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Chapitre 2 : Synthèse et propriétés électroniques d’oligofurylène-vinylènes

A) Les furylène-vinylènes : De nouveaux semi-conducteurs organiques dérivés de la biomasse ?

I) Synthèse d’oligofurylène-vinylènes

Afin de pouvoir effectuer l’analyse de l’évolution des propriétés optiques et électrochimiques avec l’allongement de la chaine conjuguée, nous avons synthétisé une nouvelle série d’oligo- furylène-vinylènes (Fn) substitués sur les positions terminales par des chaînes pentyles. Ces dernières doivent accroitre la solubilité des oligomères et augmenter la stabilité des espèces oxydées en empêchant la polymérisation. De plus, comme démontré pour les oligomères en

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série thiophène, les chaînes alkyles ont tendance à favoriser l’auto-organisation des couches minces d’oligomères dans les composants électroniques.17-19 Les composés F3, F4 et F5 portant respectivement deux, trois et quatre motifs furanes ont été synthétisés par double réaction de Wittig-Horner à partir des aldéhydes (B3), (B4) et (B5) et du 2-pentylfurylméthylphosphonate (B6) selon le Schéma 2-6.

Schéma 2-6

1) Synthèse des dialdéhydes

Parmi le grand nombre de publications portant sur la synthèse du HMF (B2), nous avons choisi la méthode décrite par Fayet et Gelas20 de part sa facilité de mise en œuvre. Elle permet l’obtention de (B2) par déshydratation thermique du D-Fructose sans solvant en présence de chlorure de pyridinium (Schéma 2-7). Après une extraction à l’acétate d’éthyle, et une purification par chromatographie sur gel de silice, le HMF est obtenu avec un rendement de 85%. Il se présente sous forme d’un solide à bas point de fusion qui brunit rapidement à température ambiante. Il est préférable de l’oxyder en 2,5-difuraldéhyde (B3), beaucoup plus stable qui peut se conserver à température ambiante.

Schéma 2-7

Comme pour la synthèse du HMF, de nombreuses méthodes d’oxydation ont été décrites dans la littérature. Dans des conditions non catalytiques et en utilisant une quantité stœchiométrique d’agents oxydants classiques21,22 ou en présence d’un agent électrophile23

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chercheurs se sontintéressés aux méthodes d’oxydation catalytique par différents systèmes métal/halogène.24 Cependant, la nature corrosive du système est un gros désavantage et conduit à des rendements moindres de 50%. L’utilisation de l’oxyde de vanadium comme catalyseur facilite l’oxydation du HMF en (B3) par l’air. Grunshin et al.25 réalisent la synthèse du 2,5-difuraldéhyde en deux étapes à partir du D-Fructose sans isoler le HMF, produit intermédiaire. La première étape consiste à transformer le D-Fructose en HMF à 170 °C en utilisant une résine acide échangeuse d’ions dans le DMSO. Dans la seconde étape, l’ajout de l’oxyde de vanadium conduit à la conversion de (B2) en (B3) sous pression (0,1 MPa) à 220 °C et avec 40% de rendement. Néanmoins, l’utilisation du DMSO comme solvant pause des problèmes environnementaux, les sous-produits doivent être traités et (B3) purifiés. De notre côté, toujours pour des raisons de facilité de mise en œuvre, l’oxydation du HMF (B2) a été effectuée par le dioxyde de manganèse dans du dicholorométhane (Schéma 2-8). Le dialdéhyde (B3) est ainsi obtenu avec un rendement de 90%.

Schéma 2-8

Le dialdéhyde (B4) précurseur de l’oligomère F4 a été obtenu en deux étapes à partir du furaldéhyde (B1) par la méthode décrite par Elandaloussi et al.26 (Schéma 2-9). Une réaction de McMurry27 sur (B1) conduit au furylène-vinylène (B7) avec un rendement de 72%. Le composé diformylé (B4) est ensuite préparé avec un rendement de 60% par réaction du diméthylformamide (DMF) sur le dilithien obtenu par action du n-BuLi en présence de N,N,N’,N’-tetraméthyldiaminoéthane (TMEDA).

Schéma 2-9

Nous avons également cherché à synthétiser (B4) à partir du HMF en l’engageant directement dans un couplage de McMurry (Schéma 2-10), mais le diol attendu (B8) a été isolé avec un rendement très faible de 8%. De plus, ce composé s’est révélé très instable, il se présente sous la forme d’une huile brune qui noirci très rapidement à l’air.

