• Aucun résultat trouvé

6. Discussion

6.1.3. Facteurs influençant l’exposition des racines

Contrairement aux deux phénomènes précédents, l’exposition des racines n’a jamais été étudiée individuellement (Olive et Marion, 2009; Wimpey et Marion, 2010). Cette différence de traitement est probablement due à la marginalité du phénomène. En utilisant la technique de recensement des problèmes, Leung et Marion (1999a) ont recensé des racines exposées sur 1 % de leur site d’étude contre 3,5 % pour l’envasement ou 4,4 % uniquement pour une incision supérieure à 30 centimètres.

Selon les résultats des modèles optimisés, la densité de la végétation est la caractéristique la plus significative pour expliquer l’exposition des racines. Lorsque la densité de végétation diminue, l’exposition des racines augmente. Ce résultat, bien que surprenant à première vue, peut s’expliquer par la définition de la densité de végétation. Un secteur composé majoritairement d’arbres matures où les strates arbustive et herbacée sont peu présentes est considéré peu dense tandis qu’à l’inverse, les secteurs où les strates dominantes sont arbustive et herbacée ont été

69

définis denses, car l’évaluation de la végétation est basée sur l’opportunité de pénétration offerte par celle-ci. Alors que la végétation y est définie moins dense lors de son observation, les secteurs dominés par des arbres matures ont des systèmes racinaires plus denses et des racines plus volumineuses qu’un secteur où les strates dominantes sont arbustive et herbacée (Schenk et Jackson, 2002). Les secteurs plus denses au sens forestier qui considère la densité de la strate arborée mature sont donc les lieux où l’on retrouve le plus de racines importantes exposées. Ces secteurs devraient être proscrits au profit des secteurs où la végétation sous-jacente est plus importante (Marion et Olive, 2006).

Les résultats indiquent également que par rapport à une forêt mixte, les secteurs à dominance feuillue permettent de diminuer significativement l’exposition des racines alors que, bien que ce ne soit pas statistiquement significatif dans les différents modèles, les secteurs majoritairement résineux sont d’avantages sujets à l’exposition des racines. Ceci indique que les résineux sont plus sensibles à l’exposition des racines que les feuillus et semblent donc avoir un système racinaire moins profond que celui des feuillus. Pourtant, Canadell et al. (1996) ont montré qu’en milieu tempéré, la profondeur moyenne des systèmes racinaires des feuillus et des résineux est similaire et que la profondeur maximale atteinte par des résineux est même légèrement supérieure à celle des feuillus.

Ce résultat exprime donc probablement une autre relation puisque les caractéristiques du sol et la concurrence des systèmes racinaires influencent fortement le développement des racines (Riou- Nivert, 2001). Un sol peut-être difficile à pénétrer en raison de son type ou de l’épaisseur du dépôt. Les systèmes racinaires les plus profonds sont principalement observés dans des sols sableux très épais tandis que la présence d’une roche mère non fissurée, d’une nappe phréatique à faible profondeur ou encore d’un dépôt argileux ou schisteux limite généralement considérablement la pénétration en profondeur du système racinaire (Canadell et al., 1996).

Cette relation est ici vraisemblablement davantage due à l’épaisseur du dépôt qui est également une variable significative ainsi qu’à l’humidité du sol et à la concurrence du sous-couvert végétal. En effet, en observant plus en détail le diagnostic du territoire, on constate que 12 des 13 sites où l’exposition des racines est égale ou supérieure à forte sont situés au-dessus de 800 mètres et que hormis 4 de ces sites situés dans des zones de végétation mixte, tous les autres sont dans des secteurs résineux. Cela n’est pas surprenant puisqu’au PENS, les résineux peuplent les étages supérieurs des versants et descendent plus bas sur les versants nord que sur les versants sud. Au

70

Round Top, les peuplements mixtes apparaissent ainsi des 650-700 mètres d’altitudes sur les versants nord tandis que l’on retrouve des peuplements exclusivement feuillus jusqu’à 830-850 mètres sur le versant sud (Ministère Énergie et Ressources naturelles du Québec, 2011). Par ailleurs, il a déjà été mentionné que les sites ayant la plus faible épaisseur de dépôt sont concentrés principalement au sommet du Round Top. D’autre part, lors de la collecte des données, il a été constaté que les strates herbacées et arbustives peuvent être très développées dans les secteurs dominés par les feuillus alors qu’elles sont absentes dans la majorité des sites résineux où l’on retrouve seulement la strate muscinale. Aussi, face à une humidité du sol plus faible et à la concurrence du sous-couvert forestier, le système racinaire des feuillus réduit son développement horizontal et creuse davantage en profondeur devenant moins sujet à l’exposition des racines (Riou-Nivert, 2001). Les racines des résineux sont quant à elles, contraintes d’affleurer à la surface par une épaisseur de dépôt plus faible. Les caractéristiques du sol influencent ainsi directement la distribution des racines.

Enfin, l’orientation est également statistiquement significative. Selon le modèle, une meilleure orientation aggrave l’exposition des racines, ces résultats corroborent les observations précédentes, en effet les versants sud sont occupés par une végétation plus luxuriante que les versants nord, il est donc logique qu’une végétation plus abondante se traduise par davantage de racines susceptibles d’être exposées (Riou-Nivert, 2001). L’incision est également conservée dans les modèles corrigés, mais elle ne peut être considérée comme un facteur explicatif de l’exposition des racines, car la relation n’est statistiquement significative dans aucun des modèles, il est plus que vraisemblable qu’en creusant le sol, l’incision joue un rôle de catalyseur dans la mise à nu des systèmes racinaires.

Ainsi, bien que ce phénomène soit relativement peu présent dans les sentiers étudiés, la majorité des occurrences ont été observées sur les portions de sentiers situés dans la RNMV ou en périphérie de celle-ci, car le sommet du site concentre les caractéristiques favorables à l’exposition des racines c’est-à-dire des versants bien exposés, une densité de végétation et une épaisseur de dépôt faible.