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Synthèse des résultats obtenus sur les règles d’assemblages de la communauté herbacée steppique

La synthèse des filtres identifiés responsables de l‟assemblage de la communauté herbacée steppique est présentée dans la figure 35 et détaillée dans la partie qui suit.

Production, Dispersion, Viabilité des graines

Paysage

Communautés

Populations

Pool d’espèces potentiellement disponibles Interactions biotiques Compétition / Facilitation Sol M.O. C P K

Taille population, Âge de l’individu N

Figure 34 : Synthèse des principaux filtres identifiés responsables de l’assemblage de la communauté steppique (cadres en pointillés). Les cadres en traits continus représentent les

différentes échelles où interviennent les filtres.

1. La production, la dispersion des graines et leur viabilité dans le sol

L‟un des principaux obstacles de la régénération de la communauté herbacée steppique est la disponibilité en graines. De nombreuses espèces steppiques, notamment les espèces pérennes, sont caractérisées par une faible capacité de reproduction et/ou de dispersion de leurs graines. Ce filtre est couramment observé dans les écosystèmes herbacés (Hutchings & Booth 1996 ; Bischoff 2000 ; Coiffait et al. 2008 ; Hellström et al. 2009 ; Kiehl et al. 2010 ; Török et al.

2010 ; Piqueray et al. 2011) et dans les milieux xériques (Barberà et al. 2006 ; Pugnaire et al. 2006 ; Martínez-Duro et al. 2009). L‟espèce dominante de la steppe, Brachypodium retusum, se reproduit essentiellement de manière asexuée (Caturla et al. 2000 ; Larchevêque et al. 2005 ; Baeza & Vallejo 2008) et figure donc parmi ces espèces. Ce résultat semble déterminant pour l‟avenir de la steppe car son absence sera responsable d‟une régénération spontanée incomplète. La végétation steppique est majoritairement stress-tolérante. Les espèces qui la composent sont caractérisées par des graines lourdes et/ou sont myrmécochores. Ces traits limitent leur dispersion sur de faibles distances (Bakker & Berendse 1999 ; Buisson et al. 2006). De plus, la taille de ces graines peut être corrélée au temps qu‟elles résident dans le sol, grosses, elles présentent une viabilité très réduite (inférieure à un an) (Thompson et al. 1997). Ainsi, comme pour de nombreuses pelouses pâturées, la banque de graines de la steppe est essentiellement transitoire (Mitlacher et al. 2002 ; Dutoit et al. 2003 ; Römermann et al. 2005 ; Henry 2009) ce qui limitent sa capacité de régénération après une perturbation.

2. Les propriétés physico-chimiques du sol

Le sol de l‟écosystème steppique est très sensible aux perturbations. Les perturbations suite à l‟enfouissement de canalisations (parties 1 et 2) ou créées par les pratiques culturales (parties 3 et 4) engendrent des changements des propriétés physico-chimiques des sols. Notamment une diminution du potassium, de la matière organique, du carbone et de l‟azote total et une légère augmentation du phosphore. La destruction de la matrice calcaire lors des travaux pour la mise en place des canalisations a crée également une augmentation des ions calcium et a fait basculé le pH plus au moins neutre en pH basique. Ces changements toujours décelables plus de trente ans après la perturbation engendrent eux-mêmes des modifications de la richesse, de la composition et de la structure de la communauté végétale sur la même échelle temporelle. Ces résultats sont comparables avec ceux obtenus sur d‟autres écosystèmes méditerranéens (Ackermann et al. 2004) et herbacées d‟Europe (Charman & Pollard 1995 ; Poptcheva et al. 2009) dont certains prévoient un délai de régénération supérieur au siècle (Ackermann et al. 2004, Karlik & Poschlod 2009). Ces changements engendrent également des modifications à l‟échelle de certains traits de certains individus. Ainsi, nous avons pu observer en conditions semi-contrôlées (partie 4) qu‟ils étaient notamment responsables des variations morphologiques de certaines espèces. Par exemple, pour Taeniatherum

caput-D

indépendamment de la compétition avec Brachypodium retusum. La modification des propriétés physico-chimique du sol steppique n‟empêche cependant pas la réussite des espèces structurantes (brachypode, thym, trèfle). Ce résultat démontre que l‟absence de

Brachypodium retusum sur les parcelles de steppe perturbée n‟est pas corrélée aux modifications de l‟habitat.

3. Les interactions entre espèces végétales

Comme pour la plupart des travaux sur les assemblages des communautés végétales (Gotelli & McCabe 2002 ; Holdaway & Sparrow 2006 ; Bertiller et al. 2009 ; Siles et al. 2010 ; Filotas et al. 2010), nous avons examiné les interactions entre certaines espèces qui la composent car elles ont un rôle déterminant (Callaway & Walker 1997 ; Weiher & Keddy 2001 ) notamment en influençant son organisation, sa structure et sa distribution (Connor & Simberloff 1983 ; Roxburgh & Wilson 2000 ; Wilson 2001 ; Watkins & Wilson 2003 ; Zhang et al. 2009). Certains de ces travaux montrent que la cooccurrence et la coexistence des espèces est définie, au moins en partie, par les phénomènes de compétition (Didham & Watts 2005 ; Zhang et al. 2009). Selon la théorie de « texture convergence », la structure des communautés peut être identique entre plusieurs communautés de continents différents par le principe d‟exclusion compétitive avec des espèces présentant des traits semblables. Ce principe se base sur le fait que plusieurs espèces peuvent occuper la même niche spatiale mais seule restera l‟espèce la plus compétitive, c‟est à dire possédant les traits les plus adaptés à la niche (Figure 35). Il est donc important d‟identifier ces espèces puis les traits qui les caractérisent afin de définir un patron de structure. L‟information de présence/absence n‟est pas toujours suffisante pour définir et/ou expliquer un patron de végétation, on utilise alors l‟abondance ou la densité des espèces (Laughlin & Abella 2007).

Nous avons donc dans un premier temps abordé globalement ces interactions en les étudiant à l‟échelle de la communauté en utilisant comme indicateur la présence/absence et l‟abondance des espèces (parties 1, 2, 3), puis nous avons isolé une sélection d‟espèces en pépinière afin d‟étudier ces interactions plus finement en effectuant des mesures quantitatives sur certains traits (Keddy 1992).

Extinction locale d‟une espèce

Après immigration des espèces Processus d‟exclusion écologique Après exclusion écologique

Non-equilibriumcooccurence Non-equilibriumcoexistence Equilibrium

Figure 35 : Processus écologiques conduisant à la convergence. Le carré représente l’espace fonctionnel (modifiée d’après Wilson 2001).