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En corrélant le cadre théorique de notre recherche aux analyses des entretiens effectués auprès des partenaires, nous avons fait ressortir de nombreuses convergences entre nos diverses thématiques.

L’ensemble des témoignages ont mis en évidence la mise en place de stratégies d’adaptation communes aux interlocuteurs : distance émotionnelle, sens du devoir et de l’engagement, valorisation, etc. Comme l’a démontré la littérature (Chappuis, 2009, Chen & Chang, 2012) le processus de « coping » favorise l’adaptation à une épreuve de maladie et se retrouve particulièrement au cours d’expérience de deuil. Nous avons relevé que les partenaires rencontrés étaient amenés à vivre divers deuils suite à la maladie de leur conjoint (sexualité, vie de couple, image corporelle) et élaboraient diverses stratégies d’adaptation leur permettant de les surmonter. En effet, ils se sont appuyés sur leurs valeurs de couple mais également sur des principes d’acceptation et de banalisation afin de mieux tolérer les changements dans leur vie intime engendrés par la maladie.

En constatant le paradoxe entre le refus des partenaires d’exprimer du dégoût à l’égard de leur conjoint et la fréquence de ce dernier relevé par la littérature (Persson & al., 2004), nous pouvons faire un lien avec le refoulement des émotions cité comme une stratégie de « coping ». Nos interlocuteurs ont énoncé leur volonté de ne pas blesser leur conjoint et ont traduit à travers les entretiens leur peur de l’emploi de certains termes, ce qui nous amène à penser qu’ils ne pourraient exprimer leur éventuel dégoût.

Nous constatons également que les valeurs et principes moraux des interviewés ont un impact sur la dynamique de leur couple. En effet, ils insistent sur les répercussions de ces derniers sur l’évolution de leur couple (fragilisation ou consolidation). D’autre part, la dynamique de couple sera influencée par d’autres facteurs tels que l’âge des membres du couple ainsi que sa longévité ou encore le vécu du couple. Les interlocuteurs ont en effet relié un renforcement de leur couple avec de nombreuses années de vie commune ou avec un vécu d’épreuves de vie douloureuses. De plus, ils corrèlent la notion d’âge avec un deuil de la sexualité facilité ou non.

Un lien supplémentaire entre le deuil de la sexualité et le vécu personnel a été mis en avant par les partenaires qui décrivent un deuil simplifié ou complexifié par une vie sexuelle passée épanouie et active. Le vécu influe également sur l’adaptation à l’image corporelle perturbée du partenaire : la confrontation passée à des épreuves douloureuses favoriserait l’ajustement.

Par ailleurs, nous avons relevé un lien entre les expériences passées des partenaires et leur vision du rôle infirmier. Les interlocuteurs ont souligné un vécu difficile avec le corps soignant qui aurait pu altérer leur confiance envers ces derniers. Ces expériences passées ont orienté leurs représentations de la profession et sont donc primordiales à identifier par les soignants au cours de leur prise en soin. En effet, la légitimité d’aborder la sexualité par les soignants sera influencée par la vision du couple de la profession infirmière.

La théorie (Penson et al., 2000 ; Mick et al., 2003) soulève l’importance de la création d’un lien de confiance afin de faciliter l’abord des problématiques liées à la sexualité avec le couple et propose un modèle d’intervention (BETTER), qui suggère également la nécessité de la confiance entre le soignant et le soigné en élaborant une phase de « Temps ». Les bénéfices de ce programme ne sont pas uniquement dirigés vers le couple mais également vers les professionnels de la santé au sujet desquels la littérature (Singer et al., 2008) a mis en avant le malaise et les réticences à aborder la sexualité en raison de lacunes dans leur formation.

Les entretiens ont démontré une relation directe entre la confiance des partenaires envers le corps soignant et leur vécu lors de l’annonce du diagnostic. Ce lien est confirmé par la littérature (Reich et al., 2001) qui insiste sur l’importance du moment de l’annonce qui influera de manière considérable les relations soignant-soigné futures. Les entretiens ont par ailleurs évoqué que la notion de la survie prime sur les problématiques liées à la sexualité particulièrement au moment de l’annonce du diagnostic.

Le rôle du professionnel lors de l’accompagnement de couple mis en avant par les recherches (Sandham & Harcourt, 2007) comprend l’intégration du partenaire dans les soins qui majorera le soutien interconjugal. Or, les témoignages relèvent que cette intégration n’est pas encouragée par les professionnels de la santé. Nous observons également des contractions dans leurs propos par rapport à leurs attentes et besoins en ce qui concerne l’abord de l’intimité avec une infirmière.

De plus, les interviewés affirment accorder une grande importance au soutien apporté à leur conjoint et décrivent l’implication dans les soins de ce dernier comme une forme de soutien. Le soutien familial ainsi que des traits de personnalités, tels qu’un caractère fort et indépendant, sont identifiés par certains des interviewés comme constituant des ressources suffisantes et diminuant ainsi le besoin de soutien professionnel.

Au sein de la communication intercouple, l’omission d’information peut constituer une autre nature de soutien évoqué par les interlocuteurs. En effet, il est décrit par ces derniers ainsi que le refoulement de leurs émotions comme étant un moyen de protéger leur compagnon.

En partant de ces résultats, nous pouvons élaborer des hypothèses quant à la prise en soin et à l’accompagnement de partenaires de patients dont l’image corporelle est perturbée et la manière adéquate d’aborder des problématiques liées à la sexualité.