- 41 - Schéma 2-10

Quant au dialdéhyde (B5)26 précurseur de F5, il a été préparé en deux étapes à partir du 2,5-difuraldéhyde (B3). La réaction de double oléfination de Wittig-Horner entre (B3) et un léger excès du phosphonate (B9) -vide infra-, du furane, en présence de ter-butylate de potassium conduit au composé (B10) avec un rendement de 55%. La diformylation de (B10) est réalisée comme pour (B4) en présence de TMEDA , n-BuLi et de DMF. Ainsi le dialdéhyde (B5) est obtenu avec un rendement de 70% (Schéma 2-11)

Schéma 2-11

2) Synthèse des furylméthylphosphonates

La voie de synthèse la plus classique pour obtenir le 2-furylméthylphosphonate (B9) utilise l’alcool furylique (B11) comme matière première.28,29 Celui-ci est transformé en chlorure ou bromure de furyle qui réagit sur l’anion du diéthyle phosphite ou sur le triéthylphosphite pour donner (B9) (Schéma 2-12). Cette méthode se révèle assez délicate du fait de la grande instabilité des dérivés halogénés intermédiaires, le bromure de furyle a été décrit comme explosif lors de sa purification.30 Nous l’avons adapté en engageant rapidement le dérivé bromé (B12), obtenu par action de PBr3 sur le furylalcool à -20°C dans un mélange toluène-benzène, sur l’anion du diéthylphosphite préalablement préparé. Le phosphonate (B9) a été obtenu avec un rendement de 48%.

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Schéma 2-12

Cette méthode a également été appliquée à la synthèse du pentylfurylméthylphosphonate (B6). Pour cela, le 2-pentylfuraldéhyde (B14) est synthétisé à partir du 2-pentylfurane (B13) par la séquence BuLi/DMF dans le THF avec un rendement de 87%, puis est réduit en alcool (B15) par NaBH4 avec un rendement de 80%. Le phosphonate (B6) est obtenu de la même façon que (B9) avec un rendement de 80%.

Schéma 2-13

Même si le rendement obtenu par la méthode précédente est tout à fait correct, nous avons testé la synthèse du phosphonate (B6) en adaptant la méthode développée par Cava31 et adaptée au laboratoire par Turbiez et al.32 sur des dérivés du 3,4-éthylènedioxythiophène. Cette dernière passe par un intermédiaire porteur du groupe ammonium quaternaire beaucoup plus stable que les dérivés halogénés. Une réaction de Mannich sur le pentylfurane (B13) avec le chlorure de diméthylimminium33 comme électrophile conduit à l’amine (B16) qui est ensuite transformée en sel d’ammonium quaternaire (B17) par action d’un excès de iodure de méthyle. Le rendement global des deux étapes est de 90% (Schéma 2-14).

- 43 - Schéma 2-14

Plusieurs essais ont ensuite été réalisés pour obtenir le phosphonate. D’abord, l’action du diéthylphosphite en présence de t-BuOK sur le sel d’ammonium quaternaire par activation micro ondes n’a donné aucun résultat. Ensuite, l’action de l’anion du diéthylphosphite préalablement préparé en présence de NaH conduit au phosphonate attendu (B6) avec un rendement de 32%.

3) Réaction de Wittig-Horner

Les réactions de double oléfination de Wittig-Horner sur les aldéhydes (B3), (B4) et (B5) sont effectuées en utilisant un léger excès de 2-pentylphosphonate (B6) en présence de t-BuOK , dans le THF à 0°C. Le trimère F3, le tetramère F4 et le pentamère F5 sont obtenus avec les rendements respectifs de 24%, 42% et 24% (Schéma 2-15).

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Les configurations trans des oligomères Fn ont été confirmées en partie par RMN proton. Les spectres protons (Figure 2-1) et carbones de F4 et F5 ont été réalisés dans l’acétone-d6.

Pour le composé F5, les protons éthyléniques apparaissent comme un singulet intégrant pour quatre protons et deux doublets intégrant respectivement pour deux protons (symbole

 sur la Figure 2-1). Les deux systèmes vinyliques centraux de la molécule ont un environnement électronique identique et les quatre protons de ce système sont équivalents et résonnent ainsi sous la forme d’un singulet. Par contre les deux systèmes vinyliques extérieurs subissent l’effet de la chaîne pentyle et les protons présentent un système A-B (doublet élargi) avec un couplage de 16 Hz caractéristique d’une configuration trans. Les protons des furanes apparaissent sous forme de quatre doublets avec un couplage de 3,6 Hz intégrant chacun pour deux hydrogènes (symbole  sur la Figure 2-1). Ceux liés au furane central apparaissent sous forme d’un singulet intégrant pour deux protons.

Pour F4, le système éthylénique central, présentant un axe de symétrie, porte deux hydrogènes équivalents représentés sous la forme d’un singulet intégrant pour deux protons. Les deux doublets élargis représentant les deux autres systèmes vinyliques montrent un couplage de 16 Hz caractéristique d’une configuration trans.

Figure 2-1: Spectres RMN 1H de F4 et F5 dans l'acétone-d6

Le spectre 13C découplé du composé F5 présente dix-huit singulets dont treize correspondent aux carbones aromatiques (Figure 2-2). Les carbones éthyléniques centraux sont équivalents comme pour les protons éthyléniques du spectre proton. Pour le composé F4, le spectre présente exactement onze singulets correspondant aux carbones des cycles furanes. Aucun dédoublement des signaux n’est observé, ce qui confirme bien la présence d’une seule configuration a priori tout trans.

F4 1H RMN 500 MHz

F5 1H

RMN 300 MHz

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Figure 2-2: Spectres RMN 13C de F5 dans l’acétone-d6

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