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3. LiCoO 2 , matériau d’électrode positive

3.3. Méthodes de synthèse du LiCoO 2

3.3.1. Synthèse du LiCoO 2 sous forme de poudre

3.3.1.1.Synthèse par voie solide

Le matériau d’électrode positive LiCoO2 est donc étudié sous forme de poudre depuis les

années 1980 [57] et sa synthèse est en général réalisée par réactions entre solides. Elle consiste en une alternance de traitements thermiques et de broyages répétés à partir de précurseurs tels que des sels de lithium (LiOH [68], Li2CO3 [69, 79, 80]) et des sels de cobalt (Co3O4 [68, 69], CoCO3 [79, 80]). Le broyage de ces précurseurs permet l'homogénéisation du mélange et la phase électrochimiquement active LiCoO2 R3m est formée lors du traitement thermique sous air à haute température (> 800°C). Certains auteurs [69, 81] préconisent l’alternance de broyages et de recuits pour améliorer les propriétés du matériaux et obtenir une poudre plus fine. Cette technique de synthèse est actuellement la plus utilisée pour la production du matériau à l’échelle industrielle même si elle nécessite un apport énergétique considérable.

3.3.1.2.Synthèse par voie chimique

De nombreuses techniques de synthèse de poudre de LiCoO2 différentes de la voie

solide-solide ont été développées. Dans cette partie, nous nous concentrerons sur la description de deux techniques prometteuses : la synthèse sol-gel et la synthèse hydrothermale, utilisées dans la suite de ce travail.

3.3.1.2.1.Synthèse sol-gel

Ces dernières années, les chercheurs se sont particulièrement intéressés à la synthèse par voie sol-gel. Le principal avantage de cette méthode est avant tout de parvenir à un mélange intime et homogène des différents ions métalliques. Elle est très étudiée pour la synthèse d'oxydes de lithium de type LiMxOy tels que LiNiO2 [82-84], LiMn2O4 [85, 86] et LiCoO2.

Le principe de la synthèse par voie sol-gel consiste à dissoudre les précurseurs (sels de cobalt et de lithium) dans un solvant (le plus souvent aqueux ou alcoolique) en présence d’un agent chélatant. Différentes conditions de synthèse rapportées dans la littérature pour le LiCoO2 sont données dans le Tableau 1-6. Les méthodes décrites dans ce tableau dérivent de la méthode Pechini [87] développée pour la synthèse de titanates et de niobates en 1967. La principale différence est que la méthode Pechini passe par un état solide de type mousse de polymère avant le traitement thermique final alors que dans les méthodes présentées ci-dessous le traitement thermique est directement effectué sur le gel. L’agent chélatant le plus souvent employé est un acide organique même si d’autres études proposent l’utilisation d’éthylène glycol [88] ou de triéthanolamine [89]. Soltanmohammad et al. [89] ont d’ailleurs obtenu de meilleures cristallisations avec l’acide acrylique et le trialcool amine qu’avec les acides oxalique et citrique plus couramment utilisés. Lors de la phase de chauffage, accompagnée ou non d’une évaporation, l’agent chélatant va polymériser pour former un réseau organique dans lequel les cations métalliques vont se répartir de manière homogène (Figure 1-28).

Précurseurs Chélatant M : Chélatant pH Chauffage Calcination Réf. LiOH Co(NO3)2 Succinique Oxalique Malique Tartrique 4-8 60-150°C 900°C 6h [90]

LiNO3 Co(NO3)2 PAA 1 :0.5-1 :2 1-2 70-80°C 24h 300°C 1h +

400-650°C 1h [91] LiNO3 Co(NO3)2 Maléique 1 :0.75-1 :2 4.5-5.5 70-80°C 24h 400°C 1h +

500-700°C [92]

LiOAc Co(OAc)2 Citrique 140°C 550-750°C 10h [93]

LiNO3 Co(NO3)2 PAA 1 :1 1-2 80°C 600-800°C 10h [94]

LiOAc Co(OAc)2 Acrylique 70-80°C 450°C 1h +

500-900°C 10h [95] Li2CO3 Co(NO3)2 Citrique 1 :1 3-4 80°C 600°C 6h +

850°C 20h [96]

