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6. Discussion

6.1.6. Synthèse des facteurs influençant la dégradation des sentiers

L’incision des sentiers est la dégradation la plus citée et la plus étudiée (Leung et Marion, 1996; Marion et al., 2006; Olive et Marion, 2009; Wimpey et Marion, non publié). Elle est également considérée comme la forme de dégradation la plus importante, car elle est définie comme un processus qui est fortement relié à d'autres processus de dégradation qui contribuent à l'amplifier (Marion et al., 2006). Les résultats de la présente étude invitent également à considérer l’incision comme la dégradation la plus importante, car en plus des caractéristiques précédentes, l’incision est une variable explicative (plus ou moins significativement) dans les modèles optimisés des trois autres formes de dégradation évaluées, l’élargissement des sentiers, l’exposition des racines et l’apparition de sentiers informels. Elle est même statistiquement très significative dans les deux phénomènes liés au comportement des utilisateurs, soit l’élargissement des sentiers et la formation de sentiers informels (Leung et Marion, 1996; Wimpey et Marion, 2011). En somme, en plus d’être une conséquence des activités récréatives, l’incision est également une cause de l’apparition des autres phénomènes de dégradation, notamment ceux liés au comportement des visiteurs. Ainsi, plus l’incision est importante plus les chances que les autres phénomènes observés le soient également.

Aussi, en intervenant sur les processus responsables de l’incision et en les régulant, les résultats affecteront l’ensemble des autres phénomènes de dégradation. D’une part, car l’incision est une des causes directes des autres phénomènes de dégradation. D’autre part, car les variables explicatives de l’incision sont également présentes dans les modèles expliquant les autres phénomènes. Ainsi, aménager des sentiers dans les secteurs bénéficiant de la meilleure orientation, contribuera à limiter l’élargissement tandis que privilégier les secteurs ayant un dépôt épais limiterait l’exposition des racines. Enfin, contrôler la pente du sentier a également une influence sur la prolifération des sentiers informels.

Par ailleurs, les résultats montrent également que l’indicateur « Dénivellement » reprenant la grille de Marion et Wimpey (non publié) initialement prévu pour limiter l’incision présente des valeurs utiles pour normer l’aménagement de sentiers. Il semble également meilleur que les variables « Pente » et « AAS » séparées pour prévoir l’élargissement des sentiers, car même s’il n’est pas statistiquement significatif, il est conservé dans son modèle contrairement aux variables « Pente »

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et « AAS » dans les modèles 1 et 2. De plus, il est probable que ces résultats puissent être améliorés et devenir significatifs en incluant dans l’indicateur une pente du versant minimum pour assurer la présence de l’effet barrière induite par la construction d’un sentier perpendiculaire à la pente du versant. De nouvelles analyses devraient être réalisées pour observer si des seuils significatifs de pente transversale peuvent être identifiés pour améliorer la durabilité d’un sentier. Par exemple, est-ce qu’aux sites où l’indicateur « Dénivellement » a été défini « Bon », une tendance entre la pente du versant et l’importance des dégradations serait observable ? Ou bien est-ce qu’au contraire, l’importance des dégradations observées seraient réparties de manière homogène quelle que soit la pente du versant ?

Basé sur les résultats de cette étude et sur la revue de littérature, le tableau 24 présente une synthèse des caractéristiques à rechercher pour assurer la meilleure durabilité possible d’un réseau de sentiers. La classification proposée par Marion et Wimpey (non publiée) reprise ici à travers l’indicateur « Dénivellement » devrait être conservée afin de limiter l’incision. En parallèle, les gestionnaires devraient s’assurer que la végétation soit suffisamment dense pour limiter l’élargissement ou la prolifération de sentiers informels. Si cette condition n’est pas présente, une pente de versant minimale devrait être recherchée afin d’inciter les utilisateurs à rester dans le sentier. Pour limiter l’exposition des racines, les secteurs où le dépôt est épais et où le couvert forestier est dominé par les feuillus devraient être privilégiés. Par conséquent, les versants bénéficiant de la meilleure orientation doivent être recherchés surtout en altitude. Lors des dernières portions avant le sommet, c’est à dire quand l’altitude commence à influer sur les peuplements rencontrés et où la végétation bénéficie d’une période de croissance plus courte, cette condition acquiert davantage d’importance afin de privilégier les secteurs où la végétation dispose d’une croissance précoce. Toutefois, les résultats ne permettent pas de définir de limites de classes. En l’état, la distinction reste donc à la discrétion des aménageurs en fonction à la fois des caractéristiques environnementales telles que le climat, la topographie ou la flore ou encore des caractéristiques législatives spécifiques à leurs territoires.

Enfin, pour lutter contre la dégradation, des infrastructures peuvent être aménagées surtout lorsque les conditions optimales présentées dans le tableau 24 ne peuvent être atteintes. Bien que celles-ci n’aient pas été abordées dans ce projet, une attention particulière devrait également être portée aux infrastructures de drainage afin de limiter l’érosion (Olive et Marion, 2009).

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Tableau 24 : Caractéristiques à rechercher pour améliorer la durabilité des sentiers

Objectifs Limiter l’incision Produire un effet de barrière naturelle

Protéger

les racines Tous objectifs Caractéristiques (pente (p) et AASDénivèlement 1) Densité de végétation et relief Épaisseur du dépôt Orientation

Bon 3 < p > 10 % AAS > 30°

Densité de végétation suffisante ET pente du

versant suffisamment importante pour créer un effet de barrière visuelle.

Forte SE > O et altitude faible Moyen 0 < p > 2 % Densité de végétation suffisante OU pente du versant suffisamment importante pour créer un

effet de barrière Moyenne O > NO ; E > SE ou SE > O en altitude Faible 3 < p > 10 % et AAS 0-30° ou 11 < p > 20 % et AAS > 30° Densité de végétation moyenne et/ou pente du

versant modéré Faible NO > E Très faible 11 < p > 20 % et AAS 0-30°, ou p > 20 % Densité de végétation faible et/ou pente du

versant très faible

Inexistant NO > E en altitude

1Angle d’alignement du sentier