, debout, marche dans les escaliers, marche à plat, marche en pente (Varol et al. 2010). Cependant, ces derniers travaux sont encore à l’état de recherche. Cette prothèse est actuellement à l’état de prototype et n’a pas encore vocation à être commercialisée. En effet, le poids, l’autonomie, les erreurs de reconnaissance de situations ne permettent pas actuellement de laisser la prothèse aux sujets pour une utilisation en situation de vie réelle.

b. SPCM

Figure I-23 — Machine d’état et règles de transition entre les différents états du SPCM ; Bie= couple à la cheville, Ext=Extension, 𝜃= angle du tibia dans le plan sagittal par rapport à la verticale, 𝜃̇= la vitesse angulaire du tibia dans le plan sagittal

Pour limiter ces problèmes de poids et d’autonomie, une solution serait de développer un système passif qui nécessite des batteries moins importantes pour une autonomie suffisante et des moteurs moins lourds pour fonctionner. PROTEOR a ainsi développé un Système

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projet APSIC, un prototype du SPCM a été conçu à partir des problématiques rencontrées par les sujets amputés au-dessus du genou dans les situations de la vie courante. Actuellement, le SPCM vise à faciliter la marche dans les situations de la vie courante. Ce système prothétique comporte une unité hydraulique agissant sur le genou et la cheville contrôlée par un microprocesseur. Le lien hydraulique entre la cheville et le genou a pour objectif de reproduire le comportement du triceps sural, muscle bi-articulaire entre ces deux articulations. Le microprocesseur utilise une machine d’état pour différencier le contrôle de l’unité hydraulique pendant les différentes sous phases du cycle de marche (Figure I-23). Les transitions entre les états sont établies par des règles qui utilisent les informations des capteurs. La prothèse intègre une centrale inertielle dans le tibia prothétique, un capteur magnétique pour détecter l’extension du genou, et un capteur de couple à la cheville.

D’une manière comparable aux genoux prothétiques à microprocesseurs présentés précédemment, ce système prothétique permet d’adapter l’amortissement du système hydraulique en fonction des différentes phases du cycle de marche avec un ordre de poids et un encombrement similaire.

En phase d’appui, cet amortissement est suffisamment important pour permettre de contrôler la flexion du genou lors de la descente de pente et d’escalier. Par rapport aux pieds prothétiques à microprocesseur présentés précédemment, le SPCM autorise une dorsiflexion maximale de cheville bien plus importante (de l’ordre de 20° en descente d’escalier) grâce à la synergie hydraulique entre le genou et la cheville. Elle est avantageuse en descente de pente ou d’escalier, lorsque l’utilisateur utilise la résistance à la flexion du genou. Cette mobilité plus proche de celle observée chez les sujets non amputés devrait restaurer la stratégie de marche de ces derniers et apporter une plus grande stabilité. D’autant plus que la stratégie utilisant le nez de la marche est délétère pour le membre controlatéral. Enfin, le microprocesseur peut ajuster la butée de dorsiflexion de la cheville hydraulique pour adapter la prothèse à la hauteur de talon de chaussure ou à la pente, adaptation se rapprochant plus de celle observée chez les sujets non amputés.

En phase oscillante, le système modifie l’amortissement à la flexion pour l’adapter à la vitesse de marche de la personne et assurer un appui sur la prothèse en cas de trébuchement. Le passage du pas est facilité par cette synergie, réalisant une dorsiflexion de cheville avec la flexion de genou de manière automatique et sans intervention du microprocesseur sur l’articulation.