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Pour pouvoir comparer la différence de cinétique de réaction entre frittage réactif par SPS et voie céramique, des expériences sont réalisées pendant des temps comparables à une température de 550°C. Du fait de la réactivité rapide, les temps de synthèse ont été réduits de manière à suivre l’avancée de la réaction menant aux phases CuxV2O5.

Les synthèses par voie solide sont réalisées selon le protocole expérimental suivant : les réactifs pulvérulents (Cu et V2O5) sont pesés dans les conditions stœchiométriques,

mélangés et broyés dans un mortier en agate pendant une dizaine de minutes. Le mélange obtenu est ensuite placé dans un tube en quartz qui est scellé sous vide. Les traitements thermiques sont réalisés sous vide car les produits attendus présentent une valence mixte V4+/V5+ (et Cu2+/Cu+ pour la phase β’) qui ne pourrait pas être présente sous atmosphère oxydante [74]. L’enceinte du four utilisé est préalablement placée à 550°C pour que les tubes en quartz scellés contenant les mélanges y soient introduits brusquement pendant les temps requis (4 minutes, 1 heure et 12 heures) sans attendre une montée en température pouvant prendre plus d’une heure. Une fois le temps de traitement thermique atteint, les tubes sont trempés à l’air. Chaque temps de traitement thermique est effectué sur des échantillons préparés dans les mêmes conditions (même four, réactifs, tubes...). Pour les synthèses conventionnelles, deux recuits de 12 heures avec un broyage intermédiaires sont habituellement effectués pour obtenir un produit le plus homogène possible.

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Figure 23: a) photos des tubes en quartz contenant les produits des réactions entre Cu et V2O5 à t = 0, 4 min,

1 et 12 h à 550°C sous vide et b) zoom sur les poudres.

Des photographies des tubes en quartz contenant les produits sont rassemblées sur la Figure 23. Ces photographies permettent d’illustrer la réactivité de ces mélanges en fonction des temps de traitement thermique. Dans le cas du mélange 0,4Cu + V2O5, visant l’obtention de

la phase β’-CuxV2O5, après 4 minutes de traitement thermique, la majorité du mélange reste

de couleur orangée (couleur de V2O5) avec quelques traces noires. Au bout d’une heure à

550°C pour la même phase, le mélange conserve une importante partie orangée. Au bout de 12 heures de traitement thermique, la poudre semble être de couleur homogène. Dans le cas de la phase ε-CuxV2O5, au bout de 4 minutes de recuit, il reste beaucoup de poudre

orangée n’ayant pas réagi, mais de nombreux grains noirs sont visibles. Après une heure à 550°C, la poudre est noire.

Pour quantifier les phases en présence et donc la quantité de cuivre et de V2O5 ayant réagi,

une analyse par diffraction des rayons X sur poudre (DRX) est réalisée sur chacun des produits obtenus. Les diffractogrammes expérimentaux de chacun des composés synthétisés sont effectués sur un diffractomètre Seifert XRD 3000. Les intensités sont mesurées tous les 0,02° (2θ) pendant 15 secondes entre 5 et 60° (2θ). Les diffractogrammes expérimentaux sont comparés à ceux calculés à partir des données structurales des différents composés (V2O5, Cu, β’-CuxV2O5 et ε-CuxV2O5) à l’aide du logiciel PCW développé par Werner Kraus et

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Gert Nolze [76]. Les intensités relatives des raies caractéristiques des diffractogrammes calculés sont ajustées en jouant sur le facteur d’échelle de chacune des phases en présence afin de correspondre au diffractogramme expérimental. Il est difficile de réaliser un affinement plus précis des produits de par le nombre de phases présentes. Les pourcentages donnés sont des estimations (± 5% en masse). Il est très délicat de donner une quantité précise car les intensités relatives des diffractogrammes calculés varient en fonction du nombre de cuivre présents dans la solution solide. C’est pourquoi certaines raies des diffractogrammes calculés n’ont pas les bonnes intensités.