LiNO3 Co(OAc)2 EG 120°C 24h 400-900°C 5h [88]

LiNO3 Co(NO3)2 Citrique 1 :2 5-5.5 80°C 600°C 12h [97]

LiNO3 Co(NO3)2 Citrique 80°C 700°C 24h [98]

LiNO3 Co(NO3)2 TEA 1 :0.5-1 :2 90°C 250°C 6h +

400-1100°C 12h [89] Tableau 1-6 : Conditions de synthèse rapportées dans la littérature (Aq : aqueux, Al : alcool, M : total des ions métalliques, PAA : Polyacide acrylique, EG : éthylène glycol, TEA : triéthanolamine).

Figure 1-28 : Représentation schématique de la formation du réseau organique à base d’acide polyacrylique PAA et d’hydroxydes métalliques [99].

La méthode sol-gel permettant un mélange intime et homogène des ions lithium et cobalt, elle facilite la cristallisation. De ce fait, la température de calcination nécessaire pour former

LiCoO2 est diminuée et la formation d’une phase proche de la structure idéale α-NaFeO2

est facilitée. Les études [89, 91, 100] ont montré l’importance de l’agent chélatant dans le processus sol-gel. En effet, des concentrations d’agent chélatant trop faibles n’induisent pas une bonne répartition des ions ce qui limite la cristallisation aux faibles températures. Une montée à haute température similaire à la voie solide est alors nécessaire pour synthétiser le matériau et les avantages de la voie sol-gel ne sont plus visibles. D’autre part, lors de la

calcination, la plupart des agents chélatants utilisés présentent une décomposition exothermique. Celle-ci permet d’apporter une énergie supplémentaire lors du traitement thermique. Cependant, une étude de Sun et al. [82] sur la synthèse sol-gel du LiNiO2 montre qu’une concentration d’agent chélatant (ici le polyvinylbutyral PVB) trop importante est néfaste à une bonne cristallisation. Un excès de PVB entraine une augmentation brutale de la température locale sur un temps court qui favorise la

décomposition du PVB en gaz carbonés CO et CO2. Cette modification subite de

l'atmosphère gazeuse diminue la pression partielle en O2 nécessaire à la formation de l’oxyde LiNiO2.

D’autre part, le pH apparait comme un paramètre primordial dans la formation du gel. La plupart des synthèses sont effectuées à pH acide. Oh et al. [92] ont observé une précipitation des précurseurs lorsque le pH de la solution sortait de la gamme 4,5-5,5. Ils en ont conclu que le pH contrôlait la dissociation des fonctions carboxyliques de l’agent chélatant (ici l’acide maléique). Un mauvais contrôle du pH lors de la phase de chauffage inhibe la répartition des ions métalliques dans le réseau organique [92, 100] et donc limite la bonne cristallisation du matériau. Certains auteurs préconisent l’utilisation d’un dispersant comme le Tween 80 [101] ou l’hydroxypropylcellulose [102] pour améliorer la répartition des ions métalliques dans le réseau organique. Khomane et al. [101] ont montré une homogénéisation des tailles de particules avec l’utilisation du Tween 80 menant à de meilleures performances électrochimiques (capacité presque doublée avec l’utilisation du tensioactif).

Des études plus atypiques proposent une amélioration de la voie sol-gel "classique". Ding et al. [103] présentent un procédé de polymérisation non plus par chauffage mais par radiation γ. L’équipe de Li [99] propose quant à elle le séchage du gel par spray ce qui permettrait de mieux contrôler le séchage du gel et donc la taille des particules et l’homogénéité de la poudre obtenue.

La voie sol-gel s'avère aussi particulièrement utile pour des matériaux plus complexes tels que Li(Ni, Co, Mn, Al, etc.)O2 [104-106] puisqu'elle évite la formation de particules d'oxydes simples tels que Al2O3 qui ne participent ensuite plus à la réaction de synthèse. Fey et al. [105, 107, 108] ont notamment travaillé sur la synthèse du composé LiNi1-yCoyO2 à partir de nitrates métalliques et de différents acides organiques (maléique, tartarique, citrique). Julien [106] rapporte la synthèse d’un composé LiNi0.6Co0.4O2 par voie sol-gel à base d’acétates métalliques et d’acide citrique. Il obtient une phase bien cristallisée et sans impureté à partir de 700°C contre 800 à 900°C pour la synthèse en voie solide. D’autres oxydes mixtes comme le LiNi1-yAlyO2 [104] ou le Li-M-Mn-O (avec M=Co, Cr, Ti) [109] ont aussi été synthétisés avec succès grâce à cette voie de synthèse.

