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Microclimate, burn severity and post-fire tree establishment affect predictions of long-term carbon dynamics in a boreal forest landscape

II. Synthèse des principaux résultats de la thèse

Les travaux de recherche présentés dans cette thèse visaient à évaluer la résilience des pessières à mousses du Québec aux incendies peu sévères, et à en comprendre les déterminants. Nous nous sommes intéressés à plusieurs caractéristiques de l’écosystème et de son fonctionnement : la structure et la composition du peuplement, la composition fonctionnelle des communautés du sous-bois, le stockage et les émissions de carbone à long-terme. Ces propriétés structurelles et fonctionnelles de l’écosystème ont été analysées à différentes échelles spatiales allant du peuplement à la région.

Dans un premier temps, un dispositif expérimental nous a permis d’inventorier les conifères du couvert forestier et les plantes du sous-bois se régénérant après feu dans 133 parcelles situées dans 14 sites brûlés répartis sur un transect de 600 km. Les facteurs environnementaux gouvernant la régénération de l’épinette noire, du pin gris et des plantes de sous-bois ont été identifiés. Nous avons déterminé quels traits fonctionnels étaient impliqués dans l’assemblage des communautés aux différentes échelles spatiales considérées, et analysé les filtres environnementaux aboutissant à la sélection d’espèces portant ces traits. Dans un deuxième temps, nous avons utilisé une partie des observations

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effectuées sur le terrain pour quantifier l’impact de la sévérité des feux et la façon dont elle influence la régénération des espèces sur les prévisions à long-terme des stocks et des flux de carbone dans un paysage du domaine bioclimatique de la pessière à mousses. L’utilisation du modèle LANDIS-II (Scheller et al. 2007), a permis l’estimation du stockage et des émissions de carbone sur une période de simulation de 500 ans dans le paysage régional du Lac Opémisca, au centre duquel se trouve la ville de Chapais.

Nos résultats indiquent que les incendies des années 2005, 2006 et 2007 présentaient une sévérité relativement faible, puisqu’ils ont laissé derrière eux une importante couche de matière organique résiduelle dont l’épaisseur moyenne atteignait 17 ± 8 cm. Aussi, la matière organique noircie était de loin le lit de semence le plus représenté recouvrant en moyenne 86 % du sol des parcelles inventoriées. La prépondérance de ce substrat s’est révélée défavorable à la germination et à la survie des plantules d’épinette noire, qui était restreinte aux îlots de sphaigne ayant survécu au passage du feu, avec de meilleurs taux de régénération dans les zones ayant reçu les précipitations les plus abondantes les étés suivant l’incendie. La sphaigne étant un substrat peu abondant dans les sites étudiés, le feu s’est traduit dans la grande majorité des cas par un très faible niveau de régénération de l’épinette noire. Dans certains sites, les niveaux de régénération du pin étaient suffisamment élevés pour compenser la baisse de densité des tiges causée par le faible de taux d’établissement de l’épinette. Il s’agissait notamment des pentes exposées au nord, qui abritaient les sites les mieux protégés du stress hydrique parce qu’elles présentaient des épaisseurs de matière organique modérées tout en étant peu exposées au rayonnement solaire. Néanmoins, dans la plupart des parcelles, la pessière noire d’origine semblait vouée à évoluer vers un peuplement ouvert, non productif et dominé par le pin gris lorsque celui-ci était présent dans le peuplement d’origine.

Les grandes années de feu peuvent contribuer à accélérer la transformation des pessières fermées, car les conditions météorologiques chaudes et sèches qui les caractérisent provoquent un stress hydrique susceptible de nuire à la survie des plantules. De plus, l’ampleur des surfaces brûlées lors des grandes années de feu augmente la probabilité d’observer un changement de type d’écosystème à grande échelle (Barrett et al. 2011).

121 Les communautés végétales du sous-bois se régénérant après incendie étaient quant à elles largement dominées par les éricacées dont les rhizomes avaient été préservés par les incendies peu sévères. La faible sévérité de la perturbation paraissait en effet avoir favorisé la survie d’une grande partie des banques de graines et de bourgeons enfouis dans la matière organique du sol et issus du peuplement d’avant feu. Ainsi, les assemblages d’espèces qui se sont régénérés après feu semblaient refléter la composition des communautés d’origine parce que l’incendie avait été peu sévère. Or l’abondance relative des différentes espèces composant le cortège floristique de l’écosystème avant l’incendie dépend beaucoup du climat, des caractéristiques du site et du peuplement qui recoupent les niches écologiques des espèces présentes. Ainsi, la composition spécifique des différentes parcelles apparaissait plus fortement reliée aux caractéristiques du site et du peuplement d’origine qu’aux variations de la sévérité du feu. De plus, quelle que soit l’échelle spatiale considérée, des patrons spatiaux associés aux habitats des différentes espèces et à leurs traits de capture des ressources ont été mis en évidence. À l’échelle du site brûlé, qui était la plus fine échelle considérée, nous avons observé des patrons spatiaux liés aux modes de dispersion des espèces. La détection de tels patrons spatiaux auraient probablement été compromise si les feux avaient été plus sévères, car ils sont généralement difficiles à observer dans les milieux très perturbés et/ou dans les environnements marqués par de fortes contraintes environnementales.

Nos résultats du troisième chapitre démontrent qu’il est nécessaire d’inclure explicitement la combustion de la matière organique et son influence sur la régénération des espèces après feu dans les modèles prédictifs de la dynamique du carbone en forêt boréale. En effet, cela conduit à revoir à la baisse les prévisions à long-terme du stockage du carbone dans les pessières à mousses (-13 %).

La plus grande partie de la diminution des stocks prédits était liée à la simulation des effets indirects du feu, autrement dit à la baisse de la régénération de l’épinette noire en l’absence de lits de germination favorables, dont l’effet surpassait celui de la combustion de la matière organique du sol. D’autre part, la libération de carbone dans l’atmosphère par les incendies était principalement liée aux variations de la surface annuelle brûlée et non au niveau de combustion du sol forestier, ce qui est en accord avec les résultats

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obtenus par Amiro et al. (2009). Ainsi, la simulation de la sévérité du feu au niveau du sol présente plus d’intérêt de par son effet sur la régénération des essences forestières en tant que telle. Les émissions de carbone ont augmenté de 3 g C.m-2 suite à l’ensemble des modifications apportées au modèle. Cette augmentation, faible dans l’absolu, est à mettre en perspective avec la quasi-neutralité des paysages forestiers de cette région (Stinson et al. 2011). Nous avons en effet estimé que l’accumulation nette de carbone à l’échelle du paysage, sans prendre en compte l’effet des perturbations, était de 17 gC.m-2 au terme des simulations. En forêt boréale, le rythme d’accumulation de la biomasse est fortement limité par la disponibilité des nutriments qui dépend elle-même de la vitesse de décomposition de la matière organique. Aussi, lorsque l’activité des micro-organismes décomposeurs du sol augmente sous-l’effet d’une augmentation de la température du sol ou de la disponibilité en azote, cela peut se traduire par une meilleure disponibilité des nutriments pour les plantes, qui cause une augmentation de leur productivité. (Van Cleve and Viereck 1981, Bonan and Shugart 1989). De cette façon, une augmentation des émissions de carbone liées à la respiration est souvent compensée par une augmentation du carbone accumulé par les plantes (Janssens et al. 2001), quel que soit le scénario, ce qui explique que nos modifications aient moindrement affecté le bilan net de carbone.

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