Figure 24 : Exemple de détermination des %massiques des phases en présence pour 0,4Cu+V2O5 après 1h à

550°C

A titre d’exemple, la comparaison, dans le cas de la synthèse réalisée pendant une heure pour un mélange de 0,4 Cu + V2O5, est présentée sur la Figure 24.

Les résultats des différentes expériences sont rassemblés dans le Tableau 1.

Tableau 1 : Récapitulatif des estimations en % massique des produits des synthèses par voie céramique de β’-Cu0,4V2O5 et ε-Cu0,9V2O5

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Dans le cas du mélange de 0,4 Cu + V2O5, au bout de 4 minutes en tube à 550°C, seul 20% en

masse de phase β’-CuxV2O5 sont formées. Il reste plus de la moitié du réactif V2O5 n’ayant

pas commencé à réagir alors que seul 1% massique du cuivre est encore présent. Notons que malgré une stœchiométrie initiale du mélange correspondant à la composition de la phase β’-CuxV2O5, la phase ε-CuxV2O5 se forme de manière transitoire. La réaction du cuivre

avec V2O5 forme à l’interface une phase riche en cuivre (ε-CuxV2O5) et dans les zones

éloignées de la source de cuivre une phases plus pauvre (β’-CuxV2O5) [7].

Après 1 heure de traitement thermique à 550°C, la synthèse n’est pas complète, il reste 25% en masse de V2O5 dans le produit obtenu, toujours une trace de cuivre métallique.

Cependant l’homogénéité des produits est plus grande. En effet, au bout de 1 heure, la présence majoritaire du bronze β’-CuxV2O5 (74% en masse) est observée sur le

diffractogramme expérimental traduisant la réaction de la phase ε-CuxV2O5 préalablement

formée avec V2O5 n’ayant pas encore réagi pour former le bronze β’-CuxV2O5 (ε-CuyV2O5 +

V2O5  β’-CuxV2O5).

Dans le cas du mélange de 0,9 Cu + V2O5, au bout de 4 minutes en tube à 550°C, plus de la

moitié de la masse de produit correspond à la phase ε-CuxV2O5. La présence de β’-CuxV2O5

est notable (15% en masse). Pour ce temps de synthèse, la présence des réactifs est encore une fois observée avec plus du quart de la masse du produit étant du V2O5 et 2, 5% du cuivre

restant. La présence de la phase β’-CuxV2O5 démontre que même dans le cas de mélange

réactionnels visant à obtenir une phase riche en cuivre, la formation de la phase ε-CuxV2O5 à

l’interface Cu/V2O5 est majoritaire avec, dans les zones éloignées de la source de cuivre, la

formation d’une phase intermédiaire entre V2O5 et ε-CuxV2O5 : β’-CuxV2O5.

Après une heure de traitement thermique, la quasi totalité du produit correspond à la phase souhaitée (95% en masse) avec des traces de β’-CuxV2O5 (5% en masse). Les réactifs ne sont

plus présents mais le produit n’est pas pour autant homogène après ce temps de recuit. Après 12 heures de traitement thermique à la même température et dans les mêmes conditions, les phases visées sont obtenues homogènes et pures comme le montre les analyses par DRX (Figure 25).

La présence des réactifs dans les produits obtenus après 4 minutes et 1 heure montre que la réaction entre le cuivre et le pentoxyde de vanadium n’est pas complète. Les analyses par DRX montrent que dans le cas du mélange 0,9 Cu + V2O5 plus de V2O5 est consommé et plus

de bronzes CuxV2O5 sont synthétisés pour des conditions identiques témoignant d’un

avancement plus prononcé. Cet écart de cinétique est probablement lié au nombre de grains de cuivre prêts à diffuser dans V2O5 plus ou moins important dans le mélange réactionnel.

Ces résultats mettent en avant l’importance du temps de recuits sur l’évolution de la réaction entre le cuivre et V2O5 formant dans un premier temps une phase riche en cuivre

qui réagit avec le reste de l’échantillon pour, après un temps de traitement thermique suffisant, former un produit ayant un taux de cuivre homogène.

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Figure 25 : DRX expérimentaux et calculés des composés a) β’-Cu0,4V2O5 et b) ε-Cu0,9V2O5 synthétisés par voie

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