3.3.1.2.2.Synthèse hydrothermale

La première étude de synthèse hydrothermale fut rapportée par Shafthual en 1845 [110] pour la préparation de fines particules de quartz. Depuis, la synthèse de nombreux silicates, hydroxydes et oxydes par voie hydrothermale a été étudiée. La première industrialisation de cette technique démarre dans l’année 1900 avec le procédé Bayer qui est toujours aujourd’hui la principale technique d’extraction de l’alumine à partir de la bauxite. L’évolution des matériaux et des techniques de synthèse hydrothermale est donnée dans le Tableau 1-7. Les années 1970-1980 marquent un tournant avec le développement au Japon et aux USA des procédés hydrothermaux "multi-énergie".

Tableau 1-7 : Développement du procédé de synthèse hydrothermale [110].

L'utilisation du procédé hydrothermal pour la synthèse de poudres de LiCoO2 a été motivée par la nécessité d'effectuer des recuits à haute température (> 800°C) lors de la synthèse par voie solide. La voie hydrothermale permet de s'affranchir de cette étape de recuit et d'obtenir des poudres fines (de 50 à 200 nm) et homogènes à des températures beaucoup plus basses, entre 160 et 200°C [111-114]. La synthèse est réalisée dans une enceinte autoclave et les précurseurs sont un sel ou un hydroxyde de cobalt (Co(OH)2 [111], CoCl2 [112, 114], Co(NO3)2 [113]) dissous dans une solution très alcaline d'hydroxyde de lithium LiOH (3 à 12 mol.L-1). L'action de la base LiOH peut être renforcée par l'ajout d'une base forte de type KOH ou NaOH [112] et/ou d'un agent oxydant de type peroxyde d'hydrogène H2O2 [113, 114]. En l'absence d'additif oxydant, la réaction d'oxydation semble avoir lieu grâce à l'oxygène du ciel gazeux de l'enceinte autoclave. L'obtention d'une bonne cristallisation nécessite des temps de synthèse généralement longs de 5 à 48h. Burukhin et al. [113] rapportent l'obtention de LiCoO2 pur à 150°C avec un temps de synthèse de 30mn mais le matériau présente des propriétés médiocres et les meilleurs matériaux sont obtenus à 230°C pendant 6h. Plusieurs groupes [113, 114] rapportent l'utilisation d'un agent oxydant de type peroxyde d'hydrogène H2O2. Qian et al. [114] ont montré que l'augmentation de H2O2 tend à favoriser la formation d'une phase

LiCoO2 sans impureté de type oxyde Co3O4. Ils ont aussi montré qu'une augmentation de

la température de 160°C à 200°C tend à limiter la présence d'impuretés Co3O4 jusqu'à obtenir une phase pure à 200°C. Cependant, au-delà de 200°C, l'impureté de Co3O4

réapparait. Ils attribuent ce phénomène à l'augmentation de la pression dans l'enceinte autoclave, induit par l'augmentation de la température. Une pression plus importante tendrait à stabiliser des phases plus compactes comme le Co3O4 plutôt que des phases

étendues avec un paramètre de maille selon l'axe c important comme le LiCoO2. Chang et

al. [115] s'affranchissent du paramètre pression et rapportent la synthèse de poudre de LiCoO2 en température (de 130 à 200°C) en utilisant un montage à reflux sous O2. Néanmoins, les temps de synthèse sont longs (obtention d'une phase sans impuretés après 48h) et les performances électrochimiques restent insuffisantes (conservation de la capacité de seulement 38 % à 100 cycles). A l'inverse, Shin et al. [116] ont rapporté des résultats sur une synthèse très rapide (de l'ordre de la minute) en travaillent en fluide supercritique. Cependant, cette technique nécessite d'atteindre des pressions de l'ordre de 300 bars et des températures de 400°C ce qui semble difficilement transposable en milieu industriel.